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Le Composé des composés🔗 cataloguesEntrée Data.Bnf absente Rechercher sur Sudoc Rechercher sur Openlibrary Rechercher sur Worldcat
Compositum de Compositis


AuteursDatesTypeLieuThèmesStatut
attr. à Albert le Grandecr. 1331
publ. 1602 : compilé in Théâtre Chimique {Theatrum Chemicum}
Littératurepubl. Strasbourg (France)AlchimieNon applicable

► Fulcanelli évoque le "composé des composés" dans les Demeures philosophales alors qu'il interprète le caisson VI et la série VII des caissons du Château de Dampierre-sur-Boutonne (La Fortune accompagne la vertu): Hermès, père de la science hermétique, est à la fois considéré comme créateur et créature, maître de la philosophie et matière des philosophes. Son sceptre ailé porte l’explication de l’énigme qu’il propose, et la révélation du mystère couvrant le composé du composé, chef-d’œuvre de la nature et de l’art, sous l’épithète vulgaire de mercure des sages..

🕮 Ouvaroff, ref.703,704.


Texte et traduction : du latin au français, Albert Poisson, in Cinq traités d’Alchimie des plus grands philosophes, 1899. | bs. Bibliothèque Nationale de France (Paris, France). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur la Bibliothèque Nationale de France

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Je ne cacherai pas une science qui m’a été révélée par la grâce de Dieu, je ne la garderai pas jalousement pour moi seul, de peur d’attirer sa malédiction. Une science tenue secrète, un trésor caché, quelle est leur utilité ? La science que j’ai apprise sans fictions, je vous la transmets sans regrets. L’envie ébranle tout, un homme envieux ne peut être juste devant Dieu. Toute science, toute sagesse vient de Dieu ; c’est une simple façon de parler que de dire qu’elle vient de l’Esprit-Saint. Nul ne peut dire : Notre-Seigneur Jésus-Christ sans sousentendre : fils de Dieu le Père, par l’opération du Saint-Esprit. De même cette science de vérité ne peut être séparée de Celui qui me l’a communiquée.
Je n’ai pas été envoyé vers tous, mais seulement vers ceux qui admirent le Seigneur dans ses œuvres et que Dieu a jugé dignes. Que celui qui a des oreilles pour entendre cette communication divine recueille les secrets qui m’ont été transmis par la grâce de Dieu et qu’il ne les révèle jamais à ceux qui en sont indignes.
La nature doit servir de base et de modèle à la science, aussi l’Art travaille d’après la Nature autant qu’il peut. Il faut donc que l’Artiste observe la Nature et opère comme elle opère.

CHAPITRE I

DE LA FORMATON DES METAUX EN GENERAL PAR LE SOUFRE ET LE MERCURE.

On a observé que la nature des métaux, telle que nous la connaissons est d’être engendrée d’une manière générale par 1e Soufre et le Mercure. La différence seule de cuisson et de digestion produit la variété dans l’espèce métallique. .J’ai observé moi-même que dans un seul et même vaisseau, c’est-à-dire dans un même filon, la nature avait produit plusieurs métaux et de l’argent, disséminés ça et là. Nous avons en effet démontré clairement dans notre Traité des minéraux que la génération des métaux est circulaire, on passe facilement de l’un à l’autre suivant un cercle, les métaux voisins ont des propriétés semblables ; c’est pour cela que l’argent se change plus facilement en or que tout autre métal.
Il n’y a plus en effet à changer dans l’argent que la couleur et le poids, ce qui est facile. Car une substance déjà compacte augmente plus facilement de poids. Et comme il contient un soufre blanc jaunâtre, sa couleur sera aussi aisée à transformer.
Il en est de même des autres métaux. Le Soufre est pour ainsi dire leur père et le Mercure leur mère. C’est encore plus vrai, si l’on dit que dans la conjonction le Soufre représente le sperme du père et que le Mercure figure un menstrue coagulé pour former la substance de l’embryon. Le Soufre seul ne peut engendrer, ainsi le père seul.
De même que le mâle engendre de sa propre substance mêlée au sang menstruel, de même le Soufre engendre avec le Mercure, mais seul il ne produit rien. Par cette comparaison nous voulons faire entendre que l’Alchimiste devra enlever d’abord au métal la spécificité que lui a donnée la Nature, puis qu’il procède comme la nature a procédé, avec le Mercure et le Soufre préparés et purifiés toujours en suivant l’exemple de la nature.

DU SOUFRE.

Le Soufre contient trois principes humides. Le premier de ces principes est surtout aérien et igné, on le trouve dans les parties extérieures du Soufre, à cause même de la grande volatilité de ses éléments, qui s’envolent facilement et consument les corps avec lesquels ils viennent en contact.
Le second principe est flegmatique, autrement dit aqueux, il se trouve immédiatement placé sous le précédent. Le troisième est radical, fixe, adhérent aux parties internes. Celui-là seul est général, et on ne peut le séparer des autres sans détruire tout l’édifice. Le premier principe ne résiste pas au feu ; étant combustible, il se consume dans le feu et calcine la substance du métal avec lequel on le chauffe. Aussi est-il non seulement inutile, mais encore nuisible au but que nous nous proposons. Le second principe ne fait que mouiller les corps, il n’engendre pas, il ne peut non plus nous servir. Le troisième est radical, il pénètre toutes les particules de la matière qui lui doit ses propriétés essentielles. Il faut débarrasser le Soufre des deux premiers principes pour que la subtilité du troisième puisse nous servir à faire un composé parfait.
Le feu n’est autre chose que la vapeur du Soufre ; la vapeur du Soufre bien purifié et sublimé blanchit et rend plus compact. Aussi les alchimistes habiles outils coutume d’enlever au Soufre ses deux principes superflus par des lavages acides, tels que le vinaigre des citrons, le lait aigri, le lait de chèvres, l’urine des enfants. Ils le purifient par lixivation, digestion, sublimation. Il faut finalement le rectifier par résolution de façon à n’avoir plus qu’une substance pure contenant la force active, perfectible et prochaine du métal. Nous voilà en possession d’une partie de notre OEuvre.

DE LA NATURE DU MERCURE.

Le Mercure renferme deux substances superflues, la terre et l’eau. La substance terreuse a quelque chose du Soufre, le feu la rougit. La substance aqueuse a une humidité superflue.
On débarrasse facilement le mercure de ses impuretés aqueuses et terreuses par des sublimations et des lavages très acides. La nature le sépare à l’état sec du Soufre et le dépouille de sa terre par la chaleur du soleil et des étoiles.
Elle obtient ainsi un Mercure pur, complétement débarrassé de sa substance terreuse, ne contenant plus de parties étrangères. Elle l’unit alors à un Soufre pur et produit enfin dans le sein de la terre des métaux purs et parfaits. Si les deux principes sont impurs les métaux sont imparfaits. C’est pourquoi dans les mines on trouve des métaux différents, ce qui tient à la purification et à la digestion variable de leurs Principes. Cela dépend de la cuisson.

DE L’ARSENIC.

L’Arsenic est de même nature que le Soufre, tous deux teignent en rouge et en blanc. Mais il y a plus d’humidité dans l’arsenic, et sur le feu il se sublime moins rapidement que le Soufre.
On sait combien le soufre se sublime vite et comment il consume tous les corps, excepté l’or. L’Arsenic peut unir son principe sec à celui du soufre, ils se tempèrent l’un l’autre, et une fois unis on les sépare difficilement ; leur teinture est adoucie par cette union.
« L’Arsenic, dit Geber, contient beaucoup de mercure, aussi peut-il être préparé comme lui. » Sachez que l’esprit, caché dans le soufre, l’arsenic et l’huile animale, est appelé par les philosophes Elixir blanc. Il est unique, miscible à la substance ignée, de laquelle nous tirons L’Élixir rouge ; il s’unit aux métaux fondus, ainsi que nous l’avons expérimenté, il les purifie, non seulement à cause des propriétés précitées, mais encore parce qu’il y a une proportion commune entre ses éléments.
Les métaux diffèrent entre eux selon la pureté ou l’impureté de la matière première, c’est-à-dire du Soufre et du Mercure, et aussi selon le degré du feu qui les a engendrés.
Selon le philosophe, l’élixir s’appelle encore Médecine, parce qu’on assimile le corps des métaux au corps des animaux. Aussi disons-nous qu’il y a un esprit caché dans le Soufre, l’arsenic et l’huile extraite des substances animales. C’est là l’esprit que nous cherchons, à l’aide duquel nous teindrons tous les corps imparfaits en parfaits. Cet esprit est appelé Eau et Mercure par les Philosophes. « Le Mercure, dit Geber, est une médecine composée de sec et d’humide, d’humide et de sec.» Tu comprends la succession des opérations : extrais la terre du feu, l’air de la terre, l’eau de l’air, puisque l’eau peut résister au feu. Il faut noter ces enseignements, ce sont des arcanes universels.
Aucun. des principes qui entrent dans l’OEuvre n’a de puissance par lui-même ; car ils sont enchaînés dans les métaux, ils ne peuvent perfectionner, ils ne sont plus fixes. Il leur manque deux substances, une miscible aux métaux en fusion, l’autre fixe qui puisse coaguler et fixer. Aussi Rhasès a dit : « Il y a quatre substances qui changent dans le temps ; chacune d’elles est composée des quatre éléments et prend le nom de l’élément dominant. Leur essence merveilleuse s’est fixée dans un corps et avec ce dernier on peut nourrir les autres corps. Cette essence est composée d’eau et d’air, combinés de telle sorte que la chaleur les liquéfie. C’est là un secret merveilleux. Les minéraux employés en Alchimie doivent pour nous servir avoir une action sur les corps fondus. Les pierres, que nous utilisons, sont au nombre de quatre, deux teignent en blanc, les deux autres on rouge. Aussi le blanc, le rouge, le Soufre, l’Arsenic, Saturne n’ont qu’un même corps. Mais en ce seul corps, que de choses obscures ! Et d’abord il est sans action sur les métaux parfaits. »
Dans les corps imparfaits, il y a une eau acide, amère, aigre, nécessaire à notre art. Car elle dissout et mortifie les corps, puis les revivifie et les recompose. Rhasès dit dans sa troisième lettre : « Ceux qui cherchent notre Entéléchie, demandent d’où provient l’amertume aqueuse élémentaire. Nous leur répondrons : de l’impureté des métaux. Car l’eau contenue dans l’or et l’argent est douce, elle ne dissout pas, au contraire elle coagule et fortifie, parce qu’elle ne contient ni acidité ni impureté comme les corps imparfaits. » C’est pourquoi Geber a dit : « On calcine et on dissout l’or et l’argent sans utilité, car notre Vinaigre se tire de quatre corps imparfaits ; c’est cet esprit mortifiant et dissolvant qui mélange les teintures de tous les corps que nous employons dans l’œuvre. Nous n’avons besoin que de cette eau, peu nous importe les autres esprits. »

Geber a raison ; nous n’avons que faire d’une teinture que le feu altère, bien au contraire, il faut que le feu lui donne l’excellence et la force pour qu’elle puisse s’allier aux métaux fondus. Il faut qu’elle fortifie, qu’elle fixe, que malgré la fusion elle reste intimement unie au métal.
J’ajouterai que des quatre corps imparfaits on peut tout tirer. Quant à la manière de préparer le Soufre, l’arsenic et le Mercure, indiquée plus haut, on peut la reporter ici.
En effet, lorsque dans cette préparation nous chauffons l’esprit du soufre et de l’arsenic avec des eaux acides ou de l’huile, pour on extraire l’essence ignée, l’huile, l’onctuosité, nous leur enlevons ce qu’il y a de superflu en eux ; il nous reste la force ignée et l’huile, les seules choses qui nous soient utiles ; mais elles sont mêlées à l’eau acide qui nous servait à purifier, il n’y a pas moyen de les en séparer ; mais du moins nous sommes débarrassés de l’inutile. Il faut donc trouver un autre moyen d’extraire de ces corps, l’eau, l’huile et l’esprit très subtil du soufre qui est la vraie teinture très active que nous cherchons à obtenir. Nous travaillerons donc ces corps en séparant par décomposition ou encore par distillation leurs parties composantes naturelles, et nous arriverons ainsi aux parties simples. Quelques-uns, ignorant la composition du Magistère, veulent travailler sur le seul Mercure, prétendant qu’il a un corps, une âme, un esprit, et qu’il est la matière première de l’or et de l’argent. Il faut leur répondre qu’à la vérité quelques philosophes affirment que l’OEuvre se fait de trois choses, l’esprit, le corps et l’âme, tirées d’une seule. Mais d’autre part on ne peut trouver en une chose ce qui n’y est pas. Or, le Mercure n’a, pas la teinture rouge, donc il ne peut, seul, suffire à former le corps du Soleil ; il nous serait impossible avec le seul Mercure de mener l’OEuvre à bonne fin. La Lune seule ne peut suffire, cependant ce corps est pour ainsi dire la base de l’œuvre.
De quelque manière qu’on travaille et transforme le Mercure, jamais il ne pourra constituer le corps. Ils disent aussi : « On trouve dans le Mercure un soufre rouge, donc il renferme la teinture rouge. » Erreur ! le Soufre est le père des métaux, on n’en trouve jamais dans le mercure qui est femelle.
Une matière passive ne peut se féconder elle -même. Le Mercure contient bien un Soufre, mais, comme nous l’avons déjà dit c’est un soufre terrestre. Remarquons enfin que le Soufre ne peut supporter la fusion ; donc l’Élixir ne peut se tirer d’une seule chose.

CHAPITRE II

DE LA PUTREFACTION.

Le feu engendre la mort et la vie. Un feu léger dessèche le corps. En voici la raison : le feu arrivant au contact d’un corps, met en mouvement l’élément semblable à lui qui existe dans ce corps.
Cet élément c’est la chaleur naturelle. Celle -ci excite le feu extrait en premier lieu du corps ; il y a conjonction et l’humidité radicale du corps monte à sa surface tant que le feu agit au dehors. Dès que l’humidité radicale qui unissait les diverses portions du corps est partie, le corps meurt, se dissout, se résout ; toutes ses parties se séparent les unes des autres. Le feu agit ici comme un instrument tranchant. Quoiqu’il dessèche et rétrécisse par lui-même, il ne le peut qu’autant qu’il y a dans le corps une certaine prédisposition, surtout si le corps est compact comme l’est un élément. Ce dernier manque d’une mixte agglutinant, qui se séparerait du corps après la corruption. Tout cela peut se faire par le Soleil, parce qu’il est d’une nature chaude et humide par rapport aux autres corps.

CHAPITRE III

DU REGIME DE LA PIERRE.

Il y a quatre régimes de la Pierre : I° Décomposer ; 2° laver ; 3° réduire ; 4° fixer. Dans le premier régime on sépare les natures, car sans division, sans purification, il ne peut y avoir conjonction. Pendant le second régime, les éléments séparés sont lavés, purifiés, et ramenés à l’état simple. Au troisième on change notre Soufre en minière du Soleil, de la Lune et des autres métaux. Au quatrième tous les corps précédemment extraits de notre Pierre, sont unis, recomposés et fixés pour rester désormais conjoints.
Il yen a qui comptent cinq degrés dans le Magistère : I° résoudre les substances en leur matière première ; 2° amener notre terre, c’est à dire la magnésie noire à être prochaine de la nature du Soufre et du Mercure ; 3° rendre le Soufre aussi prochain que possible de la matière minérale du Soleil et de la Lune ; 4° composer de plusieurs choses un Elixir blanc ; 5° brûler parfaitement l’élixir blanc, lui donner la couleur du cinabre, et partir de là, pour faire l’Elixir rouge. Enfin il y en a qui comptent quatre degrés dans l’OEuvre, d’autres trois, d’autres deux seulement. Ces derniers comptent ainsi : 1° mise en œuvre et purification des éléments ; 2° conjonction. Remarque bien ce qui suit : la matière de la Pierre des Philosophes, est à bas prix ; on la trouve partout, c’est une eau visqueuse comme le mercure que l’on extrait de la terre. Notre eau visqueuse se trouve partout, jusque dans les Latrines, ont dit certains philosophes, et quelques imbéciles prenant leurs paroles à la lettre, l’ont cherchée dans les excréments.
La nature opère sur cette matière en lui enlevant quelque chose, son principe terreux, et en lui adjoignant quelque chose, le Soufre des Philosophes qui n’est pas le soufre du vulgaire, mais un Soufre invisible, teinture du rouge. Pour dire la vérité, c’est l’esprit du vitriol romain. Prépare-le ainsi : Prends du salpêtre et du vitriol romain, 2 livres de chaque ; broye subtilement. Aristote a donc raison quand il dit en son quatrième livre des météores. « Tous les Alchimistes savent que l’on ne peut en aucune façon changer la forme des métaux, si on ne les réduit auparavant en leur matière première. » Ce qui est facile comme on le verra bientôt. Le Philosophe dit qu’on ne peut pas aller d’une extrémité à l’autre sans passer par le milieu. À une extrémité de notre pierre philosophale sont deux luminaires, l’or et l’argent, à l’autre extrémité l’élixir parfait ou teinture. Au milieu l’eau-de-vie philosophique, naturellement purifiée, cuite et digérée. Toutes ces choses sont proches de la perfection et préférables aux corps de nature plus éloignée. De même qu’au moyen de la chaleur, la glace se résout en eau, pour avoir été jadis eau, de même les métaux se résolvent en leur première matière qui est notre Eau-de-vie. La préparation est indiquée dans les chapitres suivants. Elle seule peut réduire tous les corps métalliques en leur matière première.

CHAPITRE IV

DE LA SUBLIMATION DU MERCURE.

Au nom du Seigneur, procure-toi une livre de mercure pur provenant de la mine. D’autre part, prends du vitriol romain et du sel commun calciné, broye et mélange intimement. Mets ces deux dernières matières dans un large vase de terre vernissé sur un feu doux, jusqu’à ce que la matière commence à fondre et à couler. Alors prends ton mercure minéral, mets-le dans un vase à long col et verse goutte à goutte sur le vitriol et le sel en fusion. Remue avec une spatule de bois, jusqu’à ce que le mercure soit tout entier dévoré et qu’il n’en reste plus trace. Quand il aura complètement disparu, dessèche la matière à feu doux pendant la nuit. Le lendemain matin, tu prendras la matière bien desséchée, tu la broyeras finement sur une pierre. Tu mettras la matière pulvérisée dans le vase sublimatoire nommé aludel pour la sublimer selon l’art. Tu mettras le chapiteau et tu enduiras les jointures de lut philosophique, afin que le mercure ne puisse s’échapper. Tu placeras l’aludel sur son fourneau et tu l’y luteras de façon qu’il ne puisse s’incliner et qu’il se tienne bien droit ; alors tu feras un petit feu pendant quatre heures pour chasser l’humidité du mercure et du vitriol ; après l’évaporation de l’humidité, augmente le feu pour que la matière blanche et pure du mercure se sépare de ses impuretés, cela pendant quatre heures ; tu verras si cela suffit en introduisant une baguette de bois dans le vase sublimatoire par l’ouverture, supérieure, tu descendras jusqu’à la matière et tu sentiras si la matière blanche du mercure est superposée au mélange. Si cela est, enlève le bâton, ferme l’ouverture du chapiteau avec un lut pour que le mercure ne puisse s’échapper et augmente le feu de telle sorte que la matière blanche du mercure s’élève au-dessus des fèces, jusque dans l’aludel, cela pendant quatre heures. Chauffe enfin avec du bois de manière à obtenir des flammes, il faut que le fond du vase et le résidu deviennent rouges ; continue ainsi tant qu’il restera un peu de substance blanche du mercure adhérente aux fèces. La force et la violence du feu finiront par l’en séparer. Cesse alors le feu, laisse refroidir le fourneau et la matière pendant la nuit. Le lendemain matin retire le vase du fourneau, enlève les luts avec précaution pour ne pas salir le Mercure, ouvre l’appareil ; si tu trouves une matière blanche, sublimée, pure, compacte, pesante, tu as réussi. Mais si ton sublimé était spongieux, léger, poreux, ramasse-le, recommence la sublimation sur le résidu en ajoutant de nouveau du sel commun pulvérisé ; opère dans le même vase sur son fourneau, de la même manière, avec le même degré de feu que plus haut. Ouvre alors le vase, vois si le sublimé est blanc, compact, dense, recueille-le et mets-le soigneusement de côté pour t’en servir quand tu en auras besoin pour terminer l’OEuvre. Mais s’il ne se présentait pas encore tel qu’il doit être, il te faudrait le sublimer une troisième fois jusqu’à ce que tu l’obtiennes pur, compact, blanc, pesant.
Remarque que par cette opération tu as enlevé au Mercure deux impuretés. D’abord tu lui as ôté toute son humidité superflue ; en second lieu tu l’as débarrassé de ses parties terreuses impures qui sont restées dans les fèces ; tu l’as ainsi sublimé en une substance claire, demi-fixe.
Mets-le de côté comme on te l’a recommandé.

CHAPITRE V

DE LA PREPARATION DES EAUX D’OU TU TIRERAS L’EAU-DE-VIE.

Prends deux livres de vitriol romain, deux livres de salpêtre, une livre d’alun calciné. Écrase bien, mélange parfaitement, mets dans un alambic en verre, distille l’eau selon les règles ordinaires, en fermant bien les jointures, de peur que les esprits ne s’échappent. Commence par un feu doux, puis chauffe plus fortement ; chauffe ensuite avec du bois jusqu’à ce que l’appareil devienne blanc, de telle sorte que tous les esprits distillent. Alors cesse le feu, laisse le fourneau refroidir ; mets soigneusement cette eau de côté, car c’est le dissolvant de la Lune ; conserve-la pour l’OEuvre, elle dissout l’argent et le sépare de l’or. Elle calcine le Mercure et le crocus de Mars ; elle communique à la peau de l’homme une coloratioa brune qui s’en va difficilement. C’est l’eau prime des philosophes, elle est parfaite au premier degré. Ta prépareras trois livres de cette eau.

Eau seconde préparée par le sel ammoniac.

Au nom du Seigneur, prends une livre d’eau prime et y dissous quatre lots de sel ammoniac pur et incolore ; la dissolution faite, l’eau a changé de couleur, elle a acquis d’autres propriétés. L’eau prime était verdâtre, elle dissolvait la Lune, était sans action sur le Soleil ; mais dès qu’on lui ajoute du sel ammoniac, elle prend une couleur jaune, elle dissout l’or, le mercure, le Soufre sublimé et communique une forte coloration jaune à la peau de l’homme. Conserve précieusement cette eau, car elle nous servira dans la suite.

Eau tierce préparée au moyen du Mercure sublimé.

Prends une livre d’eau seconde et onze lots de Mercure sublimé (par le vitriol romain et le sel) bien préparé et bien pur. Tu verseras peu à peu le Mercure dans l’eau seconde. Puis tu scelleras l’orifice de la fiole, de peur que l’esprit du Mercure ne s’échappe. Tu placeras la fiole sur des cendres tièdes, l’eau commencera aussitôt à agir sur le Mercure, le dissolvant et se l’incorporant. Tu laisseras la fiole sur les cendres chaudes, il ne devra pas rester un excès d’eau et il faudra que le Mercure sublimé se dissolve entièrement. L’eau agit par imbibition sur le Mercure jusqu’à ce qu’elle l’ait dissous.
Si l’eau n’a pu dissoudre tout le mercure, tu prendras ce qui reste au fond de la fiole, tu le dessècheras à feu lent, tu pulvériseras et tu le dissoudras dans une nouvelle quantité d’eau seconde. Tu recommenceras cette opération jusqu’à ce que tout le mercure sublimé se soit dissous dans l’eau. Tu réuniras en une seule toutes ces solutions, dans un vase de verre, bien propre, dont tu fermeras parfaitement l’orifice avec de la cire. Mets soigneusement de côté. Car c’est là notre eau tierce, philosophique, épaisse, parfaite au troisième degré. C’est la mère de l’Eau-de-vie qui réduit tous les corps en leur matière première.

Eau quarte qui réduit les corps calcinés en leur matière première.

Prends de l’eau tierce mercurique, parfaite au troisième degré, limpide, et mets-la putréfier dans le ventre du cheval en une fiole à long col, propre, bien fermée, pendant quatorze jours. Laisse fermenter, les impuretés tombent au fond et l’eau passe du jaune au roux. À ce moment tu retireras la fiole et tu la mettras sur des cendres à un feu très doux, adaptes-y un chapiteau d’alambic avec son récipient. Commence la distillation lentement. Ce qui passe goutte à goutte est notre eau-de-vie très limpide, pure, pesante, Lait virginal, Vinaigre très aigre. Continue le feu doucement jusqu’à ce que toute l’eau-de-vie ait distillé tranquillement ; cesse alors le feu, laisse le fourneau se refroidir et conserve avec soin ton eau distillée. C’est là notre Eau-de-vie, Vinaigre des philosophes, Lait virginal qui réduit les corps en leur matière première. On lui a donné une infinité de noms.
Voici les propriétés de cette eau : une goutte déposée sur une lame de cuivre chaude la pénètre aussitôt et y laisse une tache blanche. Jetée sur des charbons, elle émet de la fumée ; à l’air elle se congèle et ressemble à de la glace. Quand on distille cette eau, les gouttes ne passent pas en suivant toutes le même chemin, mais les unes passent ici, les autres là. Elle n’agit pas sur les métaux comme l’eau forte, corrosive, qui les dissout, mais elle réduit en Mercure tous les corps qu’elle baigne, ainsi que tu le verras plus loin.
Après la putréfaction, la distillation, la clarification, elle est pure et plus parfaite, débarrassée de tout principe sulfureux igné et corrosif. Ce n’est pas une eau qui ronge, elle ne dissout pas les corps, elle les réduit en Mercure. Elle doit cette propriété au Mercure primitivement dissous et putréfié au troisième degré de la perfection. Elle ne contient plus ni fèces ni impuretés terreuses. La dernière distillation les a séparées, les impuretés noires sont restées au fond de l’alambic. La couleur de cette eau est bleue, limpide, rousse ; mets-la de côté. Car elle réduit tous les corps calcinés et pourris en leur matière première radicale ou mercurielle.
Lorsque tu voudras avec cette eau réduire les corps calcinés prépare ainsi les corps.
Prends un marc du corps que tu voudras, Soleil ou Lune ; lime-le doucement. Pulvérise bien cette limaille sur une pierre avec du sel commun préparé. Sépare le sel en le dissolvant dans l’eau chaude ; la chaux pulvérisée retombera au fond du liquide ; décante. Sèche la chaux, imbibe-la trois fois d’huile de tartre, en laissant chaque fois la chaux absorber toute l’huile ; mets ensuite la chaux dans une petite fiole ; verse par-dessus l’huile de tartre, de façon que le liquide ait une épaisseur de deux doigts, ferme alors la fiole, mets-la putréfier au ventre du cheval pendant huit jours ; puis prends la fiole, décante l’huile et dessèche la chaux. Ceci fait, mets la chaux dans un poids égal de notre Eau-de-vie ; ferme la fiole et laisse digérer à un feu très doux jusqu’à ce que toute la chaux soit convertie en Mercure. Décante alors l’eau avec précaution, recueille le Mercure corporel, mets-le en un vase de verre ; purifie-le avec de l’eau et du sel commun, dessèche selon les règles, mets-en un linge fin et exprime-le en gouttelettes. S’il passe tout entier, c’est bien. S’il reste quelque portion du corps amalgamé, venant de ce que la dissolution n’a pas été complète, mets ce résidu avec une nouvelle quantité d’eau bénite. Sache que la distillation de l’eau doit se faire au bain-marie ; pour l’air et le feu, on distillera sur les cendres chaudes. L’eau doit être tirée de la substance humide et non d’ailleurs ; l’air et le feu doivent être extraits de la substance sèche et non d’une autre.

Propriétés de ce Mercure.

Il est moins mobile, il court moins vite que l’autre mercure ; il laisse des traces de son corps fixe au feu ; une goutte placée sur une lame chauffée au rouge laisse un résidu.

Multiplication du Mercure philosophique.

Lorsque tu auras ton Mercure philosophique, prends-en deux parties et une partie de la limaille mentionnée plus haut ; fais un amalgame en broyant le tout ensemble jusqu’à union parfaite. Mets cet amalgame dans une fiole, ferme bien l’orifice et place sur les cendres à un feu tempéré. Tout se résoudra en Mercure. Tu pourras ainsi l’augmenter à l’infini, car la somme de volatil dépassant toujours la somme de fixe, l’augmente indéfiniment en lui communiquant sa propre nature et il y en aura toujours assez.
Maintenant tu sais préparer l’eau-de-vie, tu en connais les degrés et les propriétés, tu connais la putréfaction des corps métalliques, leur réduction à la matière première, la multiplication de la matière à l’infini. Je t’ai expliqué clairement ce que tous les philosophes ont caché avec soin.

Pratique du Mercure des sages.

Ce n’est pas le mercure du vulgaire, c’est la matière première des philosophes. C’est un élément aqueux, froid, humide, c’est une eau permanente, c’est l’esprit du corps, vapeur grasse, Eau bénite, Eau forte, Eau des sages, Vinaigre des philosophes, Eau minérale, Rosée de la grâce céleste ; il a bien d’autres noms encore, et bien qu’ils soient différents, ils désignent tous une seule et même chose qui est le Mercure des philosophes ; il est la force de l’alchimie ; seul il peut servir à faire la teinture blanche et la rouge, etc.
Prends donc au nom de Jésus-Christ, notre M... vénérable, Eau des philosophes, Hylè primitive des sages ; c’est la pierre qu’on t’a découverte dans ce traité, c’est la matière première du corps parfait, comme tu l’as deviné. Mets ta matière dans un fourneau, en un vaisseau propre, clair, transparent, rond, dont tu scelleras hermétiquement l’orifice, de sorte que rien ne puisse s’échapper. Ta matière sera placée sur un lit bien aplani, légèrement chaud ; tu l’y laisseras un mois philosophique ; tu maintiendras la chaleur égale, tant que la sueur de la matière se sublimera, jusqu’à ce qu’elle ne sue plus, que rien ne monte, que rien ne descende, qu’elle commence à pourrir, à suffoquer, à se coaguler et à se fixer, par suite de la constance du feu.
Il ne s’élèvera plus de substance aérienne fumeuse et notre Mercure restera au fond, sec, dépouillé de son humidité, pourri, coagulé, changé en une terre noire, qu’on appelle Tête noire du corbeau, élément sec terreux.
Quand tu auras fait cela, tu auras accompli la véritable sublimation des Philosophes, pendant laquelle tu as parcouru tous les degrés précités : sublimation du Mercure, distillation, coagulation, putréfaction, calcination, fixation, dans un seul vaisseau et un seul fourneau comme il a été dit.
En effet, quand notre pierre est dans son vaisseau, et qu’elle s’élève, on dit alors qu’il y a sublimation ou ascension. Mais quand ensuite elle retombe au fond, on dit qu’il y a distillation ou précipitation. Puis lorsqu’après la sublimation et la distillation, notre Pierre commence à pourrir et à se coaguler, c’est la putréfaction et la coagulation ; finalement quand elle se calcine et se fixe par privation de son humidité radicale aqueuse, c’est la calcination et la fixation ; tout cela se fait par le seul acte de chauffer, en un seul fourneau, en un seul vaisseau, comme il a été dit.
Cette sublimation constitue une véritable séparation des éléments, d’après les philosophes : « Le travail de notre pierre ne consiste qu’en la séparation et conjonction des éléments ; car dans notre sublimation l’élément aqueux froid et humide se change en élément terreux sec et chaud. Il s’ensuit que la séparation des éléments de notre pierre, n’est pas vulgaire, mais philosophique ; notre seule sublimation très parfaite suffit en effet à séparer les éléments ; dans notre pierre il n’y a que la forme de deux éléments, l’eau et la terre, qui contiennent virtuellement les deux autres. La Terre renferme virtuellement le Feu, à cause de sa sécheresse ; l’Eau renferme virtuellement l’Air à cause de son humidité. Il est donc bien évident que si notre Pierre n’a en elle que la forme de deux éléments elle les renferme virtuellement tous les quatre.
Aussi un Philosophe a -t-il dit : « Il n’y a pas de séparation des quatre éléments dans notre Pierre comme le pensent les imbéciles. Notre nature renferme un arcane très caché dont on voit la force et la puissance, la terre et l’eau. Elle renferme deux autres éléments, l’air et le feu, mais ils ne sont ni visibles, ni tangibles, on ne peut les représenter, rien ne les décèle, on ignore leur puissance, qui ne se manifeste que dans les deux autres éléments, terre et eau, lorsque le feu change les couleurs pendant la cuisson.
Voici que par la grâce de Dieu, tu as lé second composant de la pierre philosophale, qui est la Terre noire, Tête de corbeau, mère, cœur, racine des autres couleurs. De cette terre comme d’un tronc, tout le reste prend naissance. Cet élément terreux, sec, a reçu dans les livres des philosophes un grand nombre de noms, on l’appelle encore Laton immonde, résidu noir, Airain des philosophes, Nummus, Soufre noir, mâle, époux, etc. Malgré cette infinie variété de noms, ce n’est jamais qu’une seule et même chose, tirée d’une seule matière.
À la suite de cette privation d’humidité, causée par la sublimation philosophique, le volatil est devenu fixe, le mou dur, l’aqueux est devenu terreux, selon Geber. C’est la métamorphose de la nature, le changement de l’eau en feu, selon la Tourbe. C’est encore le changement des constitutions froides et humides en constitutions bilieuses, sèches, selon les médecins. Aristote dit que l’esprit a pris un corps, et Alphidius que le liquide est devenu visqueux. L’occulte est devenu manifeste, dit Rudianus dans le Livre des trois paroles. L’on comprend maintenant les philosophes quand ils disent : « Notre grand-œuvre n’est autre qu’une permutation des natures, une évolution des éléments. » Il est bien évident que par cette privation d’humidité nous rendons la pierre sèche, le volatile devient fixe, l’esprit devient corporel, le liquide devient solide, le feu se change en eau, l’air en terre. Nous avons ainsi changé les vraies natures suivant un certain ordre, nous avons fait tourner les quatre éléments en cercle, nous avons permuté leurs natures. Que Dieu soit éternellement béni! Amen.
Passons maintenant avec la permission de Dieu à la seconde opération qui est le blanchiment de notre terre pure. Prends donc deux parties de terre fixe ou Tête de corbeau ; broye-la subtilement et avec précaution en un mortier excessivement propre, ajoutes-y une partie de l’Eau philosophique que tu sais (c’est l’eau que tu as mise de côté). Applique-toi à les unir, en imbibant peu à peu d’eau la terre sèche, jusqu’à ce qu’elle ait étanché sa soif ; broye et mélange si bien, que l’union du corps, de l’âme et de l’eau soit parfaite et intime. Ceci fait, tu mettras le tout dans un matras scellé hermétiquement pour que rien ne s’échappe, et tu le placeras sur son petit lit uni, tiède, toujours chaud pour qu’en suant il débarrasse ses entrailles du liquide qu’il a bu. Tu l’y laisseras huit jours, jusqu’à ce que la terre blanchisse en partie. Tu prendras alors la Pierre, tu la pulvériseras, tu l’imbiberas de nouveau de Lait virginal, en remuant, jusqu’à ce qu’elle ait étanché sa soif ; tu la remettras dans la fiole sur son petit lit tiède pour qu’elle se dessèche en suant, comme ci-dessus. Tu recommenceras quatre fois cette opération en suivant le même ordre : imbibition de la terre par l’eau jusqu’à union parfaite, dessication, calcination. Tu auras ainsi suffisamment cuit la terre de notre pierre très précieuse. En suivant cet ordre : cuisson, pulvérisation, imbibition par l’eau, dessication, calcination, tu as suffisamment purifié la Tête de corbeau, la terre noire et fétide, tu l’as conduite à la blancheur par la puissance du feu, de la chaleur et de l’Eau blanchissante. Recueille ta terre blanche et mets-la soigneusement de côté, car c’est un bien précieux, c’est la Terre foliée blanche, Soufre blanc, Magnésie blanche, etc. Morien parle d’elle lorsqu’il dit… « Mettez pourrir cette terre avec son eau, pour qu’elle se purifie et avec l’aide de Dieu vous terminerez le Magistère. » Hermès dit de même que l’Azoth lave le Laton et lui enlève toutes ses impuretés.
Dans cette dernière opération nous avons reproduit la véritable conjonction des éléments, car l’eau s’est unie à la terre, l’air au feu. C’est l’union de l’homme et de la femme, du mâle et de la femelle, de l’or et l’argent du Soufre sec et de l’Eau céleste impure. Il y a eu aussi résurrection des corps morts. C’est pourquoi le philosophe a dit : « Que ceux qui ne savent pas tuer et ressusciter abandonnent l’art » et ailleurs : « Ceux qui savent tuer et ressusciter profiteront dans notre science. Celui-là sera le Prince de l’Art qui saura faire ces deux choses.» Un autre philosophe a dit : « Notre Terre sèche ne portera aucun fruit, si elle n’est profondément imbibée de son Eau de pluie. Notre Terre sèche a une grande soif, lorsqu’elle a commencé à boire, elle boit jusqu’à la lie. » Un autre a dit : « Notre Terre boit l’eau fécondante qu’elle attendait, elle étanche sa soif, puis elle produit des centaines de fruits. » On trouve bien d’autres passages semblables dans les livres des philosophes, mais ils sont sous forme de parabole, pour que les méchants ne puissent les entendre. Par la grâce de Dieu, tu possèdes maintenant notre Terre blanche foliée toute prête à subir la fermentation, qui lui donnera le souffle. Aussi le Philosophe a dit : « Blanchissez la terre noire avant de lui adjoindre le ferment. » Un autre a dit : « Semez votre or dans la Terre foliée blanche... et elle vous donnera du fruit au centuple. Gloire à Dieu. Amen.
Passons à la troisième opération qui est la fermentation de la Terre blanche. Il nous faut animer le corps mort et le ressusciter, pour multiplier sa puissance à l’infini, et le faire passer à l’état d’Elixir parfait blanc qui change le Mercure en Lune parfaite et véritable. Remarque que le ferment ne peut pénétrer le corps mort que par l’intermédiaire de l’eau qui fait le mariage et sert de lien entre la terre, blanche et le ferment. C’est pourquoi dans toute fermentation, il faut noter le poids de chaque chose. Si donc tu veux mettre fermenter la Terre foliée blanche pour la changer en élixir blanc renfermant un excès de teinture, il te faut prendre trois parties de Terre blanche ou Corps mort folié, deux parties de l’Eau-de-vie que tu as mise en réserve et une partie et demie de ferment. Prépare le ferment de telle sorte qu’il soit réduit en une chaux blanche ténue et fixe si tu veux faire l’élixir blanc. Si tu veux faire l’élixir rouge, sers-toi de chaux d’or très jaune, préparée selon l’art. Il n’y a pas d’autres ferments que ceux-là. Le ferment de l’argent est l’argent, le ferment de l’or est l’or, ne cherche donc pas ailleurs. La raison en est que ces deux corps sont lumineux, ils renferment des rayons éclatants qui communiquent aux autres corps la vraie rougeur et blancheur. Ils sont d’une nature semblable à celle du Soufre le plus pur de la matière, de l’espèce des pierres. Extrais donc chaque espèce de son espèce, chaque genre de son genre. L’œuvre au blanc a pour but de blanchir, l’œuvre au rouge de rougir. Ne mêle pas surtout les deux OEuvres, sinon tu ne feras rien de bon.
Tous les Philosophes disent que notre Pierre se compose de trois choses : le corps, l’esprit et l’âme. Or, la terre blanche foliée c’est le corps, le ferment c’est l’âme qui lui donne la vie, l’eau intermédiaire c’est l’esprit. Réunis ces trois choses en une par le mariage, en les broyant bien sur une pierre propre, de façon à les unir dans leurs plus infinies particules, à en former un chaos confus. Quand tu auras fait un seul corps du tout, tu le mettras doucement dans une fiole spéciale, que tu placeras sur son lit chaud, pour que le mélange se coagule, se fixe et devienne blanc. Tu prendras cette pierre blanche bénite, tu la broieras subtilement sur une pierre bien propre, tu l’imbiberas avec un tiers de son poids d’eau pour abaisser sa soif. Tu la remettras ensuite dans la fiole claire et propre sur son lit tiède et chaud pour qu’elle commence à suer, à rendre son eau et finalement tu laisseras ses entrailles se dessécher. Recommence plusieurs fois jusqu’à ce que tu aies préparé par ce procédé notre très excellente Pierre blanche, fixe, qui pénètre les plus petites parties des corps très rapidement, coulant comme l’eau fixe quand on la met sur le feu, changeant les corps imparfaits en argent véritable, comparable en tout à l’argent naturel. Remarque que si tu recommences plusieurs fois toutes ces opérations dans le même ordre : dissoudre, coaguler, broyer, cuire, ta Médecine sera d’autant meilleure, son excellence augmentera de plus en plus. Plus tu travailleras ta Pierre pour en augmenter la vertu, et plus tu auras de rendement lorsque tu feras la projection sur les corps imparfaits. En sorte qu’après une opération une partie de l’Elixir change cent parties de n’importe quel corps en Lune, après deux opérations mille, après trois dix mille, après quatre cent mille, après cinq un million, après six opérations des milliers de mille et ainsi de suite à l’infini. Aussi les adeptes louent-ils tous la grande maxime des philosophes sur la persévérance à recommencer cette opération. Si une imbibition avait suffi, ils n’auraient pas tant discouru sur ce sujet. Grâces soient rendues à Dieu. Amen.
Si tu désires changer cette Pierre glorieuse, ce Roi blanc qui transmue et teint le Mercure et tous les corps imparfaits en vraie Lune, si tu désires, dis-je, la changer en Pierre rouge qui transmue et teigne le Mercure, la Lune et les autres métaux en vrai Soleil, opère ainsi. Prends la Pierre blanche et divise-la en deux parties ; tu augmenteras l’une à l’état d’élixir blanc avec son Eau blanche, comme il a été dit plus haut, en sorte que tu en auras indéfiniment. Tu mettras l’autre dans le nouveau lit des philosophes, net, propre, transparent, sphérique, et tu placeras le tout dans le fourneau de digestion. Tu augmenteras le feu jusqu’à ce que par sa force et sa puissance la matière soit changée en une pierre très rouge, que les Philosophes appellent Sang, or pourpre, Corail rouge, Soufre rouge. Lorsque tu verras cette couleur telle que le rouge soit aussi brillant que du crocus sec calciné, alors prends joyeusement le Roi, mets-le précieusement de côté. Si tu veux le changer en teinture du très puissant Elixir rouge, transmuant et teignant le Mercure, la Lune et tout autre métal imparfait en Soleil très véritable, mets-en fermenter trois parties avec une partie et demie d’or très pur à l’état de chaux tenue et bien jaune, et deux parties d’Eau solidifiée. Fais-en un mélange parfait selon les règles de l’Art, jusqu’à ne plus rien distinguer des composants. Remets dans la fiole sur un feu qui mûrisse, pour lui donner la perfection. Dès qu’apparaîtra la vraie Pierre sanguine rouge, tu ajouteras graduellement de 1’Eau solide.
Tu augmenteras peu à peu le feu de digestion. Tu accroîtras sa perfection en recommençant l’opération. il faut chaque fois ajouter de l’Eau solide (que ta as gardée), qui convient à sa nature ; elle multiplie sa puissance à l’infini, sans rien changer à son essence. Une partie d’Elixir parfait au premier degré projetée sur cent parties de Mercure (lavé avec du vinaigre et du sel, comme tu dois le savoir) placée dans un creuset à petit feu, jusqu’à ce que des fumées apparaissent, les transmue aussitôt en véritable Soleil meilleur que le naturel. De même en remplaçant le Mercure par la Lune. Pour chaque degré de perfection en plus de 1’Elixir, c’est la même chose que pour l’Elixir blanc, jusqu’à ce qu’il teigne enfin en Soleil des quantités infinies de Mercure et de Lune. Tu possèdes maintenant un précieux arcane, un trésor infini. C’est pourquoi les philosophes disent : « Notre Pierre a trois couleurs, elle est noire au commencement, blanche au milieu, rouge à la fin. » Un philosophe a dit : « La chaleur agissant d’abord sur l’humide engendre la noirceur, son action sur le sec engendre la blancheur et sur la blancheur engendre la rougeur. Car la blancheur n’est autre chose que la privation complète de noirceur. Le blanc fortement condensé par la force du feu engendre le rouge. » — « Vous tous chercheurs qui travaillez l’Art, a dit un autre sage, lorsque vous verrez apparaître le blanc dans le vaisseau, sachez que le rouge est caché dans ce blanc. Il vous faut l’en extraire et pour cela chauffer fortement jusqu’à l’apparition du rouge. »
Maintenant rendons grâce à Dieu sublime et glorieux Souverain de la Nature, qui a créé cette substance et lui a donné une propriété qui ne se retrouve dans aucun autre corps. C’est elle qui, mise sur le feu, engage le combat avec celui-ci et lui résiste vaillamment. Tous les autres corps s’enfuient ou sont exterminés par le feu. Recueillez mes paroles, notez combien elles renferment de mystères, car dans ce court traité, j’ai rassemblé et expliqué ce qu’il y a de plus secret dans l’Alchimie ; tout y est dit simplement et clairement, je n’ai rien omis, tout s’y trouve brièvement indiqué, et je prends Dieu à témoin que dans les livres des Philosophes, on ne peut rien trouver de meilleur que ce que je vous ai dit. Aussi je t’en prie, ne confie ce traité à personne, ne le laisse pas tomber entre des mains impies, car il renferme les secrets des philosophes de tous les siècles. Une telle quantité de perles précieuses ne doit pas être jetée aux pourceaux et aux indignes. Si cependant cela arrivait, je prie alors Dieu tout puissant que tu ne parviennes jamais à terminer cet OEuvre divin.

Béni soit Dieu, un en trois personnes.

AMEN.




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Maj : 07/10/2024