🔍
Bouton_Accueil

Haguiga
חגיגה


AuteursDatesTypeLieuThèmesStatut
Les Amoraïm -VILittérature (reli.)IrakReligion
Morale
Mysticisme
Non applicable

► Ce court texte contenu dans la première Mishna du Talmud est d’une importance capitale pour la mystique juive. Il est question des fêtes de pèlerinage, des sacrifices et des purifications telles qu’elles étaient prescrites avant la destruction du Temple. Les commentateurs qabalistes l’ont abondamment interprété puisqu’il contient ce qui constitue les noyaux des spéculations ultérieures relatives à la סתרי תורה (sithre Torah) {Secrets de la Loi} : béréchit et merkaba, pardès et cosmologie.

■ Nous avons écarté les notes de la traduction d’origine, laissant tout de même dans le texte, en indication, celles donnant les références pour les passages non publiés.


Texte et traduction : de l’hébreu au français classique, Moïse Schwab in Le Talmud de Jérusalem, 1871. | bs. Bibliothèque de recherche John P. Robarts (Toronto, Canada). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur Internet Archive

𝕍 Le Voyage mystique des quatre in Revue de l’histoire des religions (140, 1 pp. 59-82), André Neher, 1951. Lien vers le document sur Persée

séparateur

Chapitre I

1. Tous les Israélites sont tenus de voir (se présenter) au Temple, aux 3 fêtes, sauf les sourds, les idiots, les enfants, les défectueux (aux organes bouchés), les androgynes, les femmes, les esclaves non affranchis, les boiteux, les aveugles, les malades, les vieillards, enfin tous ceux qui ne pourraient pas y monter seuls à pied. On appelle enfant le garçon trop petit pour monter sur l’épaule de son père et aller ainsi de la ville de Jérusalem à la Montagne sainte. Tel est l’avis des Schammaïtes ; selon les Hillélites, c’est l’enfant encore trop faible pour faire le trajet de la ville à la montagne, en se tenant à la main de son père, car il est dit (Exode, XXIII, 44) : trois רנלֹים‬ (mot signifiant : fois, fête et pieds).

La Mischnâ, en signalant l’obligation de la vue, l’applique au sacrifice que celle-ci entraîne ; mais la simple visite est obligatoire même pour les enfants, comme il est dit (Deut. XXXI, 12) : Réunis le peuple, hommes, femmes et les nouveaux-nés, dernier terme qui comprend, du moins, les enfants. On a enseigné : il est arrivé à R. Yohanan b. Broqa et R. Eléazar b. Hasma, d’aller de Yabneh à Lod ; R. Josué l’accueillit à Beqiin. Qu’avez-vous de neuf aujourd’hui en fait d’exposé exégétique, demanda R. Eléazar ? Tous sont tes disciples, lui répondit-on, et nous voulons boire de tes eaux. Il n’est pourtant pas possible, dit il, que dans une telle salle d’études, il n’y ait rien de nouveau. À qui est-ce le tour cette semaine d’occuper la chaire ? A R. Eléazar b. Azaria ; il avait à expliquer ces mots (ib.) : Réunis le peuple, hommes et femmes, ainsi que les enfants. Il commença et dit : puisque les hommes viennent apprendre et les femmes écouter, à quoi bon parler des enfants (qui forcément les accompagnent) ? C’est pour en attribuer le mérite à ceux qui les amènent. Heureuse la génération, dit le premier, qui possède R. Éléazar b. Azariah au milieu d’elle. L’avis que vient d’exprimer R. Eléazar b. Azariah est opposé à celui de B. Azaï, car il a été enseigné ailleurs : de ce que l’on a dit au sujet de l’eau amère (d’épreuve), il résulte, selon B. Azaï, que l’homme est tenu d’enseigner la Loi à sa fille ; de cette façon, elle saura que si (étant soupçonnée) elle boit de cette eau amère (d’épreuve) et qu’elle sera innocente, elle le doit à sa vertu (selon R. Eléazar b. Azariah, au contraire, la femme écoute seulement). —

« Sauf le sourd », est-il dit. Quelle est la règle, demanda R.Yohanan, pour celui qui est sourd d’une oreille ? C’est un sujet en discussion, répondit R Yossé b. R. Aboun, entre R. Yossé et les autres sages ; or, il a été enseigné : du verset (Exode, XXVIII, 40) aux fils d’Aron tu feras des tuniques, les sages déduisent qu’il fallait 2 tuniques (minimum du pluriel) pour chacun ; selon R. Yossé, une seule suffit à chacun. Les autres sages fondent leur avis sur les termes de ce verset ; tandis que R. Yossé applique l’emploi du pluriel au grand nombre des fils d’Aron, qui doivent tous recevoir la tunique officielle. Ici (pour la réunion au Temple), il est dit (Deut. XXXI, 11) : Tu liras cette loi en face de tout Israël, à leurs oreilles ; d’après ce pluriel, disent les sages, il s’agit forcément de ceux qui ont 2 oreilles ; selon R. Yossa, on y englobe môme ceux qui n’ont qu’une oreiile (le pluriel s’appliquant à l’ensemble). — « Ni l’idiot », est-il dit. C’est conforme, dit R. Éleazar, à ces mots (ib. IV, 35) : tu as été rendu témoin (de ces faits) afin d’apprendre, etc. (c’est inutile à celui qui ne peut pas apprendre).— « Ni l’enfant. » R. Jérémie et R. Aïbo b. Nagri étaient assis ensemble, et ils enseignaient : on nomme enfant celui qui n’est pas encore capable de monter seul sur les épaules de son père. Mais est-ce que l’enfant comprend, ou parle ? (Ne faut-il pas l’exclure à ces titres?) Aussi, ils se reprirent et dirent : l’expression tous tes mâles (ib. XVI, 16) a pour but d’englober les enfants; et l’on ne tire pas de ce collectif la déduction d’étendre ce terme aux sourds, puisqu’il est dit aussitôt après : afin qu’ils entendent et qu’ils apprennent, ce qui exclut évidemment le sourd. Pourquoi ne pas déduire de la dernière expression, qu’ils apprennent, que les enfants sont exclus? R. Yossa répond : comme un verset vise son extension et l’autre une restriction, on appliquera l’extension à l’enfant qui sera apte à entrer au Temple plus tard, et la restriction au sourd, qui n’aura jamais l’aptitude voulue. Samuel b. Abba demanda en présence de R. Zeira si un enfant sourd est soumis au devoir de cette visite ? Que demandes-tu là, répliqua R. Zeira ; c’est comme si l’on voulait supposer que l’Israélite originaire serait placé sur la terre et le prosélyte serait élevé en haut des deux ; or, si une grande personne sourde est dispensée du devoir de la visite, à plus forte raison un enfant l’est-il. Ce raisonnement n’est pas absolu, dit R. Jérémie, car il serait juste qu’un enfant, même non sourd, en soit dispensé, et c’est par déduction du texte biblique, tous tes mâles, que les enfants sont compris dans l’obligation ; dès lors, on pouvait supposer que cette extension s’applique aussi à l’enfant sourd, afin de ne pas établir de distinction dans les déductions tirées de la dite expression biblique. Voilà pourquoi il faut recourir à l’avis exprimé, par R. Yossé, à savoir qu’un verset vise l’extension, et l’autre la restriction ; par suite, l’extension devra s’appliquer à l’enfant susceptible plus tard d’aptitude, tandis que la restriction s’applique au sourd, à jamais incapable.

« Ni l’homme bouché », est-il dit. Tous reconnaissent que si le voile recouvrant ses organes a été déchiré et qu’il a été reconnu pour mâle au 1er jour de la fêle, il est soumis au devoir de la visite ; la discussion a seulement lieu si cette reconnaissance a été effectuée aux jours suivants de fête : selon Hiskia, on déduit de l’analogie des deux termes il verra (Exode, XXXIV, 23 ; Deut. XVI, 16), que celui qui est soumis au devoir de la visite dès le 1er jour y reste soumis le 2ᵉ jour, mais celui qui n’était pas soumis le ler jour, n’y est plus soumis après ; selon R. Yohanan, au contraire, on a tous les 7 jours pour compenser ce qui est en retard du 1er. R. lia dit que R. Yohanan a exprimé son avis par analogie avec la seconde Pâques : comme celle-ci sert à remplacer la Pâques primitive (au cas d’empêchement en son temps), de même on dit ici que les 7 jours de fête servent à compenser ce qui a dû être omis le ler jour. De plus, R. Oschia dit que tous ces 7 jours sont obligatoires. Quelle différence pratique y a-t-il entre ces divers avis? Il y en a une si un prosélyte s’est converti au judaïsme après le ler jour : selon Hiskia, il n’est pas soumis au devoir de la visite ; selon R. Yohanan et R. Oschia, il l’est. De même l’homme impur, devenu pur aux jours suivants, sera-t-il dispensé, selon Hiskia, et soumis selon R. Yohanan ou R. Oschia ? Non, dit R. Yossa : le déchirement du voile des organes, qui motive cette obligation, aurait pu s’effectuer plus tôt; tandis que l’impur était réellement impropre le 1er jour.

— « L’androgyne est exclu », en verlu de l’expression (précitée) tout mâle —.

« Les femmes sont exclues » par déduction de l’expression tous les mâles. « Ni les esclaves ». On le déduit de ce qu’il est dit (ib.) : Trois fois par an apparaîtront tous tes mâles, etc. ; ceci est applicable à ceux qui n’ont pas de maître en dehors de la Divinité; tandis que l’esclave a encore un autre maître, son propriétaire. R. Josué b. Lévi dit : l’accomplissement du précepte de la visite au Temple équivaut au bonheur de voir face à face la Divinité; on le sait de ce qu’il est dit (ib.) ; 3 fois l’an tous verront la face du Seigneur Dieu. « Ni le boiteux », en raison du terme biblique Regalim (signifiant à la fois : fête et pieds). « Ni le malade », puisqu’il est prescrit (Deut., XVI, \4) de se réjouir « Ni le vieillard », dont la marche est trop pénible. R. Yossa dit : on applique les 2 déductions dans le sens le moins grave; si p. ex. on est à même de se réjouir (étant sain) et non de marcher (étant boiteux ou vieux), on sera dispensé de la visite, en raison du mot regalim ; à celui qui peut marcher mais ne peut pas se réjouir (étant malade), on appliquera l’expression : tu te réjouiras. R. Yohanan dit au nom de R. Yanaï que les Schammaïtes et les Hilléliles interprètent diversement le même texte : ainsi, selon Schammaï, de ce qu’un verset dit : tous tes mâles, et l’autre emploie le terme regalim, on s’arrêtera à un terme moyen, et le devoir sera imposé à l’enfant capable de se tenir achevai sur les épaules de son père; encore ne s’agit-il pas d’un enfant tellement petit qu’une fois sur les épaules de son père celui-ci ait à le porter, mais d’un enfant qui, en voyant son père debout, suit ses pas. Selon Hillel, de ce qu’un verset dit : tous tes mâles, et l’autre emploie le terme regalim, on s’arrêtera à un terme moyen, p. ex. à l’enfant capable de marcher en tenant son père par la main. Au point de vue de la pureté, voici la règle pour l’enfant : lorsqu’il prend lui-même la main de son père pour se guider, le doute qu’il émet équivaut à celui d’une grande personne (il y a présomption d’impureté) ; si au contraire le père le tient par la main, le doute de cet enfant sera sans valeur (et il y aura présomption de pureté). Au contraire ici (pour la visite au Temple), elle est due par l’un et l’autre enfant (par tous). R. Aboun b. Hiya demanda devant R. Zeira : où le devoir réel de la visite s’accomplit-il ? Est-ce sur toute la montagne sainte, ou à l’un des parvis? On peut résoudre cette question de ce qu’il est dit : l’homme impur est dispensé de ce devoir, comme il est écrit (Deut., XII, 5 et 6) : tu viendras là ; vous y apporterez, etc. ; or, est-ce que l’homme impur, même par contact de cadavre, ne peut pas pénétrer sur la montagne sainte ? Il s’agit donc des parvis.

Pour la question de capacité de marche depuis la ville jusqu’à la montagne, énoncée dans la Mischnâ, à partir d’où mesure-t-on ? Est-ce du mur de rempart, ou des maisons ? C’est à partir de la fontaine de Siloah, enseigne Samuel, laquelle est sise au milieu de la province. — R. Aboun b. Hiya demanda en présence de R. Zeira s’il est permis à un homme sain d’envoyer son offrande de fête par autrui (au lieu de venir lui-même) ? On peut supposer que non, fût-il répondu, de ce que l’on sait qu’il y a dispense de visite pour ceux qui sont frappés de la lèpre, ou affectés d’une mauvaise haleine (polypus), comme il est écrit (ib.) : tu y viendras; vous (mêmes) y amènerez. L’impur en est aussi dispensé, selon ces mots (ib. XXXI, 11) : Lorsque tout Israël arrive pour voir, etc., c.-à-d. celui-là seul qui peut venir avec tous les autres (le pur) pourra aussi apporter le sacrifice ; sans cela, non. Mais pourquoi ne l’enverrait-il pas par un autre ? Ceci même prouve, dit R. Yossé, que l’envoi par autrui n’est pas autorisé. R. Saméi demanda: ne serait-il pas juste de tirer les déductions à l’inverse, et dire : ceux qui sont frappés de la lèpre ou affectés d’une mauvaise haleine, sont dispensés, en raison du verset : lorsque tout Israël vient pour voir, et l’impur en est aussi dispensé, en vertu du verset (précédent) : tu viendras là; vous y amènerez ? Revenant sur son objection, R. Saméi lui-même la réfuta, en expliquant ainsi l’enseignement qui précédé : les malades en question, bien qu’ils ne peuvent pas venir avec les autres israëlites, sont à même de se présenter isolément, tandis que l’impur ne peut venir ni seul, ni avec d’autres (les déductions, telles qu’elles ont été présentées, sont donc logiques). Si quelqu’un, après avoir destiné un animal à servir d’offrande de fête meurt, les héritiers sont-ils tenus d’offrir l’animal désigné? Non, dit R. Ila, de la répétition du terme apparaîtra, contenu deux fois dans le même verset (ib.), on déduit qu’il faut être à même devenir si l’on doit offrir (non le mort). R. Zeira au contraire adopte la déduction tirée par R. Yohanan et R. Jonathan : ils disent tous deux que le terme explétif tout, dans l’expression tu rachèteras tout aîné de tes fils (Exode, XXXIV, 20), a pour but d’indiquer l’obligation même après la mort du père ; de même, pour le sacrifice de fête, l’expression superflue on ne verra pas ma face les mains vides subsiste même après la mort du maître (et les héritiers doivent offrir ce sacrifice). R. Aba b. Mamal dit que c’est le sujet de la discussion entre Samuel et R. Yohanan, car on a enseigné : Si une accouchée (tenue d’offrir un sacrifice d’expiation et un holocauste) meurt après avoir offert le premier sacrifice, les héritiers sont tenus d’offrir l’holocauste au Temple ; si après avoir offert l’holocauste (seul) elle meurt, les héritiers ne sont pas tenus d’offrir le sacrifice d’expiation. Toutefois, dit Samuel, le sacrifice reste dû si la femme avait déjà destiné un animal à cet effet ; selon R. Yohanan, c’est dû, même lorsqu’il n’y a pas d’animal déjà affecté à ce but ; si l’héritage consiste en objets mobiliers, comment R. Yohanan impose-t-il l’obligation de l’offre lors même qu’il n’y a pas d’animal destiné d’avance à ce but ? (Toute créance n’est pas prélevée sur les biens mobiliers). En quoi donc leur discussion importe-t-elle ? Le voici : si l’héritage se compose de biens immeubles, selon Samuel, le trésor réclamera le sacrifice désigné, sans toutefois y contraindre personne ; selon R. Yohanan, on pourra même y contraindre les héritiers. Si au contraire l’héritage se compose de biens mobiliers, selon R. Yohanan, ce sacrifice pourra être réclamé, sans toutefois employer do contrainte; mais, selon Samuel, il ne pourra pas même être réclamé.

2. Les Schammaïtes disent : le sacrifice offert à la visite (du Temple) devra être de la valeur de 2 pièces d’argent, et celui de la fête, d’une pièce d’argent; selon les Ilillélites, au contraire, il suffira pour le 1er d’une victime valant une pièce d’argent, et pour le second il faudra une valeur de deux pièces.

Le sacrifice pour la visite est composé d’un holocauste, et celui de la fête d’un sacrifice pacifique. Or, dit Schammaï, il faut faire une large part à l’holocauste (entièrement à Dieu) et une part moindre au sacrifice pacifique ; Hillel dit au contraire de consumer à l’autel la petite part et de garder la grande pour la consommation. Selon R. Tanhoum b. Ilaï au nom de R. Yossé b. Hanina, les Schammaïtes se basent sur le grand nombre d’holocaustes offerts à la fête de la Pentecôte (Lévit. XXIII, 18); les Ilillélites prennent pourpoint de comparaison les sacrifices (de paix) offerts par les chefs de tribus à l’inauguration de l’autel (Nombres, VII). Nous trouvons plus juste, disent les Hillélites aux Schammaïtes, de déduire par analogie l’obligation du sacrifice particulier (comme celui de la visite) d’un autre sacrifice particulier (du par les chefs), que de le déduire du sacrifice dû par le public (à Pentecôte). Nous préférons, disent les Schammaïtes, établir une analogie entre des sacrifices ayant tous pour caractère commun d’être observés par les diverses générations, que de recourir aux offres des chefs de tribus qui ont eu lieu une seule fois (sous Moïse). On a enseigné : le sacrifice de la visite comporte certaines particularités que n’a pas celui de la fête, et ce dernier en a que l’autre n’a pas : le ler est tout entier à Dieu, non le second ; celui-ci au contraire a déjà eu lieu avant la promulgation de la Loi, et se continue depuis lors, particularité non afférente à l’offre de la visite. On sait que le sacrifice de fête est antérieur à la promulgation de la Loi, en ce que l’expression fête a été employée à son égard auparavant, dans ces mots (Exode, V, 1) : renvoie mon peuple, qu’il me fête au désert. En outre, il y a une distinction au sujet de la joie, non applicable à ces deux sacrifices : elle se dit d’ordinaire aussi bien de ce qui vous appartient que de ce qui est à autrui, soit qu’on ait l’habitude de se réjouir avec cette chair (d’en manger), soit que l’on n’en ait pas l’habitude ; tandis que les sacrifices de visite et de fête seront offerts exclusivement de son propre bien et de ce qui réjouit d’ordinaire (un animal à consommer). Mais, demanda R. Yossé, pourquoi ne pas établir une autre distinction, savoir que tout individu soumis au devoir de visiter le Temple est tenu de se réjouir, tandis que ceux qui sont tenus de se réjouir ne sont pas tous astreints à offrir le sacrifice de visite, p. ex. les femmes ? C’est que, dit R. Josué b. Lévi, l’expression tu te réjouiras (Deut. XVI, 14) a lieu même pour la viande achetée à la boucherie, macellum (ce n’est donc pas absolu). R. Eléazar dit : comme il y a le terme joie employé à ce sujet et plus haut (ib. XII, 12), on en déduit que, dans l’un et l’autre verset, ce mot désigne les sacrifices pacifiques. Aussi, R. Houna mangeait pour une petite valeur de viande à chacun des 7 jours de la fête —.

3. Les holocaustes dus pour dons devront être offerts aux jours de demi-fête et provenir d’animaux profanes ; les sacrifices pacifiques pourront être pris des dîmes apportées à Jérusalem ; enfin l’holocauste de visite au Temple devra être présenté au 1er jour de la fête. Selon Schamaï, sa provenance devra être profane ; selon Hillel, on pourra le prendre de la dime.

R. Tanhoun b. Ilaï dit au nom de R. Yossé b. R. Hanma : les Schammaïtes font observer à Hillel qu’on ne saurait remplir un devoir obligatoire en prenant la victime sur le montant de la dîme apportée. Puisqu’aux jours ordinaires de semaine, répliquent les Hillélites, il arrive parfois de prendre une part profane et de l’adjoindre aux dîmes à consommer à Jérusalem ; de même lors de la fête, on opère cette jonction (afin d’employer l’ensemble à diverses offrandes). D’où sait-on que cette jonction est permise ? On le déduit, dit R. Yossé b. Hanina, de l’analogie des termes employés dans le verset traitant de la mesure du don (Deut. XVI, 10) et dans cet autre (ib. XIV, 24) : car tu ne pourras pas le porter ; or, comme dans ce dernier verset il est question de dîme, il en sera de même au premier. R. Eliézer aboutit à la même conclusion par une autre déduction d’analogies : de ce qu’au sujet de la fête on emploie le terme joie (ib. XVI, 14), ainsi que précédemment (ib. XIV, 26), on conclut à une analogie de sens, et comme dans ce dernier il est question de dîme, il en sera de même au premier verset. Mais alors pourquoi parler seulement d’adjonction du profane aux dîmes et ne pas tirer de celles-ci toutes les offrandes dues ? C’est que, dit ’Oula b. Ismaël, comme il est écrit d’une part (XVI, 10) mesure de don,et d’autre part (Genèse, XLÏII, 34) : la part de Benjamin fût augmentée, on établit de cette analogie des termes une comparaison de sens, et l’on dit que dans l’un comme dans l’autre cas, il s’agit d’une part essentielle, à laquelle on adjoint un accessoire. Mais, objecta R.Yossé b. R. Aboun, puisque le sacrifice pacifique offert pour la fête est semblable à ceux des offrandes volontaires, pourquoi en parler d’une façon accessoire dans les versets précités ? (Ne comportent-ils pas le même caractère?) C’est afin d’indiquer que, pour le premier seul, on enfreint le repos de la fête (les autres seront offerts aux jours de demi-fête).

4. Le devoir de manger du sacrifice pacifique pour la joie sera rempli, par tous les israélites, à l’aide des vœux, des engagements, ou de la dîme d’animaux; par les prêtres, en mangeant des sacrifices d’expiation, ou de péché, ou des dons sacerdotaux de la poitrine et de l’épaule, ou des premiers-nés qu’ils reçoivent, non avec de la volaille, ou des offres de farine —.

5. Si quelqu’un a beaucoup de personnes à sa table (une grande famille) et peu de ressources, il pourra apporter beaucoup de sacrifices pacifiques de fête et peu d’holocaustes ; si au contraire il a peu de commensaux et beaucoup de biens, il offrira moins de sacrifices pacifiques et plus d’holocaustes. Pour celui qui a peu de l’un et de l’autre, il est dit qu’il suffit d’une victime d’une pièce d’argent et d’une autre de deux. Pour celui qui a beaucoup de l’un et de l’autre, il est écrit (Deut. XVI, 17) : chacun selon le don de sa main (ses facultés), d’après la bénédiction dont l’Eternel ton Dieu t’a gratifié.

De celui qui est pauvre et pourtant généreux, il est dit : selon le don de sa main ; de celui qui est riche et parcimonieux, il est dit : selon la bénédiction dont Dieu t’a gratifié. Enfin pour le pauvre parcimonieux, il est dit qu’il suffit d’une victime d’une pièce d’argent et d’une autre de deux. Le mot homme (chacun), de ce verset, a pour but d’exclure l’enfant. R. Jérémie demanda : si quelqu’un s’est engagé à offrir pour les sacrifices de fête une victime de 5 sela’, et qu’ensuite il en apporte une valant seulement 2 sela’, le devoir est-il rempli (puisqu’en règle cela suffit), ou en raison de son engagement une victime d’un prix inférieur serait-elle sans validité ? Cela ne souffre pas de doute, répliqua R. Yossé ; si quelqu’un s’est engagé à offrir un sacrifice de péché valant 5 sela’ (quoiqu’en règle générale il suffise d’une victime valant 2 sela’) son vœu est constitué et obligatoire ; il en sera de même ici pour l’offrande de fête.

6. Celui qui n’a pas offert les sacrifices pacifiques de fête le premier jour pourra les offrir à n’importe quel jour suivant de la fête, même au dernier jour (malgré sa solennité spéciale de clôture). Si l’on a laissé complètement passer la fête sans offrir ce sacrifice, on n’est pas tenu de le remplacer plus tard ; on peut lui appliquer ce verset (Ecclés., I, 15) : ce qui est tordu ne peut se redresser, et ce qui manque ne saurait être compté.

R. Yohanan dit au nom de R. Ismaël : il est question du 15 (Nissan) pour Pâques, et du même chiffre pour la fête des Tentes (en Tisri) ; comme à la première de ces fêtes, le dernier jour peut servir à remplacer une omission du commencement, il en sera de même à l’égard de la fête des Tentes. R. Juda b. Safra au nom de R. Oschia interprète ce verset (Lévit. XXIII, 41) :

vous fêterez cette solennité à l’Eternel 7 jours ; or, celte fête des Tentes n’est pas de 7 jours, mais de 8 ; seulement, en défalquant le samedi compris dans cette série, on arrive au chiffre de 7 (il en résulte donc que l’obligation de cette offre ne l’emporte pas sur le sabbat). Mais, demanda R. Yossé, est-Ce bien de là qu’on tire la déduction que ce sacrifice ne prédomine pas la question du repos sabbatique ? N’ést-ce pas d’ailleurs (de ce qu’il s’agit d’un sacrifice de particulier) ? Du reste, objecta R. Juda, frère de R. Safra, n’est-il pas dit aussi pour la Pâque de la célébrer 7 jours, et si l’on excluait le samedi de cette série de jours, il ne resterait que 6, au lieu de 7 ? Et de plus s’il se trouvait (à la fête des Tentes) que le 1er jour comme le dernier soit un samedi, il faudrait défalquer 2 jours, et il ne resterait que 6 (ce qui serait contraire au texte)? Aussi, R. Hanania est venu rectifier l’interprétation, donnée par R. Juda b. Safra au nom de R. Oschia, du verset précité ; s’il est vrai que cette fête n’est pas de 7 jours, mais de 8, il faut en déduire le samedi; et comme on sait déjà d’autre part que le sacrifice pacifique de fête (particulier) ne prédomine pas le repos sabbatique, but d’indiquer que, même au dernier jour, on peut restituer l’omission du premier —.

7. R. Simon b. Manassié dit : on nomme tordu qui ne peut se redresser un acte irréparable, comme celui d’avoir eu une relation illicite dont il est né un bâtard; car c’est différent d’un vol, ou d’une rapine, mal que l’on peut réparer en restituant au propriétaire le bien détourné. R. Simon b. Manassié (ou : R. Simon b. Yohaï) dit : On appelle tordu celui qui était bien dressé en principe et qui s’est détérioré plus tard, savoir l’homme instruit, versé dans la Loi, qui s’en est détaché.

On a enseigné que R. Simon b. Yohaï dit : Si l’on voit en Palestine des villes ruinées, il faut savoir qu’elles n’ont pas subsisté par suite du défaut d’écoles et d’instituteurs, selon ces mots (Jérémie, IX, 11 et 12) : pourquoi la terres est-elle perdue, est-elle désolée comme un désert où personne ne passe ? C’est que, dit l’Eternel, vous avez abandonné ma loi. R. Judan le Naci chargea R. Hiya, R. Assé et R. Amé de faire un voyage dans diverses localités de la Judée pour y organiser l’instruction publique. Ils arrivent dans une ville où ils ne trouvent aucune trace d’enseignement. Indignés, ils demandent à être conduits auprès des administrateurs du pays, qui portaient le titre honorifique de gardiens de la cité. Dès qu’ils sont en leur présence: « Quoi, s’écrient-ils, ce sont là les gardiens de la cité ? Non, c’en sont plutôt les destructeurs. —

Qui sont donc les gardiens, répliquent avec surprise les assistants? — Qui, reprennent les docteurs ; les écrivains, les professeurs, ceux qui instruisent la jeunesse, » comme il est dit (Ps. CXXVII, 1) ; si l’Eternel ne construit pas la maison, c’est en vain que les maçons y travaillent. R. Houna ou R. Jérémie dit au nom de R. Samuel b. R. Issaac : on trouve souvent que Dieu a prémuni Israël au sujet de l’idolâtrie, ou des relations illicites, ou de l’homicide, mais il n’a rien dit du fait non moins grave de délaisser la loi, sans respect. Aussi est-il écrit (Jérémie, ib.) : C’est que l’Eternel dit etc. ; il n’y est pas question d’idolâtrie, d’inceste, ou d’homicide, mais de l’abandon de la loi. R. Hiya b. Aba l’explique ainsi : C’est moi, dit Dieu, qu’ils ont abandonné, en n’observant pas ma loi, car l’un est la conséquence de l’autre, et la lumière vivifiante que celle-ci contient les eût rapprochés de moi. R. Houna dit: occupez-vous d’apprendre la loi, même sans but pratique immédiat, car à la longue vous finirez par la connaître, afin de la mettre en pratique. Lorsque R. Juda voyait les honneurs rendus à un mort, où à des fiancés, il regardait des disciples (pour les engager à prendre part à ces actes religieux), en disant (à l’opposé de R. Houna) : l’action est supérieure à l’étude —.

8. La libération des vœux vole en l’air et n’offre guère une base d’appui (d’allusion biblique). Les règles relatives au sabbat, ou aux sacrifices de fête, ou à la prévarication, sont comme des montagnes suspendues à un cheveu (aussi peu fondées), car elles dépendent d’une légère allusion à un verset de la Bible ; tandis qu’un grand nombre d’autres règles, telles que les questions civiles, ou celles du culte, ou de la pureté et de l’impureté, ou des relations illicites, sont basées sur des textes précis. Pourtant les unes et les autres constituent l’ensemble de la Loi.

On a enseigné que R. Éliézer dit : on peut invoquer (comme base d’appui en faveur de la libération des vœux) ces mots (Ps. CXIX, 10§) : j’ai juré et je tiendrai, car il arrive parfois de ne pas donner suite à un engagement ; selon R. Josué, on peut invoquer ces mots (Ps. XCV, 11): j’ai juré dans ma colère ; or, sur un serment prononcé ainsi, on peut revenir. On a enseigné ailleurs : il est 4 vœux que les sages délient. Mais ne peuvent-ils pas délier tous les vœux ? De ce que le chapitre des vœux suit ce verset (Nombres, XXX, 2) : Moïse parla aux chefs de tribus des enfants d’Israël, on déduit qu’il appartient aux chefs (ou sages) de délier les vœux des Israélites ? (question non résolue). R. Juda dit au nom de Samuel : l’expression suivante (ib. 3), qu’il ne profane pas sa parole, indique que le particulier ne peut pas revenir sur son dire, mais un autre peut la rendre profane, savoir le sage apte à délier d’un vœu. R. Zeira, ou R. Juda, ou Jérémie b. Aba dit au nom de Samuel : s’il y a 3 personnes sachant trouver un expédient pour délier d’un vœu, elles sont aptes à cet acte aussi bien qu’un vieillard (sage). On avait supposé que cette permission est applicable à de simples israélites seulement en l’absence d’un sage. Mais les rabbins de Césarée ajoutèrent que c’est applicable aussi lors même qu’il y a un sage. Devant R. Yossa on demanda si R. Houna est considéré comme chef de tribu (sage), ou non ? Certes, répondit-il ; qui le serait si ce n’est lui, et il doit être le premier des chefs. Y a-t-il lieu parfois de nommer des sages pour des cas spéciaux (délégués pour un point particulier) ? On peut résoudre ce cas de ce fait : Rab avait été désigné par Rabbi pour délier les vœux et pour examiner les taches (en cas de doute sur les menstrues). À la mort de Rabbi, Rab sollicita du fils et successeur le pouvoir de prononcer en cas de doute sur les défauts des premiers-nés (afin de juger s’il est permis de les égorger) : non, dit le fils de Rabbi, je ne puis rien ajouter à ce que mon père t’a octroyé. R. Yossé b. R. Aboun dit : tout lui a été accordé, la faculté de juger seul, de délier les vœux, d’examiner les défauts apparents (externes); mais à la mort de Rabbi, comme ce R. Yossé voulut en outre solliciter du fils la faculté de prononcer sur les défauts cachés (à l’intérieur des corps), il lui fut répondu : je 11e puis rien ajouter à ce que mon père t’a octroyé. Donc, bien que l’on ait dit qu’il est loisible de nommer les sages pour n’importe quel but particulier, il faut encore qu’il soit apte à se prononcer sur chaque détail. Ainsi, R. Josué b. Lévi donna ce pouvoir général à ses disciples, mais il eut le chagrin de ne pas pouvoir déléguer dans les mêmes conditions générales, un élève borgne (impropre à présider la cérémonie du déchaussement pour refus de lévirat).

Et il ne le nomma pas avec des pouvoirs particuliers (restreints) ; c’est une preuve que lorsqu’on est apte à tout, on l’est aussi pour un point particulier ; et si au contraire on n’est pas propre à tout, on est parfois impropre même pour un seul point. Peut-on déléguer les sages pour un temps limité ? On le sait par ce fait : Hiya b. Aba alla prier R. Éliézer de demander pour lui à R. Judan Naci une lettre de présentation, pour qu’il puisse aller vivre au dehors. Rabbi l’accorda et écrivit : nous vous envoyons un homme important, notre délégué et notre fondé de pouvoir en tout, acte valable jusqu’à son retour ici. R. Hiskia, R. Dousti, R. Aba b. Zemina, peut-être aussi au nom de R. Dossi le vieux, demanda comment Rabbi a pu le traiter d’important ? Quel était son mérite ? Celui d’avouer lorsqu’il ignorait une règle. Est-il permis de délier en n’étant revêtu que de la tunique, ou le vêtement officiel du Talith est-il exigible ? R. Abahou au nom de R. Yohanan permet de prononcer en n’ayant que la tunique ; c’est aussi l’avis de Rabbi, ainsi que de R. Josué b. Lévi. R. Houna au nom de R. Jérémie le permet seulement lorsqu’on n’a pas de talith ; R. Yossé b. R. Aboun le permet seulement pour les vœux moins graves. — « Les règles relatives au Sabbat etc., dit la Mischnâ, dépendent seulement d’une légère allusion à la Bible. » Toutefois, dit R. Yôna, R. Hama b. ’Ouqba objecta que d’un seul verset (Lévit. XI, 36), seulement une source et une citerne où l’eau afflue seront pures, on déduit un grand nombre de règles relatives à la pureté (on pouvait donc les ranger à côté de celles du sabbat). —. [Suivent de longs passages jusqu’à la fin du §, traduits : 1° tr. Péa, II, 6 (t. II, pp. 36-7); 2° tr. Troumôth, V, 9 (t. 111, p. 63)

Chapitre II

1. On n’interprétera pas à 3 personnes réunies les déductions à tirer du chapitre des relations illicites (Lévit. XVIII), ni le récit de la Création (Genèse, I) à deux, ni les récits relatifs au char céleste (d’Isaïe et d’Ezéchiel) même à une seule, à moins que ce soit un sage qui comprend presque seul (et devine plus qu’on ne lui explique). Il vaudrait mieux n’être pas né que de contempler (fixer) les quatre objets suivants : ce qu’il y a au-dessus de nous au ciel, ce qu’il y a au-dessous, ce qu’il y a devant nous, et ce qu’il y a derrière ; il vaudrait mieux n’être pas né si l’on n’a pas soin d’honorer son Créateur.

R. Aba dit au nom de R. Juda que l’avis exprimé ici doit émaner de R. Akiba, non de son interlocuteur R. Ismaël, car celui-ci enseigne qu’il faut appliquer aussi l’avertissement (avec ses conséquences pénales) à celui qui subit une relation contre nature, aussi bien que celui qui l’accomplit (Lévit. XX, 13) ; et de ce que l’on a vu R. Amé assis à enseigner qu’il faut un avertissement à celui qui accomplit un tel acte et un autre (par déduction) à celui qui le subit, on conclut que l’avis de R. Ismaël (de pouvoir enseigner ces sujets) sert de règle. — « Ni le récit de la création à 2 », est-il dit. Ceci aussi doit émaner de R. Akiba, dit R. Aba au nom de R. Juda, car son interlocuteur R. Ismaël, qui applique la déduction précédente à un 2e avertissement, autorise cette interprétation ; et de ce que R. Juda b. Pazi était assis à exposer qu’en principe le monde était composé d’eau sur eau, on conclut que l’avis de R. Ismaël, d’autoriser ces explications, sert de règle. Voici l’exposé de R. Juda b. Pazi : en principe, le monde se composait d’eau sur eau, selon ces mots (Genèse, I, 2) : le souffle divin planait au-dessus des eaux ; puis a été constituée la neige (semi-solide), selon ces mots (Ps. CXLVII, 17) : Il sème les glaçons comme des miettes ; puis il en a fait la terre, selon ces mots (Job, XXXVII, 6) : à la neige il dit d’être de la terre. Celle-ci est placée au-dessus de l’eau, selon les mots (Ps. CXXXVI, 6) : Celui qui a étendu la terre sur les eaux. Celles-ci à leur tour sont sises sur des montagnes, selon ces mots (Ps. CIV, 6) : Sur les montagnes s’arrêtent les eaux. Les monts sont suspendus en l’air, selon ces mots (Amos, IV, 13) : Voici, il forme les montagnes et crée le vent. Ce dernier dépend de la tempête, selon ces mots (Ps. CXLVIII, 8) : Le vent de la tempête exécute ses ordres. La tempête même a été faite par Dieu en forme d’amulette suspendue à son bras, selon ces mots (Deut. XXXIII, 27) : sous les bras du monde, etc.

Le verset (précité), voici il forme des montagnes, etc., est l’un des six que Rabbi lisait en pleurant (en raison des sévérités qu’ils contiennent). Les 5 autres sont : Ils recherchent Dieu, tous les humbles de la terre, etc. (Sophonie, II, 3). Haïssez le mal et aimez le bien, etc. (Amos, V, 15) ; il mettra sa bouche dans la poussière, etc. (Lament., III, 29) ; car toute l’œuvre sera présentée par Dieu en justice (Ecclés., XII, 16); Et Samuel dit à Saul; pourquoi m’as-tu irrité (I. Sam. XXVIII, 15). Ce dernier verset peut s’expliquer ainsi : tu n’aurais dû irriter ton créateur, lui dit Samuel, que contre moi ; au lieu de cela, tu m’as traité comme ton idole, et tu sembles ignorer que si celui qui l’érige mérite une peine, celui qui se laisse faire (adorer) la mérite aussi ; en outre, en étant éveillé de mon sommeil, j’ai cru que c’était le jour du jugement dernier, et j’ai eu peur. Or, il y a lieu d’établir un raisonnement par a fortiori et se dire : si Samuel, le maître des Prophètes, dont il est dit (I Sam. III, 20) : Israël depuis Dan jusqu’à Beér-Seba’ reconnut etc., a éprouvé des craintes pour le jugement ; combien devons-nous en être effrayés ! C’est ce qui résulte p. ex. du verset (d’Amos) : Voici celui qui a formé les montagnes, qui a créé le vent et qui déclare à l’homme quelle est sa pensée ; c’est-à-dire même les paroles qui ne comportent pas de péché sont inscrites à l’homme sur son registre, πίναξ; et qui le déclare à l’homme? L’haleine de sa bouche en parlant. R. Hagai dit au nom de R. Ya’beç : on déduit de la juxtaposition des termes dans ce verset que le vent créé (souffle produit) reprochera un jour à l’homme ses paroles. Il dit aussi : les gens de Cippori disent d’entendre par le mot chaos l’obscurité et les ténèbres. R. Juda b. Pazi dit au nom de R. Yossé b. R. Juda : Adrien demanda au prosélyte Aquilas s’il est vrai ce que l’on dit, que le monde est suspendu en l’air ? Certes, répondit Aquilas ; et, pour te le prouver, fais-moi venir de petits chameaux : ce qui fut exécuté. Il eut beau les charger lourdement ; les bêtes restaient debout ; puis il enleva la charge et les étrangla. Voici tes bêtes, dit-il à Adrien, relève-les. Je ne le puis plus, puisqu’elles sont mortes. Que leur manque-t-il, dit Aquilas, rien que le souffle qui les a quittés et qui les soutenait (ainsi le monde est soutenu par l’air).

« Ni des chars célestes même à un seul », dit la Mischnâ. Cet avis émane-t-il encore de R. Akiba seul (comme les cas précédents) ? Non, c’est conforme à l’avis de tous, car l’homme est tenu de ne toucher qu’avec les plus grands égards à ce qui conserve la gloire du créateur. Ainsi Rab a dit : il n’est pas permis d’énoncer un avis en présence de son maître, à moins de l’avoir déjà vu ou servi (à plus forte raison de Dieu). Voici comment on opérera : d’abord le maître ouvrira (exposera) les sommaires des chapitres, et l’élève les achèvera avec l’assentiment du maître. R. Hiya dit au nom de R. Yohanan : Rabbi avait un élève perspicace, εὔθιχος, qui se mit à expliquer un chapitre des récits du char céleste, sans l’approbation de Rabbi, et il fut frappé de la lèpre. La loi ressemble à 2 sentiers, l’un de feu, l’autre de neige ; s’il penche d’un côté, il mourra brûlé ; s’il penche de l’autre, il sera saisi par le froid de la neige (dont la lèpre blanche est l’image). Que faire ? Suivre un juste milieu (sans s’exposer aux dangers de trop approfondir ces sujets, et de devenir fou). Il est arrivé à R. Yohanan b. Zaccaï de parcourir un trajet, chevauchant sur un âne, suivi par R. Éleazar b. Arak, qui lui demanda d’étudier avec lui un chapitre de la science du char. Mais, lui objecta R. Yohanan, les sages n’ont-ils pas défendu un tel enseignement, à moins qu’il s’agisse d’un savant apte à deviner seul la suite ? Permets-moi, maître, dit le disciple, de te dire un mot. J’y consens, dit R. Yohanan. Dès que R. Éleazar b. Arakh eut commencé à exposer ce sujet, R. Yohanan b. Zaccaï descendit d’âne, en disant : Il n’est pas convenable que j’entende prononcer la gloire du Seigneur, en restant à âne. Ils allèrent donc s’asseoir sous un arbre. Un feu descendit du ciel et les entoura : Les agents du service céleste sautaient devant eux, comme les gens d’une noce se réjouissent devant un fiancé, et un ange se mit à dire au milieu du feu : comme tu viens de l’expliquer, ô Éleazar b. Arakh, tel est bien le récit du Char. Aussitôt tous les arbres se mirent à parler et récitèrent un cantique (Ps. XCVI, 12) : Alors tous les bois de la forêt chanteront. Lorsque R. Éleazar b. Arakh eut achevé cet exposé, R. Yohanan b. Zaccaï se leva, le baisa sur la tête, et s’écria : Béni soit l’Éternel, Dieu d’Abraham, Isaac et Jacob, qui a donné au patriarche Abraham une descendant aussi sage, capable d’expliquer la gloire de notre père aux cieux. Il te convient de faire de telles explications ; car parfois on ne sait pas les mettre en pratique ; d’autres fois, on le sait, mais l’on ne sait pas l’expliquer. Éleazar b. Arakh au contraire est aussi capable en théorie qu’en pratique ; heureux notre ancêtre Abraham qui a la satisfaction d’avoir pour descendant cet Éleazar b. Arakh. Lorsque R. Joseph Cohen et R. Simon b. Nathanel eurent connaissance de ce fait, ils se mirent aussi à expliquer le récit du Char, et dirent : un jour, au 1er du solstice de Tamouz (milieu de l’été), la terre trembla, l’arc-en-ciel apparut (fut miraculeux à ce moment de la saison), et l’on entendit une voix céleste dire : Votre place au ciel est déjà préparée, votre chambre (triclinium) est déjà tendue ; vous occuperez vous et vos élèves le rang de la 3e catégorie. C’est conforme à la déduction tirée de ce verset (Ps. XVI, H) : il y a des rassasiements de joie dans ta face, qu’il y aura au monde à venir 7 catégories de justes. Une autre fois, comme R. Josué était en route, Ben-Zoma vint à sa rencontre et s’informa de sa santé ; R. Josué ne lui répondit pas. D’où viens-tu et où vas-tu (si préoccupé que tu ne me réponds pas) ? Excuse-moi, B. Zoma, lui répondit-il, je contemplais le mystère de la création ; entre l’eau supérieure et l’eau inférieure, il n’y a guère plus d’intervalle que l’espace d’un palme. À ce sujet (Genèse, I, 2) le terme planer est employé, et on le retrouve au verset (Deut. XXXII, 11) : comme l’aigle veille sur son nid, qui plane auprès de ses petits ; comme dans ce dernier verset il s’agit d’un vol qui frôle sans toucher, il en est de même au sujet de la Création. Ce Ben-Zoma, dit R. Josué à ses disciples, est en dehors. Peu de temps après, Ben-Zoma mourut.

R. Juda b. Pazi dit au nom de R. Yossé b. R. Juda : 3 sages ont étudié ce sujet mystérieux de la Bible sous la direction de leur maître, savoir R. Josué devant R. Yohanan b. Zacaï, R. Akiba devant R. Josué, et R. Hanania b. Hakhinaï en présence de R. Akiba; à partir de ce moment, leur raisonnement n’avait plus la netteté primitive. Quatre individus entrèrent au Paradis : le premier osa contempler la Divinité et en mourut ; le second en sortit frappé (fou) ; le troisième se mit à ravager les plantes après cet examen ; le quatrième seul entra en paix (dans ce sujet) et en sortit aussi pacifiquement. Ben-Azaï sortit frappé de cette contemplation, selon ces mots (Prov. XXV, 16) : Quand tu auras trouvé du miel, ne manges-en que ce qu’il te faut, sans excès. Ben-Zoma, après avoir contemplé, mourut; et de lui il est dit (Ps. CXVII, 15) : Elle est précieuse aux yeux de l’Éternel la mort de ses justes. Un autre, après avoir contemplé, ravagea les plantes (de ce jardin) ; et cet « autre » n’est nul qu’Elischa b. Abouya, qui tua les plus grands étudiants de la Loi. L’on dit de lui que (par ses maléfices) il mettait à mort tout élève qu’il voyait réussir dans l’étude de la Loi ; en outre, il se rendait à la salle d’études, et lorsqu’il voyait les adolescents assis devant le maître, il leur disait qu’ils n’avaient que faire là ; un tel ferait mieux d’embrasser la profession de maçon, un autre celle de serrurier, un autre celle de chasseur, un autre celle de tailleur. Lorsque les jeunes gens l’avaient entendu s’exprimer ainsi, ils quittaient le maître pour s’abandonner à un travail manuel. De lui il est écrit (Ecclés. V, 5) : n’expose pas ta bouche à te faire pécher, etc., car il blessa ainsi ses propres œuvres (antérieures). De même à une époque de persécution contre les Juifs (pour les contraindre à violer le repos sabbatique), on leur imposa des charges à porter le samedi ; les Juifs s’appliquèrent à porter à deux une seule charge, en raison de la règle que si un travail est accompli par deux, on est moins blâmable (il n’entraîne pas de pénalité). Mais cet hérétique disait aux persécuteurs de charger les Juifs isolés, ce qu’ils exécutèrent. Les Juifs alors s’appliquèrent à se décharger sur une place intermédiaire, Χηραμíς, afin de ne pas opérer l’acte interdit, de transporter d’un bien privé sur la voie publique directement. Elischa donna alors le conseil impie de leur faire porter des verreries (pour les empêcher de se décharger ailleurs qu’à la maison, sous peine de bris) ; ce qui fut fait. Seul R. Akiba entra en paix, et sortit de même. De lui il est dit (Cantique, I, 4) : Entraîne-moi avec toi, courons, etc.

Comme R. Méir était assis à expliquer l’exégèse dans la salle d’études, Elischa son maître à cheval, un jour de sabbat, vint à passer : voici, ton maître est dehors, dit-on à R. Méir, qui se leva, interrompant son exposé, et se rendit auprès de lui. Qu’expliques-tu aujourd’hui, lui demanda Elischa ? Le verset suivant (Job, XL11, 12) : l’Eternel bénit la fin de Job au-delà de ce qu’il avait eu d’abord. Et où as-tu commencé, lui demanda-t-il ? Au suivant (ib. 10) : Dieu augmenta du double tout ce que Job avait eu, en ce sens qu’il lui redoubla tout son argent. Malheur, dit Elischa, à ceux qui perdent et ne retrouvent pas ; ce n’est pas ainsi que ton maître Akiba avait expliqué ce verset, mais il interprêta les mots l’Éternel bénit la fin de Job au-delà de ce qu’il avait eu en principe, en ce sens : grâce aux préceptes religieux et bonnes œuvres que Job avait en main dès le principe, Dieu le bénit. Qu’as-tu expliqué ? Le verset suivant (Ecclés. VII, 8) : mieux vaut la fin d’une chose que son commencement. Et comment as-tu approfondi ce sujet, demanda Elischa ? En le comparant, dit R. Méir, à un homme qui ayant engendré des fils dans sa jeunesse, les voit longtemps languir, et se remettre lorsqu’il est déjà vieux ; c’est une fin meilleure que le commencement. Ou bien : si un homme s’étant livré au commerce dans sa jeunesse a éprouvé des pertes, et au temps de sa vieillesse il est en profit ; c’est une fin meilleure que le commencement. Ou bien encore : si un homme ayant étudié la Loi dans sa jeunesse l’oublie et que dans sa vieillesse il s’en souvient ; c’est une fin meilleure que le commencement. Malheur, s’écria Elischa, à ceux qui perdent et ne trouvent pas. Ce n’est pas ainsi que ton maître Akiba l’a expliqué ; mais il a dit que la fin est meilleure que le commencement, lorsque le principe, le point de départ est bien religieux. Voici, à l’appui de cette opinion, ce qui m’est arrivé : Mon père Abouya était l’un des plus grands personnages de Jérusalem ; au jour de ma circoncision, il invita au festin toutes les principales personnes de la ville, les installa dans une maison, et en établit une autre à part pour R. Eliézer et R. Josué. Lorsque les premiers eurent fini de manger et de boire, ils se mirent à jouer au jeu de paume et à danser.

Tandis qu’ils passent le temps à leur façon, dit R. Eliézer à R. Josia, occupons-nous à notre manière, et ils se mirent à étudier les paroles de la Loi, passant tour à tour de la Loi aux Prophètes, et de ceux-ci aux Hagiographes. Un feu du ciel descendit et les entoura. Mes maîtres, vint leur dire Abouya, êtes-vous venu brûler ma maison ? Dieu nous en garde, répondirent-ils ; nous étions assis, occupés à nous remémorer les paroles de la Loi, en passant successivement aux Prophètes, puis aux Hagiographes ; ce sujet nous rendait aussi joyeux que si nous assistions à la promulgation sur le mont Sinaï ; le feu nous léchait comme il flamba sur le mont Sinaï ; en effet, dès le principe, la loi a été donnée au milieu du feu, selon ces mots (Deut. IV, 11) : q>la montagne se consumait dans le feu jusqu’au milieu du ciel. Alors mon père Abouya leur dit : Mes maîtres, puisque la loi a une telle force, je promets, si mon fils reste en vie, de le consacrer à cette étude ; mais comme son intention primitive n’avait pas un but exclusivement religieux, son projet ne se réalisa pas en entier. — Qu’as-tu encore expliqué ? Le verset suivant (Job, XXVIII, 19) : ni l’or ni le verre fin ne l’égale. Quel sens lui as-tu appliqué, demanda Elischa ? Celui-ci: les paroles de la Loi sont aussi difficiles à acquérir que les objets en or, et aussi faciles à perdre que les ustensiles faits de verre ; et comme le vase d’or ou de verre une fois brisé peut de nouveau être reconstitué à l’état primitif (par une refonte), de même le sage qui aurait oublié son savoir peut se mettre à l’apprendre de nouveau. — Arrête-toi là, Meir, dit Elischa ; voici la fin de la limite sabbatique. D’où le sais-tu, demanda R. Méir ? — Je le sais, dit-il, d’après les pas de mon cheval, que j’ai comptés pendant 2,000 coudées. — Quoi, s’écria R. Méir, toute cette science est en toi, et tu ne te repens pas (tu ne reviens pas aux pratiques religieuses) ? Je ne le puis pas, dit Elischa. Pourquoi ? C’est qu’une fois je passais devant le saint des saints, monté sur mon cheval, au jour du grand pardon survenant un samedi, et j’ai entendu une voix céleste sortant de ce sanctuaire et disant : repentez-vous, o fils, sauf Elischa b. Abouya, qui a connu ma puissance et s’est révolté contre moi. Et quelle est la cause de toutes ses erreurs ? C’est qu’un jour étant assis à étudier dans la vallée de Guenossar, il vit un homme monter au sommet d’un palmier et prendre dans un nid la mère et ses petits, puis s’en aller de là tranquillement (malgré l’interdit d’agir ainsi) ; le lendemain, il vit un autre homme monter au sommet de cet arbre, prendre les petits après avoir renvoyé la mère (comme le veut 1a Loi), et à la descente être mordu par un serpent, morsure dont l’homme mourut. À cette vue, Elischa s’étonna, disant qu’il est écrit (Deut. XXII, 7) : tu renverras la mère et tu prendras les petits pour toi, afin qu’il t’en arrive du bien et que tu vives longtemps. Or. quel bien cet homme en a-t-il acquis ? Où est sa longue vie ? C’est qu’Elischa ignorait l’interprétation de ce verset donnée par R. Jacob bien avant lui, en ce sens : ce sera un bien pour toi, dans le monde futur, qui est tout bon ; et tu prolongeras tes jours, à l’avenir, qui est entièrement long. Selon d’autres, lorsqu’il vit la langue de R. Juda le boulanger pendante comme de la gueule d’un chien et ensanglantée, il s’écria : est-ce là la récompense de la Loi ! Voilà une langue qui a exposé les paroles de la Loi comme il convient ; elle s’est adonnée aux sujets religieux en toute son existence, et voilà comment elle est traitée ! Il semble qu’il n’y ait pas de récompense de ce fait, et que la résurrection des morts n’existe pas. Selon d’autres, pendant que sa mère enceinte le portait dans ses entrailles, elle passa devant des maisons d’idoles, elle en aspira l’encens pernicieux, qui pénétra son corps comme le venin d’un serpent (ἔχιδνα).

Quelque temps après, Elischa tomba malade, on vint dire à R. Meir que son maître va très mal. R. Meir vint donc pour lui rendre visite, et le trouva malade. Ne renonces-tu pas à tes erreurs anti-religieuses, lui demanda-t-il ? — Reçoit-on (au ciel) ceux qui se repentent en cet état, demanda Elischa ? — Certes, répondit R. Meir, comme il est écrit (Ps. XC, 3) : tu fais rentrer l’homme jusqu’au moment de la poussière ; jusqu’à ce que son âme soit sur sur le point d’être réduite, on le reçoit. À ces mots, Elischa se mit à pleurer, et il expira bientôt après, R. Meir se réjouit de cette fin, se disant en lui-même : il me semble qu’il est mort au milieu du repentir. Lorsqu’on l’eut mis dans la bière, un feu descendit du ciel et la consuma. On alla dire à R. Meir que le corps de son maître est brûlé. Il sortit aussitôt pour l’ensevelir, et le trouva en effet consumé. Que fit-il? Il prit son vêtement d’office et l’étendit sur le corps, en disant (Ruth, III, 13) : Passe ici la nuit ; c’est-à-dire séjourne encore en ce monde, semblable à la nuit ; et sois là au matin, c’est le monde futur tout plein de clarté ; s’il veut t’épouser, c’est bien, qu’il t’épouse (ib.), ceci s’adresse à Dieu le bon par excellence, dont il est dit (Ps. CXLV, 9) : l’Éternel est bon pour tous ; sa miséricorde s’étend à toutes ses œuvres. Puis il est dit (Ruth, ib.) : s’il ne veut pas t’épouser, je t’épouserai moi, vive Dieu. Sur quoi, le feu s’éteignit. On demanda alors à R. Meir : si en ce monde on te questionne pour savoir à qui tu rendras la première visite, sera-ce à ton père, ou à ton maître ? (Qui préfères-tu) ? — Je ferai passer la visite au maître avant tout, répondit-il, et ensuite à mon père. — Mais, lui demanda-t-on, crois-tu que ton intercession en sa faveur sera exaucée? — Je le crois, dit-il, puisqu’il a été enseigné : Il est permis de sauver d’un incendie l’étui d’un livre avec ce livre, ou l’étui des phylactères en leur faveur ; de même, on sauvera Elischa (de la damnation), malgré ses hérésies, en faveur de sa science de la Loi. Au bout d’un certain temps, ses filles durent aller demander l’aumône à Rabbi, qui se prononça ainsi (Ps. CIX, 12) : il n’aura pas de prolongement de grâce ; personne n’aura pitié de ses orphelins. Rabbi, lui dit-on, n’aie pas égard à sa conduite, mais à son savoir. À ce moment, Rabbi fondit en larmes, et ordonna que les enfants d’Elischa soient nourris ; puis il dit : si cet homme, qui s’est occupé de l’étude de la Loi sans but religieux, est arrivé à un tel résultat ; combien serait-il plus remarquable s’il avait poursuivi un but religieux par cette étude.

R. Eléazar dit au nom de B. Sirah : Ce qui est trop merveilleux pour toi, et dont tu ne connais pas au-delà du Scheol toute la profondeur, ne cherche pas à le scruter ; réserve tes réflexions pour ce qui t’est accessible ; car tu ne saurais arriver aux mystères cachés. Rab explique ces mots (Ps. XXXI, 19) : qu’elles deviennent muettes les lèvres mensongères, qu’elles soient sourdes, qu’elles se brisent, qu’elles se taisent. Qu’elles soient sourdes, comme il est écrit (Exode, IV, 11) : l’Éternel lui dit : qui a mis une bouche à l’homme, etc. ; qu’elles soient brisées (éparses), comme il est dit (Genèse, XXXVII, 7) : Voici nous attachions des gerbes ; qu’elles se taisent, selon le sens habituel. Elles prononcent des paroles dures contre le juste (Ps. ib.) ; c’est-à-dire elles prononcent contre le juste du monde des paroles tirées (cachées) à ses créatures. Avec orgueil et mépris (ib.) ; c’est une allusion à celui qui a l’orgueil de vouloir commenter le récit de la Création ; il s’imagine exalter l’idée de la Providence, et il ne fait que la rabaisser. R. Yossé b. Hanina dit : celui qui se joue de l’honneur de son prochain n’aura pas de part à la vie future, et à plus forte raison celui qui se joue des attributs du maître de l’univers. Il est dit ensuite (ib. 20) : Qu’ils sont grands les biens que tu as réservés à ceux qui te craignent ; il n’aura pas départ à cette grande quantité de biens.

R. Lévi interprète ce verset (Prov. XXV, 2) : la gloire de Dieu est de céler la chose ; c’est le glorifier que d’ignorer ce qui s’est passé avant la création du monde ; la gloire des rois est de sonder les affaires, d’apprendre ce qui a lieu depuis la Création. R. Lévi l’explique aussi par ce verset (Job, XX, 4) : sais-tu cela de toute antiquité ? (Connais-tu ce qui a eu lieu avant la création ?) ; mais depuis que l’homme a été placé sur la terre, tu peux savoir. R. Yôna au nom de R. Aba explique ce verset (Deut. IV, 32) : Interroge les premiers, qui ont été avant toi ; il ne s’agit pas de ce qui a précédé la Création, puisqu’il est dit (ib.) : depuis le jour où Dieu a créé l’homme sur la terre ; et ce n’est pas seulement à partir du 6e jour, puisqu’il y a le mot premiers : il y a donc dans le texte une extension, puis une exclusion, qui tend à une déduction à tirer du 6e jour, et comme celui-ci est particulier, en ce qu’il fait partie des 6 jours de la création, on ne pourra lui comparer que des jours semblables (soit tous ceux de la création). On ne cherchera pas à savoir ce qui est au-dessus du ciel, ou au-dessous de l’abîme, puisqu’il est dit (ib.) : d’une extrémité du ciel à l’autre (non au-delà). Si toutefois tu t’occupes des mystères antérieurs à la création, tu pourras seulement exposer (des sommaires de chapitres), de façon à ce que ta pensée y corresponde (à voix basse) ; mais, pour ce qui a eu lieu après, ta voix pourra s’élever, dût-on l’entendre au bout du monde. Bar-Kappara déduit de l’expression à partir du jour que tout ce qui est relatif même au premier jour pourra être exposé en public. Cet avis de Bar-Kappara a pour équivalent celui de R. Juda b. Pazi, et l’avis de R. Hiya s’accorde avec celui de R. Aba.

R. Yôna dit au nom de R. Lévi ; le monde a été créé par la lettre ב (B) ; comme elle est fermée de 3 côtés et ouverte d’un seul, de même on ne devra pas scruter ce qui est au-dessus du ciel, ou sous la terre, ni ce qui est devant, ni ce qui est derrière, et seulement à partir de la création du monde. Si l’on demande à cette lettre qui l’a créée, elle semble montrer par une pointe sortant de l’angle supérieur la lettre précédente: A ; celle-ci est l’initiale d’un nom qu’elle semble désigner par une pointe à l’angle d’en bas, savoir le mot Adon, ou le nom du Seigneur Dieu. Selon d’autres, la création a eu lieu par la lettre B, initiale du mot Berakha (bénédiction), et non par la lettre A, parce qu’elle est l’initiale du mot Arira (malédiction). Or, la Providence a dit : je créérai le monde par un B, ses futurs habitants ne seront pas livrés à la crainte qu’il ne puisse pas subsister, en raison de ses auspices de malédiction ; mais puisqu’il est créé par B, initiale de bénédiction, peut-être subsistera-t-il. R. Abahou dit au nom de R. Yohanan : les deux mondes ont été créés par 2 lettres, le monde actuel et le monde futur, l’un par ה, l’autre par י, puisqu’il est dit (Isaïe, XXVI, 4) : car par יה (Dieu), l’Éternel, rocher (formateur) des mondes. On ne sait pas laquelle de ces lettres doit être attribuée comme origine à chacun de ces mondes ; mais de ce qu’il est écrit (Genèse, II, 4) : Voici les générations du ciel et de la terre lorsqu’ils furent créés כהכראם, on décompose ce dernier mot, et l’on dit : par ה il les a créés ; c’est donc par cette lettre (H) qu’a été créé ce bas-monde, et le monde futur l’est par un י (I). Comme la 1re est ouverte par en bas, c’est une allusion à ce que les habitants de la terre ont pour destination de descendre au Sheól (tombe) ; cette même lettre a au sommet supérieur une pointe angulée, pour désigner que les humains, après être descendus, pourront remonter; et elle a une ouverture de chaque côté, par allusion à la porte ouverte de toutes parts au repentir. La lettre י est courbée ; c’est un indice que les habitants de la terre devront se courber, selon ces mots (Jérémie, XXX, 6) : tous les visages seront bouleversés par la jaunisse, etc. (courbés par la honte). Lorsque David sut tout cela, il entonna ses louanges par les deux lettres, comme il est dit (Ps. CX1V, 1) : Alléluia, יה, louez serviteurs de l’Eternel, louez le nom de l’Éternel. R. Judan Nasia (le Naci) demanda à R. Samuel b. Nahman pourquoi est-il dit (Ps. LXVIIl, 5) : Exaltez celui qui chevauche dans les nuées (au ciel), par son nom de יה, et réjouissez-vous devant lui II n’y a nul endroit, lui répondit R. Samuel, qui n’ait un préposé à l’entretien de la vie, Βíος ; et celui qui est préposé à la vie de tous, c’est la Providence, car Βíος (l’Eternel) est son nom. Ton maître R. Eléazar, répliqua R. Judan, ne l’a pas interprété ainsi ; cela ressemble à un roi qui bâtit un palais (palatium) à la place où se trouvaient des gouttières, ou du fumier, ou des ordures ; et ne serait-ce pas un déshonneur pour ce palais de rappeler ce qu’il y avait là jadis? De même, dire du monde actuel qu’en principe l’eau supérieure se joignait à l’inférieure dans le chaos, serait lui faire tort. Ou encore, au-dessus d’un jardin royal une terrasse a été construite afin de l’admirer ; mais il est défendu d’y toucher (ainsi qu’à ce qui précède la création).

Les Schammaïtes disent : le ciel a été créé d’abord, puis la terre ; selon les Hillélites, c’est l’inverse. Chaque école motive son opinion. Les Schammaïtes se fondent sur ces mots (Genèse, 1, 1) : au commencement, Dieu créa le ciel et la terre, c’est semblable à l’acte de ce roi qui, après avoir édifié un trône, a construit le piédestal, ὑποπóδιον, selon ces mots (Isaïe, LXVI, 1) : le ciel est mon trône, et la terre mon marchepied. Les Hillélites invoquent ce verset (Genèse, II, 4) : au jour où l’Éternel Dieu fil la terre et les cieux. Tel est l’usage des constructions royales, d’édifier d’abord la base, puis la partie supérieure, selon ces mots (Isaïe, XLVIII, 13) ma main droite a fondé la terre et ma droite a étendu les deux. R. Juda b. Pazi cite aussi, à l’appui de Hillel, ces mots (Ps. CII, 26) : Auparavant tu as fondé la terre, et les deux sont l’œuvre de tes mains. R. Hanina dit : ce qui sert d’appui à l’avis de Schammaï est retourné comme argument contre lui, invoqué par Hillel. Ainsi Schammaï invoque le 1er verset de la Genèse ; à quoi Hillel oppose les mots suivants (ib. 2) : la terre était (elle était déjà). R. Yohanan dit au nom d’autres sages : quant à la Création, celle des cieux a eu lieu la première, mais la terre a été la première consolidée et achevée ; il invoque pour le fait de la création le 1er verset de la Genèse, et pour celui de l’achèvement un autre verset (II, 4), où la terre est citée d’abord. Après la création du ciel au premier jour, selon Schammaï, 3 jours se sont passés, et les dérivés sont nés, savoir après les 3 jours, au 4e il y eut les luminaires. Après la création de la mer le 2e jour, aussi selon Schammaï, ses produits apparaissent ; et après avoir laissé passer les jours 2, 3, 4, au 5e les eaux produisent, etc. La terre apparaît sèche au 3e jour et ses produits se manifestent 3 jours plus tard, soit le 6e jour, la terre produisit. Selon Hillel, la terre fut créée le 1er jour, et après 2 jours d’intervalle, soit le 3e, elle fournit de la verdure ; les cieux datent du 2e jour, et après un intervalle de 2 jours, soit le 4°, leurs produits naissent : il y eut des Luminaires ; la mer fut créée le 3e jour, et après 2 jours d’intervalle, elle donne ses produits, que les eaux produisent. Je suis étonné, dit R. Simon b. Yohaï, de ce que les premiers personnages du monde soient divisés sur la question de la création du monde ; à mon avis, le ciel et la terre ont été créés comme une marmite (λοράς) avec son couvercle (ensemble), selon ces mots (d’Isaïe, ib.) : ma main a fondé la terre et ma droite a étendu les cieux (en même temps). D’après cet avis, dit R. Éléazar b. R. Simon, je m’explique ce que mon père a dit : parfois, il est question des cieux avant la terre, d’autres fois, c’est l’inverse; mais, en réalité, ils se valent (et sont simultanés).

2. Yossé b. Yoézer interdit d’imposer les mains (aux sacrifices de visite offerts en ces jours) ; Yossé b. Yohanan l’autorise ; Josué b. Perahia l’interdit ; Nitaï d’Arbel l’autorise ; Juda b. Tabaï l’interdit ; Simon b. Schetah l’autorise, ainsi que Schemaïa ; Ablalion l’interdit. Hillel et Menahem n’ont pas eu de désaccord. Lorsque Menahem quitta le synhédrin, Schammaï y entra. Hillel autorise l’imposition ; Schammaï l’interdit.

Les premiers (de chaque couple) étaient les princes (président général) ; les seconds étaient chefs des cours de justice.

À l’origine, il n’y a eu de discussion en Israël qu’au sujet de l’imposition. À l’arrivée de Schammai et Hillel, il y a eu 4 sujets de différends. Lorsque les disciples de l’un et de l’autre se multiplièrent, et qu’ils ne fréquentèrent pas suffisamment les leçons des maîtres, les discussions augmentèrent : on se divisa en 2 camps ; les uns déclarèrent impur ce que les autres déclarèrent pur, et l’état primitif de bon accord ne sera bien rétabli qu’à l’arrivée du fils de David (du Messie). R. Hiya dit au nom de R. Yohanan : les moindres prescriptions rabbiniques relatives au repos des jours de fête ne doivent pas être prises à la légère, puisque l’acte d’imposer les mains est secondaire, et pourtant les plus grandes autorités ont discuté à ce sujet. Ceci prouve, dit R. Yossa, qu’il faut appuyer les mains sur la victime de toutes ses forces ; car s’il n’en était pas ainsi, l’interdit ne serait pas justifiable, et l’on ne peut admettre qu’il soit interdit de toucher un animal en ce jour. — « Hillel et Menahem n’ont pas eu de désaccord, est-il dit; lorsque Menahem quitta le Synhédrin, Schammaï y entra. » Où alla-t-il en sortant ? Selon les uns, il adopta des mesures contraires à celles qu’il avait préconisées (il sortit de la bonne voie) ; selon d’autres, il dut partir contre son gré, avec 80 couples de condisciples, couverts d’ornements d’or ; ils avaient la face noircie (mal vus), comme le bas d’une marmite, car les étrangers leur avaient dit : inscrivez sur la corne de vos bœufs (de façon notoire) que vous n’avez pas de part au Dieu d’Israël.

Nous avons appris que Juda b. Tabaï était Naci et Simon b. Schetah Ab beth-din (chef de la justice) ; selon une autre version, c’était l’inverse. À l’appui de la 1re version, on peut citer le fait relatif à Alexandrie : Les habitants de Jérusalem voulaient confier à Juda b. Tabaï les fonctions de Naci ; mais celui-ci s’était enfui et allé à Alexandrie. Les Jérusalémites écrivirent donc : « Jérusalem la grande à Alexandrie la petite ! Combien de temps encore mon fiancé restera-t-il avec vous, tandis que moi, je demeure abandonnée. » Juda quitta la ville pour se rendre dans un vaisseau. « Qu’est-ce qui manquait donc à Debora, dit-il, l’hôtesse qui nous avait accueillis chez elle ? — Maître, répondit un de ses disciples, elle était borgne. — Tu commets là une double faute, dit Juda: d’abord de me soupçonner de l’avoir envisagée comme beauté ; puis, c’est une preuve que tu l’as regardée avec convoitise (action interdite) ; or, je n’ai pas dit qu’il s’agit d’une belle femme, et je n’ai parlé d’elle qu’en passant. » En voyant cette irritation, le disciple s’en alla. À l’appui de l’autre version, disant que Simon b. Schetah était Naci, on peut citer le fait relatif à Ascalon : il y avait dans cette ville deux gens pieux, mangeant et buvant ensemble et s’entretenant mutuellement de la Loi. À la mort de l’un d’eux, c’est à peine s’il fut déploré ; tandis qu’à la mort du fils de Maon le percepteur, toute la contrée interrompit ses travaux pour assister à ses funérailles. L’homme pieux survivant se lamenta à cette vue, et dit : Hélas ! Israël n’a plus de mérite. Son compagnon défunt lui apparut en songe, et lui dit : « ne méprise pas ainsi les fils de ton maître (les Israélites) ; l’un (moi) a commis un péché qui, grâce au manque d’égards lors de l’enterrement, lui a été pardonné ; l’autre (le fils du percepteur) a commis une seule bonne action, et il en a été récompensé. » Quel péché peut avoir commis un homme aussi pieux, qui n’a jamais failli ? Il lui est arrivé une fois de placer les phylactères de la tète avant ceux de la main (au lieu de l’inverse). Quelle bonne action accomplit le fils de Maon, qui n’en accomplit guère de sa vie ? Un jour il donna un festin, ἄριστον, aux chefs de la ville βουλητεία, mais ils n’acceptèrent pas l’invitation ; il donna alors l’ordre de faire manger le festin aux pauvres, pour ne pas le laisser perdu. Selon d’autres, au moment où il passait dans la rue, un pain tomba de dessous son bras ; un pauvre le voyant le prit, et le fils de Maon ne lui dit rien pour ne pas le faire rougir. Quelque temps après, l’homme pieux survivant vit son compagnon défunt, se promener dans les jardins, sur les terrasses et auprès des sources d’eau, tandis qu’il vit le fils de Maon tirer la langue aux bords d’un fleuve sans pouvoir boire, en même temps qu’il voyait Miriam la fille d’Ali-Becalim; selon R. Eliézer b. Yossa, il la vit suspendue par les bouts de ses seins ; selon R. Yossé b. Hanina, le verrou de la porte de l’enfer était fixé à son oreille. Pourquoi cet appareil, demanda-t-il ? C’est qu’elle se mortifiait et s’en vantait ; ou, selon d’autres, parce qu’après avoir jeûné un jour, elle se vantait d’avoir jeûné 2 jours. Jusqu’à quand en sera-t-il ainsi, demanda-t-il ?

Jusqu’à l’arrivée de Simon b. Schetah ; alors on enlèvera de l’oreille de cette femme le verrou, pour le fixer à celle de ce Simon. Pourquoi cela, fut-il demandé ? C’est qu’il avait promis, fut-il répondu, qu’après sa nomination aux fonctions de Naci il tuerait les sorcières, et il n’a pas rempli sa promesse, puisqu’il y a encore 80 sorcières établies dans les cavernes d’Ascalon, causant de grands dommages au monde. Va donc et rappelle à Simon son engagement. — J’ai peur, répondit l’interlocuteur, car il est Naci (chef), et il ne me croira peut-être pas. — S’il te croit, fut-il répondu, c’est bien ; sinon, fais-lui ce signe (comme preuve de véracité) : mets ta main à l’œil, sors-le, puis remets-le, et le tout sera rentré en son ordre primitif. L’homme pieux alla donc, expliqua à Simon le récit complet de ce qu’il avait à lui dire, et voulut opérer pour lui l’indice de véracité en question ; mais Simon l’en empêcha, en disant : Je sais quel homme pieux tu es, et que tu es capable d’opérer davantage ; en outre, je n’ai pas énoncé la dite promesse de mes lèvres, et je l’ai seulement méditée en mon cœur. Aussitôt Simon b. Schetah se leva (prépara l’exécution) ; il partit un jour de pluie, emmenant avec lui 20 jeunes gens d’élite, leur remit en main autant de vêtements blancs, qu’ils étaient chargés d’emporter chacun dans une marmite neuve fixée sur la tête, leur donnant l’ordre suivant : « À mon premier cri (appel), vous vous couvrirez de ce vêtement ; et à mon 2e cri vous entrerez tous à la fois, et aussitôt entrés, chacun de vous saisira une de ces femmes qu’il soulèvera de terre ; car il est de règle en magie qu’une fois le sorcier soulevé de terre, il n’a plus de pouvoir. »

Sur ce, Simon alla se présenter à la porte de la caverne, et dit : « compagnes, ὁμοία, ouvrez-moi, puisque je suis des vôtres. — Comment se fait-il, dirent-elles, que tu aies pu pénétrer jusqu’ici en un tel jour ? J’ai su (par sortilège) passer entre les gouttes d’eau (sans me mouiller). — Et que viens-tu faire ici, demandèrent-elles ? Je viens apprendre, puis enseigner, car chacun fait ce qu’il peut. » Chacune alors opéra à sa façon : l’une par ses paroles put apporter du pain ; l’autre prononça les mots (magiques) et apporta de la viande ; une autre énonça de tels mots, et apporta des légumes ; une autre encore, agissant de même, apporta du vin. Et que sais-tu faire, demandèrent-elles ? Je sais, en poussant 2 appels, dit-il, vous amener 80 beaux jeunes gens, qui se réjouiront de vous avoir, et vous aurez de la joie avec eux. — Nous voulons bien les recevoir, dirent-elles. » Il poussa un cri, et les jeunes gens revêtirent le costume blanc ; au 2e cri, ils entrèrent tous à la fois, et il commanda que chacun se choisisse une compagne, qu’ils enlevèrent, puis ils partirent, et les crucifièrent. C’est pourquoi, il a été enseigné : il est arrivé à Simon b. Schetah de pendre 80 femmes à Ascalon. Mais, fut-il objecté, comment a-t-il pu faire tant d’exécutions en un jour, puisqu’il est de règle de ne pas prononcer deux condamnations capitales le même jour ? C’est que la gravité du moment (le danger couru par le judaïsme) l’exigeait. En effet, on a enseigné que R. Éleazar b. Jacob dit : j’ai entendu déclarer que parfois on punit au delà des règles ordinaires, et l’on sévit plus que la loi ne le prescrit. Quand le tribunal peut-il user de ce pouvoir discrétionnaire ? Lorsqu’il y a à prévoir une aggravation, dit R. Éleazar b. R. Yossé. R. Yossé prescrit la punition lorsqu’il y a des témoins des crimes, mais non s’il y a eu simple avertissement de ne pas mal agir. Comme il est arrivé à quelqu’un de faire un voyage le samedi, monté à cheval, on l’amena au tribunal, qui le condamna pour être lapidé; et bien que ce fut une simple infraction au repos sabbatique, interdite par les sages, les rabbins le punirent avec tant de sévérité, en raison de la gravité des circonstances. Une autre fois, un homme en voyage, accompagné de sa femme, se contenta de passer derrière une haie pour avoir des relations avec elle ; on l’amena au tribunal, qui lui infligea la peine des coups de lanière. Pourtant, c’était sa femme légitime ; mais il fut puni pour son manque de décence publique.

3. Les Schammaïtes disent : il est permis d’offrir aux jours de fête des sacrifices pacifiques, sans imposer les mains, mais il n’est pas même permis d’offrir des holocaustes ; les Hillélites autorisent d’offrir des sacrifices pacifiques. aussi bien que des holocaustes, et d’imposer les mains. — [Toute la Guemara de ce § est traduite tr. Beça, 4, ci-dessus, p.118] .

4. Lorsque la fête de Pentecôte se trouve être un vendredi, le jour de l’égorgement, selon les Schamaïtes, pour les sacrifices de visite, sera ajourné au dimanche ; selon les Hillélites, il n’est pas besoin de jour spécial à cet effet. Tous deux reconnaissent, toutefois, que si la fête survient un samedi, l’égorgement de ces sacrifices aura lieu le lendemain. Le grand-prêtre ne revêtira pas pour cela son costume officiel ; il sera permis en ce jour de prononcer des oraisons funèbres, ou de jeûner, afin de ne pas mettre en pratique l’opinion de ceux qui disent : la Pentecôte doit toujours avoir lieu le lendemain du sabbat.

Si la Pentecôte est un vendredi, le jour de l’égorgement, selon Schammaï, devrait être le lendemain (si ce n’était un samedi) ; selon Hillel, il n’y a pas de jour à part pour l’égorgement, que l’on effectue au jour même de l’offre (elle peut avoir lieu même à la fête). Donc, en réalité, l’égorgement aura lieu en ce cas, d’après Schammaï, le dimanche, et alors le grand-prêtre ne revêtira pas le costume officiel, par a fortiori : si ce revêtement n’a pas lieu, selon Hillel, en présence des sacrifices pacifiques et des holocaustes (pendant la fête) ; à plus forte raison lorsque tous ces sacrifices ne sont plus là (en semaine), selon l’avis de Schammaï. — [Suit un passage traduit tr. Meghilla, I, 4, ci-dessus, p.205.].

Tous reconnaissent que si cette fête survient un samedi, l’égorgement du sacrifice de visite en question aura lieu le lendemain ; donc, Hillel admet aussi en ce cas un recul au lendemain. Mais à quelle section de service reviennent alors les peaux de ces victimes ? Selon R. Tabi au nom de R. Yos-chia, il y a une discussion à ce sujet entre R. Yohanan et R. Simon b. La-kisch : R. Yohanan dit que ces peaux doivent être partagées entre toutes les sections (et pas seulement par celle de la semaine qui suit la fête) ; R. Simon b. Lakisch les assigne à la section de service au moment définitif de l’égorgement. Comment peut-on discuter à ce sujet ? Dès qu’il est admis qu’en cas de coïncidence de cette fête avec le sabbat, l’égorgement a lieu le lendemain, comment l’attribution des peaux peut-elle être l’objet d’une discussion entre R. Yohanan et Resch Lakisch ? (C’est donc que, vu l’ajournement obligé, ces sacrifices sont considérés comme étant de la fête, et les peaux reviennent à toutes les sections). R. Juda dit : en cas d’omission de l’office des sacrifices de visite en ce jour de fête, on peut le remplacer pendant les 7 jours suivants (ci-dessus, I, 5). Mais, objecta R. Oschia, n’a-t-on pas enseigné qu’à l’instar du compte établi pour que la néoménie ait lieu un seul jour, il sera établi un compte pour le jour de Pentecôte ? (Comment donc admettre un remplacement d’offre pendant 7 jours?) On veut seulement dire, observe R. Ila, qu’à défaut de ce détail de fête accompli, on peut le remplacer plus tard (sans rien changer quant à la date réelle de la fête) — [La suite jusqu’à la fin de ce § est traduite tr. Yôma, I, 5 (t. V, p. 163).].

5. On se lave les mains pour manger du profane, ou de la dîme, ou de l’oblation ; pour les saintetés, on doit prendre un bain ; pour l’aspersion de l’eau de purification, si les mains sont devenues impures, tout le corps l’est (et il faut un bain).

Mais la pureté des mains est-elle exigible pour le profane? En effet, notre Mischnâ ne représente que l’avis de R. Simon b. Eliézer, qui exige cette pureté même pour le profane ; ou bien encore, elle est conforme à l’avis de tous, et c’est en vue du cohen, pour qu’il s’habitue à s’abstenir de l’oblation avant de se laver les mains. On a enseigné que R. Simon b. Eliézer dit au nom de R. Méir : l’impureté des mains au 1er degré est un obstacle à la consommation du profane, et même au 2e degré pour l’oblation. Est-ce que cet avis de R. Simon b. Eliézer est conforme à celui de R. Akiba, formulé dans la Mischnâ suivante : « Si on laisse pénétrer les mains seules dans une maison frappée d’une plaie, elles deviennent impures au Ier degré (et rendraient même le profane impropre à être mangé) ; tel est l’avis de R. Akiba ; selon les autres sages, les mains sont aussi susceptibles d’impureté au 2e degré pour le profane »? Non, c’est aussi l’avis de ces autres sages qu’exprime R. Simon (et il est admis qu’elles sont impures au 2e degré). Pourtant, le motif invoqué ici pour justifier le lavage des mains est, qu’en raison de leur susceptibilité d’être impures au 2e degré, le cohen s’habituera ainsi à s’abstenir d’oblation avant de se laver ; mais n’y a-t-il pas à invoquer la crainte qu’elles soient humectées et deviennent alors impures au 1er degré? On le sait par comparaison d’a fortiori : si, pour un homme purifié ce jour, le contact interdit par la Loi rend l’oblation seule impropre à la consommation ; il en sera à plus forte raison ainsi des mains, dont le contact n’est interdit que par les rabbins ; ou encore, la prescription rabbinique s’étend aux mains dans le but seul d’habituer le cohen à s’abstenir, en vue de l’oblation (comme il a été dit auparavant) — [Suit un passage traduit tr. Biccourim, II, 1 (t. III, pp.369 et 372-4)].

« Pour les saintetés, dit la Mischnâ, on doit prendre un bain. » Chaque fois qu’il est question de bain légal, il faut une quantité de 40 saas d’eau. Mais n’est-il pas dit qu’il suffit d’un quart de loug si l’on se lave les mains pour la sainteté ? La 1re règle, dit R. Eliézer, s’applique à des mains notoirement impures ; la 2e, à des mains présumées pures (et qu’on lave par précaution). Selon R. Hanina, fils de R. Hillel, on peut même dire que, dans l’un et l’autre cas il s’agit de mains pures, ou dans l’un et l’autre cas d’impures ; seulement, au premier cas, il s’agit d’objets sacrés par eux-mêmes (p. ex. des sacrifices), et au 2e cas il s’agit de profane traité au degré de pureté de la consécration. — « Pour l’eau de purification, est-il dit, si les mains sont devenues impures, tout le corps l’est. » Selon R. Hanania, ce n’est pas à dire qu’il en est ainsi à la naissance d’une impureté comportant la purification par l’eau d’aspersion ; mais il a été entendu qu’en étant seulement impur légèrement (des mains), c’est autant qu’une impureté grave (et le bain est exigible). R. Jacob b. Aha au nom de R. Eléazar interprète ces mots (Nombres, XIX, 9) : Et elle sera recueillie (la cendre de la vache rousse) par un homme pur ; ce dernier terme (superflu) indique que de toute façon, eût-on recueilli la cendre dans une poêle, la Loi déclare cet homme pur. Comment opérera-t-on ? S’il s’agit d’un récipient en métal, l’homme devrait être impur, puisque de simples vases en métal sont susceptibles d’impureté, étant contaminés par cette cendre ? S’il s’agit d’un récipient de bois (qui intrinsèquement n’est pas susceptible d’impureté), il doit encore y avoir propagation d’impureté, parce que la cendre n’a pas de maintien indépendant (comme elle rend ce vase impur, l’homme qui le tient deviendrait impur) ? On peut admettre, dit R. Oschia, qu’il s’agit du cas où l’on a recueilli la cendre sur une large planche. Mais encore en pesant sur le bois qui la supporte ne donne-t-elle pas l’impureté au porteur ? On peut répondre à cela, dit R. Judan père de R. Matnia, qu’il s’agit du cas où on l’a recueillie sur une grosse poutre, μελαθρóν (en raison de son poids, celui de la cendre est nul). R. Aba b. Mamal demanda en présence de R. Amé : d’où vient la différence entre un homme pur au point de vue de l’eau d’aspersion (qui ne pourra la transporter au-delà d’un cours d’eau qu’en entrant dans cette eau) et un récipient pur destiné à recevoir cette eau de lustration (transportable sans difficulté) ? Elle est déduite, répondit R. Amé, de ce qu’il est dit (ib.) : un homme pur la recueillera ; le mot pur (superflu) indique qu’il faut une plus grande pureté à l’homme chargé de ce transport, égale à l’eau ou à la cendre de lustration. R. Yossa dit au nom de R. Simon b. Lakisch : l’action de mouvoir un reptile, que je n’ai pas déclarée comme rendant impur, entraînerait ici l’impureté (en raison de la gravité du cas actuel).

6. Si l’on prend un bain légal avant de manger du profane, en ayant l’intention de ne rien manger d’autre, c’est insuffisant pour manger de la dîme ; si le bain a été pris en vue de la dîme seule, il est insuffisant pour manger de l’oblation ; si l’on a pris un bain en vue spéciale de manger de l’oblation seulement, c’est insuffisant pour une autre sainteté; un bain spécial pris pour cette dernière est insuffisant pour l’eau de l’aspersion. Mais en ayant pris un bain pour une série plus sévère, on peut manger du moins grave. Enfin, si l’on s’est baigné sans but légal, le bain ne comptera pas.

Est-il besoin d’appliquer (le bain)en vue du profane ? Non, mais on a voulu établir une extension et dire que, tout en ayant pris un bain légal en vue de manger seulement du profane, il est défendu de manger de la dîme. Mais R. Éléazar n’a-t-il pas dit qu’il y a le même nombre de degrés (1 et 2) pour le profane et pour la dîme ? (Pourquoi donc y a-t-il une distinction ?) Il y a une différence pour le manger, non pour le contact. Si l’on prend un bain légal sans aucune destination, il servira à tout; selon R. Yohanan, il en est ainsi lorsque le bain était nécessité par toutes les saintetés, et au moment d’avoir les pieds dans l’eau l’homme se proposera d’avoir la pureté exigible pour chacune d’elles. On a enseigné ailleurs : « lorsqu’un bâton creux contient des liquides impurs, il est pur dès que l’extrémité inférieure a été trempée à l’eau (par contact) ; tel est l’avis de R. Josué ; selon les autres sages, il faut le tremper en entier. » Or, R. Simon b. Lakisch expose que la discussion a seulement lieu pour une impureté secondaire, et, pour une impureté grave, R. Josué exige aussi un bain entier. Selon R. Yohanan, la discussion de la Mischnâ est applicable aussi à une impureté grave. L’avis de Resch Lakisch n’est-il pas contesté par l’enseignement qui dit qu’au moment d’avoir les pieds à l’eau l’homme se proposera d’avoir la pureté exigible pour chaque sainteté à son choix ? (N’en résulte-t-il pas que ce contact d’eau suffit?) C’est vrai lorsqu’on a mangé ou bu de l’impur (c’est moins grave qu’une impureté directe, qui exigerait un bain entier). Mais R. Jacob b. Zabdi ou R. Abahou n’a-t-il pas dit au nom de R. Simon b. Lakisch qu’en mangeant ou buvant de l’impur, le corps reste pur sans qu’il soit nécessaire d’aucune application ? (Comment donc dire qu’en un tel cas le contact de l’eau suffit ?) L’application est inutile lorsqu’on a déjà adonné sa pensée à une pureté d’ordre supérieur. N’y a-t-il pas une Mischnâ opposée à l’avis de R. Simon b. Gamaliel, disant : «Si dans un bain ayant juste 40 saas 2 hommes rentrent ensemble se baigner, ils seront purs ; mais si l’un rentre après l’autre, le 1er seul sera pur, non le second (la parcelle d’eau enlevée par le 1er rend le bain insuffisant) ; selon R. Juda, si les pieds du premier touchent encore à l’eau, le second sera pur (en raison de la jonction de l’ensemble). » (Comment donc justifier ce dernier avis, selon R. Simon b. Lakisch, qui attribue même à R. Josué l’exigence d’un bain entier pour une impureté grave) ? Là aussi, fut-il répondu, il s’agit du cas où l’on a mangé ou bu de l’impur (ce n’est qu’une impureté légère). N’y a-t-il pas une autre mischnâ opposée à l’avis de R. Simon b. Lakisch, disant : « Une femme menstruée peut rincer un radis dans l’eau d’une caverne (qui, en raison de son attenance au sol, ne propage pas l’impureté), et ce radis restera pur ; mais si en le retirant de la caverne, elle laisse une goutte d’eau sur ce radis, il deviendra impur par son contact (par celui de la femme menstruée) ; » et il a été dit à ce sujet : R. Juda le déclare pur au nom de R. Josué, si peu qu’il touche encore à l’eau (on suppose une jonction complète avec le sol) ; or, la menstrue n’est-elle pas une impureté grave (pourquoi R. Josué le déclare-t-il pur) ? En effet, il y a là opposition évidente à l’avis de R. Simon b. Lakisch, d’après lequel ce cas spécial ne serait pas maintenu.

7. Les vêtements d’un homme du peuple sont considérés comme impurs par pression (au 1er degré) pour les Pharisiens (soucieux des lois) ; les vêtements de ceux-ci sont impurs au même degré pour les mangeurs d’oblation ; les vêtements de ces derniers sont impurs au même degré pour ceux qui mangent des saintetés ; enfin les vêtements de ceux-ci sont aussi impurs pour ceux qui aspergent l’eau de pureté. Joseph b. Yoézer était l’homme le plus pieux du sacerdoce; et pourtant sa nappe était tenue pour impure s’il s’agissait de manger des saintetés. Yohanan b. Godgoda a mangé toute sa vie dans un état de pureté digne des consécrations, et pourtant sa nappe a été considérée comme impure à l’égard de l’aspersion d’eau purifiante.

R. Yossa dit au nom de R. Yohanan : c’est en cas de contact aux vêtements qu’ont lieu les impuretés par pression énoncées dans la Mischnâ. R. Zeira demanda devant R. Yossa : comment le vêtement d’un pharisien (un homme soucieux de pureté) peut-il être devenu impur par compression ? Il est possible, répondit R. Yossa, que la femme d’un homme du peuple se soit assise dessus à nu (l’entachant de son corps). Samuel b. Aba demanda devant R. Zeira : puisqu’il est admis en général que, pour le profane, l’action de remuer de l’impur n’entache pas, cet acte provoquera-t-il l’impureté par le contact ? Et de même, bien que le transport d’une impureté n’entache pas pour le profane, est-il effectif (propageant l’impur), s’il y a un contact ? (Question non résolue). R. Samuel, frère de R. Oschia, dit que R. Jérémie demanda : si une femme impure est assise sur un siège et le touche de son corps, le rend-elle impur ? Certes, fut-il répliqué, et en tous cas, il y a eu, soit transport (déplacement en s’asseyant), soit contact. Mais voici sur quoi porte la question : faut-il que la majeure partie ait été transportée, pour que le meuble soit impur, et de même faut-il avoir touché la plus grande partie, pour qu’il y ait transmission réelle d’impureté ? (Point non résolu). — Est-ce que le corps d’un pharisien est considéré à l’égal d’un gonorrhéen pour l’oblalion (en la rendant impure par compression, ou en la remuant), ou s’agit-il exclusivement des vêtements? On peut résoudre cette question, dit R. Yohanan, à l’aide de ce qu’il est dit : « Si on laisse un homme du peuple dans sa maison pour la garder, aussi longtemps que le maître de maison (pur) peut voir ceux qui entrent et sortent, on ne déclarera impurs que les mets, les liquides et les ustensiles d’argile ouverts ; mais les couches, les sièges, et les vases d’argile entourés d’une clôture hermétique restent purs. » Or, si notre mischnâ considérait le corps d’un pharisien à l’égal d’un gonorrhéén pour l’oblation, même les vases d’argile hermétiquement clos devraient être tenus pour impurs (c’est donc que le corps seul n’entache pas). Il est possible, dit R. Juda b. Pazi, qu’il s’agisse là d’un homme du peuple par rapport à un pharisien, et l’on ne peut rien conclure de là (pour l’oblation). R. Mena dit que son maître R. Yossa s’est exprimé ainsi : tout ce qui a été dit là s’applique à l’oblation ; et ce qui le prouve, c’est qu’il est dit à la fin de cette même mischnâ : si même le gardien est impotent au point de ne pas marcher sans être porté, ou s’il était attaché à une place, tout sera impur ; or, il ne peut en être ainsi qu’en raison de la crainte que quelqu’un ait soulevé un de ces objets (cette crainte n’est réelle que pour l’oblation). En outre, R. Yohanan dit que pour l’oblation il n’y a pas à se préoccuper, ni de ce qui forme séparation, ni s’il y a de l’impureté par l’acte de remuer, ni si elle subsiste dans une propriété privée, ni enfin de la personne même d’un homme du peuple (mais seulement de ses vêtements). Si l’oblation elle-même a touché la sainteté, sera-t-elle jugée à l’égal de l’attouchement d’un gonorrhéén ? (procédera-t-on de même ?) On peut résoudre cette question d’après ce qui est dit : Avant de couper un cylindre pour y renfermer des saintetés, il faut prendre un bain légal, tant celui qui le coupe que celui qui le baignera ; on comprend que le bain était imposé à celui qui coupe (il est forcé de le toucher) ; mais au lieu d’y toucher pour le baigner, ne peut-on entourer la poignée d’un corps étranger (évitant un contact direct) et être dispensé en ce cas d’un bain préalable? On peut supposer, fut-il répondu, que dès l’instant où on l’a coupé, on se proposait aussi de le baigner (et l’on a pu manquer de soin, dans l’intervalle, en raison de la prévision de ces divers bains). Est-ce que l’objet même de la sainteté, mis en contact avec l’eau de lustration, sera jugé à l’égal de l’attouchement d’un gonorrhéen? On peut résoudre ce point à l’aide de ce qu’il est dit : Si 2 cruches, dont l’une a le degré de pureté pour la sainteté et l’autre celle nécessaire à l’oblation se trouvent mises en contact, elles restent pourtant pures toutes deux ; et il n’y a pas de contradiction avec cette règle, à opposer de ce qu’il est dit ailleurs : « Si une cruche d’eau de lustration touche à une autre cruche de sainteté, ou d’oblation, la première est considérée comme impure »; car il est admissible que la cruche pure d’eau de lustration ait été remuée par la salive ou le sperme de quelqu’un assez pur pour l’oblation ; ce serait là la cause d’impureté de la première, tout en restant pure pour l’oblation, ou pour d’autres saintetés (mais entre celles-ci il n’y a pas de distinction; par conséquent aussi, la sainteté ayant tombé à l’eau de lustration n’est pas affectée).

Chapitre III

1. Il y a plus de sévérité pour les consécrations que pour l’oblation, en ce que pour celle-ci on peut avoir un vase dans l’autre au moment de leur faire prendre à tous deux un bain légal; ce n’est pas permis pour d’autres saintetés. Le côté extérieur, l’intérieur ou l’anse d’un vase sont considérés comme distincts (ne propageant pas l’impureté au vase entier), s’il s’agit d’oblation, non pour d’autres saintetés. Celui qui porte un objet devenu impur par compression peut transporter de l’oblation (dans un récipient, sans crainte du contact), non d’autres saintetés; de même, les vêtements de ceux qui mangent de l’oblation dans les dites conditions d’impureté par pression sont impurs pour d’autres saintetés. En outre, les procédés pour celles-ci ne sont pas les mêmes pour l’oblalion : l’ustensile destiné à recevoir une sainteté devra être d’abord délié, puis essuyé, enfin trempé dans le bain légal, puis être de nouveau rattaché, tandis que pour l’oblation on peut attacher ensemble les objets avant de les baigner.

R. Hiya, au nom de R. Yohanan, justifie cette gradation, en ce que les consommateurs d’oblation (les prêtres) ont plus de souci d’une grande pureté que les consommateurs de saintetés (parfois de simples israélites). Mais, objecta R. Hanania devant R. Mena, est-ce là une supériorité ? Si en présence de 2 objets égaux on déclare l’un impur et l’autre pur, le 2e a un avantage ; mais il n’en est pas de même si l’on estime moins soucieux les consommateurs de saintetés ? Il peut s’agir du cas où l’on est forcé de manger du sacré (n’ayant rien autre). R. Ila dit au nom de R. Yohanan : si le vase impur (à baigner à l’intérieur d’un autre) pèse une livre (litra), on ne le baignera pas dans un autre (mais à part). Aba Saül dit : pour l’oblation, on ne met pas non plus un vase dans l’autre afin de les baigner, à moins que le contenant soit un panier portatif, ou un grand panier d’osier, γυργαθός. Selon R. Yohanan, cet avis d’Aba-Saül et celui de R. Simon exprimé plus loin sont au fond les mêmes ; or, il a été dit ailleurs : si l’on tient un homme ou des ustensiles en les baignant, ils restent impurs (l’eau n’est pas parvenue au point de contact de la main) ; mais s’il a d’abord mis les mains à l’eau (en contact avec le bain entier), tout sera pur ; selon R. Simon, il faut de plus relâcher la prise, de façon à laisser l’eau arriver. Toutefois, dit R. Yohanan, l’identité n’est pas complète entre ces 2 avis, et il semble que R. Simon se range à l’avis d’Aba-Saül, sans que l’inverse ait lieu (Aba-Saül admet qu’un mouillage préalable suffit). Les rabbins de Césarée au nom de R. Yohanan disent que l’avis d’Aba-Saül sert de règle, et c’est ce que dit aussi un enseignement.

R. Yôna dit : l’énumération de notre Mischnâ doit être conforme à R. Meir ; car, selon les autres sages, on n’agira pas seulement ainsi pour l’oblation, mais aussi pour les consécrations, et ils ne distinguent pas entre l’anse d’un ustensile sacré et l’intérieur, le tout devant être réglé comme le côté interne. R. Yôna au nom de R. Hiya b. Aba raconte que sept anciens entrèrent dans la vallée de Rimmon pour fixer le calendrier de l’année (par embolisme), savoir R. Meir, R. Juda, R. Yossé, R. Simon, R. Néhémie, R. Eléazar b. Jacob et R. Yohanan le cordonnier ; ils ont dit combien les saintetés ont de degrés supérieurs à l’oblation : selon R. Meir, il y en a 13 ; selon R. Yossé, 12. R. Meir dit avoir entendu énoncer le chiffre de 13 par R. Akiba. R. Yohanan le cordonnier lui répliqua : j’ai plus servi R. Akiba debout (en passant) que tu ne l’as servi assis régulièrement, et je ne lui ai pas entendu dire cela. On a dit de ce R. Yohanan d’Alexandrie qu’il doit exprimer la vérité. Malgré ces discussions, on se séparait à l’amiable en s’embrassant ; et si l’un n’avait pas de manteau, son compagnon coupait la moitié du sien pour le lui offrir. Ce qui les poussait à agir ainsi, c’est que chacun expliquait de 7 manières diverses ce verset (Isaïe, V, I) : Je veux chanter à mon bien-aimé un chant d’amour à sa vigne. On loua fort le dernier d’entr’eux, pour la façon remarquable d’interpréter ces mots; c’était, dit-on, R. Simon b. Yohai. Pourquoi étaient-ils pressés de déterminer le calendrier (dès leur arrivée à la vallée de Rimmon) ? C’est qu’ils tiraient une déduction du rapprochement de ces versets (Exode, XXXIV, 17 et 18) : Tu ne te feras pas d’idoles de métal fondu, puis : tu observeras la fête des azymes ; c.-à-d. dès que l’on est à même de fixer le calendrier de l’année, si l’on n’agit pas de suite, on commet un crime égal à l’idolâtrie. Au moment de quitter la vallée, ils cherchèrent un moyen de laisser un souvenir de leur passage ; ils aperçurent une roche de marbre ; chacun d’eux prit un clou et l’enfonça aussi aisément que dans une pâte. En souvenir de ce fait merveilleux, cette roche porte encore le nom de pierre aux clous.

R. Yohanan dit : ce que la Mischnâ dit de l’anse d’un vase est aussi bien applicable au côté interne qu’à l’externe, dernier mode qu’affectionnent les gens soucieux de propreté. R. Zeira observa que l’on ne sait pas au juste de quel cas il s’agit : il ne saurait être question de mains bien sèches, puisqu’alors il n’y a pas de propagation d’impureté, ni du cas où le vase est plein de liquide, puisqu’alors ne pouvant s’empêcher de toucher le liquide on rend aussitôt le tout impur ; il doit s’agir du cas où le revers est en partie mouillé par le liquide (et où le contact peut produire l’impureté). Selon R. Yohanan au nom de R. Baniah, on comparera le contact mouillé de l’anse à celui qui qui surviendrait dans la salle d’abattoir du Temple ; et comme il a été dit ailleurs qu’en un tel cas de liquide répandu dans le parvis les objets restent purs aussi longtemps qu’ils restent en place, et qu’ils deviennent susceptibles d’impureté lorsqu’ils en sortent, de même ici, le liquide ne touchant que la place même de l’anse n’a pas de caractère contagieux, mais il reprend sa vertu de propagation rendant impur lorsqu’il quitte cette place. R. Simon dit au nom de R. Josué b. Lévi : si un objet humecté à l’abattoir quitte ce lieu, il est susceptible d’impureté. Mais n’a-t-on pas dit que, tout en étant portées au dehors, les consécrations restent sacrées et échappent à la propagation de l’impur par l’eau ? R. Yossa dit que R. Simon lui-même a répondu, ou selon R. Hinena, R. Simon a répondu au nom de R. Josué b. Lévi : il s’agit là du cas où, après avoir été portée au dehors, la victime égorgée a été ramenée à l’intérieur (malgré le séjour momentané au dehors, elle reste sacrée). Si un liquide sacré se trouvant dans la partie supérieure du parvis devient impur par contact et s’écoule au dehors, R. Aba et R. Aboun b. Hiya émettent 2 avis à cet égard : d’après l’un, la partie maintenue sur place reste pure, et ce qui est au dehors devient impur; d’après l’autre, le tout reste pur par l’effet de la première impulsion de pureté. Toutefois, dit R. Aha au nom de R. Zeira, le liquide dans la salle d’abattoir reste pur s’il est devenu impur par contact à des mets (à un degré inférieur) ; mais si c’est par contact d’un ver (impureté légale), la propagation sera réelle. On a dit ailleurs : pour, tout vase, il faut tenir compte du côté externe, de l’intérieur et de l’anse ; selon R. Tarfon on distingue seulement l’anse pour une grande huche de bois ; selon R. Akiba, la distinction est applicable aux coupes ; selon R. Méir, elle s’applique aux mains, soit pures, soit impures ; enfin, selon R. Yossé, elle est applicable aux mains pures seules, ce qu’il entend ainsi : d’après R. Méir, si les mains sont impures et l’extérieur de la coupe est pur, qu’une goutte de liquide tombe à l’extérieur de la coupe et que cette main qui a touché saisisse l’anse, il est certain que le liquide n’est pas devenu impur par la main au point que le contact de l’anse rende la coupe impure (les craintes ne vont pas si loin) ; mais l’on se demande si, de ce que le liquide n’est pas tenu pour impur par contact de la main jusqu’à entacher la coupe, ce même liquide ne sera pas entaché par la main au point de ne pas rendre impur ailleurs un pain ? On résout cette question à l’aide de ce qu’une braïtha dit : Si à des liquides purs placés sur le sol un pain impur a touché, celui-ci les a rendus impurs. Or, on entend par là qu’il peut y avoir encore une propagation d’impureté par le liquide à d’autres objets ; de ce qu’il est question de liquide à terre, on conclut qu’il n’en est pas de même du liquide au dos d’une coupe, et si l’on a eu du liquide à la main (si elle a été mouillée), puis l’on a saisi l’anse, le liquide ne sera pas devenu impur au contact des parois impures de la coupe (on ne craint donc pas qu’il y ait contact entraînant la propagation d’impureté). Si d’autre part un liquide touche la main qui saisit l’anse, dira-t-on aussi qu’il n’a pas été rendu impur par le dos de la coupe, jusqu’à rendre impure la main qui la saisira ? On peut résoudre ce point à l’aide de ce que dit la fin du même enseignement : Si au liquide impur placé à terre un pain pur a touché, il devient impur par là ; or il est seulement question de pain, non de la main (celle-ci donc ne serait pas entachée). D’après R. Yossé, on entend ainsi la distinction établie au sujet de l’anse. si les mains sont pures, l’extérieur de la coupe impur, que du liquide mouille la main, et que celle-ci prend l’anse, il va sans dire que le contact humide ne sera pas entaché par la coupe au point de rendre la main impure ; mais si l’on ne craint pas cette propagation, en résulte-t-il aussi que le liquide ne sera pas contaminé par l’extérieur de la coupe au point de rendre un pain impur ailleurs ? On peut résoudre ce point de ce qu’il est dit : si au liquide impur sis à terre un pain pur a touché, celui-ci devient impur ; or, l’impureté s’est propagée de façon à rendre le pain impur, parce que l’eau est à terre, non si elle était sur la main. Si cependant le liquide a mouillé la coupe et que l’on saisit l’anse, dira-t-on, malgré cela, que le liquide ne sera pas contaminé par la main au point de rendre la coupe impure ? On peut résoudre ce point de ce qu’il est dit : si un liquide impur se trouve à l’anse de la coupe, dès que l’on y touche, la coupe dont la paroi est pure devient impure par contagion de l’anse.

« Celui qui porte un objet devenu impur par compression, dit la Mischnâ, peut transporter l’oblation, non d’autres saintetés. » Il en est ainsi, dit Aba au nom de R. Juda, à cause du fait survenu un jour : comme un tonneau se trouvait tout à coup troué, un impur le boucha de sa sandale (et l’entacha par pression). R. Zeira ou R. Yossa dit au nom de R. Éléazar : si par mégarde (ou oubli) on en a porté ainsi, l’objet sacré reste pur (n’ayant pas été touché). C’est conforme à ce que dit R. Eléazar : selon les uns, il est interdit en principe de le porter, et en cas de fait accompli, l’objet devient impur ; selon d’autres, c’est seulement défendu en principe, et en cas de fait accompli, l’objet reste pur. N’en résulte-t-il pas, observa R. Zeira devant R. Mena, une solution à la question posée plus haut (II, 7), de savoir si le corps de celui qui mange de l’oblation égale un gonorrhéen par rapport aux saintetés, ou si l’interdit s’applique seulement aux vêtements? Or, s’il en était de même du corps, on devrait aussi déclarer l’impureté en cas de transport accompli indûment ? Ceci ne prouve rien, fut-il répondu, car on peut supposer qu’il s’agit de quelqu’un forcé de manger des saintetés (sans autre aliment, et dès lors il a toujours soin d’être en état pur). — « Les procédés pour les saintetés, est-il dit, ne sont pas les mêmes pour l’oblalion. » Pour les premières, on délie les ficelles qui rattachent les parties ; on essuie avec soin les trous par où ces ficelles tenaient, et après le bain légal, on rattache le tout ; tandis que pour l’oblation, on laisse le lien pour le bain légal, car ceux qui mangent de l’oblation ont souci de la pureté, et auront soin d’ouvrir à moitié le lien pour que l’eau pénètre. Ce détail ne peut pas être confié à tous ceux qui mangent des saintetés (parfois secondaires) ; ils ne sont pas tous soucieux de ce soin, et n’ouvriraient pas les liens à moitié (ils sont donc tenus de tout défaire).

2. Des ustensiles achevés à l’état pur doivent être mis dans un bain légal avant de servir aux saintetés ; c’est inutile pour l’oblation. Le vase joint tout ce qu’il contient (en cas d’impureté d’une partie), s’il s’agit de sainteté, non pour l’oblation. Un objet impur même au 4e degré est impropre à la consommation si c’est une sainteté ; mais pour l’oblation, il n’est impropre qu’au 3e degré. Pour celle-ci, lorsqu’une main est devenue impure, l’autre reste pure ; tandis que pour les saintetés, il faut en ce cas les baigner toutes deux, car alors une main est réputée communiquer l’impureté à l’autre, ce qui n’a pas lieu pour l’oblation.

On a enseigné : il est arrivé à une femme, après avoir tissé une étoffe à l’état de pureté, d’aller consulter R. Ismaël pour savoir si son état pur suffit. Autant que je sais, dit-elle, l’étoffe n’est pas devenue impure ; mais je reconnais ne m’être pas toujours appliquée à la garder de tout contact. Il la pressa de diverses questions, si bien qu’elle reconnût qu’au moment de ses menstrues il lui arriva de traîner le tissu après elle par une corde de communication. R Ismaël s’écria alors : combien nos sages sont prudents d’avoir dit : « des ustensiles achevés à l’état pur doivent pourtant être baignés, etc. » Une autre fois une femme tissa une nappe à l’état pur, puis elle alla consulter R. Ismaël pour savoir si cela suffit : Je sais, dit-elle, que ce linge n’est pas impur ; mais je ne me suis pas toujours appliquée à le garder. Pressée de questions, elle finit par déclarer qu’un jour, un fil s’étant rompu, elle l’a rattaché avec la bouche au moment de son impureté (et elle l’a rendu impur par sa salive), R. Ismaël dit alors : combien nos sages sont prudents d’avoir prescrit que « des ustensiles achevés à l’état pur doivent pourtant être baignés avant l’usage sacré. » Avant de couper une partie de cylindre consacré, celui qui le coupe et celui qui le baignera devront d’avance prendre un bain légal ; on comprend que le bain soit imposé à celui qui le coupe (il est forcé de le toucher) ; mais pourquoi est-ce obligatoire pour celui qui le baignera ? Au lieu d’y toucher pour cela, ne peut-on pas entourer la poignée d’un corps étranger (évitant un contact direct) pour le baigner? On peut supposer, fut-il répondu, que dès l’instant où on l’a coupé, on se proposait aussi de le baigner (et dans l’intervalle de temps, on a pu manquer de soin en raison de la prévision de ces divers bains).

R. Josué b. Lévi dit : jusque là (où la Mischnâ parle de jonction par le vase), il s’agit de sainteté du sanctuaire (d’ordre supérieur) ; mais à partir de là, il s’agit de profane établi au même degré de pureté que les saintetés générales. R. Yohanan dit : l’aptitude du vase de « joindre ce qu’il renferme » émane du témoignage de R. Akiba, comme il a été dit ailleurs : aux objets énumérés, R. Akiba ajoute que si un homme venant de se baigner en ce jour (d’une pureté incomplète) a touché à une partie de la fine farine (destinée au culte), ou à l’encens, ou aux parfums, ou aux charbons qui en font partie, il rend le tout impropre au service (la jonction a lieu même sans vase creux). R. Simon b. Lakisch dit : on savait déjà que les ustensiles sacrés ont le privilège d’opérer la jonction fictive ; mais R. Akiba est venu attester que même les restes des offrandes de farine se joignent au point de vue de l’aptitude du service. La raison en est, dit R. Yossa b. R. Zemina au nom de R. Yohanan, qu’en principe il a fallu les placer dans un vase qui joignait le tout. Selon R. Aha ou R. Ila au nom de R. Yossa, on savait aussi que la jonction opérée par le récipient se reporte sur les reliquats d’offrande ; et R. Akiba est venu attester qu’entre les aliments, la farine, l’encens et les parfums sont en ce cas comme joints (et susceptibles d’impureté). On comprend qu’il y ait à se préoccuper des reliquats de farine, ou d’encens, ou de parfums ; mais pourquoi des charbons (qu’on balayait au conduit d’égoùt) ? Il peut s’agir, explique R. Aboun b. Cahana, des charbons du jour de grand pardon, car en ce jour la même poèle servait à les enlever de l’autel et à en remettre ; tandis qu’il n’en était pas de même des charbons de tous les jours, comme il a été enseigné : lorsqu’une quantité de charbons de la valeur d’un cab se trouvait dispersée de l’autel, on les balayait au conduit de l’eau ; le samedi, on les couvrait par un grand vase, Ψύχτηρ. Selon R. Malnia, il peut s’agir de n’importe quel charbon resté avant l’enlèvement ; et comme il n’y a pas de mesure à l’égard de la farine, de l’encens et des parfums, car la jonction formée par le vase opère plus tard le maintien de cette cohésion ; il en sera de même en tout pour les charbons.

R. Aboun b. Hiya demanda : si, pour offrir une poignée de farine on l’a présentée en 2 vases, qu’arrivera-t-il ? Quoi, répliqua R. Hanin, n’est-il pas dit que le vase sert toujours à joindre le contenu ; on ne saurait admettre l’hypothèse d’une offrande régulière de la farine divisée en 2 vases pour cette poignée, en présence de l’expression « le vase joint. » Ceci ne prouve rien oppose R. Éleazar du midi, puisque R. Yossé b. R. Zemina a dit au nom de R. Yohanan, que les reliquats d’offrande sont considérés comme joints entr’eux en raison de leur jonction originaire dans les vases, et c’est précisément ici le cas de l’emploi des 2 vases. D’autre part, R. Matnia fit observer que la farine, l’encens, le parfum, passent forcément par plusieurs vases, et pourtant il est dit à leur égard : « le vase les joint » (au point de vue de la propagation de l’impureté) ; il en sera donc de même ici pour l’expression « le vase joint » à l’égard du reliquat de farine. Cahana demanda aux rabbins de Babylone : si, après avoir divisé en 2 une offrande de farine mise dans un grand vase, l’une devient impure, l’autre l’est-elle aussi par le fait de sa place ? Oui, répondirent-ils, l’impureté se propage. Est-ce à dire que l’impureté saute, puisqu’il n’y a pas de contact ? Oui, répondirent-ils, y eût-il même un corps étranger entre ces 2 parties. Par suite de cette jonction fictive, est-il permis d’utiliser les 2 parties en prenant la poignée ? Nous n’avons pas entendu formuler de tradition à cet égard ; mais il y a une Mischnâ qui dit : Si 2 offrandes de farine dont on n’a pas encore prélevé la poignée sont mêlées (se touchent), aussi longtemps qu’il y a de chaque côté une quantité suffisante à la prise de poignée, elles restent valables ; si non, elles sont impropres au culte, bien que les restes de l’une touchent à l’autre (donc la jonction est admise aussi pour la prise de poignée). R. Jacob b. Aha ou R. Yassa vint dire au nom de R. Yohanan ; il est permis d’utiliser pour une poignée 2 parties séparées se trouvant dans le même récipient ; et si l’une est devenue impure, l’autre le sera aussi, sauf s’il y a une autre partie au milieu (en ce point, il diffère des rabbins). Mais n’a-t-on pas enseigné que des mots une coupe (Nombres, VII, 14) on déduit que tout son contenu est un (tout est joint) ? Non, dit R. Hinena, le vase ne réunit que ce qui lui est attaché (d’un de ses côtés, non le milieu). R. Simon b. Lakisch demanda : est-ce que le déchet de pâte provenant de l’offrande, en devenant impur, est susceptible de constituer à son tour des degrés d’impureté ? Non, répondit R. Eléazar, puisqu’il est écrit (Lévit. XI, 3-4) : tout aliment qui pourra être mangé, sur lequel sera survenu de l’eau, est susceptible d’impureté ; donc, ce qui a le caractère contagieux par l’eau peut transmettre l’impureté à d’autres objets, non ce qui n’a pas été mouillé par l’eau (comme le déchet de pâle). Mais, objecta R. Juda, est-ce que la charogne d’un oiseau pur ne rend pas les aliments impurs, bien qu’il n’y ait pas eu d’appropriation par l’eau, ni d’autre impureté? C’est qu’elle finira par constituer une impureté grave. Quelle est en somme la règle pour le déchet d’offrande de farine? On déduit du verset (précité), de tout aliment qui peut être mangé, que si l’impureté provient d’un aliment (liquide), elle se propage ; si non, elle ne se propage pas (et le dit déchet est en ce cas).

R. Yonathan dit au nom de Rabbi : si quelqu’un mange d’un aliment impur au 3e degré à l’égard de l’oblation, le corps devient impropre à manger de l’oblation (sans bain, mais il n’est pas défendu de la toucher). Sur quoi R. Samuel b. R. Isaac demanda : est-ce à dire que cet avis de Rabbi est conforme à R. Eléazar seul de cette Mischnâ, disant : Si l’on mange une impureté du 1er degré, on est impur à ce degré ; si l’on mange du 2° degré, on l’est au 2e, comme si l’on mange du 3e degré on est impur au 3e, selon R. Eléazar, tandis que R. Josué ne partage pas tout-à-fait cet avis ; or, se peut-il qu’en cas de discussion l’avis de H. Josué ne prédomine pas ? Non, fut-il répondu, Rabbi peut même adopter ce dernier avis ; et s’il est vrai qu’ici il déclare inapte à manger de l’oblation celui qui aurait mangé du 3e degré, c’est pour habituer le cohen à s’abstenir d’oblation au moindre doute. De même, si en ayant mangé de ce qui est impur au 2e degré pour la dîme, le corps devient-il impropre à manger de la dîme ? On peut résoudre ce point de ce qu’il est dit : Les autres sages interdisent de manger (sans avoir pris le bain préalable) pour la 2° dîme. Il n’avait pas entendu l’explication de R. Samuel au nom de R. Zeira sur l’opinion des sages qui interdisent la dîme, savoir que l’impureté du corps le rend impropre à manger de la dîme (tandis qu’ils permettent de la toucher). De même, si l’on a mangé de ce qui est impur pour la sainteté au 4e degré, le corps devient-il impur au point de ne plus pouvoir manger de la sainteté ? On le déduit de ce qu’il est dit : Selon R. Jérémie au nom de R. Aba b. Mamal, l’homme en deuil est considéré comme ayant mangé du 4e degré d’impureté pour la défense de manger des saintetés ; donc, en un tel cas, on est impropre pour cette consommation. Ainsi, l’on connaît l’interdit s’il s’agit de saintetés faisant partie du sanctuaire ; en sera-t-il de même du profane traité pour la pureté à l’égal du sacré ? On peut le savoir de ce qu’il est dit : Si en égorgeant un animal domestique, ou une bête sauvage, ou un oiseau, il n’est pas sorti de sang, l’égorgement suffit, et on peut en manger sans se laver les mains, puisqu’il n’y a pas eu de contact mouillé par le sang, qui les approprie à devenir impurs ; selon R. Simon, l’égorgement les approprie à cet effet (et il faudra se laver au préalable). Selon R. Eléazar, au nom de R. Oschia, cette Mischnâ parle de profane traité à l’égal de la sainteté (où l’on tient compte même du 3e degré). C’est ainsi que R. Josué, R. Zeira, R. Yassa, R. Yohanan, ou R. Yanaï au nom de Rabbi dit que si l’on a mangé de l’impur au 3e degré pour l’oblation, le corps devient inapte à en manger. Mais une Mischnâ ne dit-elle pas formellement que pour avoir mangé du 3e degré, le corps est impur au 2e pour la sainteté ? Cette Mischnâ parle des saintetés faisant partie de ce qui est offert au sanctuaire ; et l’extension de cet enseignement consiste en ce que, même pour le profane traité sur le pied d’égalité des saintetés, le corps devient alors impropre à en manger. En effet, dit R. Aboun b. Hiya devant R. Zeira : la Mischnâ dit aussi que, pour les pains du sanctuaire mis au frais dans des fosses, l’eau de ces fosses sera comme sacrée (et si l’un d’eux devient impur, tout le reste, sans l’intermédiaire de l’eau, sera impur au 2e degré) ; or, il ne saurait te déplaire d’apprendre par là quelle est la règle pour le profane traité sur le pied d’égalité de la sainteté, que p. ex. le liquide dans la bouche est considéré à l’égal d’un liquide de consécration. Ainsi R. Zeira dit : comme il a été déclaré ailleurs que la pureté pour le sacrifice de péché devra égaler en sévérité celle des eaux de lustration et des cendres de la vache rousse ; de même ici, le liquide de la bouche sera considéré à l’égal de la consécration même (pour les degrés de pureté). R. Zeira, R. Yassa, R. Yohanan, R. Yanaï ne savaient plus si c’est au nom de Rabbi, ou d’une façon anonyme, que l’on a énoncé l’enseignement, d’où l’on peut déduire la confirmation d’un avis, ou son infirmation (selon la manière de l’expliquer) : Elle le confirme si on l’entend en ce sens qu’un 3e degré devient un 2e au point de vue des saintetés, non de l’oblation, lorsque le profane a été traité comme pureté d’oblation ; mais s’il s’agissait d’une pureté de consécration, il est douteux que le corps qui a consommé de l’impur au 3e degré, le soit au 2e par rapport à la sainteté. Elle l’infirme, si on l’entend en ce sens qu’un 3e degré devient un 2 pour la sainteté, non pour l’oblation traitée comme de la sainteté ; quant à la fin de cet enseignement, on entend qu’au cas où le profane est traité pour la pureté comme de l’oblation, le corps devient impur au 2e degré, inapte à manger de l’oblation et à plus forte raison impropre pour les saintetés, plus graves (il y a donc, en ce sens, à compléter les termes).

R. Yossé a enseigné : pour des saintetés jusqu’au 4e degré d’impureté, le corps est inapte à consommer du sacré, par déduction a fortiori ; car si un homme qui s’est baigné en ce jour et dont le pardon manque (il ne sera déclaré pur qu’à la nuit) est apte à manger de l’oblalion, mais ne l’est pas assez pour la sainteté ; à plus forte raison, si le 3e degré d’impureté rend le corps impropre à manger de l’oblalion, il constituera à son tour un 4e degré interdit pour de la sainteté. Donc, on connaît l’interdit du 3e degré d’après un texte biblique (le verset relatif au bain, avec pureté définitive au soir), et celui du 4° degré par un raisonnement a fortiori. On peut opposer à cela, dit R. Yohanan, que l’aliment touché par celui qui a pris un bain le même jour devient inapte à la consommation, si c’est de l’oblation ; et pourtant cela ne va pas jusqu’à rendre une sainteté impropre en la touchant à son tour (ce 3e ne forme pas de 4e ; la déduction précédente n’est pas absolue). R. Hanaoia dit au nom de R. Yohanan que l’avis de R. Yossa est conforme à celui de R. Akiba son maître : comme celui-ci déduit ailleurs de l’expression il rend impur, qu’un pain impur au 2e degré propage l’impureté au 3e degré du profane ; de même ici R. Yossé le déduit d’après une base légale. Aussi R. Abahou dit au nom de R. Yossé b. Hanina que R. Yossé n’a pas besoin d’invoquer ledit raisonnement par a fortiori, puisqu’il tire cette déduction d’un verset (Lévit. VII, 19) : La chair qui touchera, soit un 2e degré impur qui a touché au premier, à tout objet impur, c.-à-d. un 3e degré ayant touché au 2e, ne devra pas être mangée ; même ce qui touche à cette dernière impureté ne devra pas être mangé (s’il s’agit de sainteté). — Par la déduction précédente tirée de l’expression il rend impur, on sait la règle pour les aliments devenus impurs à l’atmosphère d’un vase d’argile devenu lui-même impur au contact de l’impur; mais quelle est la règle pour les aliments eux-mêmes devenus impurs directement par un ver ? On le sait par a fortiori : puisque des vases, qui ne deviennent pas impurs à l’air d’un vase d’argile contaminé par un ver, le deviennent au contact d’un ver, au point d’entacher à leur tour des aliments par leur contact ; à plus forte raison les aliments eux-mêmes, contaminés par un ver, rendront à leur tour impurs les aliments qu’ils loucheraient. Voilà le procédé de R. Akiba. Quant à R. Ismaël, on a enseigné: le texte (précité) la chair qui louche à tout objet impur vise un 1er degré provenant d’une impureté capitale, et l’expression ne sera pas mangée s’applique au 2 degré ; quant au 3e degré pour l’oblation, on le déduit par a fortiori : puisque celui qui s’est baigné le même jour ne rend pas le profane inapte à la consommation par son contact, mais entacherait en ce cas l’oblation, à plus forte raison un 2e degré d’impureté, qui entache le profane, entache aussi l’oblation ; et de même pour le 4° degré, s’il s’agit de sainteté, puisque le contact de celui qui s’est baigné le même jour et manque encore de pardon (dont la pureté est incomplète) ne rend pas l’oblation impropre au manger par son contact, mais entacherait en ce cas la sainteté, à plus forte raison un 3° degré d’impureté, qui par son contact entache l’oblation, rendrait la sainteté impropre au manger (en faisant un 4e degré). On a donc déduit le 1er et le 2e degré du texte biblique, le 3e par la logique, le 4e par a fortiori. Mais peut-on déduire un raisonnement a fortiori d’un autre semblable? (L’argument du 3e degré interdit pour l’oblation étant déduit ainsi, comment l’employer à fixer l’interdit du 4e degré pour la sainteté ?) En fait, le tout est soumis à une règle sinaïtique, savoir que le 3e degré impur est impropre pour l’oblation, et le 4e pour la sainteté (et lesdits raisonnements ne servent qu’à la confirmer).

« Pour l’oblation, dit la Mischnâ, si une main est devenue impure, l’autre reste pure. » Toutefois, son contact rendrait la sainteté impure (et communiquant aussi l’impureté), selon Rabbi; R. Yossé b. R. Juda dit qu’elle rendrait la sainteté impropre (sans aller au delà). Est-ce à dire que Rabbi suit l’avis de R. Josué exprimé dans cette Misehnâ : tout ce qui rend l’oblation inapte au manger rend les mains impures en faisant d’elles un 2e degré (d’impureté), et si une seule main est devenue impure, celle-ci par contact rendra l’autre impure, selon l’avis de R. Josué (contrairement aux autres sages) ? Non, car l’avis de R. Josué est plus sévère que celui de Rabbi, puisque celui-ci admet la propagation d’impureté par contact d’une main à l’autre pour la sainteté seule, tandis que R. Josué professe cette opinion même à l’égard de l’oblation. R. Simon b. Lakisch dit : il n’est question ici que de l’autre main (du même individu), non de celle d’une autre personne ; selon R. Yohanan, il en est de même aussi pour une autre personne. R. Jérémie ou R. Amé dit au nom de R. Yohanan que si cette main touche même un pain, elle le rend impur ; puis on dit que R. Yohanan renonça à cet avis, reproduit par R. Jérémie. Cette renonciation se conçoit, car auparavant il était seulement question de déclarer impur le pain touché ; or, comme il vient d’être dit, « tout ce qui rend l’oblation inapte au manger rend les mains impures, en faisant d’elles un 2e degré d’impureté », il s’agit des mains seules, et, pour le pain touché, tous reconnaissent qu’il n’est pas entaché, en raison de la règle qu’un 2e degré ne peut pas constituer à son tour un 2e degré.

3. Il est permis de manger, avec des mains non lavées spécialement, des aliments profanes secs, en même temps que l’oblation ; ce n’est pas permis pour les saintetés. Un homme en deuil ou un homme pur à qui il manque le pardon, doivent se baigner pour manger des saintetés, non pour l’oblation.

R. Hanania b. Antigonos objecta : comment peut-il être question d’aliments secs « pour les saintetés » ? (Celles-ci, par leur caractère, ne sont-elles pas toujours aptes à l’impureté, comme mouillées ?) Il s’agit ici du cas où l’on pique un gâteau d’oblation à la broche (sans contact immédiat), pour le mettre à la bouche, et en même temps on mange un morceau de chair profane, avec des mains non lavées ; il faut alors que celle-ci soit sèche (sous peine de contact pouvant entacher l’oblation), mais ce n’est pas permis pour la sainteté. On a enseigné ailleurs : si l’on mange un gâteau de figues d’oblation sans se laver les mains, et que l’on met la main à la bouche pour en retirer un caillou ou corps étranger qui s’y est glissé, selon R. Méir, ce contact mouillé rend le gâteau impur ; selon R. Josué, le tout reste pur (la salive, selon lui, n’est pas un liquide). Hiskia ajoute : R. Méir déclare que, par suite de ce contact mouillé, le gâteau sera impur, parce qu’il s’agit d’un aliment par lequel l’humidité survenue au doigt est avantageuse ; mais, pour tout autre aliment, où l’humectation ne sert pas, celle-ci n’est pas un agent de propagation. Selon R. Yohanan, la discussion entre R. Méir et R. Juda est aussi bien applicable au gâteau de figues qu’à tout autre objet (il ne tient pas compte de ce que l’humeclation sert parfois). La même Mischnâ (au commencement) est en opposition avec l’avis de Hiskia : si un homme impur pour avoir touché au cadavre d’un mort (impureté capitale donnant le 1er degré) a des aliments et de la boisson dans la bouche, et qu’en cet état il passe la tête dans l’air d’un four pur, il le rend impur ; de même si un homme pur ayant des aliments et de la boisson dans la bouche passe la tète dans un four impur, il devient impur. Or, on comprend le rôle de la boisson impure en ce cas (le liquide donnant et recevant l’impureté) ; mais si on l’admet aussi pour les aliments, n’est-ce pas à cause de la propagation du liquide de la bouche ? (n’en résulte-t-il pas qu’il en est ainsi pour tout aliment?) On peut répondre que là aussi il s’agit, soit d’un gâteau gras (déjà humide), soit des aliments déjà appropriés (humectés) avant d’avoir été mis à la bouche. Est-ce que notre Mischnâ ne conteste pas l’avis de R. Yohanan, en disant qu’il est même permis de manger, avec des mains non lavées spécialement, des mets profanes, en même temps que l’oblation, non avec des saintetés » ? (En mettant les mets à la bouche, ne mouille-t-on pas les doigts, ce qui expose l’oblation à l’impureté ?) On peut répondre qu’en jetant les aliments à la bouche, on ne s’expose pas à se mouiller (ni à entacher l’oblation). Mais pourquoi alors ne pas permettre la jonction du sacré ? On craint que, par oubli, on ne touche la bouche. Pourquoi n’éprouve-t-on pas ensuite cette crainte pour l’oblalion ? C’est que les consommateurs d’oblation (prêtres) ont l’habitude de prendre souci de la pureté, et ils n’oublieront pas ; tandis que cela peut arriver aux consommateurs de saintetés (secondaires), moins soucieux. On a enseigné ailleurs : le prêtre en deuil (pour un décès du même jour) peut toucher aux saintetés, non en offrir, ni participer au partage pour en consommer le même soir ; comment donc se fait-il que là il lui soit permis de tomber, tandis que notre Mischnâ le défend avant d’avoir pris un bain? C’est qu’ici, dit R. Yanaï, on craint que la préoccupation du deuil lui ait fait détourner la pensée du sacré (le cohen doit donc se baigner), tandis qu’ailleurs on suppose qu’il n’y a pas eu de détournement de pensée. Si notre Mischnâ craint un moment d’oubli ayant pu causer une impureté, elle ne devrait pas dispenser du bain pour l’oblation ? C’est qu’il en est de ce point selon ce qu’a dit R. Jérémie au nom de R. Aba b. Mamal : en vue d’un manger d’aliment sacré, le corps impur au 3e degré peut constituer un 4e degré (gravité supérieure à celle de l’oblation). Il en résulte que si en cet état on mangeait du sacré, ce serait un 4e degré, qu’il est interdit de manger, mais il est permis d’y toucher ; de même au prêtre en deuil il est défendu d’en manger, non d’y toucher. On a enseigne ailleurs : les Schammaïtes disent qu’une femme se levant de couches (bien qu’elle ait pris un bain de purification après les semaines de couches) devra prendre un bain au dernier jour (80°) de la période de pureté ; les Hillélites la dispensent de ce second bain. Or, sur quel point porte leur discussion ? S’il s’agit de manger l’oblation, on ne s’explique pas l’avis de Schammaï, puisqu’elle égale celui qui aurait pris un bain en ce jour, lequel peut manger de l’oblation après le coucher du soleil (sans une nouvelle attente) ; s’il s’agit au contraire de consommer des saintetés, on ne s’explique pas l’avis de R. Hillel, car il manque encore à cette femme le pardon par les offrandes, et notre Mischnâ ne prescrit-elle pas le bain en ce cas ? On ne peut pas non plus supposer que la discussion portant sur la consommation de l’oblation, Schammaï craint un moment d’oubli pouvant causer de l’impureté, et Hillel ne le craint pas ; et en ce cas on expliquerait le commencement de la présente Mischnâ (qu’en cas d’omission du pardon, il faut un bain pour la sainteté), selon l’avis unanime de tous, en faisant porter la discussion sur la fin qui parle de l’oblation ; comment alors admettre qu’il soit question d’oblation seule ? Il faudrait dire alors que ceci et l’enseignement énoncé ailleurs au commencement est de l’avis de de tous, portant la discussion sur la fin. R. Samuel b. Abdima dit devant R. Mena (au sujet de la question susénoncée, sur quel point porte la discussion), qu’il s’agit de manger de l’oblation; et l’opinion sévère de Schammaï (de prescrire un nouveau bain) a pour but d’éviter que les gens ignorants ne disent avoir vu une femme observer encore un jour les prescriptions de pureté du sang, puis manger de l’oblation le soir (mais, en droit strict, le bain n’est pas exigible).

4. Pour l’oblation il y a une gravité spéciale : en Judée, chacun est digne de foi si, pendant le cours de l’année, il déclare que le vin ou l’huile est pur (pour les offrandes), et pendant l’époque de la compression, de la vendange ou de la cueillette, on est aussi digne de foi pour l’oblation ; mais une fois cette période de temps passée, si l’on apporte au cohen un tonneau devin d’oblation, il ne devra pas le recevoir (de crainte d’impureté), et il faudra le laisser de côté jusqu’à la prochaine époque de cuvaison. Mais si le simple israélite déclare y avoir réservé un quart de long pour une sainteté, on ajoute foi à sa déclaration de pureté (en raison de la gravité de la consécration). Si (au moment de leur faire prendre un bain légal) on a mêlé des cruches de vin ou d’huile profane avec d’autres sacrées, ou d’oblation, on pourra ajouter foi à celui qui les déclare pures au moment de la cuvaison, ou de la compression, et même 70 jours avant cette époque (temps des préparatifs).

« En Judée, chacun est digne de foi », est-il dit. Donc on ne l’est pas autant en Galilée. C’est que, dit R. Simon ou R. Josué b. Lévi au nom de R. Padiéh, entre ces 2 provinces il y a comme séparation la zone de terre occupée par les Cuthééns. Mais n’a-t-on pas objecté à l’enseignement que la deuxième station du dépôt d’huile est Ragab au delà du Jourdain, qu’elle est séparée de la Palestine par la zone de terre des Cuthééns (et l’huile serait exposée à devenir impure) ? Il peut s’agir, répond R. Siméi, du cas où l’on tire de là des olives, que l’on pile (dont on fera l’huile) en Judée. En cette province, on est digne de foi pour le vin, non pour la pureté des cruches ; tandis qu’en Galilée on n’est digne de foi ni pour l’un, ni pour l’autre. R. Simon dit au nom de R. Josué b. Lévi : si un homme du midi prétend avoir apporté du vin ou de l’huile de la Galilée, il est digne de foi ; si un galiléen prétend l’avoir apporté du midi (ou Judée), on ne le croit pas (c’est peu probable). — R. Jérémie a cru devoir dire que lorsque la Mischnâ déclare tous dignes de foi pendant l’époque de la vendange, c’est lorsqu’il s’agit d’oblation traitée avec autant de pureté que la sainteté ; mais si elle est seulement considérée comme elle-même (en oblation), cela ne suffit pas. Non, dit R. Yossé, même en ce dernier cas, on est digne de foi. Une Mischnâ est opposée à cet avis de R. Yossé, en disant : Selon R. Méir, il suffit d’avoir vu les vendangeurs aller à la caverne se baigner, pour être certain de la pureté ; R. Yossé prescrit de rester auprès d’eux jusqu’après l’accomplissement du bain (de crainte d’inexécution) ; comment donc dit-on ici qu’on leur ajoute foi même au point de vue de la pureté d’oblation ? Dans cette mischnâ, fut-il répondu, il s’agit d’une époque qui n’est pas celle des vendanges. Est-il possible de parler de raisins mis à la cuve en dehors de leur temps (ajournement admissible seulement pour la compression des olives) ? On peut admettre, dit R. Isaac b. R. Eliézer, qu’il s’agit du moment qui précède celui où 3 propriétaires au moins vendangent leur vigne (et un vigneron, s’y prenant d’avance, fait baigner ses ouvriers). — Comment se fait-il que si des objets purs touchent les cuves ou les pressoirs au moment des vendanges ou de la cuvaison, le tout reste pur, et qu’après cette période même le pur devienne impur? Est-il admissible qu’un vase d’argile (un de ces ustensiles), après avoir été pur, devienne impur par le simple fait d’une période de temps ? N’est-il pas au contraire formel que tout état reste en sa présomption première, sans devenir pur s’il était impur, ni à l’inverse? Voici comment il faut l’entendre: lorsque des objets purs ont touché aux cuves ou pressoirs pendant qu’ils étaient pleins, ils restent purs ; et s’ils étaient vidés, les purs deviennent-ils impurs? Or, se peut-il qu’un vase d’argile pur devienne spontanément impur, contrairement à la présomption ? Voici donc quelle est la question : si des objets purs ont touché à ces ustensiles lorsque ceux-ci étaient vides, ils deviennent impurs ; mais si c’était lorsque ces ustensiles sont pleins, époque des grands travaux, le contact laisse le tout pur ; or, comment un vase d’argile, après avoir été impur, peut-il être pur ? C’est en effet la présomption première qui domine. — [Suit un passage traduit tr. ’Eroubin, IX, 4 (t. IV, p.292)]

R. Yanaï dit : selon l’avis des jeunes maîtres, il s’agit ici d’oblation traitée pour la pureté comme les saintetés, mais si elle est considérée comme elle-même (en oblation), c’est insuffisant ; tandis que selon moi, même en ce dernier cas, on est digne de foi. Donc, l’avis analogue énoncé ci-dessus par R. Yossé est conforme à ce qu’a dit ici R. Yanaï, et l’avis précédent de R. Jérémie s’accorde avec celui des « jeunes maîtres ».— « Si le simple israélite déclare y avoir réservé un quart de loug pour une sainteté, il est digne de foi » ; et aussi bien qu’on le croit pour la sainteté (en fait de pureté), on le croit aussi pour l’oblation. — « Si l’on a des cruches de vin ou d’huile mêlés », est-il dit ensuite. On entend par là, dit R. Yossé b. R. Aboun, les cruches où l’on a fait un mélange indù.

5. À partir de la localité de Modiin et plus à l’intérieur, on ajoute foi à la déclaration du potier disant que ses vases d’argile sont purs ; mais à partir de cette localité et en deçà vers l’extérieur, on ne le croit pas. Voici comment: si le potier vend de sa fabrication, on le croit pour lui et pour ses marchandises, ainsi que les acquéreurs compétents ; s’il sort, on ne le croit pas.

6. Les percepteurs du Trésor qui sont entrés dans une maison, et même des voleurs qui ont rendu les ustensiles volés, sont dignes de foi pour ce qu’ils déclarent n’avoir pas touché ; à Jérusalem, tous sont dignes de foi pour la sainteté, et au moment d’une fête (en présence de la foule d’arrivants), on les croit aussi pour l’oblation.

Lorsque la Mischnà dit (§ 5) que la déclaration des potiers est digne de foi, il s’agit de petits vases d’argile ; et ce qui le prouve, c’est que la Mischnâ même dit à la fin « si le potier vend de sa fabrication, on le croit pour lui et ses pots, ainsi que les acquéreurs ». Or, les pots sont des objets minces (et il s’agit d’analogues). Ce qui est dit du contact de la pureté pour la localité de Modiin et en deçà, s’applique seulement au vase, non à ce que l’ignorant aurait déclaré y mettre pur ; et si c’est un liquide, le vase entier devient impur. S’il était plein d’eau (d’avance), selon R. Simon b. Lakisch, le potier sera digne de foi, pour la pureté du vase, non pour le contenu liquide ; selon R. Yohanan, il sera digne de foi pour l’un et l’autre. La Mischnâ (§ 4) n’est-elle pas opposée à l’avis de R. Simon b. Lakisch, en disant : « Si l’on déclare avoir réservé un quart de loug pour une sainteté, on est digne de foi? » (Pourquoi ne pas le croire aussi pour l’oblation?) Il peut s’agir du cas, répond R. Zeira, où cet homme déclare l’avoir réservé lorsqu’il était devenu compagnon (très pur). Selon les rabbins de Césarée au nom de R. Aboun b. Hiya, R. Simon b. Lakisch n’est pas d’avis d’ajouter foi au potier, si le vase est plein d’eau, parce qu’il n’y a pas lieu de tenir compte du compagnonnage de pureté pour l’eau.

En principe, les percepteurs (juifs) entrant dans une maison (§ 6) sont impurs ; et bien qu’il y ait des païens avec eux, on peut les croire s’ils disent être entrés sans toucher à rien. Ce n’est pas une contradiction avec notre mischnâ (qui ne parle pas de la présence d’étrangers), parce que l’on peut l’expliquer de 2 manières différentes : On les croit s’ils disent être entrés sans toucher lorsqu’il y a des témoins notoires ; et à Jérusalem on les croit pour les saintetés, s’il y a même des témoins qui les accusent d’avoir touché. Quant à la fin de notre mischnâ (parlant de Jérusalem), on l’explique autrement : l’avis qu’on les croit s’ils disent être entrés sans toucher à rien, était inutile à énoncer, et l’on en parle pour dire que, malgré l’attestation des témoins qui les ont vus entrer, on les croit s’ils disent n’avoir pas touché ; à Jérusalem, on les croit même pour la sainteté, et y eût-il des témoins qui les ont vus. R. Josué b. Lévi explique ce verset (Ps. CXXII, 3) : Jérusalem, cité par excellence, centre de toutes les réunions, en ce sens que cette ville fait de tous ses habitants des compagnons instruits (purs). S’il en est ainsi, elle devrait avoir ce privilège toute l’année? Non, dit R. Zeira, en raison de la suite (ib. 4), là montèrent les tribus de Dieu ; elle indique qu’il en est seulement ainsi pendant la présence des tribus (aux fêtes).

7. Si quelqu’un (un compagnon pur) ouvre un tonneau de vin, ou se met à débiter de sa pâte, au commencement d’une fête, il pourra, selon R. Juda, continuer et achever la vente après la fête ; les autres sages l’interdisent. Aussitôt que la fête était passée, en débarrassait le parvis pour le purifier ; mais si elle cessait un vendredi, on n’opérait pas ainsi de suite, étant occupé à honorer (préparer) le sabbat ; selon R. Juda, on ne débarrassait pas non plus un jeudi, les cohanim n’ayant pas le temps (ils étaient occupés à enlever les cendres).

R. Hanania dit au nom de R. Yohanan : R. Juda permet d’achever, même après la fête, autorisant la fin en raison du commencement (pendant la fête) ; car, s’il était défendu d’achever plus tard, on ne commencerait pas pendant la fête. Qu’importerait si l’on ne commençait pas? On diminuerait la joie de la fête. R. Samuel b. Nahman dit au nom de R. Nathan : la discussion a lieu pour un tonneau de vin (qui se gâterait) ; mais pour un tonneau d’huile, tous reconnaissent qu’il sera défendu de l’achever plus tard (il se conserve). Que fait-on du reliquat, selon les autres sages? R. Hiya enseigne de le verser à terre ; B. Kappara prescrit de le briser (déclarant même le tonneau impur). R. Halafta b. Saül dit au contraire de le conserver pour la prochaine fête (où la présomption de pureté revient). — R. Simon dit au nom de R. Josué b. Lévi (au sujet de l’enlèvement) : Si le dernier jour de la fête est un vendredi, on pourra le lendemain samedi consommer ce qui reste de la fête dans le même état présumable de pureté. En effet, dit R. Zeira, une braïtha dit formellement que la veille de la Pâque est considérée à l’égal du jour même de fête, ou le jour d’égorgement qui suit la fête de Pentecôte (en raison de leur jonction à la solennité). Nous avons aussi appris une plus grande extension à ce sujet, dit R. Hanania, puisque, « selon R. Juda, on ne débarrassait pas non plus le parvis un jeudi, les cohanim n’ayant pas le temps en ce jour » (la présomption de pureté persiste donc aussi longtemps que les ustensiles sacrés sont présents).

8. Comment procédait-on à la purification du parvis ? On faisait passer au bain légal les ustensiles se trouvant au Temple, en avertissant (les simples cohanim) de ne pas toucher à la table sacrée, ni au chandelier, sous peine de les rendre impurs. Tous les ustensiles du Temple s’y trouvaient en double ou triple, de façon à ce que si les premiers deviennent impurs on en ait d’autres purs sous la main. Tous les ustensiles du Temple devaient subir le bain légal, sauf l’autel d’or et celui de cuivre, assimilés au sol (non susceptibles d’impureté). Selon R. Eliézer, les autres sages motivent la dispense, parce que les autels sont couverts de plaques en métal.

Mais est-ce que les ustensiles sacrés ont besoin d’un bain ? Il se peut, observe R. Aba, qu’un de ces ustensiles n’ait pas été aspergé par l’eau de lustration (pour être tout-à-fait pur). S’il en est ainsi (que l’on éprouve cette crainte), on devrait le craindre pour tout (même p. ex. pour la table, qu’il est impossible d’enlever et de baigner) ? On peut supposer, dit R. Aboun b. Hiya, qu’un des prêtres, causant à une femme au sujet des nids d’oiseaux qu’elle sera tenue d’offrir lors de son prochain état de pureté, a eu son vêtement contaminé par un peu de salive tombée de la bouche de cette femme, et lui à son tour rend impur ce qu’il touche. Mais encore pourquoi n’éprouve-t-on pas cette crainte pour tout ? On admettra, fut-il répondu, que le cohen a été atteint par un liquide douteux (dont on ne sait s’il est pur ou non) ; et, par suite, l’interdit rabbinique n’est applicable qu’aux vases aisés à baigner. N’a-t-on pas enseigné ailleurs : «en cas de doute, le liquide rend impur en cas de contact direct, non par intermédiaire » ? Là, il s’agit d’oblation (il faut un contact direct), et ici il s’agit de saintetés, pour lesquelles on est plus sévère. On a enseigné : si la table du Temple est devenue impure, on la purifie en son temps par le bain, (lorsqu’elle sera débarrassée), bien que ce soit un jour de sabbat, dit R. Méir; selon les autres sages, on y procédera de suite. Il se trouve donc que si l’on adopte l’avis de R. Méir (de respecter la perpétuité de présence des pains de proposition sur la table) on rendra 2 pains impurs (le dernier laissé sur la table impure, au moment de l’échange contre des nouveaux, et le nouveau remis); selon les autres sages, il n’y en a qu’un d’impur (par le retrait et le bain immédiats). Selon R. Jacob b. Sisi en présence de R. Yossa, même d’après l’avis de R. Méir, un seul pain serait impur en ce cas, si l’on admet par contre qu’il s’agit seulement d’une impureté par liquide douteux. Un jour, comme le chandelier fut soumis à la purification, les Sadducéens dirent (en raillant) : « voyez les Pharisiens soumettant bientôt le globe du soleil à l’eau lustrale. »

On a enseigné ailleurs : ils entrèrent dans la pièce de réserve des vases sacrés, et ils en firent sortir 93 ustensiles d’or et d’argent. Ce nombre, dit R. Samuel b. Nahman au nom de R. Jonathan, vise les 93 mentions du nom divin qui se trouvent dans les livres prophétiques d’Hagée, Zakharie et Malakhi. R. Houna dit les avoir comptées et n’avoir trouvé le nom divin que 83 fois, selon les 83 signatures énoncées au livre d’Ezra; car chacun proclamait l’unité de Dieu au moment de signer. Selon les uns, le plus grand nombre d’ustensiles sacrés était mis en réquisition au 1er jour de la fête des tentes, à l’usage des 13 taureaux, 14 agneaux, 2 béliers et un bouc. — R. Schilô, du village de Tamara, dit au nom do R. Yohanan : R. Éliézer traite l’autel à l’égal du sol, non susceptible d’impureté, parce qu’il est dit (Genèse, XXX, 3) : tu le couvriras d’or pur, etc. etc,; le texte biblique le considère donc comme adhérent au sol. On sait par là comment il faut traiter l’autel d’or ; mais comment le sait-on pour l’autel d’holocauste ? On le déduit par raisonnement : si l’autel d’or qui n’a qu’une coudée carrée, est égal au sol, à plus forte raison il en est de même de l’autel d’holocauste, qui a 5 coudées carrées. Selon d’autres, parce qu’ils ont tous deux pour analogie d’être carrés, ils sont aussi traités tous deux à l’égal du sol. Selon R. Ila, les autres sages ne partagent pas cet avis, parce qu’il est dit (Ézéchiel, XLI, 22) : l’autel était un bois haut de 3 coudées; par cette désignation de bois, la Bible nous le montre comme un objet mobilier (susceptible d’impureté). C’est vrai pour l’autel d’holocauste. Mais d’où le sait-on aussi pour l’autel d’or ? On le déduit par raisonnement : si l’autel d’holocauste qui a 5 coudées carrées est considéré comme objet mobilier, à plus forte raison l’autel d’or, qui n’a qu’une coudée carrée, l’est aussi. Selon d’autres, en raison de l’analogie d’être tous deux carrés, ils sont aussi mobiliers tous deux. Les sages déclarent les autels susceptibles d’impureté, parce que ceux-ci sont couverts. Mais n’est-ce pas un placage incapable de se soutenir seul ? R. Simon b. Lévi n’a-t-il pas dit au nom de R. Oschia que ce placage était aussi mince qu’un dinar de Gordianus ? Aussi R. lia dit : l’autel n’est pas fait en vue de son œuvre, laquelle s’accomplit seule. C’est conforme à ce qu’a dit Resch Lakisch sur ces mots (Exode, XXX, I) : tu, feras un autel, etc. ; il n’est pas dit « qui encensera », mais « où l’encens fume »; c’est l’autel qui le fait fumer. Pourquoi ne pas le traiter à l’égal d’une table (tabella), devant laquelle on passe sans la déplacer? Or, R. Amé n’a-t-il pas dit au nom de R. Simon b. Lakisch que la table est parfois susceptible d’impureté, vu qu’on la sort et la montre aux arrivants pour la fête, tandis que l’autel ne bouge pas de place ? C’est qu’il sert parfois à recevoir les vases sacrés. Malgré cela, il pourrait rester pur ; pourquoi non? C’est conforme, dit R. Mena, à ce que l’on a dit ailleurs : il y a trois dépôts d’ordures ; et ceux du fumier ou de la paille rendent impur, parce qu’on y emploie aussi la corde utilisée pour le culte ; de même ici, pour l’autel, comme la corde sert à tous ces objets, il y a susceptibilité d’impureté (par contagion de la corde).