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Le Jardin sacré
Hortulus Sacer


AuteursDatesTypeLieuThèmesStatut
? Melchior Douzetemps1732Littérature (herm.)FranceHermétisme
Alchimie
Christianisme
Non applicable

► On trouve ce recueil de poésie hermétique en appendice du Mystère de la Croix de Douzetemps. Même si le recueil est anonyme, on a cru bon de faire de Douzetemps son auteur.

■ Nous avons corrigé les lacunes les plus évidentes du texte à l’aide du texte latin d’origine.

🕮 Ouvaroff, ref.124 (Mystère de la Croix).


Texte et traduction : du latin au français classique, André Savoret in L’Hortulus Sacer, 1952.

Pour consulter le texte latin d’origine, 𝕍 par ex. Le Mystère de la Croix, 1859. | bs. Bibliothèque nationale d’Espagne (Madrid, Espagne). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre

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Enclos sacré d’une fleur variant de coloris et de parfum

Par quoi l’âme accède des choses terrestres aux célestes, des corporelles aux spirituelles.

Au lecteur

Si tu lis mes vers d’un cœur froid, mes vers seront froids à ton cœur. Mais si c’est d’un cœur aimant, tu brûleras du même feu qui embrase ma muse et me consume d’Amour.

I. L’Oiseau dans la Cage

Le Seigneur prend soin de l’oiseau dans la cage en retour, l’oiseau apprécie et chante les dons du Seigneur.

II. La Pierre transmutatrice

Conduis-moi à la Pierre du Soleil, ô vierge Sophia, puisqu’en effet tu as coutume de te jouer avec tes disciples. D’aucuns cherchent la Pierre à la manière des sophistes. Pour moi, tu es la Pierre Lunifique et Solifique. Ta céleste chair est la Pierre Lunifique, et ton sang, ô Sophia, est la Pierre Solifique : la blanche et la rouge. Tu changes la mort en vie, la peine en joie, les ténèbres en lumière, tous les maux en biens, et la guerre en paix : tu compenses le labeur par le repos, l’affliction par la joie ô, Pierre admirable par le feu !

III. Le Christ renaissant

O Christ, je célébrerai ta gloire, tes hauts faits, tes mérites ; et j’honorerai les bienfaisants effets de ta vertu. Voici : Le Dragon gît, inanimé ! Tu triomphes de la mort : tes ennemis menaçants tombent devant ton sceptre ; les Lémures sont contraintes de retourner au ténébreux empire lorsqu’une étincelle de ta Lumière est faite chair. Né d’une semence incorruptible, le Fils de l’Amour veut habiter dans une humble demeure. Viens dans nos bras, ô le meilleur des Hôtes ! Ranime-moi de tes flammes, aimable Sauveur ! Liquéfie mon cœur, rénove mon âme et purifie mon esprit, afin que tu puisses dire de moi : voici le nouvel homme ! – un nouvel homme passant, par ta vertu, de la mort à la vie ; un nouvel homme, par le Don d’En-haut ! – O Amour, que tes feux sacrés repoussent les feux défendus ! Que notre étincelle brûle d’un feu pur ! Ravis-moi : Que je sois ton bien propre, et cela de droit paternel ! Vois ! j’agis librement en m’abandonnant à ta juridiction. Simplifie-moi, purifie-moi, sanctifie-moi, car la candeur, la droiture et la simplicité t’agréent. Que nulle amante ne me sépare jamais de ton amour. Que la foi sainte et l’Amour resserrent nos liens. Que je sois à toi, sois à moi ! À toi je me donne, me voue et me soumets ; donne-toi pareillement à moi : que je sois tien, que tu sois mien

IV. Colombe solitaire

N’est-il pas triste d’entendre les plaintes pitoyables de la Colombe : Sans toi, chaste, elle gémit ! Sans toi, accablée de douleur, elle périt !

V. Stupéfiant Amour de Dieu dans le Christ

Le Christ est le doux cœur du Père, la compassion absolue ; il est le pur abîme du divin cœur, l’Amour. Il est la paix inaltérable, l’eau vive, le salut, la clémence, la vertu, la Grâce ; le guide et le compagnon conduisant au Père éternel. Fait homme, il est descendu au fond des entrailles humaines afin de joindre les choses supérieures aux inférieures, les hautes aux profondes. Invincible, l’Amour se vainc ; le libre est lié ; le vainqueur est vaincu : la vie meurt en lui. O cruel Amour, trop acharné contre Toi-même ! Abstiens-toi de répandre un sang innocent ! Châtie le coupable. Pour laver entièrement les milliers de fautes volontaires du monde, une seule gouttelette de ton sang suffit : épargne-toi. Mais il ne s’épargne pas : voici que le sang coule, coule de tous côtés, jusqu’à ce que la cohorte toute entière soit lavée de tout crime. O œuvre sublime en hauteur, largeur, longueur et profondeur ! L’esprit stupéfait est accablé par ton prodige : Tu es la pleine Lumière ! le salut surabondant ! la vie perpétuelle ! Dans ton cœur clément, plonge mon cœur oppressé. O Agneau de Dieu, toujours en agonie, comme une victime perpétuelle – Victime sacrée s’offrant sans cesse au Père irrité ! – Fais, par ta mort, que ma vie soit pour toujours une victime sacrifiée avec toi à l’éternel Père ! Fontaine, sois ouverte aux âmes altérées ! nous serons rassasiés : en Toi, salut du genre humain, toute gloire est manifestée !

VI. Rien n’est à nous

Quoi ! tu t’appropries toutes choses ? Ce sont les miennes, dis-tu, aussi bien ceci que cela. O Homme ! Si toutes choses sont tiennes, qu’est-ce donc qui appartient à Dieu ?

VII. Baiser sacré de l’Amour : ÉCHO

Quelle voix inouïe frappe l’air et nos oreilles ? Une réalité. Et dans notre poitrine, quel est ce trouble : l’Amour. L’Amour, grand ami et bourreau, aux débuts insensibles. L’Agneau. Douce mélodie ! Ta bouche. Avec passion ? Patience ! Abrège ! Est-ce une prière ? je te prie de tout cœur. O Cœur. Ne rendras-tu pas heureux le cœur qui s’est voué à toi ? M’abandonnes-tu ? Mon souci me consume. Tu brûles. Non, mais je suis brûlé. Par tes demi-mots. Bis. Tu plaisantes injustement, Amour : Tu ne réponds pas bien. Tu promets. J’engage ma foi. De même. Foi sacrée ! Enfin tu as pitié. Tu seras. Alors, je serai satisfait si tu me donnes un gage d’Amour. De la bouche. Penché vers toi, je suis suspendu à ta bouche. O fardeau. Doux joug ! Fardeau léger ! je me tais, ne désirant rien de plus : je suis suspendu à tes lèvres : échangeons mille baisers.

VIII. Rien ne périt

O stupeur ! d’un tronc d’arbre calciné se tire le Sel : Du sel purifié, une eau spirituelle. Que les eaux subissent la coction du feu, il en renaîtra un sel qui sera d’un grand secours médical aux malades. Une énergie indestructible réside dans les sels : L’Art démontre que les arcanes du sel ont quelque chose de divin. La fin de toutes choses paraît être de la cendre. Mais il est dit que la fin de la cendre est un verre. L’Art fait ceci : pourquoi pas le Créateur de la Nature et de l’Art ? Si une terre vile nous a donné le verre, que nous donneront donc les Astres ?

IX. L’Amour restitue Tout

À celui qui est le plus puissant en vertu se doit une plus grande gloire. Serait-ce au Christ ou au Serpent ? Résous : la conséquence est claire. Si le Serpent a pu donner la mort à toutes choses, le sang du Christ n’a-t-il pas eu le pouvoir de vivifier toutes choses ? Plus fort que l’Enfer, plus fort que la colère est l’Amour ; la source éternelle plus forte que le feu. La lumière repousse les ténèbres, et la vie le trépas. Finalement, Amour vivifiera tout ce qu’il aura mortifié.

X. Sur le même sujet : le Lion et l’Agneau

Toi qui pardonnes aux ennemis et enseignes à leur pardonner, excusant leur ignorance et priant pour leur salut ; et qui commande de bénir qui maudit : Ton courroux sévira-t-il toujours sur le troupeau égaré ? Certes, comme un Lion, tu feras passer par le feu et par l’eau ces endurcis, jusqu’à ce que, lénifiés, purifiés, de bœufs ils deviennent brebis, de tigres, Agneaux, afin que tu paisses tes dociles brebis avec la douceur de l’Agneau.

XI. L’Amour Chasseur

Oiseleur impénitent, dressant panneaux et pièges, tu sais enlacer les âmes par des moyens admirables. La difficulté te stimule ; l’horreur de la prison ne t’effraie pas : Les fers n’entravent pas l’œuvre de l’Amour. Ouvre ton carquois, saisis une flèche, bande ton arc. S’il te manque une cible, frappe mon cœur. Ravisseur universel : aucun des petits renards qui ravagèrent notre vigne ne survit [Cant. c. 2, v. 15]. O rends-moi heureux, fais-moi jouir de la béatitude céleste ! Que ne puis-je devenir la proie étroitement serrée dans tes filets ! Épris d’amour pour toi, je me fais captif de l’Amour : Comme tu es pour moi le chasseur, que je sois pour toi le gibier !

XII. L’Amour Changeur

Je ne sais rien, je ne puis rien, je ne suis rien que l’ombre d’un nom : Toi, tu connais, tu peux, et es tout ensemble. Mon cœur est petit et pervers, le Tien est grand et saint ; mauvaise est ma volonté, mais la Tienne est bonne. Si le manque de profits ne Te détourne pas de faire l’échange : Prends ma volonté, donne-moi la Tienne ; ce que je Te livre est à Toi, Toi, en me donnant ce qui déborde de Toi, tu ne perds rien, tandis que pour moi c’est un gain immense. Lorsque, tout entier, je me livre à Toi, Tu ne reçois rien ; par contre, lorsque Tu Te donnes à moi, Tu es et m’es le souverain Bien. Si nous faisons ce mutuel échange, mon cœur de Ton amour, Ton cœur de mon amour s’embraseront : le bénéfice que Tu me procureras sera la gloire d’une vie bienheureuse, celui que je Te procurerai ne sera qu’un iota de tes louanges.

XIII. Philomèle. L’Amour

Les autres oiseaux gazouillent leur air. Toi seule, ô Philomèle, compose une mélodie mellisuave. Les passions autres rejettent les devoirs qui nous incombent : L’Amour qui dure jusqu’à la fin des siècles les vainc toutes.

XIV. L’Amour ailé. Le Navire

Comme l’un est emporté par un courant rapide, et l’autre par un vol prompt, quel à propos dans la rencontre navis, avis (nef, oiseau) ! L’esprit brûle de désirs si vifs que l’aile de l’Amour l’enlève aux Cieux.

XV. Par le Feu, à la Lumière

Aucune autre voie ne mène à la Lumière Poursuis ton chemin à travers le feu, où que te conduise l’Aimé : avec ce guide, tu seras en sûreté. Car le père de la Lumière est le feu : mais, quel que soit ce dont tu te dépouilleras dans le feu, tiens-le pour un gain inappréciable.

XVI. Union de l’âme avec Sophia

L’Épouse régit les eaux célestes ; l’Époux exhale le feu interne, autant que brûle un légitime Amour. La conjonction du feu et des eaux crée par cette semence la lumière. De là, l’un est dit le mâle de la vierge, l’autre, la vierge du mâle.

XVII. Dans la Bonne et Mauvaise Réputation. (2 Cor. c. 6, v. 8.)

À quoi te sert la bonne réputation, si JÉSUS n’est pas ton hôte ? Et s’il est ton hôte, en quoi te nuira la mauvaise renommée ? Que les orgueilleux m’accusent, me condamnent, me rejettent, me piétinent ; qu’ils affectent là mon propos des airs de supériorité, je n’en suis pas ému : pour moi, le Christ sera toujours, JÉSUS sera toujours la renommée, l’honneur, la louange, la gloire, la réputation.

XVIII. L’Éternité conçue, mais non comprise

Ici, nombre, spéculation, mesure, raison déterminante font défaut à la fois : toi-même, tu défailles. Évalue et suppute : observe, imagine, recommence, le vertige t’annihilera ; l’univers t’écrasera. L’Aeon des Grecs, l’Olam des Hébreux s’évanouissent ! L’esprit fait de vains efforts pour soulever un si pesant fardeau ; s’il s’obstine quand même, s’il lutte, il s’égare ce n’est point éternel : assurément il lui faut cesser. Que quelqu’un encore cherche, espère, demande, souhaite anxieusement ; ce n’est point éternel : et il manque toujours le but. Pour toi, ô Boëce, c’est la possession de la vie éternelle, à la fois pleine, entière et parfaite : j’approuve ce jugement. L’éternel Esprit d’Harmonie, qui délie les éternels Abîmes, est seul à en posséder les clés. À l’esprit pacifié, dégagé de tout le transitoire, il se révèle dans les profondeurs à la clarté de l’Amour. Quiétude immense et sans fin ; un seul Bien les renfermant toujours tous : un seul Bien indivisible et constant. C’est la vraie liberté, la paix véritable, les seules félicités de la vie, sans nulle peine ni lutte à soutenir. Il est dit, ô Agneau, que la vertu de ton sang répandu pacifie tout, réconcilie tous. Qui la goûte avec toi les épreuves passées, jouit d’une paix inexprimable : En vérité, ce qu’il expérimente, il le comprend !

XIX. De nous, à Dieu

Chasse les ténèbres, si tu veux être rempli de Lumière ; veux-tu ne pas être privé de Dieu ? Dépouille-toi de l’amour du Monde. Désespère de toi, du Monde, et de toutes choses créées : Ainsi, ton espoir demeurera bien fixé en Dieu seul.

XX. La Conscience parle

Comme personne ne peut se fuir, ni me fuir ; je témoigne à chacun que je suis le tribunal, trône de l’éternelle Puissance. Dénonciateur, j’énumère les fautes ; témoin, je les blâme, à la fois juge et bourreau. Le vengeur poursuit parfois d’un pied agile les coupables qui le fuient, mais moi j’aiguillonne tes entrailles et j’en compte les fibres une à une. Si tu pèches contre moi, je serai le boulet que tu traîneras. Le crime reçoit son châtiment en tous lieux. Suis-je dénonciateur : sois honteux ! Suis- je témoin : crains ! Suis-je juge : je te poursuis ! Sous mes coups : c’est la douleur Consulte-moi, reste à mon obédience, car je suis le plateau de la balance témoignant l’examen du juge éternel.

XXI. Dieu incompréhensible

Si quelqu’un va vers la Lumière inaccessible sans le flambeau qui émet la Lumière, il marche à l’aveuglette. La Lumière infinie accablera l’aveugle. Sans le flambeau de la foi, autant d’idées différentes tu te formes, autant d’illusions tu te fais sur la Déité ; autant de concepts qui te sont propres, autant de représentations mentales fallacieuses ; tout autant de Dieux tu imagines, tout autant d’idoles tu adores. Il appartient à la Majesté seule de se connaître. À la foi, appartient de croire. Crois : tu vois !

XXII. Laconiquement

Crains de pécher sciemment ; et prie le Pneuma sacré qui donne l’impulsion à ton sein : Renonce à tout et même à toi : C’est tout. L’Esprit manifeste à ton esprit haletant accomplira le reste et enseignera à ton cœur les sens mystiques.

XXIII. La Lettre tue ; l’Esprit vivifie

La lettre du Verbe écrit est une gaine et une écale ; sous l’une se cache un glaive et sous l’autre un noyau. Ouvre ton cœur, brise la noix : ainsi, la lettre du Verbe étant morte, le Pneuma sera ta vie et celle de ton cœur.

XXIV. Où est la vraie Religion ?

Mère de l’amour fraternel, elle nous inspire de l’aversion pour nous-mêmes. Elle a la foi pour compagne et la piété pour sœur. Éprise de paix, elle ne lutte contre personne ; elle chérit tous les hommes. Elle nous détache du Monde et nous rattache à Dieu. Aux pauvres, aux veuves, aux spoliés et aux prisonniers, elle tend sans répit des mains secourables. Ce que les mains ne peuvent fournir, le cœur et la bouche le donnent. Consolant les misérables et compatissante envers les coupables, elle se fait tout pour tous ; elle supporte volontiers les opprobres et les croix, souffre et meurt avec JÉSUS. Dis-moi où elle se montre telle ? Et je te dirai en retour : Le salut est là, avec la vraie religion !

XXV. Idolâtrie subtile

Celui qui met sa confiance en soi ou dans les choses créées se cherche soi-même, s’honore et s’aime, au- dessus de Dieu ; il se réjouit des dons et des bienfaits divins mais ne les attribue ni ne les rapporte à Dieu donateur. Celui-ci se fait des idoles mentales de son cœur et des choses créées, et leur rend un culte.

XXVI. Accomplissement final de toutes Choses en JÉSUS (De l’Allemand)

Les entrailles de la terre ont englouti Moïse, le Législateur [Deut. c. 34, v. 6]. Un char de feu a enlevé le zélé Elie [4 Reg. c. 2, v. 11]. Le Messie, ni la terre ne le recouvre, ni le feu ne l’a enlevé, mais une nuée l’a emporté [Act. c. I, v. 9-11], et une nuée, pareillement, le rendra quand cesseront l’ancienne Loi et le feu, tandis que Moïse et Elie seront couverts d’un vêtement aussi blanc que la neige, comme autrefois sur le Thabor. [Luc, c. 9, v. 30, 31] Alors, la vie s’écoulera douce et paisible, telle une eau limpide. Enoch [Gen. c. 5, v. 24] et les temps paradisiaques reviendront, – cet Enoch qui, longtemps à l’avance, préfigura JÉSUS, le Messie promis, – et l’image du Sauveur resplendira en tous.

XXVII. Le Lis instruisant les Mortels

O homme mortel [Job, c. 14, v. 2], toi qui passes à l’instar d’une fleur et qui, comme elle, te flétris pour retourner en poussière ; observe-moi, sortant du sol pour monter droit dans les airs. Examine mon stigmate trigone et mes anthères safranées. Considère la forme, la texture et la disposition de mes feuilles : combien grande est la vertu médicinale qui se cache en moi ! Aucun art ne peut imiter mon coloris ; aucun parfum ne peut égaler la fragrance du mien. Auprès de la mienne [Matt. c. 6, v. 29] la gloire de Salomon s’éclipse. Ma blancheur éblouissante est l’ornement de la chaste virginité. Or, je vis et je meurs, mais, de la mort, je renais encore : le printemps me rend la vie, mais l’âpre hiver me tue. Toi, Mortel, scrute cette vivante similitude : Apprends de moi à vivre chastement, et apprends à mourir. Ma vie est courte, la tienne est brève : méprise les choses caduques, et, avec moi, élève ta tête, de la terre, vers les cieux. Contemple-moi et aie pitié de toi nous disparaissons ensemble ! Si je péris, péris avec moi si je renais, renais avec moi. Lorsque je meurs, meurs à toi-même et aux créatures ; quand, sortant de la mort, je lève, relève- toi en même temps. Sois parfum agréable au Christ, par ta vie et tes mœurs, comme, spontanément, mon parfum monte à tes narines. je croîs et reverdis pour toi : feuillant, fleurissant, parfumant. Dans une nouvelle vie, croîs et reverdis de même. Enfin, puisque autant de fois je meurs, autant de fois je ressuscite, dis où se cache la vie entre sa fuite et son retour ?

XXVIII. La Clémence

La Cause qui pourvoit à tout a donné aux brutes griffes, dents, rictus et cornes, afin qu’elles repoussent la force par la force. À l’homme nu et faible elle a donné l’amour de ses parents et de la patrie afin que chaque homme remplisse ses devoirs envers autrui. La Clémence subjugue plus sûrement et plus aisément ceux que dirige un coeur sans fiel qu’une poigne rude. Comme les vertus guerrières procurent aux princes une grande renommée, ainsi l’amour gagne les âmes hostiles. Le droit de grâce est le privilège du pouvoir. La puissance souveraine vient de l’Un : qu’elle soit crainte sans avoir à se faire craindre.

XXIX. La Justice parlant d’elle-même

Vigne et vice prolifèrent outre mesure dès que nulle main ne les taille plus. Quel est mon rôle ? je les éprouve l’une et l’autre. Telle la foudre, ceux que je frappe sont le petit nombre, mais ceux que j’effraie sont légion. Plusieurs sont corrigés par mes avertissements, bien davantage, par mes menaces. Par moi, personne ne périt que celui que l’on doit plaindre d’avoir vécu. Quoique par moi beaucoup souffrent et périssent, ô douleur !

XXX. Faustine et sa piété filiale

Il avait été ordonné que le vieillard, condamné au dernier supplice, périrait d’une mort lente, pieds et poings liés. Longtemps, Faustine nourrit son père à la dérobée, de ses mamelles de fille, devenue mère. L’attention des gardes mise en éveil, la ruse de Faustine commença à être soupçonnée ainsi que son amour intense. Aussi, lorsqu’un des gardes, plus avisé, vit le père tarissant le sein de son enfant, il s’écria, transporté de colère : « O la fine mouche ! je me rends compte, de ce que peut une femme, et de quelles fraudes pieuses elle est susceptible ».

XXXI. Stoïcisme

Sois un Agneau, conduis-toi en Agneau. Rongé jusqu’à la moelle des os, l’Agneau se tait : Toi, serre les lèvres quand tu souffres.

XXXII. Toi qui dors, lève-toi !

Homme immortel ! Quoi, tu t’endors dans une vie oisive, toi qui es né pour la vie éternelle ! D’où vient une si profonde torpeur ? Lève-toi ; ouvre les yeux ; bannis le sommeil qui t’accable : Les violents ravissent le Royaume des Cieux.

XXXIII. Fiat

Quelle puissance, dans ce verbe passif, qui s’étend à tout ! Dieu Lui-même, en créant, et Marie, nous l’enseignent : Le Premier Fiat, du néant, crée tout [Gen. c. I, v. 3] ; le second Fiat [Luc, c. I, v. 38] fait descendre Dieu de sa propre sphère. Puisque le Verbe actif crée toutes choses pour toi, apprends à subir en silence, comme l’implique le Fiat passif.

XXXIV. Le Côté ouvert du Christ

Là où découle de la blessure d’Adam déchu, le sang corrompu. Là même, s’épanche avec ce sang l’eau vive du salut.

XXXV. Le Royaume maintenant mélangé sera purifié

Présentement, les lis fleurissent parmi les épines. Le Milan brigande parmi les oiseaux, et le Loup chez les brebis. Le Feu consumera les épines, le Milan et le Loup : Lis, oiseaux et brebis se réjouiront de concert.

XXXVI. O Orgueilleux ! De quoi t’énorgueillis-tu ?

Toi qui t’avances le visage menaçant et plein de hargne, toisant tout avec une sourcilleuse arrogance, fœtus, tu es conçu, et, enfant, tu nais entre les excréments et les urines. O homme, d’où vient ton orgueil ?

XXXVII. L’Humilité réceptive

De même que les eaux s’écoulent abondamment des collines dans la vallée, de même Dieu remplit d’amour les humbles détachés du monde.

XXXVIII. Le Néant

Tu veux devenir quelque chose ? Souviens-toi auparavant que tu n’es rien : La matière de laquelle crée le Grand Tout est le néant.

XXXIX. Le Ver à Soie Symbole de la vie érémitique et de la résurrection

À l’abri de son cocon, le Bombyx tisse ses fils soyeux dont l’homme s’enorgueillit sans nul droit. Ah ! que loin des foules, renfermé en moi-même je retisse utilement les fils de ma vie ! Dieu, qui revêt d’ailes le vermisseau, peut aussi transmuer après ma mort le ver que je suis.

XL. L’Esclave, l’Affranchi

Quand volontairement je m’assujettis au péché, j’en deviens l’esclave ; les tristes emportements des passions me tiennent enchaîné. Quand, esclave du Christ, je sers le Christ : l’Amour m’affranchit.

XLI. Louanges et Ruses féminines

Si tu es sage, tu dois éventer la fraude, l’artifice et la flatterie : La femme est féconde en ruses et brûle de s’entendre complimenter.

XLII. Plaisir mortel (De l’allemand)

Là où tu trouves seulement un fardeau, là, Dieu n’est pas perdu. Là où tu trouves actuellement un plaisir, là, la Mort est née !

XLIII. EVA, AVE

EVA et AVE, par l’inversion de leur nom, nous découvrent combien immense est le Mal causé par une femme, et combien immense le Bien causé par une autre. EVA, notre mère, est la cause de la Mort, et AVE, celle du Salut. EVA a perdu les hommes qu’a restaurés AVE.

XLIV. Tisseurs de Toiles d’Araignée

Lorsque l’araignée s’évertue à ourdir une toile fragile, ô combien elle a d’imitateurs : tu ne pourrais les compter ! Savants, ignorants, grands et petits, capables, incapables, et ceux que ma Muse m’interdit de nommer, accompagnés de paroles futiles et d’arguments frivoles, et que conduit la vanité de la certitude absolue qu’ils s’imaginent posséder. Ceux que la Critique divertit, ceux que la lettre du Verbe torture Ceux que le Codex absorbe, comme aussi le Podex et ceux qui prétendent à la Pierre des Sages, voulant avec une énergie rapace soumettre les lois divines à leur propre loi. Et ceux que tourmente la Quadrature du Cercle, ceux que tarabuste le Mouvement perpétuel ; ceux aussi qui sont fiers de leurs titres honorifiques et de leurs vaines richesses, comme ceux-là qui se glorifient de la noblesse de leur Origine. De part et d’autre, cependant, on file avec autant d’efforts : Celle-là, afin de prendre les mouches, ceux-ci afin de capter les hommes. L’araignée espérait-elle avoir de tels collègues aux mêmes instincts ? Mais, de peur que, peut-être, enorgueillie d’une si grande fortune, elle ne crève, de crainte aussi que les frelons, cinglés par mes paroles véridiques, ne me décochent leurs traits sanglants en récompense d’une fine toile, ici je me tais et cesse de dépeindre ses Semblables : car le fil qu’une brise légère a emporté me manque.

XLV. Notion de l’Idée

L’Idée conçoit la vision de l’esprit et l’image formée dans la pensée, enfantant et vivifiant sa lignée. De là, l’on dit que l’une a été formée et que l’autre a donné la forme. À cause de cela, elle est elle-même sa propre fille et sa propre mère. L’une et l’autre sont une jeune vierge chaste, charmante, tendre et lumineuse, et une image limpide de la chose conçue. Qui saisit la mère de celle-ci et l’enfantement de la Magie ? Que l’Idée ne trouble pas le miroir de sa pensée. L’Idée unique se manifeste par une Image claire, car elle se réfléchit d’elle-même, et fait d’Écho une Déesse.

XLVI. L’Éternité est un Point

Bien que tu additionnes des siècles pendant une longue vie, ce que tu peux compter n’est pas éternel. Mais ce qui se suffit à soi-même, le Point indivisible, omniprésent, cela est éternel, car tu ne peux le compter.

XLVII. Jamais de Fin, pourtant une Fin

Les choses auxquelles le temps donne naissance, cessent avec le temps : les peines, les afflictions, le chagrin, le deuil, la douleur, la colère, les passions, car l’Abîme les engloutit, ainsi que leurs causes et leurs fins, dévorant ces produits monstrueux de la Nature dégénérée. Mais ce qui a pris son cours dès l’éternel commencement, jamais ne cesse : la vie ne cessera point, l’amour durera toujours.

XLVIII. L’Époux blanc et vermeil (Cant. des Cant. c. V, v. 10)

Dès que tu me seras livré, Toi, l’Époux de la Lumière et du Feu, la candeur et l’ardeur seront parfaitement conjointes.

XLIX. Absalon suspendu (2 Rois, c. 18, v. 9 -14)

Le vengeur le serre de près et l’arbre se fait gibet, la chevelure, piège, et Joab lui-même, bourreau.

L. Triple Croix de l’Auteur

La première Croix m’a été infligée autrefois par un clergé aveugle, se dissimulant sous l’habit de deux frères de la Doctrine Chrétienne. Une autre me vint, inventée par un Sophiste orgueilleux auquel il plut de vider mes coffres. La troisième fut imaginée par un odieux Iscariote ; j’en ignore encore la cause : peut-être le saurais-je. Ce sont là croix extérieures. Mais celle que Dieu a ajoutée intérieurement surpasse de beaucoup les autres, Croix (bénie – pesante) des Croix.

LI. 63, Grande Année Climatérique

Cette année, ainsi qu’on le présage, annonce mille périls : Beaucoup de maux et rien de bon. Celui qui rappelle et prédit ces choses a atteint ce terme, âge auquel son indépendance, sa réputation et son honneur ont sombré. Cependant cette année lui promet nombre de dons et aussi lui rendra son indépendance, sa réputation et son honneur et, en même temps, imposera silence aux calomnies du vulgaire : et les autres menteurs se repentiront et rougiront de leurs agissements. L’espérance me suggère encore un présage plus heureux, que Sophia (la Sagesse) de sa propre bouche m’interdit d’exprimer.

LII. Corruption de l’un est Génération de l’autre

Ce que l’hiver rigoureux fait périr, le doux printemps le rend. Les choses d’ici-bas sont soumises à des changements successifs : La mort succède à la vie, la lumière aux ténèbres, au travail, le repos réparateur ; à la guerre, la paix et au vieux, le neuf. Quand périt le vieil Adam, il en renaît un nouveau ; lorsque la Nature succombe, la Grâce revient spontanément : Veux-tu produire une nouvelle nature ? Détruis l’ancienne par la corruption, car si celle-ci n’est pas détruite, jamais une vie nouvelle ne se développera.

LIII. La Médecine est triple, et n’est pas la Vulgaire

Le Vert-de-Gris des Sages 1 donne la première ; l’aimable Vénus donne la seconde ; la troisième est issue du Ciel et de la Mer. La première a en elle ses feux ; cependant l’œuvre exige un second et différent feu pour réussir. La deuxième attire les vertus du Ciel à la manière d’un aimant ; la coction seule suffit au reste. Et la troisième conjoint les forces du Ciel et de la Terre en imprégnant le sel marin de la rosée du Ciel.

LIV. L’Esprit renouvelle toutes Choses

Celui qui demeure enseveli dans le vieil Adam se crucifie, se dégoûte de lui-même et deviendra rigide et glacé ; le Pneuma sacré seul, vraiment, renouvelle toutes choses : plus tu te joins à lui, plus tu es rénové. Veux-tu devenir Phénix ? Abandonne ton 1 La note du texte nous reporte au Chap. XIII du Traité. Les passages auxquels il est visiblement fait allusion ici seront reproduits en Appendice. ancienne vie : la chair étant vaincue, l’âme, en retour, vit d’une vie nouvelle.

LV. Une nécessité

Marthe, distraite par divers soins, peut difficilement connaître l’Unique : Mais sa sœur, ne cherchant que l’Unique, a trouvé toutes choses en Lui seul.

LVI. La plus utile Connaissance

Celui qui se connaîtra soi-même, saura beaucoup de choses secrètes : L’homme est l’abrégé du Monde. Mais si ce Microcosme renferme en lui un abîme de Ténèbre et de Lumière : Qui peut le pénétrer ? L’approfondir ? La Raison, qui dépend seulement des Astres, en est incapable. L’esprit peut atteindre la Lumière éternelle. Or notre esprit ne la saisira jamais en agissant mais en la souffrant : en conséquence, savoir souffrir est tout l’art !

LVII. Tout savoir, ne rien savoir

La Puissance divine a créé toutes choses, de l’abîme du rien. Si tu désires connaître tout, apprends à connaître : rien !

LVIII. Funeste Convoitise

Lorsque le corps meurt, l’esprit vit, et toutes choses vivent aussi, qu’il désire ardemment. Tu veux qu’alors ton esprit règne en maître dans une Cour paisible ? Sois, dès maintenant, le maître de tes passions.

LIX. 666 – 999 (Apoc. c. 13, v. 18)

C’est le nombre de l’homme qui possède l’horrible Légion des démons : Mais, de ce nombre, la Bête prend son nom. Ce monstre terrible, féroce, s’empare de l’homme et celui-ci, rebelle à son Créateur, dresse ses crêtes contre le Ciel : 666 ! Veux- tu devenir libre ? Abaisse les crêtes ; les pointes tournées vers le bas, tu seras le vainqueur infligeant le châtiment : 999 ! La foi vive, l’humble patience, propres aux Saints [Apocal, c. 13, v. 10] domptent ce monstre ainsi que toutes ses Légions.

LX. Malheur ! trois fois Malheur ! à ceux qui habitent sur la Terre (Apoc. c. 8, v. 13)

Malheur au Monde immonde ! La mesure est comble : un lac de soufre et de poix enflammée est préparé pour tous les criminels. Le tribunal siège aux portes ! l’Hécla, par ses mugissements, le Vésuve en flammes, l’Etna embrasé, font un bruit assourdissant. Sous le sol du Latium – inexorable destin – soufre et salpêtre s’accumulent. Crains, ô Rome ! Déjà, vole à la curée la cruelle armée des bêtes sauvages, châtiant et massacrant les coupables que rien n’émeut. Et l’Océan qui enserre Anglais et Bataves, menace le Monde de ses eaux vengeresses, s’il ne se repent pas. Malheur au Monde immonde ! Malheur une première fois ! Malheur une seconde fois ! Si la troisième arrive Malheur à toi, Monde ! tu es perdu

LXI. Rien de caché

Toutes choses sont claires aux yeux de la suprême Puissance : Sois son intendant dans les Ténèbres, et elle sera ta Dispensatrice dans la Lumière.

LXII. L’Avare

Les pièces d’or et d’argent sont des buissons remplis d’épines. La soif exécrable de l’or met l’avare à la torture : il n’est jamais rassasié de richesses. Il vend la justice, son âme corrompue, tout. Pourquoi ne vendrait-il pas le Christ, son Dieu ? Tandis que l’avare cherche, par des moyens sordides, les biens qu’il n’a pas, il perd en même temps les vrais biens qu’il possède.

LXIII. La vraie Liberté

Quand mon esprit conscient du droit, de la juste raison, me montre Celui qui ne m’a fait aucun mal mis en accusation par la seule trahison de judas : Attentif à ce qui se passe en moi intérieurement, les choses extérieures ne me sont plus rien ; pendant ces moments de ma vie, je suis libre, heureux. Mon corps oppressé est confiné dans son étroit domaine ; mon esprit sanctifié vole dans les cieux magnifiques. Les prisons terrestres ne le tiennent pas enchaîné : aucune affection, aucun pilori ne l’arrêtent. Tout ce qui t’est visible est une prison pour lui ; seules les choses célestes occupent sa pensée et les choses divines le rendent heureux. L’esprit détestant la Terre subit l’insinuation délicieuse de cette lumière et de cette vie qui sont au-delà du périssable. Alors se révèle le chaste amour auquel l’esprit se joint comme se joint à l’océan immense la gouttelette immergée. Hors de ce centre, il n’est aucun repos ; dans cet unique centre, liberté, quiétude, paix et tous les biens foisonnent ; l’esprit n’est réellement libre que dans ce centre immuable. Tous les autres sont trop durs, tous les autres sont trop étroits. Tourne-toi par où tu veux, en haut, en bas, en tous sens : tous les autres sont trop durs et trop étroits. Ici est la liberté surpassant toute royauté par son excellence. Si tu doutes, emprisonné, je tiens parole !

LXIV. Cœur amoureux du Nom de Jésus

[Jésus -
Miel dans la Bouche
Mélodie dans l’Oreille,
Médecine dans le Cœur.
]

O nobles insectes ailés,
Abeilles, - dirais-je richesses ?
Vous, industrieux insectes,
Surpasserai-je vos miels ?

Sur les gazons hybléens,
Dans les roseraies embaumées,
Votre trompe délicate
Aspire le miel.

O Jésus, Nom plus suave
Que le miel officinal,
Fleuve de délices,
Ravis-moi.

Jésus, Nom aimable,
Dispensateur de béatitude ;
Nom plus doux que miel,
Pourvoyeur de pérennité.

Jésus, flambeau perpétuel,
Pure flamme de charité,
Divinité omnipotente,
Lumière de l’Éternité.

Doux de coeur et débonnaire,
Plus splendide que les lis,
Coeur candide, ensanglanté,
Plus parfumé que les roses.

Toi, la chasteté de l’amour,
La douceur des lèvres,
La sublimité de l’honneur
Et le rétributeur des oeuvres.

En Toi, IOVA, sourit
La grâce, sans frivolité ;
Ta vénérable antiquité
Brille d’un éclat sans rides.

Tu es la douceur des sons,
La consolation de,la douleur ;
Tu es l’éclat des coloris,
Le voile de la pudeur.

Tu es, Toi, la fleur des fleurs,
La suavité du parfum,
Tu es la beauté des choses
Et le doux baiser de la bouche.

Tu es le trésor du salut,
Né pauvre, volontairement,
L’arbre qui rend la santé,
Et chargé de nos douleurs.

Toi, la solitude plénière,
Tu vides soudain le plein,
Toi, la seule plénitude,
Tu combles soudain le vide.

Profonde étendue,
Tu ramènes des Enfers ;
Sublime altitude,
Tu nous fais atteindre aux Cieux.

Profondeur sans fond
Et beauté sans forme,
Fond de toute profondeur
Et règle sans norme.

Bienheureuse sainteté,
Ne souffrant rien de souillé,
Sainteté, béatitude,
Tu rends heureux qui tu veux.

Astre ardent d’amour
Pour la troupe des fidèles,
Tu es le frein de la frayeur
Pour les pécheurs imprudents.

Agneau, tu vaincs le Dragon
Menaçant ton homme lige ;
Agneau, tu lances le Lion
Sur qui néglige ta loi.

Nom saint et sacré,
Gage de fidélité :
Vrai présage de salut
Et autel de sainteté.

Fontaine de tous les Biens
De la Vie et foyer de Lumière,
Fin de tous les maux,
Vainqueur de l’Enfer et du Trépas.

Félicité des Pieux,
Homme Dieu, le Rédempteur :
Jubilation des Anges,
Universel rénovateur.

Expiant pour ceux qui souffrent,
Étoile des égarés,
Soulagement des gémissants
Et miel pour ceux qui aiment.

Remède pour les mortels,
Le grand Prophète de Dieu ;
Langage clair aux enfants
Et Agneau plein de bonté.

Lait de la petite enfance
Et pain de l’âge viril,
Tu es le feu de la jeunesse
Et la vie des justifiés.

Grand-Prêtre du Sacerdoce,
Immole-nous avec toi :
Tu es ma part et ma dot,
Reste toujours avec moi.

Roi triomphant de la mort,
Dompte les ennemis rebelles :
Régnant sur les coeurs,
Éteins les conflits.

Tu es la couronne des vierges
Et le Germe des Martyrs :
Donne-moi la virginale
Et pure essence de l’amour.

Mon coeur Te supplie,
Il se donne et se consacre à Toi :
Mon coeur, pour être tien,
Se soumet à jamais.

Fais qu’une étincelle de ton amour
Embrase mon coeur :
Fais que brûle ton coeur
Une étincelle de mon amour !

Dans les cavernes de mes blessures,
Cache-toi, mon coeur ;
Dans l’Unité-trine,
Immerge-toi, mon coeur.

Docteur enseignant le vrai Bien,
Sois mon Prophète :
Créateur de l’éloquence,
Que je devienne ton Poète !

De jour et de nuit,
Que je T’adore en vérité
Veillant comme dormant,
Que je Te prie d’esprit et de coeur.

Assis, marchant, couché,
Je chanterai ton amour :
Souffrant, agissant, reposant,
Je célébrerai tes faveurs.

J’allierai dans un tendre chant
Le triomphe à la victoire ;
J’agiterai de coeur et de bouche
Les trophées de la victoire.

Mille fois sur notre bouche
Notre amour amènera ton nom :
La célébration de ton culte
L’amènera mille fois à nos oreilles.

La pupille de ton oeil
Loin de moi chasse les ténèbres ;
La papille de ton sein
Pénètre mes retraites.

La parole de ta lèvre,
Sans fraude, fiel ni tourment
Est pour moi un doux éventail
De l’esprit, du coeur, des sentiments.

La source de ton côté
Répand de l’eau et du sang :
Le plus profond de mon coeur
Aspire à ce breuvage.

Transporté, je suis plongé
Dans ton ravissement, comme dans un bain :
Me perdre moi-même est mon gain,
Le collier sacré est à moi.

Mon amour brûlant
Consume entièrement mon coeur :
Pour toi mon coeur dépérit,
Calciné d’amour.

Transformé en escarbilles,
Il tombe en cendre et en poussière !
Mais, qu’il boive à ta coupe,
Il ressuscitera, invigoré.

Mais, où m’élançais-je, ô mon coeur ?
Quelle fièvre t’embrase ?
Quelle insolite ardeur
Dévore tes fibres ?

De force, de lumière et de vie,
O JÉSUS, tu remplis son âme
Lorsque du trait de l’amour
Tu blesses celui qui t’aime.

Balbutiante et éclectique,
Ma Muse semblera délirante et novice ;
Te chantant et te célébrant,
Elle sera tenue pour ignare.

Inégale à sa tâche,
Ma Muse ici se tait :
Mon coeur, créé pour l’Amour,
Dans l’Amour a son repos.

HALLELU-JAH !