🔍
Bouton_Accueil

Sur l’Eau Divine


AuteursDatesTypeLieuThèmesStatut
Zosime de Panopolisecr. III IVLittératureecr. ÉgypteMysticisme
Alchimie
Non applicable

► Les fragments ici réunis sont dus au travail de recherche, de compilation et de traduction de Marcelin Berthelot et Charles-Émile Ruelle. Les textes traduits du grec, viennent de l’ouvrage Collection des anciens alchimistes grecs, 1887 1888. Ils ont principalement utilisé pour leur travail le Manuscrit de Saint Marc (Gr.Z.299 Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre bs. Bibliothèque Marcienne) datant du X XI.

■ Cette fiche Sur l’Eau divine reprend la première partie des Mémoires authentiques où Zosime discourt sur le mercure. Nous avons ôté le fragment Sur la Vertu et l’interprétation — qui est incomplet chez Berthelot —, d’auteurs divers et sur des sujets hétéroclites.

🕮 Bosc, ref.343:2.


Texte et traduction : Du grec ancien au français, Marcelin Berthelot, in Collection des anciens alchimistes grecs, 1887. | bs. Bibliothèque Universitaire de livres rares de Thomas Fisher (Toronto, Canada). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre

séparateur

SUR LA VERTU. — LEÇON I

1. La composition des eaux, le mouvement, l’accroissement, l’enlèvement et la restitution de la nature corporelle, la séparation de l’esprit d’avec le corps, et la fixation de l’esprit sur le corps ; les opérations qui ne résultent pas de l’addition de natures étrangères et tirées du dehors, mais qui sont dues à la nature propre, unique, agissant sur elle-même, dérivée d’une seule espèce, ainsi que (l’emploi) des minerais durcis et solidifiés, et des extraits liquides du tissu des plantes ; tout ce système uniforme et polychrome comprend la recherche multiple et infiniment variée de toutes choses, la recherche de la nature, subordonnée à l’influence lunaire et à la mesure du temps, lesquelles règlent le terme et l’accroissement suivant lesquels la nature se transforme.

2. En disant ces choses, je m’endormis ; et je vis un sacrificateur qui se tenait debout devant moi, en haut d’un autel en forme de coupe. Cet autel avait quinze marches à monter. Le prêtre s’y tenait debout, et j’entendis une voix d’en haut qui me disait : J’ai accompli l’action de descendre les quinze marches, en marchant vers l’obscurité, et l’action de monter les marches, en allant vers la lumière. C’est le sacrificateur qui me renouvelle, en rejetant la nature épaisse du corps. Ainsi consacré prêtre par la nécessité, je deviens un esprit.

Ayant entendu la voix de celui qui se tenait debout sur l’autel en forme de coupe, je lui demandai qui il était. Et lui, d’une voix grêle, me répondit en ces termes : « Je suis Ion, le prêtre des sanctuaires, et je subis une violence intolérable. Quelqu’un est venu au matin précipitamment, et il m’a violenté, me pourfendant avec un glaive, et me démembrant, suivant les règles de la combinaison. Il a enlevé toute la peau de ma tête, avec l’épée qu’il tenait (en main) ; il a mêlé les os avec la chair et il les a fait brûler avec le feu du traitement. C’est ainsi que j’ai appris, par la transformation du corps, à devenir esprit. Telle est la violence intolérable (que j’ai subie).

Comme il m’entretenait encore, et que je le forçais de me parler, ses yeux devinrent comme du sang, et il vomit toutes ses chairs. Et je le vis (changé en) petit homme contrefait, se déchirer lui-même avec ses propres dents, et s’affaisser.

3. Rempli de crainte, je m’éveillai et je songeai : « N’est-ce-pas là la composition des eaux? n. Je fus persuadé que j’avais bien compris ; et je m’endormis de nouveau. Je vis le même autel en forme de coupe, et, à la partie supérieure, de l’eau bouillonnante et beaucoup de peuple s’y portant sans relâche. Et il n’y avait personne que je pusse interroger en dehors de l’autel. Je monte alors vers l’autel, pour voir ce spectacle. Et j’aperçois un petit homme, un barbier blanchi par les années, qui me dit : « Que regardes- tu? » Je lui répondis que j’étais surpris de voir l’agitation de Peau et celle des hommes brûlés et vivants. Il me répondit en ces termes : « Ce spectacle que tu vois, c’est l’entrée, et la sortie, et la mutation ». Je lui demandai encore :

Quelle mutation ? Et il me répondit : « C’est le lieu de l’opération appelée macération ; car les hommes qui veulent obtenir la vertu entrent ici et deviennent des esprits, après avoir fui le corps. Alors je lui dis : « Et toi es-tu un esprit? » Et il me répondit : « Oui un esprit et un gardien d’esprits a. Pendant notre entretien, l’ébullition allant en croissant, et le peuple poussant des cris lamentables, je vis un homme de cuivre, tenant dans sa main une tablette de plomb. Il me dit les mots suivants, en regardant la tablette : « Je prescris à tous ceux qui sont soumis au châtiment de se calmer, de prendre chacun une tablette de plomb, d’écrire de leur propre main, et de tenir les yeux levés en l’air et les bouches ouvertes, jusqu’à ce que leur vendange soit développée ». L’acte suivit la parole et le maître de la maison me dit : « Tu as contemplé, tu as allongé le cou vers le haut et tu as vu ce qui s’est fait ». Je lui répondis que je voyais, et il me dit : « Celui que tu vois est l’homme de cuivre ; c’est le chef des sacrificateurs et le sacrifié, celui qui vomit ses propres chairs. L’autorité lui a été donnée sur cette eau et sur les gens punis ».

4. Après avoir eu cette apparition, je m’éveillai de nouveau. Je lui dis : Quelle est la cause de cette vision? N’est-ce donc pas là l’eau blanche et jaune bouillonnante, l’eau divine? Et j’ai trouvé que j’avais bien compris. Je dis qu’il est beau de parler et beau d’écouter, beau de donner et beau de recevoir, beau d’âtre pauvre et beau d’être riche. Or, comment la nature apprend-elle à donner et à recevoir? L’homme de cuivre donne et la pierre liquéfiée reçoit ; le minéral donne et la plante reçoit ; les astres donnent et les fleurs reçoivent ; le ciel donne et La terre reçoit ; les coups de foudre donnent le feu qui s’élance. Dans l’autel en forme de coupe, toutes choses s’entrelacent, et toutes se dissocient : toutes choses s’unissent ; toutes se combinent ; toutes choses se mêlent, et toutes se séparent ; toutes choses sont mouillées, et toutes sont asséchées ; toutes choses fleurissent et toutes se déflorent. En effet, pour chacune c’est par la méthode, par la mesure, par la pesée exacte des quatre éléments que se fait l’entrelacement et la dissociation de toutes choses ; aucune liaison ne se produit sans méthode. Il y a une méthode naturelle, pour souffler et pour aspirer, pour conserver les classes stationnaires, pour les augmenter et pour les diminuer. Lorsque toutes choses, en un mot, concordent par la division et par l’union, sans que la méthode soit négligée en rien, la nature est transformée ; car la nature, étant retournée sur elle-même, se transforme : il s’agit de la nature et du lien de la vertu dans l’univers entier.

5. Bref, mon ami, bâtis un temple monolithe, semblable à la céruse, à l’albâtre, n’ayant ni commencement ni fin dans sa construction. Qu’il y ait à l’intérieur une source d’eau très pure, étincelante comme le soleil. Observe avec soin de quel côté est l’entrée du temple et prends en main une épée ; cherche alors l’entrée, car il est étroit ic lieu où se trouve l’ouverture. Un serpent est couché à l’entrée, gardant le temple. Empare-toi de lui ; tu l’immoleras d’abord ; dépouille-le, et prenant sa chair et ses os, sépare ses membres ; puis réunissant les membres avec les os, à l’entrée du temple, fais-en un marchepied, monte dessus, et entre : tu trouveras là ce que tu cherches. Le prêtre, cet homme de cuivre, que tu vois assis dans la source, rassemblant (en lui) la couleur, ne le regarde pas comme un homme de cuivre ; car il a changé la couleur de sa nature et il est devenu un homme d’argent. Si tu le veux, tu l’auras bientôt (à l’état d’) homme d’or.

6. Ce préambule est une entrée destinée à te manifester les fleurs des discours qui vont suivre (c’est-à-dire) la recherche des vertus, du savoir, de la raison, les doctrines de l’intelligence, les méthodes efficaces, les révélations qui éclaircissent les paroles secrètes. Ainsi la vertu poursuit le Tout, en son temps et avec méthode,

7. Que signifient ces mots : « La nature triomphant des natures o?et ceci « Au moment où elle est accomplie, elle est prise de vertige »? et encore :

Resserrée dans la recherche, elle prend le visage commun de l’œuvre du

- Tout, et elle absorbe la matière propre de l’espèce-»? Et ceci : « tombée ensuite en dehors (de) sa première apparence, elle croit mourir ? Et ceci :

« Lorsque, parlant une langue barbare, elle imite celui qui parle la langue hébraïque ; alors, se défendant elle-même, La malheureuse se rend plus légère en mélangeant ses propres membres. »? Et ceci ! L’ensemble liquide est mené à maturité par le feu

8. Appuyé sur la clarté de ces conceptions de l’intelligence, transforme la nature, et considère la matière multiple comme étant une. N’expose clairement à personne une telle propriété ; mais suffis-toi à toi-même, de crainte qu’en parlant, tu ne te détruises toi-même. Car le silence enseigne la vertu, il est beau de voir les mutations des quatre métaux [le plomb, le cuivre l’asèm (ou l’argent), l’étain], changés en or parfait.

Prenant du sel, mouille le soufre, de façon à amener la masse en consistance de cire mielleuse. Enchaîne la force de l’un et l’autre ; ajoutes-y de la couperose et fabriques-en un acide, premier ferment de la couleur blanche, tiré de la couperose. Avec ces (substances) tu amèneras par degré le cuivre dompté à l’apparence blanche. Fais distiller par la cinquième méthode, au moyen des trois vapeurs sublimées : tu trouveras l’or attendu. Voilà comment en domptant la matière tu obtiens l’espèce unique, tirée de plusieurs espèces.

LA CHAUX
ZOSIME DIT AU SUJET DE LA CHAUX

1. Je vais vous rendre (les choses) claires. On sait que la pierre alabastron est appelée cerveau, parce qu’elle est l’agent fixateur de toute teinture volatile. Prenant donc la pierre alabastron, fais.la cuire une nuit et un jour ; aie de la chaux, prends du vinaigre très fort et fais bouillir : tu seras étonné ; car tu réaliseras une fabrication divine, un produit qui blanchit au plus haut degré la surface (des métaux). Laisse déposer, puis ajoute du vinaigre très fort, en opérant dans un vase sans couvercle, afin d’enlever la vapeur sublimée, à mesure qu’elle se forme au-dessus. Prenant encore du vinaigre fort, fais élever cette vapeur pendant sept jours, et opère ainsi jusqu’à ce que la vapeur ne monte plus. Laisse durant quarante jours le produit (exposé) au soleil et à la rosée, à l’époque fixée ; puis adoucis avec de l’eau de pluie. Fais sécher au soleil, et conserve.

C’est là le mystère incommuniqué, qu’aucun des prophètes n’a osé divulguer par la parole ; mais ils l’ont révélé seulement aux initiés. Ils l’ont appelé la pierre encéphale dans leurs écrits symboliques, la pierre non-pierre, la chose inconnue qui est connue de tous, la chose méprisée qui est très précieuse, la chose donnée et non-donnée de Dieu. Pour moi, je la saluerai du nom de (pierre) non donnée et donnée de Dieu : c’est la seule, dans notre œuvre, qui domine la matière. Telle est la préparation qui possède la puissance, le mystère mithriaque.

2. L’esprit du feu s’unit avec la pierre et devient un esprit de genre unique. Or je vous expliquerai les œuvres de la pierre. Mélangée avec la coma- ris, elle produit les perles, et c’est là ce que l’on a nommé chrysolithe. L’esprit opère toutes choses par la puissance de la poudre sèche. Et moi, je vais vous expliquer le mot comaris, chose que personne n’a osé divulguer ; mais ceux-ci (les anciens) la transmettaient aux personnes intelligentes. Elle détient la puissance féminine, celle que l’on doit préférer ; car le blanchiment est devenu un objet de vénération pour tout prophète.

Je vous expliquerai aussi la puissance de la perle. Elle accomplit ses œuvres, mise en décoction dans l’huile. Elle représente la puissance féminine. Prenant la perle, tu la mettras en décoction avec de l’huile, dans un vase non bouché, sans couvercle, pendant 3 heures, sur un feu modéré. Prenant un chiffon de laine, frotte-le contre la perle, afin d’en ôter l’huile et tiens, (la perle disponible) pour les besoins des teintures ; car l’accomplissement de la (transformation) matérielle a lieu au moyen de la perle.

2 bis. Stephanus dit : Prenez (le métal composé) des quatre éléments, (ajoutez-y l’arsenic le plus élevé et le plus bas, le rugueux et le roux, le mile et la femelle, à poids égaux, afin de les unir entre eux. Car de même que l’oiseau couve ses œufs et les mène à terme dans la chaleur, de même vous couverez et mènerez à terme votre œuvre, après l’avoir porté au dehors, arrosé avec les eaux divines, exposé au soleil et dans des lieux chauds ; après l’avoir fait cuire sur un feu doux, en le déposant dans du lait virginal. Prenez garde à la fumée. Plongez le produit dans l’Hadès ; [ressortez-le, arrosez-le avec du safran de Cilicie, au soleil et dans des lieux chauds ; faites cuire sur un feu doux, avec du lait virginal, en dehors de la fumée. Enfoncez-le dans l’Hadès]. Remuez avec soin, jusqu’à ce que la préparation ait pris de la consistance, et ne puisse s’échapper du feu. Alors, prenez-en (une partie), et lorsque l’âme et l’esprit se sont unifiés (avec le corps) et ne forment plus qu’un seul être, projetez sur le corps métallique de l’argent et vous aurez de l’or, tel que n’en renferment pas les trésors des rois.

Voilà le mystère des philosophes, celui que nos pères ont juré de ne point révéler ni publier.

3. On entend par élévation, la montée des fleurs : l’eau avec laquelle le produit a été arrosé s’élève et monte sans obstacle, par suite de l’association intime du corps avec le soufre. Sinon (le corps) reste au fond (du vase à sublimation?) Contentons-nous du mortier et du filtre pour les deux teintures.

Quant au cuivre, Zosime dit à son sujet : a Altéré par la plupart des eaux, à cause de l’humidité de l’air et de la chaleur, il augmente de volume et se couvre de fleurs, qui sont de beaucoup les plus douces ; il fructifie par l’action productrice de la nature ».

AGATHODEMON

Après l’affinage du cuivre et son noircissement, puis son blanchiment ultérieur, alors aura lieu le jaunissement solide.

HERMÈS

Si tu ne dépouilles pas les corps de leur nature corporelle et si tu ne donnes pas une nature corporelle aux êtres incorporels, rien de ce que tu attends n’aura lieu.

ZOSIME
LEÇON II

1. Enfin je fus pris du désir de monter les sept degrés et de voir les sept châtiments ; et comme il convient, en un seul des jours (fixés), j’effectuai la route de l’ascension. En m’y reprenant à plusieurs reprises, je parcourus la route. Au retour, je ne retrouvai pas mon chemin. Plongé dans un grand découragement, ne voyant pas comment sortir, je tombai dans le sommeil.

J’aperçus pendant mon sommeil un certain petit homme, un barbier revêtu d’une robe rouge et d’un habillement royal, qui se tenait debout en dehors du lieu des châtiments, et il me dit : Que fais-tu (là), ô homme? Et moi je lui répondis : Je m’arrête ici parce hue, m’étant écarté de tout chemin, je me trouve égaré. Il me dit (alors) : Suis-moi. Et moi, je vins et je le suivis. Comme nous étions près du lieu des châtiments, je vis celui qui me guidait, ce petit barbier, s’engager dans ce lieu et tout son corps fut consumé par le feu.

2. À cette vue, je m’éloignai, je tremblai de peur ; puis je me réveillai, et je me dis en moi-même : Qu’est-ce que je vois? et de nouveau je tirai mon raisonnement au clair et je compris que ce barbier était l’homme de cuivre, revêtu d’un habillement rouge, et je (me) dis : J’ai bien compris, c’est l’homme de cuivre. Il faut d’abord qu’il s’engage dans le lieu des châtiments.

3. De nouveau mon âme désira monter le 3e degré. Et de nouveau, seul, je suivis le chemin ; et comme j’étais près du lieu des châtiments, je m’égarai encore, ne sachant pas ma route, et je m’arrêtai désespéré. Et de nouveau, semblablement, je vis un vieillard blanchi par les années, devenu tout à fait blanc, d’une blancheur aveuglante. Il s’appelait Agathodémon. Se retournant, ce vieillard aux cheveux blancs me considéra pendant une grande heure, Et moi je lui demandai : Montre-moi le droit chemin. Il ne se retourna pas vers moi, mais il s’empressa de suivre sa propre route. En allant et venant, de ci, de là, je gagnai en hâte l’autel. Lorsque je fus arrivé en haut sur l’autel, je vis le vieillard aux cheveux blancs s’engager dans le lieu du châtiment. O démiurges des natures célestes ! Comme il fut aussitôt embrasé tout entier ! Quel récit effroyable, mes frères ! Car, par suite de la violence du châtiment, ses yeux se remplirent de sang. Je (lui) adressai la parole et lui demandai : Pourquoi es-tu étendu? Mais lui, ayant entr’ouvert la bouche, me dit : Je suis l’homme de plomb et je subis une violence intolérable ». Là-dessus, saisi d’une grande crainte, je m’éveillai et je cherchai en moi-même la raison de ce fait. De nouveau je réfléchis et je me dis :

J’ai bien compris par là qu’il faut rejeter le plomb ; la vision se rapporte réellement à la composition des liquides.

OUVRAGE DU MÊME ZOSIME
LEÇON III

1. De nouveau, je remarquai le divin et sacré autel en forme de coupe, et je vis un prêtre revêtu d’une (robe) blanche, tombant jusqu’à ses pieds, lequel célébrait ces effrayants mystères, et je dis : Quel est celui-ci? Et il me répondit : C’est le prêtre des sanctuaires. C’est lui qui a l’habitude d’ensanglanter les corps, de rendre les yeux clairvoyants et de ressusciter les morts. Alors, tombant de nouveau (à terre), je m’endormis encore. Pendant que je montais le quatrième degré, je vis, du côté de l’orient, (quelqu’un) venir, tenant dans sa main un glaive. Un autre, derrière lui, portait un objet circulaire, d’une blancheur éclatante, et très beau à voir, appelé Méridien du Cinabre. Comme j’approchais du lieu du châtiment, il me dit que celui qui tenait un glaive, devait lui trancher la tâte, sacrifier son corps et couper ses chairs par morceaux, afin que ses chairs fussent d’abord bouillies dans l’appareil, et qu’alors elles fussent portées au lieu du châtiment.

M’étant réveillé de nouveau, je (me) dis : j’ai bien compris ; il s’agit des liquides dans l’art des métaux. Celui qui portait le glaive dit encore Vous avez accompli l’ascension des sept degrés. L’autre reprit, en même temps qu’il laissait dissoudre les plombs par tous les liquides (?), l’Art s’accomplit

SUR L’ÉVAPORATION DE L’EAU DIVINE
(QUI FIXE LE MERCURE)

1. Me trouvant une fois dans vos demeures, ô femme, afin de t’entendre, j’admirais toute l’opération de ce qui est appelé chez toi le « structeur. » Je tombai dans une grande stupéfaction, à la vue de ces effets, et je me mis à vénérer comme divin le poxamo ; je pensais, (en considérant) l’intelligence de chaque artisan (de l’œuvre) ; comment, trouvant secours dans leurs devanciers, ils perfectionnaient leurs propres recherches.

Ce qui me surprenait, c’était la cuisson de l’oiseau soumis à la filtration ; c’était de voir comment il la subit, par le moyen de la vapeur sublimée, de la chaleur et d’un liquide approprié, alors qu’il participe à la teinture. Surpris, mon esprit revient à notre objet d’étude ; il examine si c’est par suite de l’émission de la vapeur de l’eau divine que notre composition peut être cuite et teinte. Or je cherchais si quelqu’un des anciens fait mention de cet instrument, et (rien) ne se présentait à mon esprit. Découragé, je compulsai les livres et je trouvai dans ceux des Juifs, à côté de l’instrument traditionnel nommé tribicos, la description de ton propre instrument. Voici comment la chose est présentée.

Prenant de l’arsenic (sulfuré), blanchis-le de la manière suivante. Fais une pâte grasse, de la largeur d’un petit miroir très mince ; perce-la de petits trous, en manière de crible, et place par dessus, en l’ajustant bien, un petit récipient, renfermant une partie de soufre ; mets dans le crible de l’arsenic, la quantité que tu voudras. Après avoir recouvert avec un autre récipient, et avoir luté les points de jonction, au bout de 2 jours et 2 nuits, tu trouveras de la céruse. Prends-en un quart de mine et souffle pendant tout un jour, en y ajoutant un peu de bitume, etc. Telle est la construction de l’appareil.

2. Quant à moi je reviendrai à notre objet, en montrant, d’après l’écrit lui-même, qu’il n’y a pas blanchiment, puisqu’il conseille de faire durer la cuisson 2 jours et 2 nuits ; tandis qu’une heure suffit pour évaporer une grande quantité de soufre. Mais par là, il fournit un motif à tes réflexions. En effet Agathodémon a rappelé que l’arsenic est toute la composition ; c’est celle sur laquelle j’ai fortement discouru dans le 6e chapitre, sur la cuisson, dans mon livre sur l’Action ; beaucoup d’autres anciens l’ont rappelée explicitement et avec intention. Mais le début de l’écrit, qu’enseigne-t-il sur le sujet présent? Il dit ; « Le blanchiment par l’arsenic s’étend jusqu’à l’arsenic non blanchi ». C’est dans le même sens que Démocrite dit « si la flamme est trop forte, le jaune se produit ; mais (cela) ne te servira pas maintenant, car tu veux blanchir les corps (métalliques) ».

3. Or comment y a-t-il un homme assez simple pour ne pas entendre par là toutes les espèces de l’arsenic (sulfuré)? Et même l’arsenic lamelleux, comme l’expose L’écrit précité?

Si les matières sont blanchies de cette façon, et non pas seulement à la surface, le métal sera entièrement blanc et il ne perdra passa couleur au feu ; il sera blanc dans l’intérieur ainsi qu’à la surface. Or comment n’est-on pas capable d’entendre l’arsenic blanchi, là où l’écrit a prescrit de le projeter et de le soumettre à l’insufflation ; cet arsenic ne contenant aucune (partie) de soufre, mais s’évaporant en nature sous l’action du feu? Mais si la composition renferme du soufre, il recommande non seulement de souffler, mais encore d’ajouter du bitume, afin que par là le Tout soit désulfuré et devienne pur et brillant.

4. Voilà toutes les choses qu’il m’est permis de dire là-dessus, et vous en êtes témoins. Mais si vous y trouvez bien des ressources, vous êtes aussi des maîtres pour le reste. Je vous conseille conformément à ce que j’ai appris jusqu’ici, ayant accepté de vous, moi aussi, les fruits de l’œuvre finale. L’écrit dit qu’on opère également sur les monnaies. Or ce procédé s’exécute dans l’Ecrevisse.

5. Pour la composition, le vase de terre cuite a une ouverture, destinée à découvrir la coupe placée sur la kérotakis, afin que l’on puisse voir si la matière blanchit ou jaunit. Or l’ouverture du vase de terre cuite est fermée au moyen d’une autre coupe, afin que le produit ne s’évapore pas ; et que l’alliage de l’Écrevisse ne s’échappe pas par là. L’opération a lieu en un seul jour. Si la décoction est conduite autrement, ainsi que la cuisson, il faudra deux fourneaux : le premier, pour les fioles apparentes ; le second, pour les kérotakis, les vases à fixation, ou les bocaux. Si l’on veut y faire digérer l’alliage de l’Écrevisse, ou les matières analogues, on le placera sur la kérotakis, en l’y étendant, et en évitant qu’il ne coule. Le vieux Zosime disait : « Je connais une classe unique qui renferme deux opérations : l’une pour que la fluidité soit produite par l’extraction ; la seconde pour que l’humidité du plomb soit desséchée jusqu’à épuisement. Car elle se fixera et se desséchera ».

SUR LA MÊME EAU DIVINE

1. Prenant des œufs, la quantité que tu voudras, fais-les bouillir, et après les avoir cassés, êtes-en tout le blanc ; mais n’emploie pas la coquille. Prenant un vase de verre mâle et femelle, celui qui est appelé alambic, jettes-y les jaunes des œufs, en usant de la pesée ci-après : une once de jaune ; coquille des œufs calcinée, deux carats, ni plus ni moins, mais juste comme il a été écrit. Ensuite, délaie ; puis, prenant d’autres œufs, casse-les et jette (les) dans l’alambic avec les jaunes délayés, de façon que les œufs entiers soient recouverts par les jaunes.

Lute l’alambic et son chapiteau au récipient, avec beaucoup de soin ; en te servant de suif, ou de plâtre, ou bien de cire d’abeille, ou de cendre mélangée d’huile, ou de ce que tu voudras. Fais digérer dans du crottin de cheval ou d’âne, ou sur un feu de sciure de bois, ou dans un four de pâtissier. Emploie n’importe quel genre de caléfaction convenable, au degré que peut supporter la main humaine.

Que le lieu où les appareils sont installés soit à l’abri du vent, qu’il reçoive la lumière de l’est ou du sud, mais non celle du couchant, ou du nord, ou du nord-ouest, ou du nord-est, à cause du refroidissement. Fais digérer pendant 14 ou 21 jours, jusqu’à ce que cesse la montée des vapeurs ; et maintiens lutés avec soin les joints de l’appareil, afin de conserver l’odeur ; car si elle s’échappe, tout le travail est perdu. En effet, cette odeur est tout à fait désagréable, et c’est dans cette odeur que réside le travail.

2. La première eau qui passe (à la distillation) est blanche.

La seconde coule goutte à goutte elle est d’une odeur désagréable, toute pareille (au lait de chaux). Ensuite, quand la montée de l’eau a cessé, tu enlèves le récipient dans lequel l’eau a coulé, tu (le) fermes, et tu le gardes avec soin. Découvrant l’alambic, tu te boucheras le nez à cause de l’odeur ; et tu trouveras dans le vase femelle les scories (caput mortuum).

Ne refuse pas au mort de parvenir à la résurrection ; mais attends la résurrection du (mort) dont on a désespéré. Ensuite mélange avec la cendre d’autres jaunes d’œufs, comme dans l’art de la savonnerie ; délaie ensemble les matières humides et les matières sèches, et jette (le tout) dans un alambic. Opère comme il a été prescrit antérieurement, en changeant le récipient de l’eau, c’est-à-dire le rogion.

Fais cela jusqu’à trois fois et tu auras d’abord la première eau blanche, comme il a été dit précédemment, cette (eau) que les anciens ont nommée eau de pluie ; puis, la seconde eau, jaune-verdâtre, qu’ils ont nommée huile de raifort ; puis la troisième eau, d’un noir verdâtre.

Tu auras aussi les scories qui sont dans le têt. Lorsque tu ouvriras l’appareil, tu trouveras la première fois la scorie tournant au noir, —la seconde fois, blanche ; — la troisième fois, jaune.

Après la première, la seconde et la troisième extractions d’eau et ouvertures de l’appareil, tu réunis les eaux des trois extractions, c’est-à-dire les eaux divines qui s’y trouvent, avec le résidu contenu dans le vase femelle. Après cela, prenant un alambic de verre, fais-y entrer les matières, bouche l’alambic avec une poterie cuite, capable de s’ajuster aux bords de l’alambic. Lute avec tout le soin possible, à l’aide d’un lut qui résiste au feu. Aban donne sur le fumier du fourneau, pendant quarante et un jours, jusqu’à ce que la décomposition ayant eu lieu, la matière teinte devienne semblable à la matière tinctoriale, et que la nature domine la nature. En effet, de cette façon, les matières sulfureuses sont dominées par les matières sulfureuses et les matières humides par les matières humides correspondantes.

3. Ne prends pas souci du poids, ni de la fraîcheur des œufs, ou de leurs jaunes ; seulement, broie ensemble les matières liquides et les matières sèches, comme il a été dit précédemment, et mets-les dans l’alambic. Après le quarante et unième jour, découvre l’alambic et tu y trouveras une composition entièrement vert clair, c’est-à-dire tournée en ios. Celui qui fait l’ios, sait quelle opération il accomplit ; mais celui qui n’en fait pas ne produit rien.

Or, après le quarante et unième jour, ôte l’alambic du lieu chaud et laisse le pendant cinq jours éloigné de toute source de chaleur. Les cinq jours (écoulés), place l’alambic sur de la braise de sciure de bois et extrais-en l’eau divine ; tu la recevras, non dans ta main, mais dans un vase de verre. Puis, prenant cette eau, mets-la dans un alambic, comme il a été écrit précédemment, et fais chauffer pendant deux ou trois jours. Après avoir enlevé, délaie, et expose au soleil sur une coquille. Lorsque le produit sera devenu compacte comme du savon, fais chauffer une once d’argent, et projettes-(y) de cette eau solidifiée, c’est-à-dire deux karats de poudre sèche, et tu auras de l’or.

Le nombre total des jours de l’opération est de cent dix jours, d’après ce qu’ont dit Zosime, le Chrétien et Stephanus. Quant à moi, après avoir bien butiné de tous côtés comme l’abeille, et tressé une couronne avec beaucoup de fleurs, je t’en ai fait hommage, à toi mon maître. Ensuite, je t’exposerai quels sont les appareils. Portez-vous bien en Jésus-Christ, notre Dieu, maintenant, toujours et dans tous les siècles des siècles. Amen.

ZOSIME DE PANOPOLIS
MÉMOIRES AUTHENTIQUES SUR L’EAU DIVINE

1. Ceci est le divin et grand mystère ; l’objet que l’on cherche. Ceci est le Tout. De lui (provient) le Tout, et par lui (existe) le Tout. Deux natures, une seule essence ; car l’une attire l’une ; et l’une domine l’une. Ceci est l’eau d’argent, l’hermaphrodite, ce qui fuit toujours, ce qui est attiré vers ses propres éléments. C’est l’eau divine, que tout le monde a ignorée, dont la nature est difficile à contempler ; car ce n’est ni un métal, ni de l’eau toujours en mouvement, ni un corps (métallique) ; elle n’est pas dominée.

2. C’est le Tout en toutes choses ; il a vie et esprit et il est destructeur. Celui qui comprend cela possède l’or et l’argent. La puissance a été cachée, mais elle est déposée dans Erotyle.

CONSEILS ET RECOMMANDATIONS
POUR CEUX QUI PRATIQUENT L’ART

1. Je vous le déclare, à vous les sages : sans l’appareil propre à traiter le cuivre, et sans le temps prescrit pour l’opération de l’iosis (lequel temps est court ou long) et pour le mélange des dix espèces susdites, sèches ou liquides, que l’on broie ensemble, n’espérez rien faire, ô hommes, vous qui appartenez à la troupe de l’or, à la race d’or, aux enfants de la tête d’or ; vous qui êtes les amants de la sagesse et les investigateurs de la matière du jaune d’œuf. Mais vous, gens du creuset, vous vous raillez mutuellement et vous ne suivez pas mes avis, à moi qui vous engage à vous conformer aux préceptes des maîtres et à leurs écrits ; à moi qui vous fais connaître leurs opinions, révélées par la puissance de la parole divine.

2. Cette eau a deux couleurs, blanche et jaune ; ils lui ont donné mille noms divers. Sans l’eau divine, rien n’existe. Par elle toute la composition est entreprise ; par elle, elle est chauffée ; par elle, elle est brûlée ; par elle, elle est fixée ; par elle, elle est jaunie ; par elle, elle est décomposée ; par elle, elle est teinte ; par là, elle subit l’iosis, elle est affinée et soumise à la cuisson. En effet, il dit : « En projetant l’eau de soufre natif et un peu de gomme, tu teindras un corps quelconque ». Toutes (les substances) qui tirent leur origine de l’eau, sont en opposition avec celles qui tirent leur origine du feu ; de sorte que sans le catalogue de tous les liquides, rien n’est certain.

3. Quelques-uns l’ont rappelé, — et peut-être même tous : il est nécessaire que cette eau, en guise de levain, détermine la fermentation destinée à produire le semblable au moyen du semblable, dans le corps métallique qui doit être teint. En effet, de même que le levain du pain, pris en petite quantité, fait fermenter une grande masse de pate ; de même aussi ce petit morceau d’or va faire fermenter toute la matière sèche.

4. D’autres, mêlant ensemble deux espèces de choses, les résidus dorés des (substances) sulfureuses avec les matières d’or, les ont associées : les unes aux produits bruts et non fermentés, les autres aux produits cuits ensemble dans l’eau de l’iosis.

En haut les choses célestes, et en bas les choses terrestres ; par le mâle et la femelle l’œuvre est accomplie.