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Kabbale alchimique
L’Alchimiste

Je vous propose dans l’article qui suit d’étudier une série de quatre gravures (Plus la première page d’édition) d’un médecin tyrolien du début XVII° siècle : Steffan Michelspacher. Cet ouvrage se nomme Cabala, il fût édité en 1616 et dédié à Johann Remmelin (1583–1632) un anatomiste de l’époque.

Ce traité alchimique comporte outre une page d’édition, quatre gravures :
Miroir de l’Art et de la Nature
Exaltation et la purification du premier Mercure
La Conjonction
La Multiplication

Pour commencer, La main alchimique avec les symboles de la transmutation :

Observons l’image ci-dessus :

Au dessus du pouce se trouve le symbole de la Couronne et de la Lune qui représente l’action du Salpêtre, c’est à dire du Sel de pierre.

Au dessus de l’index le symbole de l’Étoile à six branches qui fait référence au Vitriol et que l’on obtient à partir du mélange de plusieurs substances (par exemple en superposant deux triangles). "Vitriol" renvoie au "Visita Intériora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem Verum Medicinalem" ("Visite l’intérieur de la terre et par la rectification tu trouveras la véritable Pierre Philosophale cachée.") Pour plus d’explications et de détails lire l’article Vitriol.

Au dessus du majeur le symbole du Soleil qui est le symbole de l’Or alchimique ou de l’Esprit immortel. Il est le symbole de la royauté et de la souveraineté du "Soi".

Au dessus de l’annulaire le symbole de la lanterne qui représente le cheminement intérieur nécessaire de la quête du philosophe. C’est la lampe de Dieu qui aide à explorer les profondeurs secrètes de l’être.

Au dessus de l’auriculaire le symbole de la Clef de l’Art qui permet d’ouvrir la porte de l’ésotérisme, et d’accéder à la connaissance de ce qui est caché.

Dans la paume de la main le symbole du Poisson qui se trouve dans les flammes d’un Feu entretenu par des buchettes de bois. Remarquez que la paume est le lieu sur lequel la main se renferme. Ce poisson peut s’apparenter à celui de la Salamandre des philosophes qui se nourrit du feu et crache des flammes pour se défendre. Ce poisson est une représentation du Mercure et du Soufre, les deux substances mystérieuses et secrète de l’Alchimie.

Autre une version de la main alchimique :

Observons l’image ci-dessus :

Voici les axiomes inscrits sur les différents doigts de cette main et leur traduction :

Sur le pouce :
Flos Aeris sive Salpeter Philosophorum
(La Fleur de l’Air ou Salpètre philosophique)

Sur l’index :
Aurea Vitis sive Vitriolum Philosophorum
(Vigne d’Or ou Vitriol philosophique)

Sur le médium :
Sal armoniacum sive Splendor Solis
(Le Sel armoniac ou Splendeur du Soleil)

Sur l’annulaire :
Suceris Lunariae commune Phorum
(Le sucre de Lunaire ou Alun philosophique)

Sur l’auriculaire :
Humor sive Sal commune Phorum
(Humeur ou Sel commun philosophique)

Dans la paume de la main (au-dessus du poisson) :
Mercurius noster quem scis
(Notre Mercure tant caché)
(Et en-dessous du poisson) :
Gommi sive Sulphur Coagulans
(Gomme ou Soufre Coagulant)

Voici maintenant ci-dessous la page d’introduction de l’ouvrage de Steffan Michelspacher :

Ci-dessus la page de titre de l’édition originale de Cabala, Spiegel der Kunst und Natur in Alchymia petit traité d’alchimique de Stephan Michelspacher - Augsbourg - 1616.

En voici le texte :

Kabbale, miroir de l’art et de la nature en alchymie. Ce qui réellement la très ancienne pierre des sages est une pierre triple mais cependant unique. Tout ce qui jusqu’ici fût observer à partir d’écrits différents et par peu d’hommes est honorablement proposé à tous les amants patient de l’art, qui y travaillent avec l’aide de Dieu, aussi clairement que dans un miroir transparent. L’entière vérité expliquée brièvement et limpidement est montrée dans quatre images gravées sur des plaques de cuivres par un inconnu qui mérite d’être, comme en témoigne le seau de cette première gravure.

Le mot hébreu "Kabbale" signifie "réception" ("Qibel" en hébreux signifie "recevoir") L’objet de la Kabbale est la réception de la bénédiction divine transmise par Dieu souvent dans une vision (Un rêve, ou le "miroir" dans le texte ci-dessus).

Voici, la première page du traité Cabala de l’ouvrage de Steffan Michelspacher

Fasse Dieu que nous soyons reconnaissants pour ce don éminent et très grand ! Puisque, Dieu, lorsque tu ouvres l’esprit et le cœur de quelqu’un, afin qu’il soit rendu parfait pour préparer cette œuvre, tu lui donnes assurément toute sa force.

Observons l’image ci-dessus :

Cette gravure est très riche d’enseignements.
Nous pouvons remarquer trois parties ou étages sur cette illustration :
Dans la partie ou étage supérieur, observez à gauche ainsi qu’à droite la présence de colonnes avec à chaque fois devant un adepte. Remarquez devant ces deux alchimistes à gauche un Aigle et à droite un Lion.
L’aigle représente le principe volatil de l’œuvre ou une partie de ce que désigne l’adepte par "Prima Materia" (ou Matière Première) Le Lion représente le principe fixe, ou désigne ce que les alchimiste nomme "Ultima Materia" (ou Dernière Matière).
Les deux animaux que sont l’Aigle et le Lion représentent donc deux principes qui sont initialement opposés. Nous avons déjà rencontrer cette opposition de l’union de laquelle naît le Griffon.
Nous pouvons lire sur la colonne de gauche le mot "Nature", et, sur la colonne de droite est inscrit le mot "Art".
En effet, comme l’écrit Louis Cattiaux : L’art sans la Nature est impuissant, et la nature sans l’Art est aveugle. Les deux réunis font la perfection de l’œuvre divine. (Le message retrouvé Louis Cattiaux)
En fait, c’est la Nature qui fournit la Prima Materia, et, c’est l’Art d’Hermès qui produit la Pierre Philosophale ou Ultima Materia.

Remarquez maintenant au centre de cette partie supérieur un curieux animal. Il s’agit d’un "être spagyrique", c’est à dire selon Paracelse, le fruit de la combinaison des quatre piliers principaux que sont : L’astronomie, la philosophie, L’alchimie et les vertus. Cet animal curieux représente ici un des premiers stades du "Soi intérieur" ou de la Pierre des Sages.
Observez sur chacune de ses ailes trois ronds qui représentent les trois stades de l’évolution de la pierre des sages : noire, blanche et rouge. Nous retrouvons ces trois ronds sur le blason qui est au premier plan de cette partie supérieure de l’illustration. Remarquez que la parenté qui peut exister entre ce blason et la représentation du Yin et du Yang dans la taoïsme (Voir illustration ci-dessous)
Toujours en haut de part et d’autre de l’être spagyrique se trouvent deux médaillons remplis d’inscriptions en allemand.
Il est inscrit à gauche : La Kabbale et l’Alchimie te donnent la suprême médecine, aussi la Pierre des sages, en laquelle se trouve le fondement seul, comme il est évident à Tes yeux (dans ces figures).
Il est écrit à droite : Ô Dieu, Fais que nous soyons reconnaissants pour ce don si pur et sublime ! L’homme dont Tu ouvres l’esprit et le cœur. Celui qui est parfait en cela, pour préparer cette œuvre, que toute force lui soit donnée.

Dans la partie centrale de l’image ci-dessus, nous pouvons observez des scènes qui relatent les travaux de la mine. À l’extrême gauche nous voyons un homme qui travaille durement à extraire le métal. À droite, l’homme recueille le fruit de son dur travail qu’il sort de la mine.
Au centre de ce second niveau nous remarquons deux figures géométriques. À gauche, nous distinguons une triangle dans un carré qui est lui-même dans un cercle. Le tout est entouré des deux serpents du caducée d’Hermès. Ces deux serpents représentent le Mercure Double des philosophes. Au milieu des deux têtes de serpents est représenté la Pierre philosophale. Celle-ci est représenté ici comme l’union des deux symboles du sujet conjoint à l’agent martial.
À l’intérieur de la figure géométrique de gauche nous pouvons lire deux termes alchimiques : VITRIOL et AZOTH. Il s’agit des deux agents principaux de l’Opus.
Autour de la figure géométrique de gauche remarquez les quatre petits cercles dans lesquels sont inscrits les quatre qualités élémentaires : Chaud, Froid, Sec et Humide.
Pour la figure géométrique de droite, nous observons deux cercles concentriques délimitant un carré qui contient une étoile à huit branches. Dans cette étoile sont inscrits les signes des sept planètes traditionnelles. Le Soleil glorieux est au centre. Remarquez quatre signes du Mercure dans les branches de l’étoile qui vont au coins, et, quatre signes de la Lune dans les branches de l’étoiles qui vont vers les côtés. À gauche, nous pouvons voir les signes de Saturne, à droite ceux de Jupiter. En bas les signes de Vénus symbole du corps qui doit être fécondé, et, en haut ceux de Mars ou de l’air qui doit le féconder.
Remarquez autour du carré, les noms du Soufre, du Bismuth, du Vitriol et de l’Antimoine. Dans la bande autour du cercle nous pouvons lire : Philosophie, Astronomie, Alchimie, et Vertus, qui sont les quatre piliers fondamentaux du grand Art.
Enfin, dans la circonférence extérieure du cercle sont indiqués les noms des quatre éléments : Feu, Terre, Air et Eau.

Dans la partie inférieure de l’illustration ci-dessus nous pouvons observez les travaux de l’alchimiste dans son laboratoire. Ici, sont représenter les deux voies principales possibles de l’œuvre : La Voie Humide et la Voie Sèche. Les fioles de distillations à gauche indiquent la présence d’eau et la voie humide. Les creusets montrent la présence du feu et la voie sèche.
Il existe en fait une troisième voie en alchimie qui associe en quelque sorte la voies sèche et la voie humide. Nous nommes cette troisième voie : La Voie Royale. Ces deux voies humide et sèche peuvent être associé lors du processus de dissolution et coagulation de l’Opus (C’est à dire le "Solve et Coagula") dans la pratique de la Voie Royale.

Observons l’image ci-dessous :

Voici une phrase typiquement alchimiste :
Visita Intériora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem Verum Medicinalem (Visite l’intérieur de la terre et par la rectification tu trouveras la véritable Pierre Philosophale cachée.)

Cette phrase possède un sens cachée. Lorsque nous conservons uniquement les premières lettres de chaque mot du texte latin, nous obtenons :

Visita = V
Intériora = I
Terrae = T
Rectificandoque = R
Invenies = I
Occultum = O
Lapidem = L

V + I + T + R + I + O + L = VITRIOL

Pour plus d’informations sur ce qu’est le Vitriol, lire l’article : Vitriol

Légende de l’illustration : De Cavernis metallorum occultus est, qui Lapis est venerabilis Hermès (Dans les cavernes des métaux (dans les mines) est cachée cette Pierre qui est vénérable.)

Observons l’image ci-dessus :

Il faut chercher le minerai (autrement nommé le sujet des sages) où il se trouve, c’est à dire dans la caverne ou nous pourrions dire dans l’inconscient (ou si vous préférer à l’intérieur de l’être).
C’est avec l’aide de Mars et du Feu Secret que l’on peut extraire ce minerai, c’est à dire le premier Mercure ou Pierre Philosophale.
Remarquez les deux ruisseaux paraboliques à gauche et à droite de l’illustration. L’un à gauche vient de l’inconscient, l’autre à droite vient du conscient. Ils enfantent tous les deux la pierre triangulaire, fondement de notre Art, ainsi qu’un Feu élémentaire dont l’esprit pénètre la Pierre et la sublime en vapeurs qui se solidifient dans le vaisseau (C’est à dire se constelle dans l’athanor, ou encore dans le for intérieur du protagoniste) L’art confère à cette divine sève, en renversant les éléments et en purifiant la couronne (C’est à dire la souveraineté de l’être).
Ensuite, il est possible de découvrir le secret du Second Mercure, souvent nommé Mercure Philosophique qui est ici symbolisé par les deux serpents qui s’entrelacent. Ce phénomène apparait via la relation à la lumière du Soleil et de la Lune qui selon l’auteur Limojon de Saint-Didier établissent la correspondance entre le Ciel et la Terre dans un lien secret. À ce moment-là, la distinction entre Mercure, Souffre et Sel s’établit pour le protagoniste. De ce discernement, nous obtenons obtient le Souffre (C’est à dire l’âme ou Anima) qui sera selon l’exemple du Phénix a même de se transformer. Le Phénix représente ici l’ultime achèvement du Souffre Fixe des sages (C’est à dire de l’âme incarnée).
En effet, le Souffre apparaît dans un premier temps comme un Élixir, puis se transforme Médecine Universelle ou Pierre des Philosophes. C’est à dire que l’âme ou l’Anima (La part féminine du protagoniste) est régénérée par une mort et une renaissance symbolique mais nécessaire. L’âme établie ainsi une nouvelle relation entre l’individu et Dieu. C’est à dire que le Souffre (ou l’Anima) permet la restauration du lien entre le "Moi" (Le centre du conscient) et le "Soi" (Le centre de l’inconscient).
Mais pour se faire, il faut dans un premier temps purifier la Prima Materia et Obtenir le Mercure Philosophique, qui parfois est nommé l’Or Vert, c’est à dire distinguer pour l’adepte le Mercure, le Souffre et le Sel.

"Le V-I-T-R-I-O-L"

Voici, la seconde illustration du traité Cabala de l’ouvrage de Steffan Michelspacher :

Nature, sel, adragant, vinaigre, cinabre, plomb, sang du dragon, fer, couleur de l’œuvre, degré du feu, tête de corbeau

Observons l’image ci-dessus :

Cette troisième planche illustre l’exaltation et la purification du premier Mercure. Nous y voyons un monstre couronné de la tiare papale (Voir cartes du tarot de Marseille ci-dessous). Cet animal représente la Prima Materia sous son aspect monstrueux c’est à dire dangereux. Il représente aussi la réunion des quatre éléments. En effet, ce monstre possède les quatre pattes des animaux terrestres (La Terre) des griffes d’oiseaux (l’Air) Il crache le feu (le Feu) et est recouvert d’écailles (L’Eau).
Ce monstre porte un matras, c’est à dire un vase de verre avec un long col étroit qui s’emploie dans les opérations alchimiques. Dans ce matras nous apercevons un lion et un aigle. Il s’agit du Fixe et du Volatil de la gravure précédente. Il représente la matière et la lumière, ou encore le corps et l’esprit. Plusieurs unions de ces deux principes sont nécessaire pour la création de la Pierre philosophale. De la première union nait le Corbeau ou Pierre noire. D’une seconde union nait le Paon, aux couleurs bigarrées. Puis nait un Phénix signe de la renaissance et enfin la perfection solaire.
Les trois principes que sont le Mercure, le Soufre et le Sel sont représentés avec leurs symboles dans le triangle qui entoure la sphère du mantra dont le col s’élève jusqu’à une étoile à six branches, symbole d’une conjonction parfaite. Au delà des symboles du Mercure, Soufre et Sel dans trois sphères sont représentés les signes du zodiaque.

L’ensemble de l’illustration est contenue dans une circonférence divisée en 23 sections qui contiennent chacune les lettres de l’alphabet. Il manque les lettres "J", "U" et "W". Remarquez que la lettre "M" de "Mercure" est au centre tout en haut au dessus de l’étoile. Les lettres "A" et "Z" sont en bas.

Voici ci-dessus deux cartes du tarot de Marseille : La papesse et le Pape.
Remarquez que s’ils ne constituent pas un couple, comme les cartes de L’impératrice et de l’Empereur, La papesse et le Pape portent chacun la tiare papale.
Ci-dessous les armes du pape Clément VI, pape en Avignon mais né et enterré à Rosiers d’Egleton en Corrèze. Remarquez les six roses sur le blason de la famille des Roger.

Voici un charmant petit poème dans sa version intégrale :
Le Pape est mort, un nouveau Pape est appelé à régner. Araignée ! Quel drôle de nom, pourquoi pas libellule ou papillon ? Vous n’avez pas bien compris, je recommence.
Le Pape est mort, un nouveau Pape est appelé à régner. Araignée ! Quel drôle de nom, pourquoi pas libellule ou papillon ? Vous n’avez pas bien compris, je recommence.
Le Pape est mort, un nouveau Pape est appelé à régner. Araignée ! Quel drôle de nom, pourquoi pas libellule ou papillon ?

Jacques Prévert (1900 - 1977)

Poursuivons…
Johann Daniel Mylius (1585/1628) écrit dans sa Philosophia reformata en 1622 :

Voici les quatre nobles sœurs
Qui connaissent un sort semblable :
Elles te montrent les emblèmes
De l’œuvre qui sera tienne.
La première enjoint de dissoudre
Le corps que tu auras choisi,
La seconde veut que tu laves
Ta matière soigneusement,
La troisième dit de conjoindre
Les parties du corps séparées
Et la quatrième t’enseigne
À durcir la Pierre à ton feu.

Observons l’image ci-dessus :
Les quatre éléments sont représentés dans quatre globes aux pieds de quatre "femmes déesses". De gauche à droite : Terre, Eau, Air et Feu (les quatre triangles) Ces quatre femmes ou Cariatides sont sœurs et illustrent les quatre opérations : La solution, l’ablution, la conjonction et la fixation. Ces quatre sœurs sont quelque sorte quatre matras vivants qui symbolisent les quatre degrés du feu des philosophes.
Sur leurs têtes sont illustrés les quatre phases de l’Opus alchimique avec de gauche à droite : L’ombre, La Rose blanche, le Phénix et le Lion.
Il s’agit des quatre stades de l’Opus : Noir (Nigredo) Blanc (Albedo) Jaune (Citrinitas) et Rouge (Rubedo).

Il s’agit de la décomposition du processus en quatre :
Quatre éléments
Quatre degrés du Feu
Quatre couleurs
Quatre sœurs
Quatre phases de l’Opus

Le monstre de la troisième planche extrait du traité alchimique Cabala de Steffan Michelspacher, n’est pas sans rappeler le monstre ci-dessous :

Observons cette image ci-dessus :
Il s’agit d’un monstre tricéphale qui représente le Mercure philosophique. Les trois têtes correspondent au soufre, au sel et au vif-argent (ou Mercure) C’est un montre chthonien, c’est à dire qui appartient au monde caché des ténèbres et des profondeurs. Ici, l’affreuse tête de dragon signifie que le chaos initial ou la materia prima (la matière première) n’a pas encore été soumise au "processus de purification".

Pour une étude plus approfondie sur le mercure, lire l’article : Le Mercure (1)
Remarquer que ce montre se mord la queue, ce qui pour les alchimistes est une représentation de la Totalité et illustre la nature double du Mercure (volatil et fixe) Nous retrouvons une fois de plus cette symbolique dans la figure de l’Ouroboros ou Mercure des Sages qui a lui tout seul représente la Pierre philosophale et l’Alchimie :

Voici la quatrième planche du traité :

Teinture, coagulation, distillation, putréfaction,
solution, sublimation, calcination.

Observons l’image ci-dessus :

Cette gravure illustre la Conjonction, c’est à dire les noces chimiques des deux principes purifiés.
Nous observons un Temple qui se trouve à l’intérieur d’une montagne, elle-même surplombée par les sept Dieux associés aux sept métaux.
Remarquez les sept marches qui portent les noms des sept opérations alchimiques : Calcination, Sublimation, Solution, Putréfaction, Distillation, Coagulation, et Teinture.
En fait ici ce n’est pas le bon ordre des opérations pour la réalisation de l’Opus, et celui-ci semble être volontairement trompeur. Je reviendrais sur le sujet mais de toute façon il est bien question sur cette gravure de la Conjonction des opposés, c’est à dire de la confrontation des principes purifiés dont l’union permet la réalisation du Mercure Philosophique.

L’escalier mène au Temple qui abrite les époux alchimiques, c’est à dire les amours royaux. Nous pouvons observez au fond du temple qui est illuminé par sept fenêtres un athanor posé sur une petit table. C’est là que se déroule l’opération de la Conjonction ! Juste au dessus de la porte du temple, observez le toit qui est orné d’un Soleil et d’un Lune qui eux mêmes sont couronné par un Phénix.
Au dessus de la montagne se trouve les sept Dieux associés aux sept métaux nécessaire à l’Opus. Remarquez que Mercure est au sommet.

PlombÉtainFerMercureCuivreArgentOr
SaturneJupiterMarsMercureVénusLuneSoleil

Remarquez dans le fond un cercle avec la voie lactée et les 12 signes du zodiaques. Ainsi que dans les quatre coins de l’illustration le noms latins des éléments : Aqua = Eau, Ignis = Feu, Terra = Terre, Aeris = Air.

Devant la montagne deux personnages : À gauche un disciple qui se doit d’être attentif et de suivre le lièvre. Le lièvre représente la matière première et la connaissance des secrets car cet animal selon la légende garde toujours les yeux ouverts.

Cette scènette renvoie à l’axiome : Visita intériora terrae rectificandoque invenies occultum Lapidem verum medicinalem (Visite l’intérieur de la terre et par la rectification tu trouveras la véritable Pierre Philosophale cachée.)
Pour plus d’informations sur le symbole du Lièvre en alchimie, lire l’article : Lièvre
À droite, un personnage aux yeux bandés. Il représente l’ignorance de l’athée ou de l’incroyant qui ne sait pas ce qu’il se passe à l’intérieur de la montagne. Il refuse de connaître le Principe de base de la Materia Prima, c’est à dire de la psychologie.
Pour une étude plus approfondie sur la symbolique de la montagne en alchimie royale, lire l’article : La montagne alchimique

Les alchimistes voient dans le Lièvre ou le Lapin le symbole de la connaissance occulte. Ces animaux fréquentent la terre et connaissent les galeries souterraines, c’est à dire les mines.
Le lièvre ainsi que le lapin sont très abondement présents dans les différentes tapisseries de la Dame à la Licorne, œuvre sur la féminin et les cinq sens.

Observons l’image ci-dessus :

La Dame représente l’âme de la chevalerie, c’est à dire la manifestation de la sagesse et du raffinement médiéval. La Dame à la Licorne est le symbole de l’éternel féminin et s’apparente à la déesse Sophia chère au gnosticisme, ainsi qu’à la déesse Shakti indienne ou à la Shekinah de la Kabbale en tant que manifestation du "féminin divin".
Cette divinité des forêts représente la Prima Materia (mais ici dans son aspect le plus pur et raffiné c’est à dire le plus abouti). Nous pourrions dire qu’elle est la "Materiae Aperit" ou la "Materia Corporatum".
Cette Dame est une jeune vierge et, dans le cadre de cette série de tapisseries, incarne également le Récepteur c’est à dire pourrait-on dire le pôle passif.

La Licorne représente le Mercure et le Lion représente le Souffre (mais là encore lui aussi dans son aspect le plus aboutie et incarné c’est à dire au dernier stade de la Fixation)
La Licorne est, à l’opposé de la Dame, le pôle actif du Mercure des philosophes. La Licorne peut être perçue de deux façons : positive ou négative.
Positive : La corne de l’animal est un puissant contrepoison et peut être mise en parallèle avec le symbole chrétien du "calice du salut". La corne dans une certaine mesure une allégorie du divin : Christ et Saint-Esprit, le spiritus vitae ("L’esprit de vie") C’est elle qui selon la légende contient la Pierre Philosophale.
Négative : la Licorne représente les forces obscures, démoniaques, chthoniennes qui s’opposent aux puissances célestes.
Mais la Licorne est avant tout un symbole des forces vitales qui réunit les deux aspects positif et négatif, l’accord des opposés, la concordia oppositorum.
Cette sixième et ultime tapisserie de la Dame à la Licorne est une illustration du Logis alchimique ou Demeure philosophale. La Dame s’est dépouillée de ses joyaux pour être pleinement disponible à la présence du sacré. Son seul désir est en fait celui d’être en harmonie avec les étoiles et en accord avec le Ciel. C’est véritablement "l’Anima intégrée" ou "Féminin réalisé" qui est le lien entre le philosophe et Dieu.

Voici, la quatrième et dernière illustration du traité Cabala de l’ouvrage de Steffan Michelspacher :

Observons l’illustration ci-dessus :

La fontaine de l’éternelle jouvence s’élève au centre du jardin. Dans une certaine mesure elle représente le paradis terrestre retrouvé grâce au nouvel Adam régénéré, c’est à dire au Christ. Les deux époux sont agenouillés au pied de la fontaine, en adoration devant le Christ en gloire.
La Multiplication en fait est l’ensemble du processus qui relie les trois niveaux de la gravure :
● Les sept métaux sous terre,
● Dieu et le Saint-esprit au ciel,
● Le couple royal agenouillé devant le Christ Lapis.

Tout en bas et sous la terre les sept métaux qui attendent leur perfection et ne peuvent pénétrer dans le jardin. Deux épées flamboyantes les empêchent de passer. Les sept vils métaux attentent le précieux élixir pour communique la perfection de l’œuvre, c’est à dire leur purification. L’élargissement petit à petit de la conscience de l’adepte ouvre de nouvelles perspectives. Les métaux représentent la matière dénuée d’esprit, sans conscience qui relie par des liens secrets tous les atomes de la matière. Les métaux dans la psyché indique que la matière est prête au processus de transformation profonde.
(Pour la correspondance planètes/métaux voir le tableau ci-dessus).
Au-dessus et au centre : Le Christ qui est ou représente la Pierre Philosophale, c’est à dire le "Soi intérieur". Il offre deux calices à de part et d’autre :
● La Lune, Médecin du premier degré, Rose blanche ou Diane (à gauche)
● Le Soleil, Esprit immortel, Souffre fixe, ou Apollon (à droite)

Les calices offerts par le Christ au couple royal contiennent l’élixir de longue vie qui provient du petit personnage en haut à droite. Celui-ci porte en effet la croix du Christ et est relié à Dieu et au Saint-Esprit.
Remarquez la représentation des trois opérations de l’Opus avec les trois niveaux de fontaine. Au niveau de la fontaine du milieu, Mars et Vénus, qui indiquent quels métaux et quelles matières et par extension quels archétypes doivent être conjoints et associés à ce stade … (Ces deux substances salines révèlent un Feu secret !)
Mercure est en haut de la fontaine avec son caducée et l’étoile à six branches de l’harmonie Kabbalistique.
Tout en haut à gauche le demi-cercle que Dieu a accroché aux nuages après le déluge en signe d’alliance, et qui prend place par le sang du Christ dans la forme du Lapis (de la Pierre). La passion du Christ a relié l’homme à Dieu. Remarquez l’ange qui soutient la passion du Christ dans le ciel en haut à droite. Le va et vient des oiseaux qui symbolisent le Saint-Esprit depuis la passion du Christ et vers la fontaine mercurielle. Dieu envoie son esprit saint à la Fontaine des philosophes.
Telle est le principe de la Multiplication, c’est à dire de la génération et régénération de la Vie.

Observons l’image ci-dessus :

Remarquez aux pieds du Christ qui trône dans sa gloire lumineuse en forme de mandorle les figures nettement plus petites d’un empereur et de son épouse. Ce sont l’empereur Conrad II et sa femme, parents d’Henri III, commanditaire de l’œuvre. Remarquez également les symboles des quatre évangélistes sur les côtés ( L’Ange = Mathieu, Le Bœuf = Luc, Le Lion = Marc, L’Aigle = Jean)
Pour plus de détail sur cette symbolique, lire l’article : Notre-Dame de Paris (4)

Observons l’image ci-dessus :

Le moine et frère Vincent Koffskhii recueille le sang du Christ, qui est ici crucifié à l’arbre des sept métaux (Plomb, Étain, Fer, mercure, Cuivre, Argent et Or)
Adonne toi à l’étude, à la méditation, à la sueur abondante, au travail, à la coction et ne te laisse pas rebuter icelle (ceci ou cela) et un flux bénéfique, lequel issit (préfère) du cœur du fils macrocosmique nonobstant les faiblesses des choses matérielles.
Le sang du Christ à donc des vertus médicinales.

Observons l’image ci-dessus :

Dans les coins de l’image une illustration des quatre éléments : Le Feu, La Terre, l’Eau et l’Air.
En bas à droite : L’Eau. Un paysage marin avec un bateau et un gros poisson dans l’Eau. Celui-ci n’est certainement pas sans rapport avec le mythe de Jonas. À ce propos lire l’article : Jonas
En bas à gauche : La Terre avec l’évocation d’un village paisible.
En haut à droite : L’Air avec la représentation trois anges qui soufflent (Indication d’un souffle qui passe au travers d’une trinité)
En haut à gauche : Le Feu avec la présence d’une Salamandre (Animal fabuleux qui ne craint pas le feu et peut le traverser et, qui crache lui-même des flammes).

Remarquez les cinq étoiles en haut et en bas qui sont réunies entre le Soleil et la Lune. Ici, le Soleil est à gauche (côté inconscient) et la Lune à droite (côté conscient) Ces cinq étoiles représentent l’équilibre du et grâce à la Quintessence, c’est à dire au "Centre". Remarquez que le cercle est de couleur clair en haut et sombre en bas, comme l’indication du jour et de la nuit parfaitement équilibrée, c’est à dire avec la présence d’une transcendance vivante entre le conscient et l’inconscient.

Dans la partie supérieure de l’illustration, c’est à dire du côté du pôle conscient, nous voyons trois femmes. À gauche, une femme porte le triangle qui est posé sur une base est celui du Feu et de l’Air (Le triangle est posé sur une base). À droite, le triangle renversé sur son sommet est celui de l’Eau et de la Terre. Au centre, une femme montre le sceau de Salomon ou "étoile de David", c’est à dire la réunion des deux triangles de gauche et droite. Le sceau de Salomon ici représente le hiéroglyphe de la Pierre Philosophale où tous les éléments sont réconciliés et en parfait équilibre. L’union des quatre éléments (Feu, Terre, Air et Eau) qui est réputée impossible est ici représentée avec deux triangles, c’est à dire exprimée deux à deux.

Dans la partie inférieure de l’illustration, sous la terre, c’est à dire du côté du pôle inconscient, nous voyons six muses assises et un personnage central avec une lyre dans les mains. À ces six muses correspondent un métal, et, le personnage centrale est Apollon qui fait résonné avec sa lyre l’harmonie.
Or, si le chiffre "7" est souvent synonyme de plénitude (notamment dans la bible) le chiffre "6" (7-1) est souvent celui de l’imperfection (Cf. L’apocalypse de Jean du nouveau testament). Apollon est bien sûr la représentation symbolique de la lumière, de l’amour, de l’or des philosophes et de la musique.

Il est donc question d’un équilibre et d’une relation entre deux pôles (supérieur et inférieur, conscient et l’inconscient.
"3" est un chiffre qui se situe symboliquement plutôt du côté du pôle conscient. L’association des deux triangles révèle l’équilibre et l’harmonie du "4". Le chiffre "4" est un chiffre que l’on associe plutôt au pôle féminin et/ou inconscient.
En-dessous le chiffre "7" symbolise une perfection. Remarquez que le chiffre "7" est la fois 3+4 ou 4+3 mais aussi 1+6 ou 6+1. En bas le "7", si j’ose dire, c’est le féminin avec sa part masculine" (Apollon symbolise l’animus).
Donc, si l’équilibre entre le "3" et le "4" s’établit en haut ; Et en bas, si Apollon charme les "6" ; l’harmonie s’établit. Par contre, tant que le lien n’est pas établie de façon solide, inconsciemment c’est plutôt une confrontation avec Hadès ou Cerbère à laquelle il faut s’attendre … !

Remarquez à quel point les différentes gravures que nous avons extraites du traité Cabala de Steffan Michelspacher que nous avons étudié, c’est à dire : Miroir de l’Art et de la Nature, Exaltation et la purification du premier Mercure, La Conjonction et La Multiplication s’apparentent dans une certaine mesure à des Mandalas.
En effet aussi bien d’un point de vue de la construction géométrique, que de leur contenu à caractère sacré, ces gravures sont de précieux supports pour une méditation active. Ils présentent en fait le processus de mise en place de la relation intérieure de l’individu au divin, c’est à dire l’établissement de ce que le Christ nomme le "royaume de Dieu" ou l’explication du processus d’individuation sur lequel nous reviendrons.

Merci de votre lecture
Bon Magistère !

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Notes

L’Alchimiste, article : « Kabbale alchimique », in Aqua Permanens (2012).

■ À l’origine en deux parties, nous avons réuni le texte en une seule page. L’Alchimiste est un amateur de Jung et de Taoïsme. Il tient un blog soigné, notamment au niveau de la qualité iconographique et nombre d’articles sont intéressants à consulter.