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Les Douze Clefs de Philosophie🔗 cataloguesEntrée Data.Bnf absente Rechercher sur Sudoc Rechercher sur Openlibrary Rechercher sur Worldcat
Von dem grossen Stein der Uralten, Practica, una cum duodecim clavibus ex germanico


AuteursDatesTypeLieuThèmesStatut
𝔏 Basile Valentinpubl. 1599Littératurepubl. Eisleben (Allemagne)Hermésisme
Alchimie

► Ce texte est un des plus connu et reconnu du corpus alchimique, à la fois pour ses nombreuses illustrations mais aussi pour la richesse et la clarté de son propos. En témoigne, son grand nombre d’éditions et sa présence presque systématique dans les ouvrages de compilation.

■ Les figures émaillant le texte ne sont pas d’origine, et viennent de différentes éditions. La première de ces éditions illustrée vient du Le Trépied d’or {Tripus Aureus} de Michel Maïer en 1618. De même, nous avons ajouté la gravure de Jérémie Périer placée au début de l’ouvrage dans l’édition de 1624. Nous faisons également suivre à la fin du texte les frontispices supplémentaires contenus dans l’édition Von dem Grossen Stein der Uhralten, accompagnant d’autres ouvrages compilés dans cette édition, notamment De Microcosmo.

► On retrouvera quelques années plus tard, en 1612, le Sceau du Vitriol dans le frontispice de La Toyson d’or de Salomon Trismosin.

🕮 Caillet, ref.800/801/802.

🕮 Dorbon-Aîné, ref.2407 (recueil),5028,5029 (recueil) :

1. […] — Quant au « Bref traité sur la Grande Pierre des Anciens, à laquelle ont travaillé des milliers de sages depuis le commencement du monde », qui est ici dans son édition originale, il est dû à Basile Valentin, moine bénédictin et alchimiste que certains écrivains font vivre au XIIe siècle, mais qui plus vraisemblablement appartenait, si même il ne s’agit pas d’un pseudonyme, à la fin du XVIe siècle, puisqu’on rencontre dans ses ouvrages des détails sur la préparation des caractères d’imprimerie avec un alliage d’antimoine et l’indication du « morbus gallicus » qu’il appelle « nouvelle maladie des militaires » et qu’il conseille d’ailleurs de combattre par les sels de mercure, d’antimoine et de plomb. Cette édition rarissime est illustrée de 18 curieuses gravures d’une conception très naïve, qu’il est d’ailleurs tout à fait intéressant de comparer à celles de l’édition française de 1659 ; Jean Gobille qui s’en est inspiré sut leur donner toute la préciosité et toute la grâce qui caractérisent son talent.

2. Ouvrage peu commun, illustré d’un superbe frontispice allégorique gravé sur cuivre, d’une grande et belle gravure sur bois, au titre de la seconde partie, présentant un vieil adepte instruisant un jeune homme à l’ombre de l’Arbre de la Science hermétique, et de 12 curieuses figures sur bois. À la fin de ce second traité, à pagination distincte, on trouve le « Poème philosophique sur l’Azoth des Philosophes, par le sieur de Nuisement ».

3. Cette édition de 1659 est beaucoup plus estimée et plus belle que celle de 1624 et, suivant Brunet, elle est fort rare lorsqu’elle contient le traité de Bernard Trévisan. […] L’illustration du premier traité est très remarquable : elle comprend, outre la reproduction du frontispice allégorique de 1624, un frontispice gravé par Jean Gobillac et une vignette sur bois avec la devise : « Visita interiora-terræ rectificando invenies occultum lapidem », 12 figures hors texte gravées à l’eau-forte par Jean Gobille, représentant chacune des 12 clefs ; certaines de ces figures, outre leur intérêt alchimique, ont aussi celui de montrer les costumes de l’époque.

🕮 Bosc, ref.1527-1529.

🕮 Guaita, ref.1039,2182.

🕮 Jouin, ref.646.

🕮 Lenglet Du Fresnoy, ref.839:1-7.

🕮 Ouvaroff, ref.849,850,856,857.


Texte et traduction : de l’allemand au français, David Lagneau, 1660. | bs. Bibliothèque Nationale de France (Paris, France). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur la Bibliothèque Nationale de France

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie, 1660. | bs. Institut de Recherche Getty (Los Angeles, États-Unis d’Amerique). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur Internet Archive

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie, 1666. | bs. Bibliothèque numérique patrimoniale de l’université de Strasbourg (Strasbourg, France). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur Internet Archive

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie in Basilius, Valentinus ... Chymische Schriften alle, 1700. | bs. Bibliothèque d’État de Bavière (Munich, Allemagne). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur la Bibliothèque d’État de Bavière

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie, 1740. | bs. Bibliothèque de l’École polytechnique fédérale de Zurich (Zurich, Suisse). Lien vers le catalogue Lien vers e-Rara/Manuscripta

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie in Le Trépied d’or de Michel Maier, ? 1618, via Hervé Delboy Lien vers le site : nous ne savons pas de quelle version ces illustrations sont exactement tirées.

Illustrations : én. des Douze clef des Philosophie in Théâtre Chimique, comp. Lazare Zetzner, 1659 1661. | bs. Bibliothèque de Wielkopolska (Wielkopolska, Pologne) (via la Bibliothèque de l’Université Adam-Mickiewicz de Poznan). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre

Illustration : La Toyson d’or, Salomon Trismosin, . Nous ne savons pas de quelle version cette illustration est exactement tirée.

Illustrations : én. de Douze clef des Philosophie, in Musée Hermétique, 1678. | bs. Bibliothèque Beinecke de livres rares et manuscrits (New Haven, États-Unis d’Amerique). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur la Bibliothèque Beinecke de livres rares et manuscrits

Illustration : én. du Sceau du Vitriol in La Toyson d’Or, 1612. | bs. Bibliothèque Nationale de France (Paris, France). Lien vers le catalogue Lien vers l’œuvre sur la Bibliothèque Nationale de France

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PREMIER LIVRE DE LA CLAVICULE DE LA PIERRE PRECIEUSE DES ANCIENS PHILOSOPHES

Composé par Frère Basile Valentin de l’ordre de S. Benoist

AVANT-PROPOS

En ma préface (du traité de la génération des Planètes) je me suis obligé Ami Lecteur, en faveur de ceux qui sont curieux de science, et désireux de recherchée les secrets de la Nature, et enseigner ( selon le moyen que Dieu m’en a donne ) d’où, et de quelle matière nos ancêtres ont premièrement tiré, puis préparé la pierre triangulaire, donnée par la libéralité du souverain Dieu, (de laquelle ils se font servis pour entretenir leur santé durant le cours de cette vie mortelle, et pour saupoudrer comme de sel céleste les malheurs de ce monde :) Or afin que je tienne ma promesse, et que je ne t’enveloppe point dans les sophistications fallacieuses, mais que je monstre, comme l’on dit, depuis un bout jusqu’à l’autre, la source de tous biens : Sois attentif, et considère diligemment ce que je vais dire, (Si tu es désireux de science) car il ne me plais point à parler en vain, et telle n’est pas mon intention, que de me servir à cet effet de paroles frivoles, vue qu’elles ne servent de rien ; ou de bien peu pour apprendre ; bien au contraire, c’est tout mon but que de montrer en peu de mots des choses qui soient appuyées et fondées sur de bons fondements, et fondées sur des expériences très certaines.

Or il faut savoir qu’encore que beaucoup se fassent accroire de pouvoir connaître cette Pierre fort peu néanmoins en viennent à bout, car Dieu n’en a communique la connaissance de l’opération qu’à for peu, et à ceux la principalement qui haïssent le mensonge, embrassent du tout la vérité, et qui s’adonnent aux Arts et sciences, et surtout à ceux qui l’aiment grandement, et lui demandent avec grande instance et prières ce précieux don. C’est pourquoi je t’avertis, si tu veux chercher notre Pierre, de suivre mon conseil, en premier lieu, prie Dieu qu’il favorise tes œuvres : et si tu sens ta conscience chargée de péchés, je te conseille de la décharger et nettoyer par vraie contrition et confession, et que tu te délibères de persévérer toujours en la vertu, afin que ton cœur soit conforme en tout bien, et ton esprit éclairé de la lumière de vérité : outre cela délibère en toi même, que si après avoir acquis ce don divin, tu es élevé en honneur, de tendre la main aux pauvres embourbez dans le limon de la pauvreté, refaire et restaurer de ta libéralité ceux qui sont rompus et lassés de malheurs, et relever de ces richesses les accablez de misère, afin que plus aisément tu aies la bénédiction de Dieu, et qui ta foi étant confirmée par les bonnes œuvres, tu puisses enfin jouir béatitude éternelle.

Outre plus, ne méprise pas les livres des anciens Philosophes, qui pour le certain ont eu la Pierre devant nous, mais lis-les entièrement, car après Dieu ce sont ceux-là qui sont causes que je l’ai eut, lis les plus d’une fois, afin de n’oublier les principes, que les fondements te tombent, et que la lumière de la vérité ne soit éteinte.

En outre, sois diligent à la recherche des choses qui s’accordent avec la raison, et avec les livres des anciens, ne sois point muable, mais vise constamment au but, auquel tirent et s’accordent tous les sages, et souviens-toi qu’un esprit mobile n’a point de pied stable, et qu’un Architecte de légère tète a grand peine peut bâtir un édifice ferme et permanent.

“De plus, ne prenant point notre pierre, son être et sa naissance de choses combustibles (veux qu’elle combat même contre le feu et soutient, sans être aucunement offensée, tous ses efforts et embûches) ne la tire point de telles matières, lesquelles la toute puissante nature ne la peut mettre.

Par exemple ; si quelqu’un disait qu’elle est de nature végétale, ce qui néanmoins n’est pas possible bien qu’il apparaisse en elle, je ne sais quoi de végétable : car il faut que tu saches que si notre lunaire était de même nature que les autres plantes, elle ; ferrait aussi bien que les autres de matières propre au feu pour brûler et ne remporterait autre chose de lui que le sel mort, ou comme l’on dit la tête morte : et bien que nos devanciers aient écrit bien amplement de la Pierre végétable, toutefois si tu n’es plus clairvoyant que Lincée, crois moi, cela surpassera la portée de ton esprit, car ils l’ont seulement appelé végétable, pour ce qu’elle croit, et se multiplie comme une chose végétable.

Bref, sache que pas un animal ne peut étendre son espèce et engendrer son semblable, s’il ne le fait par le moyen de choses semblables, et d’une même nature, voilà pourquoi je ne veux point que tu mettes peine à chercher notre Pierre autre part, n’y d’autre côté que dans la semence de sa propre nature, de laquelle la nature l’a premièrement produite. Tire de là aussi une conséquence certaine, qu’il ne te faut aucunement choisir à cet effet un nature animale, car comme la chair et le sang ont été donnez par le Créateur de toutes choses aux seuls animaux, aussi du seul sang, à eux seul particulier, eux seuls sont nés et naissent tous les jours. Mais notre Pierre que j’ai eu par succession des anciens Philosophes, est faite et composée de deux choses, et d’une, en qui la troisième est cachée, et elle est la vérité vraiment publiée sans aucune ambiguïté et fraude, car le mari et la femme n’étaient pris par les anciens Philosophes que pour un même corps, non pas à cause de ses accidents externes qu’ils eussent, mais à cause de leur amour réciproque, et la vertu uniforme produite de leur semblable, née et inférée à l’une et à l’autre, dès leur première naissance. Et tout ainsi qu’ils ont une vertu conservative et propagative de leur espèce, tout de même la matière de laquelle est produit notre Pierre, se peut multiplier et étendre par la vertu séminale qu’elle a. C’est pourquoi si tu es vrai amateur de notre science, tu ne feras pas peu d’estime de ce que je viens de dire, et tu le considéreras attentivement, de peur de te laisser tirer avec les autres sophistes, aveuglés en cet endroit en la fosse d’ignorance, et te précipiter en ce gouffre, et enfin n’en pouvoir jamais revenir. Or mon ami, afin que je t’enseigne d’où cette semence, et cette matière est puisée, songe en toi même à quelle fin et usage tu veux faire la Pierre, alors tu saura qu’elle ne s’extrait que de racine métallique, ordonnée du Créateur à la génération seulement des Métaux. Or comprend en peu de paroles comment cela se fait.

Au commencement ; alors que l’esprit du Seigneur était porté sur les eaux, et que toutes choses étaient enveloppées dans les obscurités ténébreuses du Chaos, alors Dieu puissant et Eternel, commencement sans fin, la sagesse duquel est dès le commencement, et dès l’Eternité, par ses conseils inscrutables et providents, créa de rien le Ciel et la terre, et tout ce qui est en iceux contenu visible et invisible, quel nom que tu leur baille ou leur puisse bailler. Car Dieu fit toutes choses de rien. Or comment fut faite cette merveilleuse création, j’estime que ce n’est ici le lieu de s’en enquêter car telles matières doivent être plutôt confirmées par la foi et par la sainte Ecriture. En cette création Dieu donna et comme versa à chaque nature de peur qu’elles ne périssent, étant sujettes à corruption, à chacune sa semence, afin que par telle vertu séminale elle se puisse garantir de mort, et que les hommes, les animaux, les plantes et les métaux, puissent être perpétuellement conservés, et ne fut pas donné à l’homme telle vertu, que de pouvoir à son plaisir, contre la volonté de Dieu, faire de nouvelles semences, mais seulement lui permis de pouvoir étendre et multiplier son espèce. Et Dieu se réserva la puissance de faire de nouvelles semences, autrement la création serait possible à l’homme, comme étant la plus noble créature, ce qui ne se peut pas faire, mais doit être réservée au seul Créateur de toutes choses.

Quant à la vertu séminale des Métaux, je veux qu’ainsi tu la connaisses. Premièrement l’influence céleste par la volonté et commandement de Dieu, descend d’en haut, et se mêle avec les vertus et propriétés des Astres, d’icelles mêlée ensemble, il se forme comme un tiers entre-terrestre. Ainsi est fait le principe de notre semence, et telle est sa première production, par laquelle elle peut donner assez suffisant témoignage de sa race. De ces trois se font les éléments, à savoir l’Eau, l’Air, et la Terre, lesquels moyennant l’aide du feu, continuellement appliqué, l’on régit et gouverne jusqu’à ce qu’ils aient produit une âme qui ait moyenne nature entre les deux, un esprit incompréhensible, et un corps visible et corporel. Quand ces trois principes sont joints ensemble par vraie union, ils sont par continuation de temps, et par le moyen du feu dûment appliqué, une substance sensible ; savoir est, la Mercuriale, la Sulfureuse et la Saline, que Hermès et tous les autres devant moi, ne pouvant par delà dès le commencement du Magistère, ont appelé les trois principes, lesquels s’y étant mis proportionnellement, l’on coagule, selon les diverses opérations de nature, et la disposition de la semence, ordonnée de Dieu à cet effet.

Quiconque donc se propose de chercher la source de cette salubre fontaine, et espère de remporter par un combat désiré, le prix de ce noble Art, qu’il me croie, attestant le Souverain Dieu de cette vérité, que la part où se trouvent l’Ame Métallique, l’Esprit Métallique, et le corps Métallique, s’y trouvent aussi infailliblement, l’Argent vif, le Soufre et le Sel Métallique, lesquels nécessairement ne sauraient faire qu’un corps parfait Métallique.

Si tu ne veux pas entendre ce qu’il te faut apprendre ; ou tu n’auras jamais été élevé dans l’école de la sagesse, ou tu ne seras pas enfant de science, ou bien Dieu t’estimera indigne et incapable de telle doctrine.

Je te dis donc en peu de mots qu’il te sera impossible de tirer aucun profit félicité des matières métalliques, si tu n’assembles exactement en une forme métallique ces trois principes. Avec cela il faut que tu saches que non seulement l’homme, mais aussi tous les autres animaux terrestres, composés de chair et de sang, sont doués d’Ame et d’esprit vital, qu’ils sont dépourvus néanmoins d’entendement, qui est à l’homme seul particulier. C’est pourquoi quand ils ne sont plus en vie, l’on n’en saurait rien tirer de bon, tout étant mort en eux.

Mais quand l’Ame de l’homme est contrainte par la mort et par la disjonction d’avec le corps, de retourner à son Créateur d’où elle est venue, elle vit toujours, et enfin retourne habiter avec le corps purifié et clarifié par le feu, de telle façon que l’Ame, l’Esprit et le Corps, s’illuminent l’un l’autre d’une certaine clarté céleste, et s’embrassent de telle sorte que jamais puis après ils ne peuvent être désunis l’un l’autre.

Voilà pourquoi l’homme doit être, à cause de son âme, estimé créature fixe, d’autant que (bien qu’il semble mourir) il vivra perpétuellement, la mort de l’homme à cause de cela, n’est autre chose qu’une clarification, par laquelle (devant que passer comme par certains degrés ordonnés de Dieu) il doit après avoir quitté cette vie mortelle, vivre plus noblement, et d’une vie immortelle. Ce que n’étant ainsi des autres animaux, l’on les doit estimer créature non fixe, car après la mort ils n’ont aucune espérance de ressusciter et revivre, pour ce qu’ils sont dépourvus d’Ame raisonnable, pour laquelle a enduré et répandu son précieux sang, le vrai médiateur et unique fils de Dieu.

À la vérité si l’esprit peut habiter l’Ame et le corps, il ne s’enfuit pas néanmoins qu’ils soient liés ensemble, bien qu’ils soient en paix, et ne soient en rien discordant l’un de l’autre, car ils ont encore besoin d’un lien plus fort, à savoir de l’Ame pure, noble et incompréhensible, qui les puisse tous deux lier fermement, les garantisse de tous dangers, et défende contre tous les ennemis. Car où l’Ame s’est départie et est du tout éteinte, n’y a plus de vie en cet endroit, et n’y a aucune espérance de la recouvrer, voilà pourquoi une chose sans Ame est grandement imparfaite, et voici un grand secret, et que doit nécessairement savoir le sage qui cherche notre Pierre, ma conscience m’a obligé à ne passer sous silence un tel mystère, mais le découvrir aux amateurs de notre science. Pèse donc diligemment mes paroles, et apprends que les esprit qui sont cachés dans les métaux diffèrent beaucoup l’un de l’autre, l’un étant plus volatil, l’autre plus fixe, la même différence se trouve en leur Ame, et en leur corps. Tout métal donc qui est composé de tels esprits vraiment fixes (ce qui est donné de particulier au seul Soleil) a une grande force et vertu, par laquelle il combat même contre le feu., et par sa puissance surmonte tous ses ennemis.

La Lune a en soi un Mercure fixe, par lequel elle soutient plus longuement la violence du feu que les autres métaux imparfaits, et la victoire qu’elle remporte, montre assez combien elle est fixe, vu que le ravissant Saturne lui peut rien ôter ou diminuer.

La lascive Vénus est bien colorée, et tout son corps n’est presque que teinture, et couleur semblable à celle qu’a le Soleil, laquelle à cause de son abondance, tire grandement sur le rouge, mais d’autant que son corps est lépreux et malade, la teinture fixe n’y peut pas faire sa demeure, mais le corps s’envolant, nécessairement la teinture doit suivre, car icelui périssant, l’Ame ne peut pas demeurer, son domicile étant consommé par le feu, n’apparaissant et ne lui étant laissé aucun siège, et refuge, laquelle au contraire accompagnée demeure tout avec un corps fixe.

Le sel fixe, fournit au guerrier Mars un corps dur, fort, solide et robuste, d’où provient sa magnanimité et grand courage. C’est pourquoi il est grandement difficile de surmonter ce valeureux Capitaine, car son corps est si dur, qu’a grand peine on le blesser. Mais si quelqu’un mêle sa force et dureté avec la constance de la Lune et la beauté de Vénus, et les accorder par un moyen spirituel, il pourra faire, non point tant mal à propos une douce harmonie, par le moyen de laquelle le pauvre homme s’étant servi à cet effet de quelques clefs de notre Art, après avoir monté au haut de cette échelle, et parvenu jusqu’à la fin de l’œuvre, pourra particulièrement gagner sa vie, car la nature flegmatique et humide de la Lune peut être échauffée et desséchée par le sang chaud et colérique de Vénus, et sa grande noirceur corrigée par le Sel de Mars. Il ne faut pas que tu cherches cette semence dedans les éléments, car elle n’est pas si éloignée de nous, mais la nature nous l’a mise bien plus près, et tu l’obtiendras, si tu rectifie tellement le Mercure, le Soufre et le Sel (j’entends des Philosophes) que l’Ame, l’esprit et le corps soient si bien unis qu’ils ne se puissent jamais quitter, alors sera fait le vrai lien d’amour, et sera bâtie la maison de gloire et d’honneur. Et saches que tout ceci n’est rien autre chose que la clef de la vraie Philosophie, semblable aux propriétés célestes, et l’eau sèche conjointe avec une substance terrestre, toutes lesquelles choses reviennent toujours à même point, comme n’étant qu’une même, qui prend son origine de trois, de deux et d’une. Si tu frappes ce but et parviens jusque là, sans doute tu as accompli le magistère. Joints par après l’époux avec l’épouse, afin qu’ils soient nourris de leur chair et sang propres et soient multipliés par leur semence à l’infini, et encore que par charité je voulusse bien t’en dire d’avantage de peur néanmoins de passer les bornes que Dieu m’a limitées, je n’en parlerai pas d’avantage, ni plus amplement, craignant que l’on abuse des grands dons de Dieu, et que je sois l’auteur et cause de tant de méchancetés qui se commettraient et d’encourir l’ire divine, et ne sois condamné avec les méchants, aux peines éternelles.

Mon ami, si ces choses sont si obscures que tu n’y puisses rien comprendre, je t’enseignerai encore ma pratique, par le moyen de laquelle j’ai fait avec l’aide de Dieu, la pierre occulte, considère là diligemment, prend bien garde aux douze Clefs, et les lis plus d’une fois, puis travaille selon que je t’ai instruit, à vérité elle est un peu obscure, mais au reste fort exacte.

Prends de bon or, mets en pièces et dissout comme enseigne la nature aux amateurs de science, et le réduit en ses premiers principes, comme le Médecin a coutume de faire dissection d’un corps humain pour connaître ses parties intérieures, et tu trouveras une semence qui est le commencement, le milieu et la fin de l’œuvre, de laquelle notre or et sa femme sont produits, savoir est un subtil et pénétrant esprit, une âme délicate, nette et pure, et un Sel et baume des Astres, lesquels étant unis ne sont qu’une liqueur et eau Mercurielle.

L’on mena cette eau au Dieu Mercure son père, pour être examinée, et la voulut épouser, et de fait l’épousa, et se fit d’eux une huile incombustible, puis Mercure devint si orgueilleux et superbe, qu’il ne se reconnu plus pour soi même, mais ayant jeté ses ailes d’Aigle, il dévora sa queue glissante d’un dragon, et déclara la guerre à Mars, incontinent Mars ayant assemblé sa compagnie de chevaux légers, fit prendre Mercure, le mit prisonnier, et constitua Vulcain pour Geôlier de sa prison, jusqu’à c qu’il fut derechef délivré par le sexe féminin.

Tout aussitôt que le bruit fut su par le pays, les autres planètes s’assemblèrent et consultèrent de ce qui était de faire dorénavant, afin que tout fut gouverné avec prudence et maturité de conseil, alors Saturne avec une gravité non pareille commença en cette façon à dire le premier son avis.

Moi Saturne, le plus haut des planètes, confesse et proteste devant vous que je fus le moindre de toutes, ayant un corps faible et corruptible, de couleur noire, soumis à toutes les adversités de ce misérable monde. C’est moi toutefois qui éprouve toutes vos forces, parce que je ne saurai demeurer en une place, et m’envolant j’emporte tout ce que je trouve de semblable à moi. Je rejette la faute de cette mienne calamité sur autre que sur Mercure, qui par sa négligence et peu de soin, m’a causé tous ces malheurs. C’est pourquoi je vous prie, et conjure toutes, de prendre sur lui vengeance de cette mienne misère, et parce qu’il est déjà en prison, que vous le mettiez à mort, et le laissiez tellement corrompre et pourrir, qu’il ne lui reste aucune goutte de sang.

Après Saturne, se vint à lever Jupiter tout chenu et cassé de vieillesse, lequel ayant fait révérence, et étendu son sceptre, salua chacun selon sa qualité, et ayant fait une petite préface, loua l’avis de son compagnon Saturne, et voulut que tous ceux qui ne trouveraient pas bonne cette opinion fussent proscrits et exilés, et ainsi finit son discours.

Par après s’avança Mars avec une épée nue diversifiée d’admirables couleurs (vous eussiez dit qu’elle était entrelacée comme de miroirs jetant feu et flamme, à cause des rayons et par ça et là sortant d’icelle) et la donna à vulcain Geôlier de la prison, pour exécuter la sentence prononcée, et réduire en cendre les os de Mercure, après qu’il serait mort. Vulcain lui obéit incontinent comme exécuteur de justice, prêt à faire ce qu’on lui commandait.

Or après que Vulcain se fut acquitté de son devoir, l’on vit venir comme une belle femme blanche, et vêtue d’un habit à femme long, de couleur grise et argentine, tissu et entrelacé de beaucoup d’eau, et après l’avoir les assistant considérèrent de plus près, il connurent tous que c’était la Lune, l’épouse du Soleil, laquelle se jeta à leurs pieds, et après plusieurs soupirs accompagnés de larmes, avec une voix tremblante et entrecoupée de beaucoup de sanglot, pria que l’on délivra le Soleil son mari, emprisonné par la fraude et tromperie de Mercure, qu’il faudrait autrement qu’il périsse avec Mercure, déjà condamné à mort par le jugement des autres planètes. Mais Vulcain sachant bien ce qu’il aurait à faire, et ce qui lui avait été ordonné, boucha l’oreille à ces prière, et ne cessa d’exécuter la sentence sur ses pauvres criminels, jusqu’à ce que vint Vénus vêtue d’une robe bien rouge, doublée de vert, extrêmement belle de visage, avec une voix douce et courtoise, une contenance et façon de faire du tout agréable, portant un bouquet de fleurs odoriférantes, qui à cause de l’admirable diversité de couleurs qu’elles avaient, apportaient un merveilleux contentement aux hommes. Elle pria en langue Caldaïque Vulcain, qu’il délivre le Soleil, et le fit ressouvenir qu’il devait être racheté et délivré par le Sexe féminin, mais tout cela pour néant, car il avait les oreilles bouchées.

Comme ils parlaient ensemble, le Ciel s’ouvrit, et en sorti un grand animal avec, et un infinité de petits, lequel tua Vulcain, et à gueule ouverte dévora la noble Vénus qui priait pour lui, et cria à haute voix, les femmes m’ont engendré, les femmes ont semé et épars par toute semence et ont rempli le monde, et leur âme est unie avec moi, c’est pourquoi aussi vivrai de leur sang, ayant dit cela à haute voix, il se retire, accompagné de tous ses petits en une chambre, ferma la porte, et mangea bien d’avantage que de coutume, bu sa première incombustible, et digéra bien plus aisément son boire et manger, et créa beaucoup de nombre infini de ses petits, et cela se fit tant de fois que tout le monde en fut rempli.

Tout ceci s’étant passé de la façon, plusieurs doctes gens du pays s’assemblèrent, et se mirent ensembles à chercher le moyen de connaître ce mystère, pour avoir plus parfaite connaissance de ce fait, mais ne s’accordant point ensemble, ils se travaillaient pour néant, jusqu’à ce qu’on vit venir un vieillard qui avait la barbe et les cheveux aussi blancs que neige, il était vêtu d’écarlate depuis les pieds jusqu’à la tête, avec une couronne d’or entrelacée de pierres précieuses de grande valeur. En outre il était ceint d’une ceinture de toute gloire et bonheur, et marchant nus pieds, il parlait par un singulier esprit qui était en lui, ses paroles pénétrèrent tout son corps et de telle façon que son Ame s’en sentait, cet homme s’élevait un peu plus haut que les autres, et il fallait faire silence aux assistants, et parce qu’il était envoyé du Ciel pour déclarer et expliquer par discours physique la susdite parabole et énigme, il les admonesta de prêter les oreilles ouvertes, et l’écouter patiemment.

Ayant donc obtenu silence, il commença ainsi son discours. Eveille toi peuple mortel et regarde la lumière, de peur que les ténèbres et obscurités ne te trompent, les Dieu du bonheur, et les grands Dieux m’ont révélé ceci en dormant ! O qu’heureux est celui qui a les yeux éclairés pour voir la lumière qui lui était cachée auparavant, il s’est levé par la bonté des Dieux deux étoiles aux hommes, pour chercher la vraie et profonde sagesse : regarde les et marche à leur clarté, parce que l’on y trouve la sagesse.

Un oiseau Méridional rapide et léger arrache le cœur du corps d’un grand animal d’Orient, l’ayant arraché le dévore, baille aussi des ailes à l’animal d’Orient afin qu’ils soient semblables, car il faut que l’on ôte à la bête Orientale sa peau de Lion, et que derechef ses ailes disparaissent, et qu’ils entrent dans la grande mer salée, et en sortent derechef ayant pareille beauté, alors jette ses esprits remuant dans un puits bien creux ou l’eau ne tarisse jamais afin qu’ils luis soient rendus semblables, comme leur mère qui y est cachée, et en a été composée, et pris sa naissance des trois.

La Hongrie m’a premièrement engendrée, le Ciel et les Astres me nourrissent, la terre m’allaite. Et bien que je meure et soit enterré, je prends néanmoins vie et naissance par Vulcain, c’est pourquoi la Hongrie est mon pays, et la terre qui contient toutes choses est ma mère. Les assistants ayant entendu cela, il commença encore à parler.

Fait que ce qui est dessus soit dessous, que le visible soit invisible, le corporel incorporel, et fait derechef que ce qui est dessous soit dessus, l’invisible rendu visible, et l’incorporel corporel, et de cela dépend entièrement toute la perfection de l’art, où néanmoins habite la mort et la vie, la génération et corruption : c’est une boule ronde où se tourne l’inconstance roue de fortune, et apporte aux hommes divins toute sagesse et bonheur, l’on l’appelle de son propre nom toute chose ; Dieu toutefois est souverain, et a seul commandement sur les choses éternelles.

Or celui qui sera curieux de savoir ce que c’est que toute choses dans toutes choses, qu’il fasse à la terre de grande ailes, et la rencogne et la presse tellement qu’elle monte en haut et vole par dessus toutes les montagnes, jusqu’au firmament, alors qu’il lui coupe les ailes à force de fer, ainsi qu’elle tombe dans la mer rouge et s’y noie, puis fasse calmer la mer, et dessèche ses eaux par feu, et par air, afin que la terre renaisse, et en vérité il aura tout dans toutes choses, et s’il ne le peut trouver, qu’il regarde dans son propre sein, et cherche et visite tout ce qui est alentour de lui, et en tout le monde il trouvera tout dans tout ; ce qui n’est rien autre chose qu’une vertu stiptique et astringente des métaux et minéraux, provenant du Sel et du Soufre, et deux fois née du Mercure. Je te Jure que je ne saurais te déclarer plus amplement toutes choses dans toutes choses, vu que toutes choses sont comprises en toutes choses.

Ayant achevé ce discours, mes amis (dit-il) je crois qu’en attendant ainsi la sagesse, vous avez appris et colligé de cette mienne harangue, de quelle matière, et par quel moyen vous devez faire la Pierre précieuse des anciens Philosophes. Or cette notre Pierre ne guérit pas seulement les Métaux lépreux et imparfaits, et par régénération les réduit et convertit en une nature du tout accomplie, mais aussi conservant la santé des hommes, et les fait vivre longuement, et par sa céleste vertu m’a conduit à telle vieillesse que m’ennuyant de vivre si longuement je voudrai déjà quitter le monde.

À Dieu en soit la louange, l’honneur, la vertu, la gloire, aux siècles des siècles, pour la grâce et sagesse qu’il y a si longtemps qu’il m’a de sa libéralité donnée. Ainsi soit-il.

Ayant dit cela, il disparut de leurs yeux et s’envola en l’air. Ces choses étant passées de la façon, chacun s’en retourna d’où il était venu, et banda tout chacun son esprit, et opéra selon la sagesse que Dieu lui avait donnée.

Fin de l’avant-propos et premier livre.


Livre SECOND
contenant la première Clef de l’Œuvre des Philosophes

Chapitre I
De la préparation de la première matière.

Saches mon ami que tout corps immonde et lépreux ne sont propre à notre œuvre, car leur lèpre et impureté, non seulement ne peut rien produire de bon, mais aussi empêche que ce qui est propre puisse produire.

Toute marchandise de marchand tirée de minéraux est vendue chacun à son prix, mais lorsque elle est falsifiée, elle est rendue inutile, parce qu’elle est gâtée, et n’étant pas semblable à la naturelle, elle ne peut faire les opérations deuës.

Comme le Médecin purge le dedans du corps et nettoie toutes les ordures, par les médicaments, tout de même aussi, nos corps doivent être purgé et nettoyé de toutes leur impuretés, afin qu’en notre génération, ce qui est parfait puisse exercer des opérations parfaites, car les sages demandent un corps net, point souillé ni contaminé, parce que le mélange des choses étrangère est la lèpre et la destruction de nos métaux.

Que la couronne du Roi soit d’or très pur, et que l’on lui joigne la chaste épouse. Si donc tu veux opérer en nos matières, prends un loup affamé et ravissant, sujet à cause de l’étymologie de son nom au guerrier Mars, mais de race tenant de Saturne, comme étant son fils.

L’on le trouve dans les vallées et montagnes toujours mourant de faim. Jette lui le corps du Roi, afin qu’il s’en soûle, après qu’il aura mangé jettes le dans un grand feu pour y être du tout consommé, et le Roi sera délivré. Après que tu auras fait cela trois fois, le Lion aura du tout surmonté le Loup, et le Loup ne pourra plus rien consumer du Roi, et notre matière sera préparée et prête à commencer l’œuvre.

Et apprends que ce n’est que par ce chemin là que l’on peut opérer nos matières pures, car l’on lave et purge le Lion du sang du Loup, et la nature du Lion se délecte merveilleusement en la teinture du Loup parce qu’il y a une grande affinité et comme parentage entre le sang de l’un et de l’autre. Quand donc le Lion se sera soûlé et son esprit fortifié, ses yeux reluiront et éclaireront comme le Soleil, et sera sa force intérieure bien plus grande et de grand profit et utilité à tout ce que vous voudrez, et après qu’il aura été devemment préparé, servira de grand remède aux Epileptique, et autre détenus de grave maladie, et dix lépreux le suivront voulant boire de son sang, et tous ceux qui sont malades, quelque mal qu’il aient, se plairont grandement en son esprit. Bref tous ceux qui boiront de cette fontaine de coulate d’or, seront rendu joyeux de corps et d’esprit, jouiront d’une santé parfaite, sentiront un rétablissement de leurs forces, restauration de son sang, confortement de cœur, et entière disposition de tous leurs membres, tant au dedans qu’au dehors, parce qu’elle conforte les nerfs, et ouvre les conduits pour chasser les maladie, et introduire en leur place la santé.

Mon ami, prends garde diligemment à ce que la fontaine de vie soit très pure, et ne se mêle quelqu’autre eau étrangère avec icelle, de peur qu’il ne s’engendre un monstre, et que le salutaire poisson ne se change en venimeux poison, et si l’on a ajouté quelque eau forte et corrosive pour dissoudre les matières que l’on ôte et que l’on lave diligemment toute force corrosive, car nulle acrimonie et corrosion n’est propre à donner la fuite aux maladies, parce qu’elle pénètre, mais avec destruction et corruption du subier, et engendre bien d’avantage de maladies, et combien que l’on puisse pousser un cheville par une cheville, de même il nous faut chasser le poison par le poison, il faut néanmoins que notre fontaine soit totalement purgée, et du tout rendue exempte de corrosion.

L’on coupe tout arbre qui n’apporte pas de bon et odoriférant fruit et on ente sur le tronc une merveilleuse greffe, cela fait, le tronc produit un rameau, et de là se fait un arbre fructifiant, selon le désir du jardinier.

Le Souverain voyage par six ville céleste, il fait résidence en la septième, parce que son palais Royal est orné et embelli d’or, et de bâtiment dorés.

Si tu entends ce que je viens de dire, tu as ouvert la première porte de la première Clef, tu as passé la première barrière, mais si tu n’y voies encre goutte, et ne vois aucune clarté, tu auras beau manier et regarder le verre, cela ne te servira de rien, et ne t’aidera aucunement la vue corporelle pour trouver à la fin ce qui te manquera au commencement, car je ne parlerai pas d’avantage de cette Clef, comme m’a enseigné Luce Papirus.

LIVRE SECOND
contenant la seconde clef de l’Œuvre des Philosophes

Chapitre II

L’on trouve dans les Cours des princes diverses sorte de boissons et breuvages, et n’y en a pas un semblable à l’autre, en odeur, couleur et goût, car ils ont préparé de diverses façons, et toutefois à diverses fins, et est nécessaire pour entretenir et bailler à diverse sortes de gens.

Quand le Soleil darde et épand ses rayons par entre les nues, l’on dit communément, le Soleil à soif d’eau, c’est pourquoi nous avons de la pluie, et si cela se fait souvent, il s’ensuit presque toujours une année fertile.

Pour bâtir un superbe et magnifique logis l’on a besoin de beaucoup d’architectes, et néanmoins avant qu’il soit achevé et embelli comme il faut, car le bois ne peut pas suppléer au défaut de pierre.

Les pays contigus et proches voisins de la Mer sont enrichis par le flux et le reflux d’icelle, causé par sympathie et influence des corps célestes, car à chaque reflux elle ne leur amène pas peu de bien, mais grande quantité de précieuses richesses.

L’on habille une fille à marier de beaux et riches vêtements, afin que son époux la trouve belle, et la voyant ainsi parée, en devienne amoureux, mais quand ils doivent coucher ensemble, l’on lui ôte toutes ses sortes d’habits, et ne en laissons pas un que celui qu’elle a apporté de sa naissance et du ventre de sa mère.

Tout de même aussi quand on doit marier notre époux Apollon à sa Diane, l’on leur doit faire diverses sortes de vêtements, leur laver diligemment la tête, et même tout le corps, avec de l’eau qu’il faudra préparer avec beaucoup de distillation, car il y a de plusieurs sortes d’eaux, parce que les unes sont plus excellentes, et les autres moins, et selon que le requiert leur divers usages presque tout de même, comme j’ai dit que l’on se sert de diverse sortes de breuvages ès Cours des Princes et Seigneurs.

Et sache que si quelques vapeurs et nuages s’élèvent de la terre et s’amassent en l’Air, qu’elles retomberont à cause de la pesanteur naturelle de l’eau, et que la terre reçoit derechef son humidité perdue, de laquelle elle se délecte et nourrit, et par laquelle elle est rendue plus propre à produire son fruit ; c’est pourquoi l’on doit réitérer ses préparations d’eaux par beaucoup de distillations, de façon que la terre soit souvent imbue de son humeur, et telle humeur autant de fois tirée, comme l’Euripe laisse souvent la terre à sec, et puis y retourne toujours jusqu’à ce qu’il ait achevé son cours ordinaire.

Quand donc le palais Royal sera bâti avec bien de la peine, et paré avec grand soin, et que la mer de verre l’aura par son flux et reflux enrichi de beaucoup de richesses, le Roi y pourra sûrement entrer et loger.

Mais mon ami, prends garde que ne se face la conjonction du marié avec son épouse, qu’après avoir ôté tous leurs habits et ornement, tant du visage que de tout le reste du corps, afin qu’ils entrent dans le tombeau aussi nus comme quand ils sont venus au monde, de peur que leur demeure ne se rende pire, et ne se gâte par le mélange de quelque chose étrangère.

Je te veux encore apprendre ceci, comme par-dessus, que la précieuse eau de laquelle il faut laver le Roi, se doit faire avec grand soin et industrie, par la lutte et combat de deux champions (j’entends de deux diverses matières) car l’un d’eux doit donner le défi à l’autre pour se rendre plus prompt et encourager à remporter la victoire, car il ne faut pas que l’aigle seul fasse son nid au sommet des Alpes, parce que ses petits mourraient à cause des Neiges qui couvrent le haut d’icelles. Mais si tu joins un horrible dragon qui a toujours dans les cavernes de la Terre, et a été hôte perpétuel des montagnes froides, et couvertes de neige, Pluton soufflera de telle sorte, qu’enfin il chassera du froid dragon un esprit volant igné, qui par la violence de sa chaleur brûlera les ailes de l’Aigle, et jettera une chaleur par si longtemps, que la neige qui est au haut des montagnes soit fondue et réduite en eau, afin de bien et dûment préparer un bain minéral propre et grandement sain au Roi.

TROISIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre III

Le feu peut être étouffé et éteint par l’eau, et beaucoup d’eau versée sur un peu de feu se rend maîtresse d’icelui, ainsi notre Soufre igné doit être fait, modéré, vaincu et obtenu par l’eau dûment, par après sa force ignée surmonter et dominer les eaux se retirant. Mais l’on ne saurait ici remporter la victoire, si le Roi n’a empreint sa vertu et sa force à son eau, et ne lui ai baillé une clef de sa livrée et couleur Royale, pour par elle être dissoute et rendu invisible, il doit néanmoins derechef paraître et venir à vue. Et bien que cela ne se puisse faire qu’avec dommage et lésion de son corps, cela se fera toutefois avec augmentation de sa nature et vertu.

Un peintre peut mettre une autre couleur sur un blanc jaunâtre, un jaune rougeâtre et un vrai rouge, et bien que toutes ses autres couleurs demeurent ensemble, la dernière néanmoins est la plus en vue, et tient le premier rand par-dessus les autres. Il faut faire de même en notre magistère, quand tu l’auras fait, sache qu’il s’est levé la lumière de toute sagesse, qui resplendit même dans les ténèbres, et toutefois ne brûle pas et n’est pas brûlée, car notre soufre ne brûle pas et n’est pas brûlé, encore qu’il épande et darde sa lumière bien au loin, et ne teint point s’il n’est auparavant préparé et teint de sa propre teinture, pour par après pouvoir teindre les métaux malades et imparfaits. Et ce soufre ne peut teindre si l’on ne lui baille et empreint vivement cette couleur, car jamais le plus faible ne remporte la victoire, parce que le plus fort lui ôte, et le plus faible est contraint de la quitter au plus fort.

Par quoi, tire de ce que je t’ai dit, cette conséquence, que le faible jamais ne peut rien forcer ni aider le faible, et qu’une matière combustible ne peut préserver d’embrasement une autre comme elle combustible. Si l’on a donc besoin de protecteur pour défendre la matière combustible, tel protecteur doit nécessairement avoir plus de force et de vertu que sa partie qu’il a à défendre, et étant hors de tout danger d’incombustion doit par sa vertu naturelle vivement résister au feu. Quiconque voudra préparer notre soufre incombustible qu’il le cherche dans une matière où il est incombustiblement incombustible. Ce qui se peut faire devant que la mer salée ai englouti un corps, et icelui rejeté, qui soit sublimé jusqu’à tel degré qu’il surmonte de beaucoup en splendeur les autres Astres, et son sang soit tellement augmenté et perfectionné, qu’il puisse comme le Pélican becquetant sa poitrine sans affaiblissement de sa santé, et sans aucune incommodité des autres parties de son corps, nourrir de son sang propre tous ses petits. C’est cette Rosée des Philosophes, de couleur pourprine, et ce sang rouge du dragon, duquel ont parlé et écrit tous les Philosophes ; c’est cette écarlate de l’Empereur de notre Art, de laquelle est couverte la Reine de salut, et ce pourpre duquel tous les métaux froids et imparfaits sont échauffés et rendus du tout accomplis.

C’est ce superbe manteau, avec le sel des Astres, qui suit ce soufre céleste, gardé soigneusement de peur qu’il ne se gâte, et les fait voler comme un oiseau, tant qu’il sera besoin, et le Coq mangera le renard, et se noiera et étouffera dans l’eau, puis reprenant vie par le feu sera (afin de jouer chacun leur tour) dévoré par le Renard.

QUATRIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre IV

Toute chair née de la terre sera dissoute, et retournera en terre, afin que ce sel terrestre aidé par l’influence des Cieux, fasse lever un nouveau germe, car s’il ne se fait aucune terre, il ne se pourra aussi faire aucune résurrection en notre œuvre parce que le baume de nature est caché en la terre, comme aussi le Sel de ceux qui y ont cherché la connaissance de toutes choses.

Au jour du jugement le monde sera jugé par le feu, et ce qui a été fait de rie, sera par le feu réduit en cendre, de cette cendre renaîtra un Phœnix, car en icelle est caché le vrai tartre, duquel étant dissout l’on peut ouvrir les plus fortes serrures du palais Royal.

Après l’embrasement général, il se fera une nouvelle terre, et de nouveaux Cieux, et un homme nouveau, bien plus splendide et glorieux qu’il n’était lorsqu’il vivait au premier monde, parce qu’il sera clarifié.

De cendres et de sable décuit au feu, se fait par un verrier, du verre à l’épreuve du feu, et de couleur semblable à de claires pierreries, et l’on ne l’estime plus pour cendres, l’ignorant attribue cela à grande perfection, mais non pas l’homme docte, d’autant que cela lui est par longue expérience et connaissance qu’il en a rendu trop familier et coutumier.

L’on change les pierres en chaux propre à beaucoup de choses, et avant que la chaux soit faite par le moyen du feu, ce n’est autre chose que pierre, de laquelle on ne se peut servir au lieu de chaux, mais elle se cuit par le feu, et recevant de lui un haut degré de chaleur, acquiert une telle vertu propre que l’esprit igné de la chaux est venu à sa perfection, qu’il n’y a rien qui lui puisse être comparé.

Toute chose réduite en cendres montre et met en vue son Sel. Si tu sais en sa dissolution garder séparément son Soufre et son Mercure, et d’iceux redonner avec industrie ce qu’il faut donner au sel, il se pourra faire le même corps qu’avant sa dissolution. Ce que les sages de ce monde appellent folie, et réputent à mensonge, et crient qu’il est impossible à l’homme pêcheur de faire une nouvelle créature, ne prenant pas garde que ça été auparavant une créature, et que l’artiste faisant démonstration de sa science, a seulement multiplié la semence de la nature.

Celui qui n’a point de cendres ne peut faire de Sel propre à notre œuvre, car elle ne saurait se faire sans Sel, parce qu’il n’y a rien que lui qui baille de la force à toutes choses.

Tout ainsi que le Sel conserve toute choses, et les garde de pourriture, de même le Sel des Philosophes défend et préserve tous les métaux qu’ils ne puissent être du tout détruits ou réduits tellement à néant, qu’il ne se puissent derechef faire quelque chose, sans que se meure aussi le baume et l’esprit du Sel qu’ils ont, car en ce cas il demeurerait seulement un corps mort qui ne pourrait plus servir à rien, parce que les esprits métalliques le quitteraient, lesquels étant ôtés et perdus par la mort naturelle, laisseraient leur domicile vide et mort, et auquel l’on ne pourrait plus rémettre de vie.

Mais, mon ami, sache que le Sel provenant de cendres a pour le plus souvent une vertu occulte, il ne peut néanmoins servir de rien si son dedans n’est tourné au dehors, car il n’y a que l’esprit qui donne la vie et la force ; le corps ne peut rien seul. Si tu peux trouver cet esprit, tu aura le Sel des Philosophes, et l’huile vraiment incombustible tant renommée dans les livres des anciens sages.


Si devisant à moi le nombre tu doublais,
Si qu’avec eux m’emporter tu voulusse :
Peu toutefois de Sages trouverais
Qui ma vertu et ma force connusse.

CINQUIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre V

La vie qui est cachée dans la terre produit choses qui prennent naissance d’icelle, quiconque donc dit que la terre n’est point animée, est menteur, car ce qui est mort ne peut rien donner à un vivant, et n’est susceptible d’aucune chose, parce que l’esprit de vies s’en est envolé et dissipé. C’est pourquoi l’esprit est la vie et l’âme de la terre, où il demeure et acquiert ses vertus empruntées à la nature terrestre par l’être céleste et propriétés des Astres. Car toutes les herbes, arbres, racines, métaux et minéraux reçoivent leur force et nourriture de l’esprit de la terre, parce que c’est la vie que cet esprit qui est nourrit des Astres, et substante toutes choses qui croissent sur la terre. Et comme la mère nourrit elle même l’enfant qu’elle porte dans son ventre, de même la terre produit et nourrit de l’esprit dissolu du Ciel les minéraux qu’elle porte dans ses entrailles.

Ce n’est donc pas la terre qui donne les formes à chaque nature, mais l’esprit de vie qu’elle contient. Et si elle était une fois destituée de son esprit, elle serait morte, et ne pourrait donner aucun aliment, parce qu’elle manquerait de l’esprit de son Soufre qui conserve la vertu vitale, et qui de sa vertu fait germer toutes choses.

Deux choses contraires demeurent bien ensemble, ils ne se peuvent néanmoins bien accorder, car vous voyez que mettant le feu dans la poudre à canon, ces deux esprits desquels elle est composée se séparent l’un de l’autre avec un grand bruit et violence, et s’envolant en l’air ne peuvent plus être vu de personne, et on ne sait où ils sont allés, et ce qu’ils sont devenus, si l’on n’a appris quels ils sont, et en quelle matière ils étaient cachés.

Par la tu connaîtras que la vie n’est qu’un pur esprit, c’est pourquoi tout ce que l’ignorant estime être mort, doit vivre d’une vie incompréhensible, visible néanmoins et spirituelle, et être en icelle conservé. Si tu veux que la vie coopère avec la vie, ces esprits sont alimentés et nourris de rosée du Ciel, et prennent leur extraction d’un être céleste élémentaire et terrestre, que l’on nomme matière sans forme.

Et tout ainsi comme le fer attire à soi l’aimant par la sympathie et qualité occulte qui est entre eux deux, de même il y a dans notre or de l’aimant qui est la première matière de notre pierre précieuse. Si tu entends ceci, te voilà assez riche, et heureux pour ta vie.

Je te veux apporter encore un exemple dans ce chapitre, regardant dans un miroir l’on voit la réflexion des espèces, la même ressemblance de celui qui regarde et si celui là veut toucher de la main son image, il ne touche que le miroir qu’il a regardé, tout de même aussi l’on doit tirer de cette matière un esprit visible qui soit néanmoins incompréhensible. Cet esprit est la racine de vie de nos corps, et le Mercure des Philosophes, duquel l’on prépare industrieusement la liqueur de notre art, que tu rendras derechef matérielle, et fera parvenir par certains moyens d’un degré très bas, à une souveraine perfection d’une plus parfaite médecine. Car notre commencement est un corps bien lié et solide, le milieu est un fuyant esprit et une eau d’or sans aucune corrosion, par le moyen de laquelle les sages jouissent de leurs désirs en cette vie. Et la fin est une médecine bien fixe, tant pour le corps humain que pour les corps métalliques, la connaissance de laquelle a été plutôt donné aux Anges qu’aux hommes, bien que quelques-uns uns l’aient eu, qui l’ont demandée instamment et avec prières continuelles à Dieu, et n’usent envers lui et les pauvres d’ingratitudes.

Et de surcroît je te dis ceci avec vérité qu’un travail doit succéder à un travail, et une opération suivre l’autre, car au commencement l’on doit bien purger et nettoyer notre matière, puis la dissoudre, et mettre en pièce, et réduire en poudre, et en cendres, par après s’en doit faire un esprit volatil aussi blanc que neige, et un autre aussi volatil et aussi rouge que sang, ces deux là en contiennent un tiers, et ce n’est toutefois qu’un seul esprit, et ce sont eux trois qui conservent et prolonge la vie. Conjoints les ensemble, et leur donne un boire et manger propre à leur nature, et les tiens en un lit de rosée, et qu’il soit chaud jusque au terme de la génération. Et tu verras quelle science t’a donné Dieu et la nature. Et saches que jamais je ne me suis ouvert et allé si loin, que de découvrir tels secrets, et Dieu a plus donné de force et de miracles à la nature que pas un des hommes à peine puisse croire. Mais il m’a été donné certaines bornes et limites pour écrire, afin que ceux qui viendront après moi puissent publier les effets admirables de la nature, lesquels bien que Dieu permette d’en traiter, sontnéanmoins, par les ignorants et insensés, estimés illicites et supernaturel. Mais le naturel prend son origine du supernaturel, et toutefois si tu conjoints toutes ces choses tu ne trouveras rien que purement naturel.

SIXIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre VI

Le mâle sans femelle n’est qu’un demi-corps, comme aussi la femelle sans mâle, car étant l’un sans l’autre, ils ne peuvent pas engendrer et multiplier leurs espèces, mais quand ils sont mariés et mis ensemble, ils sont un corps parfait et accomplit, et propre à la génération.

Un champ par trop ensemencé est rendu surchargé et infructueux, et ses fruits ne peuvent parvenir à maturité, ne l’étant pas aussi assez, il ne vient que bien peu de grain, et encore mêlé avec beaucoup d’ivraie inutile.

Le marchant qui veut acheter et débiter sa marchandise avec conscience, la donne à son prochain selon le taux de justice, de peur d’encourir la malédiction, mais pour sembler faire plaisir aux pauvres.

Beaucoup de monde se noie dans les grandes et profondes rivières, mais aussi les ruisseaux sont aisément taris et desséchés par la chaleur du Soleil et nous en sommes aisément privés.

Voilà pourquoi afin d’avoir bonne issue de ton entreprise, tu prendras garde diligemment à choisir avec prudence, un certain poids et mesure en la conjonction des liqueurs Physiques, et afin que le plus grand ne pèse pas plus que le moindre, et qu’étant l’action du moindre débilitée ou empêchée, la génération ne soit aussi retardée, car les trop grandes pluies ne sont pas bonnes aux fruits de la terre, et la trop grande sécheresse les avance par trop tôt, et les fait mourir devant le temps. Puis le bain étant entièrement préparé par Neptune, mesure avec grande industrie et diligence ton eau permanente, et prends bien garde à ne faillir en donnant ou trop ou trop peu.

L’on doit donner à manger un Cygne blanc à l’homme double ignée, afin qu’ils se tuent l’un l’autre, et ressuscitent l’un quant et l’autre, que l’air qui vient des quatre parties du monde occupe les trois parts du logis fermé de cet homme igné, afin que l’on puisse entendre la chair du Cygne, disant son dernier adieu, et le Cygne rôti sera pour la table du Roi. Et la voix mélodieuse de la Reine plaira grandement aux oreilles du Roi igné, il l’embrassera amiablement pour la grande affection qu’il lui porte, et sera repu d’icelle jusqu’à ce qu’ils disparaissent tous deux, et d’eux deux ne soit fait qu’un corps.

Un sel est aisément vaincu et surmonté par les deux autres, notamment s’ils peuvent exercer leur malice, propose toi donc comme une chose du tout arrêtée, qu’il est besoin du souffle d’un double vent que l’on appelle Vulturne ou Sud Sud Est, puis d’un vent simple qui se nomme Eurus ou vent de Levant et du Midi, après qu’ils se seront rapaisés, et l’air converti en eau tu croiras à bon droit qu’il se fera une chose corporelle d’une chose incorporelle, et que le nombre prendra la domination sur les quatre saisons de l’année au quatrième Ciel, après que les sept Planètes auront l’une après l’autre fait le temps de leur domination qu’il achèvera son cours dans le bas du Palais, et sera rigoureusement examiné, et ainsi les deux auront surmonté et mis à mort le seul.

Il est ici requis une grande prudence et doctrine, si tu désire acquérir par ton art de grandes richesses, afin que ce fasse dûment la division et conjonction. Ne met pas un poids faux, et le premier qui se rencontrerait par hasard devant toi. Mais c’est ici le vrai pilier et fondement de tout le magistère, que tu mettes à fin et perfection ce chapitre, par le Ciel de l’art, par l’air, et la terre, vraie eau et feu semblable, et par conjonction et admission de poids, mise comme je t’ai avec toute vérité enseigné.

SEPTIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre VII

La chaleur naturelle conserve la vie de l’homme, étant icelle dissipée et perdue, il est de nécessité qu’il meure.

L’usage modéré du feu nous défend des injures du froid, mais si tu en veux user outre raison et plus qu’il ne faut, il nuit et apporte de la corruption.

Il n’est pas besoin que le Soleil touche la terre de près de son corps et substance, mais il suffit qu’il lui communique sa vertu et lui donne des forces, par le moyen de ses rayons dardés en terre, car par leur réfection, il a assez de force pour l’acquitter de sa charge, et par la continuelle concoctions fait mûrir toutes choses, parce que ses rayons jettent flammes, se dispersant par l’air sont par icelui tempérés, de sorte que le feu, moyennant l’air, et l’air moyennant le feu, s’entre aiment l’un l’autre produisant leurs effets.

La terre ne peut rien produire sans l’eau, ni l’eau sans la terre ne rien faire germer. Or tout ainsi que l’eau et la terre ne s’entraidant point ne peuvent rien engendrer séparément, de même le feu ne se peut passer de l’air, ni l’air du feu, car ôtant l’air du feu, vous lui ôtez sa vie, le feu aussi étant éteint, l’air ne peut faire aucune de ses fonctions ni par sa chaleur vivifier ni consumer la superflue humidité de l’eau.

Les vignes ont besoin d’une plus grande chaleur en Automne, pour avancer et faire parfaitement mûrir les raisins déjà presque murs, qu’au commencement du Printemps, et tant plus qu’il a fait chaud en Automne, elles rendent par ce moyen de meilleur vin, et plus délicat, et tant moins il y a eu de chaleur aussi rapportent-elles un vin qui a moins de force, et qui sent plus l’eau.

En Hiver le commun peuple voyant la terre toute gelée et ne pouvant rien produire de vert, estime que tout est mort, mais venant le printemps et le froid se retirant, vaincu par la chaleur du Soleil qui monte sur notre horizon, toutes choses semblent revivre, les arbres et herbes commencent à pousser, les animaux qui fuyant la dure rigueur de l’Hiver, s’étant cachés dans les cavernes de la terre sortent de leurs grottes, tout sent bon, et l’agréable et belle diversité de couleur et de fleurs fait preuve des vertus et forces de tout ce qui commence à reverdir, venant par après l’Eté, de cette variété de fleurs naissent toutes sortes de fruits, puis suit l’Automne abondant, qui le perfectionne et mûrit. C’est pourquoi nous remercions éternellement Dieu, qui a constitué un si bel ordre, et une telle suites des choses naturelles.

Ainsi se suivent et coulent toutes les saisons, après une année vient l’autre, et cela se continuera jusqu’à ce que Dieu fasse périr le monde, et que ceux qui possèdent la terre soient glorieusement élevés par le Dieu de gloire, et mis en honneur. De là cessera toute action de créature terrestre et sublunaire, et au milieu d’icelle viendra un créature céleste et infinie.

En Hiver le Soleil faisant sa course bien loin de nous, ne peut pas traverser ni fondre les grandes neiges, mais s’étant au Printemps approché il chauffe l’air, et sa force étant augmentée fond la neige, et la résout en eau, car le plus faible est contraint de quitter au plus fort.

Il faut aussi aviser et prudemment gouverner le feu, de peur que l’humeur de Rosée ne soit desséchée plutôt qu’il ne faut, et ne se fasse une trop hâtive liquéfaction, et dissolution de la terre des Sages. Si tu fais autrement tu ne peupleras ton vivier que de scorpions au lieu de bon poisson. Si donc tu veux bien mener toutes tes opérations prends l’eau céleste sur laquelle était porté et se mouvait au commencement l’esprit de Dieu, et ferme la porte du Palais royal, car par après tu verra le siège mis devant la ville céleste par les ennemis mondains. C’est pourquoi il faut mortifier et entourer ton ciel de triple muraille, rempart, et ne laisse qu’une seule avenue ouverte et libre, bien munie de fortes garnisons. Ayant mis ordre à cela, allume la lumière de sagesse, et cherche la dragme perdue, et éclaire tant qu’il sera de besoin. Sache que les animaux et autres imparfaits habitent la terre à cause de la froide disposition de leur nature. Mais à l’homme est assigné un domicile au-dessus, à cause de l’excellent tempérament de sa nature. Et les esprits célestes n’étant composés d’un corps terrestre, et sujets à pêchés et corruption comme celui de l’homme, mais d’un céleste et incorruptible, ont un tel degré de perfection, qu’ils peuvent sans être aucunement offensés, supporter le chaud et le froid, tant au haut qu’au bas. Mais l’homme clarifié ne sera pas moindre que les esprits célestes, ainsi à eux du tout semblables. Dieu gouverne le Ciel et la Terre, et fait tout dans toutes choses.

Si nous gouvernons bien nos amis, enfin nos serons enfants et héritiers de Dieu, afin de mettre en exécution ce que nous semble maintenant impossible, mais cela se peut faire avant que toute l’eau soit tarie et desséchée, et que le Ciel et la Terre ensemble le genre humain soient jugés et consumés par le feu.

HUITIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre VIII

Il ne se peut faire aucune génération ni d’homme, ni d’aucun autre animal sans putréfaction, et ne peut germer aucune semence jetée en terre, ou quelque chose que ce soit de végétable, sans que premièrement elles se pourrissent, et même que beaucoup d’animaux imparfaits prennent leur vie et origine de la seule pourriture, ce qu’à bon droit l’on doit mettre entre les merveilles de Nature, qui fait ceci, parce qu’elle a caché en terre une grande vertu productrice qui se lève excitée par les autres éléments, et par l’influence de la semence céleste.

Les bonnes femmes des champs en savent bien donner un exemple, car elles ne peuvent élever une poule pour leur petit mélange, sans putréfaction de l’œuf duquel est enclos le petit poulet. Du pain mis dans du miel naissent des fourmis par la pourriture qu’accueille le miel, ce qui n’est pas aussi petite merveille de nature.

Tout le monde voit tous le jours qu’ils engendre des vers de chair gâtée et pourrie dans le corps des hommes, des chevaux, et d’autres bêtes. Comme aussi les araignées, des vers et autres vermines, dans les noix pourries, poires et autres fruits semblables. Bref qui est ce qui peut nombrer les espèces infinies des animaux insectes et imparfaits, qui naissent de pourriture et corruption. Cela se montre aussi manifestement des plantes, où l’on voit qu’il croît beaucoup de sortes d’herbes, comme orties et autre de la seule pourritures, des lieux même où telles herbes n’ont jamais été ni semées, ni plantées. La raison en est telle, parce que la terre de tels lieux a une certaine disposition à produire ces méchantes herbes, et est grosse de leurs semences infuses des corps célestes dans ses entrailles, et excitée par leur propre pourriture à germer et reverdir, lesquelles semences venant à aider le concours des autres éléments, produisent une substance corporelle convenante en leur nature. Ainsi peuvent les Astres faire lever, par le moyen des Eléments une nouvelle semence que l’on n’ait point encore vue, laquelle étant plantée dans terre et pourrie, peut croître et multiplier, mais l’homme n’a pas la puissance et vertu d’en produire une nouvelle, car l’on ne lui a pas commis le gouvernement des opérations élémentaires et célestes, et s’engendre diverses sortes d’herbes de la seule pourriture. Mais d’autant que cela est rendu trop familier au peuple par fréquente expérience qu’il en a, il ne les considère pas plus exactement, et ne pouvant imaginer aucunes causes de telles choses, il pense que cela se fait par l’accoutumance, mais toi qui dois avoir une science plus relevée, pénètre plus avant que le vulgaire, et cherche par raisons les principes et les causes d’où (moyennant la putréfaction) se fait telle vertu vitale, non pas comme la connaît le simple peuple par l’accoutumance, mais comme le doit savoir le sage et diligent inquisiteur des effets de la nature, vu que toute vie provient de pourriture.

Chaque élément est sujet à génération et corruption, c’est pourquoi tout amateur de sagesse doit savoir qu’en chacun d’iceux les trois autres sont occultement contenus, car l’air contient en soi le feu, l’eau et la terre, ce qui (quoi qu’il semble incroyable) est néanmoins très vrai. Ainsi le feu comprend l’Air, l’eau et la terre. La terre, l’eau, l’air et le feu. Autrement ne se pourrait faire aucune génération. Bref l’eau enclôt en soi la terre, l’air et le feu, autrement elle ne serait pas propre à produire chose aucune, et bien que chaque Elément soit distingué formellement de chacun des autres, ce n’est pas à dire que pour cela ils soient séparés d’ensemble, comme il se voit clairement en la séparation des Eléments par distillation.

Or afin que l’ignorant n’estime mon discours frivole et ne servant à rien, je te le veux démontrer par preuves suffisantes. Apprends donc, toi qui est curieux de savoir la dissection et anatomie de la nature, et la séparation des éléments, qu’en la distillation de la terre, l’air comme étant plus léger que les deux autres, se distille le premier, puis après l’eau, le feu à cause de sa nature spirituelle commune à l’un et à l’autre, et naturelle sympathie, est conjoint avec l’air, la terre demeure au fond et contient le Sel de gloire. En la distillation de l’eau, le feu et l’air sortent les premiers, puis l’eau, la partie terrestre demeure toujours au fond. De même du feu réduit en substance visible et plus matérielle que de coutume, l’on en peut tirer le feu, l’air, l’eau et la terre, et les conserver à part. Semblablement l’air est des trois autre, pas un d’iceux ne se pouvant passer de lui, la terre n’est rien, et ne peut rien produire sans l’air. Le feu ne peut brûler et ni vivre sans lui. L’eau manquant de l’air ne cause aucune génération. Outre plus l’air ne consume rien et ne dessèche aucune humidité sans chaleur naturelle. Se trouvant donc une chaleur dans l’air, par conséquent il y doit avoir du feu, car tout ce qui est de nature chaude et sèche, doit aussi participer de la nature du feu. C’est pourquoi tous les quatre éléments doivent être conjoints ensemble, et ont toujours le soin l’un de l’autre. Aussi voit-on qu’ils sont mêlés ensemble en la production de toutes choses. Celui qui contredit à telle doctrine, n’a jamais entré dans le cabinet de la Nature, et n’y visite ses plus cachés secrets.

Saches que ce qui naît par putréfaction est ainsi engendré. La terre se corrompt aucunement à cause de l’humeur qu’elle a, qui est principe de putréfaction, car rien ne peut pourrir sans humeur ; à savoir sans l’élément humide de l’eau. Or si la génération doit provenir de pourriture, elle doit être excitée par la chaleur qui se rapporte à l’élément du feu, car rien ne peut venir au monde sans chaleur naturelle, pour conclusion si la chose qui doit être produite à besoin d’esprit vital et de mouvement, il lui faut aussi de l’air, car s’il ne coopérait point avec les autres, et ne faisait sa fonction, la génération ou plutôt la matière de la chose qui doit être produite s’étoufferait elle-même par faute d’air, et la génération se ferait derechef corruption, ensuite de quoi cela est plus clair que le jour, que les quatre éléments sont grandement nécessaires en toute génération, et d’avantage qu’un chacun d’eux fait voir clairement ses forces et opérations en chacun des autres, mais principalement en la corruption, car sans elle rien ne peut et ne pourra jamais venir au monde, et tiens cela pour arrêté que les quatre éléments sont requis à toute production de quelque chose que ce soit. L’on doit connaître par-là qu’Adam que Dieu créa du limon de la terre, n’exerça aucune action vitale, et ne vécu point jusqu’à ce que Dieu lui eu soufflé le souffle et esprit de vie, et qu’icelui infusé, il commença tout aussi tôt à vivre. Le Sel c’est à dire, son corps se rapportait à la terre, l’air inspiré était le Mercure, c’est à dire l’esprit, et le souffle de l’inspiration lui donnait tout aussitôt une chaleur vitale, et s’était le soufre, c’est à dire le feu, aussitôt Adam commença à se mouvoir, et donna par ce mouvement une assez suffisante preuve d’une âme vivante, car le feu ne peut pas être sans l’air, ni au contraire l’air sans le feu, l’eau était mêlée à tous deux également et proportionnellement ensemble.

Adam fut donc premièrement composé de terre, d’eau, d’air et de feu, après d’âme, d’esprit et de corps, puis de Mercure, de Soufre et de Sel.

Eve semblablement la première femme, et notre première mère participa de toutes ces choses, car elle fut tirée et produite d’Adam qui en était composé. Remarque cela que je viens de dire. Or afin de retourner à mon propos de la putréfaction, il faut que tout amateur et inquisiteur de sagesse tienne cela pour certain, que semblablement aucune semence métallique ne peut opérer, et ne peut être aucunement multipliée, si elle n’a été entièrement pourrie de soi même, et sans mélange d’aucune chose étrangère, et comme nulle semence végétable ou animale ne peut (comme il a été dit ci-dessus) étendre et multiplier son espèce sans putréfaction, de même en faut-il juger des métaux. Et cette putréfaction se doit faire par les opérations des éléments, non pas qu’ils soient (comme j’ai déjà enseigné) leur semence, mais parce que la semence métallique prenant sa naissance d’un être céleste, astral et élémentaire, et étant réduit en un corps sensible, doit être putréfié par le moyen des éléments.

D’avantage, remarque que le vin a un esprit volatil, car en le distillant l’esprit sort le premier, le phlegme le dernier, mais étant par chaleur continue tourné en vinaigre, son esprit n’est plus si volatil, car en la distillation du vinaigre, le phlegme aqueux monte le premier au haut de l’alambic, et l’esprit le dernier, et bien que ce soit une même matière en l’un et l’autre, il y a bien néanmoins d’autres qualités au vinaigre qu’au vin, parce que le vinaigre n’est plus vin, mais une pourriture du vin, qui par la continuelle chaleur s’est changé en vinaigre, et tout ce qui est tiré par le vin ou par son esprit, et rectifié dans un vaisseau circulatoire à bien d’autres forces et opérations que ce qui est tiré par le vinaigre. Car si on tire le verre de l’Antimoine, par le vin ou par son esprit, il est trop laxatif et purge avec trop de véhémence par en haut, d’autant que sa vertu vénéneuse n’étant pas surmontée et éteinte, il est encore entre les bornes de poison, mais si on le tire par vinaigre distillé, ce qui en viendra sera de belle couleur, puis si tirant le vinaigre par le bain-marie l’on lave la poudre jaune qui demeure au fond, versant beaucoup de fois de l’eau commune dessus, et autant de fois la retirant et que l’on ôte toute la force du vinaigre, il se fait une poudre douce qui ne lâche pas le ventre comme devant ; mais qui est un excellent remède qui guérissant beaucoup de maladies, est à bon droit réputé entre les merveilles de la Médecine. Cette poudre mise en lieu humide se résout en liqueur, qui sans faire douleur aucune confère grandement aux maladies externes, cela suffise. Bref en ceci consiste tout le principal de ce chapitre, savoir est que une créature céleste, la vie de laquelle est nourrie des Astres, et alimentée des quatre éléments meure, puis se putréfie, après cela, les Astres, moyennant les Eléments qui ont cette charge, redonneront derechef la vie à ce corps pourri, afin qu’il s’en fasse un céleste qui prendra sa plume en la plus haute ville du firmament. Ayant fait cela tu verras le terrestre du tout consumé par le céleste, et le corps terrestre toujours en céleste Couronne d’honneur et de gloire.

NEUVIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre IX

Saturne le plus haut des Planètes, est le plus bas et abject en notre magistère, il tient néanmoins la principale Clef, et étant le vil, et n’ayant presque point d’autorité, il tient le plus beau lieu, et bien que par sa volonté il se soit acquis le plus haut par-dessus les autres Planètes, il doit toutefois choir au plus bas, en lui coupant les ailes, et être sa lumière obscure, grandement diminuée, et par sa mort venir toute la perfection de l’œuvre, afin que le noir soit changé en blanc, et le blanc prenne la couleur rouge ; et doit surmonter toutes les autres planètes par l’avènement de toutes les couleurs qui sont au monde, que l’on verra jusqu’à ce que vienne la couleur surabondante du Roi triomphant et comblé d’honneur, marque très certaine de la victoire ; et encore que Saturne semble plus vil et moindre de toutes, il ne laisse pas d’avoir une si grande vertu et efficace, qu’étant la noble essence (qui n’est autre chose qu’un froid par trop excédant) conjointe avec un corps métallique volatil et igné, il le rend fixe, et aussi solide, voire même meilleur et plus ferme et permanent que lui même n’est. Cette transmutation prend son origine du Mercure, du Soufre et du Sel, et se faisant par eux, on prend aussi sa fin et dernier période. Cela passera la portée de beaucoup, comme aussi à la vérité ce mystère est si haut que difficilement le peut-on comprendre. Mais d’autant plus que la matière est vile et abjecte, d’autant plus doit être l’esprit relevé et subtil, afin d’entretenir l’inégalité du monde, et que les maîtres puissent être distingués des serviteurs, et les serviteurs reconnus à leur ministère d’avec les maîtres.

De Saturne préparé avec industrie sortent beaucoup de couleurs, comme la noire, la grise, la jaune et la rouge, et d’autres moyennes entre celles ci, de même la matière des Philosophes doit prendre et laisser beaucoup de couleurs, avant qu’elle parvienne à la fin et perfection désirée, car autant de fois que l’on ouvre une nouvelle porte au feu, autant de fois le Roi emprunte de ses créanciers de nouveaux habits, jusqu’à ce que se remettant en crédit, il devienne riche, et n’aie plus affaire d’aucun créancier.

Vénus tenant en main le gouvernement du Royaume, et distribuant selon la coutume les offices à chacun, apparaît la première, brillante et éclatante d’une manière Royale. La Musique porte devant elle un étendard rouge, au milieu duquel est artistement dépeinte la Charité vêtue d’un habit vert. Saturne est son Prévôt de l’hôtel et Intendant de sa maison, et lorsqu’il est en quartier, l’Astronomie marche devant lui, portant une enseigne qui à la vérité est noire, mais néanmoins est le portrait de la foi habillée de jaune et de rouge.

Jupiter avec son sceptre est en qualité de Vice-Roi. La rhétorique lui va portant la science de couleur blanchâtre et grise, où est représentée l’Espérance avec de fort agréables couleurs.

Mars Capitaine expérimenté au fait de la guerre, règne aussi tout échauffé et par la chaleur. La Géométrie le devance, lui portant son guidon ensanglanté, et teint de sang, au milieu duquel est empreint l’effigie de la Force vêtue d’un habit rouge, Mercure est le Chancelier de tout, l’Arithmétique porte son enseigne diversifiée de toutes les couleurs du monde, (car il y en a une variété indicible) au milieu est la tempérance dépeinte d’une admirable diversité.

Le Soleil est gouverneur du Royaume, la Grammaire tient sa bannière, en laquelle on voit la justice peinte en or, et bien qu’un tel gouvernement du avoir plus de puissance et autorité en son Royaume, Vénus néanmoins l’a par sa grande splendeur surmontée, et lui a fait perdre la vue.

La Lune aussi enfin apparaît, la Dialectique lui porte la sienne de couleur très blanche et reluisante, en laquelle se voit la Prudence peinte de bleu, et parce que le mari de la Lune est mort, elle doit lui succéder au Royaume. C’est pourquoi ayant fait rendre le compte a Vénus, elle lui recommandera l’administration et super abondance du Royaume, et par l’aide du Chancelier reformera l’état, et y mettra une nouvelle police, et prendront tous deux domination sur la noble Reine, Vénus. Remarque donc qu’une Planète doit faire perdre à l’autre, office, domination et Royaume, et lui ôter toute puissance et majesté Royale, jusqu’à ce que les principales d’elles tiennent le Royaume en main, le conservant, et par leur constante et permanente couleur, remportant la victoire avec leur mère, et elle dès le commencement conjointe, en jouissent d’une perpétuelle et naturelle association et amour, lors l’ancien monde ne sera plus monde. Et en sera fait un autre nouveau en sa place, et une Planète aura tellement consommé spirituellement l’autre, que les plus fortes s’étant nourries des autres, seront seules demeurées de reste, et deux et trois auront été vaincus par un seul.

Remarque enfin qu’il te faut soulever la balance céleste, et mettre dans le côté gauche le Bélier, le Taureau, l’Ecrevisse, le Scorpion et le Capricorne, et au côté droit, les Gémeaux, le Sagittaire, l’Echanson, les Poissons et la Vierge, et faits que le Lion porte or, se jette au sein de la Vierge, et que ce côté là de la Balance pèse le plus. Bref faits que les douze signes du Lion Zodiaque faisant leurs constellations avec les sept gouverneurs de l’Univers se regardent tous de bon œil, et se fasse (après que seront passées toutes les couleurs) la vraie conjonction et mariage, afin que le plus haut soit rendu le plus bas, et le plus bas le plus haut.


Si de l’Univers la nature
Mise était sous une figure,
Et ne pourrait être changée
Ni par aucun art altérée,
Personne ne la connaîtrait
Ni les miracles qu’elle ferait,
C’est pourquoi remercier devons
Ce grand Dieu qui nous à fait tels dons.

DIXIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre X

Dans notre Pierre, que les anciens sages mes prédécesseurs ont faites longtemps avant moi, sont contenus tous les Eléments, toutes les formes et propriétés Minérales et métalliques, voire même toutes les qualités qui sont au monde, car l’on y doit trouver une extrême chaleur et de grande efficace, parce que le corps froid de Saturne doit être échauffé et converti en pur par la véhémence de son feu interne. Il y doit aussi trouver un extrême froid, d’autant qu’il en faut tempérer la grande Vénus, qui brûle et consume tout et congèle le Mercure vif, et en faire un corps solide. La cause de ceci est telle, parce que la nature a donné à la matière de notre divine Pierre toutes ses propriétés, qu’il faut par certains degrés de chaleur, comme cuire, faire mûrir et mener à perfection, ce qui ne se peut exécuter devant que le mont Gibel de Gieille aie mis fin à ses embrassement, et ne se puisse plus trouver aucune froidure dans les montagnes Hyperborées desquelles tu pourra bien aussi appeler Fougeray, toujours gelées de froid, et couvertes de Neiges.

Toutes pommes cueillies avant d’être mûres se fanent et ne sont presque bonne à rien, il en est de même des vaisseaux des potiers qui ne peuvent servir s’il ne sont cuits à assez grand feu, parce que le feu, ne leur a pas donné leur perfection. Il faut prendre garde à la même chose en notre Elixir, que l’on ne lui fasse tort d’aucun jour dédié et consacré à sa génération, de peur que notre fruit étant trop tôt cueilli des pommes des Hespérides, ne puissent venir à une maturité extrêmement parfaite, et sa faute réitérée sur l’ouvrier peu sage, qui se sera follement hâté, car il est notoire à tout le monde qu’il ne se peut produire aucun fruit d’une fleur arrachée d’un arbre. Par quoi toute hativité se doit éviter à notre art, comme dangereuse et nuisible, car par elle peut-on rarement venir au bout de son dessein, mais on va toujours de mal en pis.

C’est pourquoi que le diligent explorateur des effets merveilleux de l’art et de la nature prenne garde à ce que poussé d’une curiosité dommageable, et d’un désir par trop curieux, il ne cueille rien de notre arbre avant le temps, et que la pomme lui tombant des mains, ne lui en laisse qu’une marque et vestige misérable, car si l’on ne laisse mûrir notre pierre, véritablement elle ne pourra jamais donner maturité à aucune chose.

La matière s’ouvre et dissout dans l’eau, se conjoint, et est rendue grosse en la putréfaction, dans la cendre elle acquiert des fleurs dignes avant courriers du fruit ; toute l’humidité superflue se dessèche dans le sable, la flambe du feu la rend entièrement mûre, et fermement fixe, non pas qu’il faille avoir, et nécessairement se servir du Bain-marie, du fient de cheval, de cendre et de sable. Mais parce qu’il faut par tels degrés régir et gouverner son feu, car la pierre enfermée dans le fourneau vide, et munie de triple boulevart se forme et cuit toujours jusqu’à ce que tous les nuages, et vapeurs soient dissipées et disparaissent, et qu’elle soit vêtue et ornée d’habits de triomphe et de gloire, et demeure en la plus basse ville des Cieux, et s’arrête en courant. Car quand le Roi ne peut plus élever ses mains en haut, l’on a remporté la victoire de toute la gloire mondaine, parce qu’étant alors comblé de tout bonheur et doué de constance et de force, il ne sera dorénavant sujet à aucun danger. Je te dis donc que tu dessèche la terre dissoute en sa propre humeur, par feu dûment appliqué, étant desséchée l’air lui donnera une nouvelle vie, cette vie inspirée sera une matière qu’à bon droit ne doit point être appelée que la grande Pierre des Philosophes, qui comme un esprit, pénètre les corps humains et métalliques, et est remède général à toutes maladies, car elle chasse ce qui est nuisible, et conserve ce qui est utile, et donnant à toutes choses un être accompli ; accorde et associe parfaitement le mauvais avec le bon. Sa couleur tire du rouge incarnat sur le cramoisi, ou bien de couleur de rubis sur couleur de grenade, quant à sa pesanteur elle pèse beaucoup plus qu’elle a de quantité.

Celui qui aura trouvé cette Pierre, qu’il remercie Dieu, pour ce baume céleste, et le supplie de lui octroyer cette grâce qu’il puisse heureusement franchir la carrière de cette vie misérable, et enfin jouir de la béatitude éternelle.

Louange soit à Dieu, pour ses dons et singuliers plaisirs qu’il nous a fait, et lui en rendons grâces éternellement. Ainsi-soit-il.

ONZIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre XI

Je t’expliquerai la onzième Clef qui sert à multiplier notre céleste Pierre par cette similitude.

Il y avait dans un pays du Levant un brave chevalier Orphée, grandement riche, car il avait des richesses à foison, et ne manquant de chose aucune, il avait épousé sa sœur propre appelée Euridice. Mais ne pouvant avoir d’elle aucun enfant, et croyant que ce malheur lui était envoyé pour punition de son inceste, pria Dieu continuellement, espérant obtenir de lui miséricorde, et entérinement de sa requête.

Un jour dormant profondément il lui sembla voir un homme volant à lui nommé Phoébus, qui ayant touché ses pieds grandement chauds lui parla de la façon. Après avoir, courageux chevalier, voyagé par beaucoup de Royaume, de pays, de Provinces, et de ville, t’être hasardé sur Mer à beaucoup de dangers, et avoir à la guerre renversé de ton bras victorieux ce qui te faisait résistance, l’on t’a à bon droit donné le collier de chevalier, outre plus d’autant qu’en joutes et tournois tu as rompu beaucoup de lances, et mainte fois les dames t’ont avec acclamation de tous les assistant, adjugé le prix et l’honneur de la victoire, le père céleste m’a commandé de te venir annoncer qu’il a exécuté tes prières, et c’est pourquoi tu prendras du sang de ton côté droit, et du côté gauche de ta femme, aussi le sang qui était au cœur de ton père et de ta mère, ce sang de sa nature est seulement double et néanmoins seulement simple, conjoints les, et met dans le globe des sept sages, bien fermé, et l’enfant nouveau né trois fois grand sera nourri de sa propre chair, et son glorieux sang lui servira de breuvage. Si tu fait bien cela, il te viendra de grande richesse, et aura beaucoup d’enfants. Mais apprends qu’il faut, pour perfectionner ta dernière semence, la huitième partie du temps qu’a mis la première, de laquelle tu as pris naissance. Si tu fais ceci souvent, et que toujours tu recommences, tu verras les enfants de tes enfants, et une multiplication de ta race à l’infini, et sera le grand monde tellement rempli par la fertilité et fécondité du petit, que l’on pourra aisément posséder le Royaume céleste du créateur de l’univers.

Après cela fait Phoébus s’envola, et s’étant aussitôt réveillé le chevalier, il se leva pour exécuter ce qui lui avait été commandé, ayant mis tout en effet, il ne fut pas seulement tout aussitôt assisté de bonheur en toutes ses entreprise, mais aussi appuyé sur la bonté de Dieu, il engendra plusieurs enfants, qui héritiers des bien paternels s’acquirent une grande renommée, et toujours conservèrent l’ordre de chevalerie qu’ils avaient eu de la succession de leur père.

Si tu es sage et désireux de sagesse, tu n’as que faire de plus ample démonstration, sinon, tu n’en dois rejeter la faute sur moi, mais sur ton ignorance, car il ne m’est pas permis d’en déclarer d’avantage, ni de décacheter ce paquet, et mettre en vue tous les secrets, cela sera assez clair et manifeste à celui que Dieu en jugera digne, car j’ai tout écrit plus clairement qu’il est possible de croire, et j’ai montré toute l’œuvre en figures, selon qu’on fait les anciens Philosophes aux Maîtres, mais bien plus clairement (car je n’ai rien caché) que pas un autre. Si tu chasses de toi les ténèbres d’ignorance, et es clairvoyant des yeux de l’entendement, assurément tu trouveras une Pierre précieuse qu’ont cherché beaucoup, et que peu ont trouvé, car je t’ai comme entièrement nommé la matière, et suffisamment démontré, le commencement, le milieu et la fin de l’œuvre.

DOUZIEME CLEF de l’Œuvre des Philosophes
Chapitre XII

L’épée d’un escrimeur qui ne sait pas tirer, ne lui peut de rien servir, parce qu’il n’en a pas le maniement, car il est aisément mis à bas terrassé par un autre qui saura mieux tirer et porter un coup que lui, mais celui qui entend parfaitement l’escrime, ravit aisément la victoire d’entre les mains de tous les autres.

Il en arrivera de même à celui qui aura avec l’aide de Dieu, acquis la teinture, et ne s’en saurait pas servir, comme au gladiateur qui ne sait pas son métier. Mais d’autant que voici la douzième et dernière Clef qui ferme ce livre, je ne parlerai plus avec ambiguïté Philosophique, mais j’expliquerai nûment et clairement cette Clef touchant la teinture, entendez donc cette doctrine suivante.

Prends une partie de cette médecine et Pierre des Philosophes dûment préparée, et faire du lait virginal, et trois parties de très pur or passé par la coupelle avec de l’Antimoine, et battu en lames très menues, conjoints les dans un creuset et leur donne un feu modéré aux douze premières heures, puis fonds les, et les tiens en ce feu par l’espace de trois jours naturels, et la Pierre sera changée en vrai médecine, d’une nature subtile, spirituelle et pénétrante. Et elle ne teindra pas aisément à cause de sa grande subtilité sans le ferment de l’or, mais quand elle est fermentée de son semblable, la teinture entre facilement. Prends puis après une partie de cette masse fermentée, et la jette sur mille de métal, et vraiment le tout sera changé en très bon or, car un corps prends aisément un autre corps, et bien qu’il ne lui soit pas semblable, il lui doit néanmoins être conjoint. Et par sa grande force et vertu rendue semblable, vu que le semblable a été engendré de son semblable.

Celui qui aura mis ce moyen en pratique, saura toutes les autres circonstances. Les sorties des portes du Palais Royal sont ouvertes à la fin, cette si grande subtilité ne peut être comparée à aucune chose créée, car elle seule comprend et possède toutes choses dans toutes choses, que l’on peut trouver par raisons naturelles contenues et encloses dans la conférence de l’Univers.

O commencement du commencement ! Aie souvenance de la fin ! O dernière fin ! Souviens-toi du commencement, et aie en grande recommandation le milieu de l’œuvre. Et Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit vous donnera ce qui est nécessaire à l’esprit, à l’âme et au corps.

De la première matière de la Pierre des Philosophes

Une pierre se voit qui à vil prix se vends,
D’elle un feu fugitif son origine prend,
Nitre Pierre de lui est faite et composée,
Et de blanche couleur et de rouge parée,
Elle est pierre et non pierre, et la nature en elle
Peut seule démontrer sa vertu non pareille,
Pour d’elle faire jaillir un ruisseau clair coulant
Dans lequel elle ira son père suffoquant :
Et puis d’icelui mort, gourmande elle se repaît,
Jusqu’à ce que son âme en son corps renaisse,
Et sa mère qui est de nature volante,
En puissance lui soit, et en tout ressemblance,
Et à la vérité son père renaissant
À bien plus de vertus qu’il n’avait auparavant,
La mère du Soleil surpasse les années
En âge, à cet effet par toi Vulcain aidées,
Son père néanmoins précède en origine,
Par son spirituel être et essence divine,
L’esprit, l’âme, le corps sont contenus en deux,
Le magistère vient d’un seul et un étant,
Peut ensemble assembler le fixe et le fuyant,
Elle est deux, elle est trois, et toutefois n’est qu’une,
Si tu n’es sage en cela, n’entendra chose aucune,
Fait laver dans un bain Adam le premier père,
Où se baigne Vénus des voluptés la mère,
D’un horrible Dragon ce bain l’on prépara,
Quand toutes ses vertus et ses forces il perdit
Et comme dit fort bien le Génie de la Nature
L’on ne le peut nommer que le double Mercure :
Je me tais, j’ai fini, j’ai nommé la matière,
Heureux trois fois heureux qui comprend ce mystère,
Que le soucieux ennuie ne te surprenne point,
L’issue fera voir ce tant désiré point.

FIN

Livre TROISIEME
Contenant une abrégée répétition de tout ce qui contenu dans les traités des douze Clefs de la Pierre précieuse des Philosophes.


Dans laquelle est par le même Auteur Fr Basile Valentin mise en lumière : La lumière des Sages.

Moi Basile Valentin Religieux de l’ordre de St Benoît ai composé ces traités précédent, par lesquels suivant la trace des anciens Philosophes, ai déclaré par quelle voie et moyen l’on peut chercher et trouver ce précieux trésor, duquel les sages ont conservé leur santé, et prolongé leur vie à beaucoup d’années. Et bien que je ne ma sois éloigné en aucun point de la vérité, comme ma conscience en pourra rendre témoignage devant Dieu, qui connaît le dedans de nos cœurs, et ai toujours mis en vue la vérité qu’un moyennement docte n’aurait que faire d’autre que je lui en ai donnée, conjointe avec les douze Clefs de pratique, serons plus que suffisant des nuits néanmoins que je passait à veiller, et le peu agréable repos que je prenais en ne dormant pas, mais les diverses pensées qui étaient pendant l’objet de mon imaginative, m’ont persuadé d’expliquer plus clairement, mettant en abrégé le livre que j’avais mis en lumière du flambeau que j’avais allumé, plus éclatante, afin de mieux éclairer, pour découvrir notre désirée Pierre, à ceux qui sont amateurs de l’art, et curieux de connaître la Nature. Et encore que je sache bien que beaucoup diront que j’ai tout plus que trop enseigné, et qu’à cause de cela j’ai chargé ma conscience de beaucoup de péchés, je leur répondrai néanmoins que cela est assez obscur aux ignorants et gens de peu d’esprit, mais clair et manifeste aux enfants de science. C’est pourquoi écoute et pèse bien mes paroles, et suis ce qu’ils t’enseigneront, tu parviendras aux plus cachés mystères de l’Art et de la Nature.

Je n’ai rien écrit que je ne dois approuver et duquel je ne sois prêt à rendre compte au jour du jugement.

Or tu trouveras cet abrégé en vraies et simples instructions suivantes, car je ne m’y étudie point à avoir des mots affectés et fallacieux, mais à suivre nûment la vérité.

J’ai enseigné dans le précédent traité que toutes choses naissent et sont composées de trois, savoir est de Mercure, de Soufre et de Sel, et c’est chose certaine.

Mais apprends encore que notre Pierre est composée de deux, de trois, de quatre et de cinq. De cinq c’est à dire, de sa quintessence, quatre qui sont les quatre éléments, de trois à savoir des trois principes des choses naturelles, de deux qui signifient le Mercure double, et d’un qui est le premier principe de toutes choses, qui fut produit pur et net de la création du monde, fiat, soit fait.

Afin que personne ne se travaille à comprendre ces choses, et ne se peine à chercher en vain le sens mystiques, et la vraie explication, je traiterai en peu de mots. Premièrement du Mercure, puis du Soufre, et après du Sel de notre pierre, qui sont les principes matériels.

DU MERCURE, PREMIER
principe de l’œuvre des Philosophes

Remarque donc premièrement que nul argent vif commun ne sert à notre œuvre, car notre argent vif se tire, du meilleur métal par l’art spagyrique, et est pur subtil, reluisant, clair comme eau de roche, diaphane comme cristal, et sans aucune ordure. Réduit le en eau ou huile incombustible, parce que selon que m’en avouent les sages, Mercure a été eau au commencement, dissout en cette huile incombustible son propre Mercure duquel a été fait cette eau, précipite le dans sa propre huile. Et tu auras le Mercure double. Mais note que le Soleil après avoir été purifié selon que je t’ai enseigné en la première clef, doit être dissout par une certaine eau particulière, que je t’ai donné dans la seconde et réduit en chaux subtile, selon que je t’ai enseigné en la quatrième. Cette chaux doit passer par l’alambic avec esprit de SEL, et être précipité dans cet esprit, et réduit à feu de réverbère en poudre subtile, et que son Soufre puisse plus facilement entrer en sa propre nature, et l’embrasser plus étroitement par un amour réciproque, et tu auras deux substances dans une que l’on appelle le Mercure des Philosophes, et n’est qu’une Nature, et le premier ferment.

DU SOUFRE, SECOND
principe de l’œuvre des Philosophes

Tu chercheras ton Soufre dans le même métal, il le faut tirer sans aucune corrosion par feu de réverbère, d’un corps purifié et dissout, et comment cela se peut-il faire ? Je te l’ai déclaré ne t’en disant mot, et te l’ai assez clairement montré dans la troisième Clef. Tu dissoudras ce Soufre dans son propre sang, duquel il a pris naissance, observant le poids que je t’ai ordonné en la sixième Clef, l’ayant fait, auras dissout et nourri le vrai Lion du sang du Lion verd, car le sang fixe du Lion rouge est fait du sang volatil du verd, par quoi ils sont tous deux d’une même nature, et le sang volatil de l’un rend aussi volatil le sang fixe de l’autre. Et au contraire le fixe rend le volatil aussi fixe qu’il était auparavant la solution, entretiens les en chaleurs modérée, jusqu’à ce que le Soufre soit tout dissout, et tu auras par le commun accord des philosophes, le second ferment et le Soufre fixe nourri du volatil, que l’on tire en alambic par esprit de vin, qui est rouge comme sang, et est appelé Or potable, que l’on peut consolider, ni réduire en substance corporelle.

DU SEL, TROISIEME
principe de l’œuvre des Philosophes

Le Sel selon que l’on le prépare a des effets divers, rendant le corps fixe, et tantôt volatil, car l’esprit du Sel de Tartre tiré sans aucun ingrédient rend par la résolution et putréfaction tous les Métaux volatils, et les réduit en un Mercure vif, comme te l’enseignent mes Minéraux. Le sel de Tartre aussi fixe de soi grandement, notamment si l’on y ajoute de la chaux vive avec sa chaleur, car étant jointe ensemble ils ont une merveilleuse vertu fixative. Selon donc que l’on prépare le Sel végétable de Tartre, il peut et fixer et rendre volatil, ce qui est un admirable secret de nature, et un aspect merveilleux de l’art Philosophique.

Il se fait un Sel volatil et bien clair d’urine d’un homme, qui par quelque temps n’aura bu que du vin pur, et ce Sel dissout toutes choses fixes, et les tire avec lui par l’alambic, il ne fixe pas néanmoins, et bien que cet homme n’ait bu que du vin, duquel par son urine est tiré ce Sel de Tartre ; car il s’est fait dans le corps de l’homme une certaine transmutation par la quelle la partie végétable, c’est à dire l’esprit végétable du vin, s’est changé en animal, c’est à dire en l’esprit animal du Sel d’urine, comme par exemple, des chevaux se fait transmutation d’avoine, foin et autres telles nourritures, les changeant en leur propre substance, à savoir en chair et autres partie de leurs corps.

Les Abeilles aussi font du miel des meilleurs particules, et sur des herbes et fleurs, et ainsi des autres choses desquelles la Clef et principale cause gît en la putréfaction d’où proviennent toutes ces sortes de séparations et transmutations.

L’esprit de sel commun tiré par certain moyen que je t’ai montré en ma dernière instruction, mis avec un peu de l’esprit du Dragon, dissout l’or et l’argent, et les fait monter au haut de l’Alambic, tout de même comme l’aigle joint avec l’esprit du Dragon, hôte perpétuel des rochers et montagnes. Mais si l’on fond quelque chose avec le sel avant la séparation de l’esprit d’avec le corps, il est plutôt rendu fixe que dissout.

Je te dis d’avantage, que l’esprit de Sel commun conjoint avec l’esprit de vin, et distillé par trois fois avec lui, devient doux et perd toute corrosion et acrimonie, cet esprit ne combat plus corporellement contre l’Or, mais si l’on le fond sur la chaux de l’Or dûment préparée, il attire sa grande rougeur, et si l’on procède comme il faut, la chaux donne et empreint à la Lune purifiée une couleur semblable à celle qu’a eu premièrement le corps d’où elle a pris son origine.

Ce corps peut recevoir sa première couleur, se mêlant et joignant à la lascive Vénus, d’autant qu’il a du commencement pris avec elle sa naissance de son sang, ou du moins de semblable au sien, et je ne t’en dirai pas d’avantage.

Note que l’esprit de Sel dissout aussi la Lune préparée, et la réduit (comme t’en enseigne mes instructions) en une nature spirituelle, de laquelle se peut faire la Lune potable, ces esprit du Soleil et de la Lune doivent être conjoints comme le mari à la femme, par l’entremise de l’esprit du Mercure, ou de son huile.

L’esprit est dans le Mercure, la couleur dans le Soufre, et la congélation dans le Sel, et se sont ces trois qui peuvent reproduire le corps parfait, c’est à dire, l’esprit du Soleil fermenté de sa propre huile. Le Soufre que l’on trouve abondamment dans la nature de Vénus enflambé de sang fixe par elle engendré, l’esprit provenant du Sel Physique donné, en fortifiant et endurcissant la victoire entière, encore que l’esprit de Tartre, d’urine et de chaux vive, avec du vrai vinaigre aie bien de la vertu, car l’esprit de vinaigre est froid, et celui de la chaux est chaud, c’est pourquoi l’on juge à bon droit être de nature contraire, comme aussi l’on le voit par expérience. Je viens de parler en Philosophe, et ne m’est pas permis de passer outre, et montrer à aucun comment les portes sont fermées et remparée au-dedans.

Je te donne encore ceci, pour dire adieu. Cherche ta matière dans la nature métallique, faits en un Mercure, et le fermente d’un Mercure, puis d’un Soufre, et le fermente pareillement de son propre Soufre, dispose et mets en ordre par le Sel, tire le une fois par l’alambic, et mêle le tout par juste poids, et il viendra un qui a pris aussi auparavant son origine d’un, fixe le, et le coagule par la chaleur continue puis le multiplie, comme je t’ai appris dans les deux dernières Clefs, et le fermente pour la troisième fois, et tu viendra à bout de ton dessin, quand à l’usage de la teinture, la douzième Clef t’en a assez instruit.

PREMIERE ADDITION
continuant les enseignement de l’œuvre susdite.

Pour le par-dessus, je te veux apprendre que du noir Saturne et du doux Jupiter se peut aussi tirer un esprit, qui par après se réduit en huile douce comme en sa plus grande perfection, qui peut particulièrement et fermement ôter vie au Mercure, et le rendre beaucoup meilleur, comme je te l’ai enseigné en mes minéraux.

SECONDE ADDITION
Des œuvres susdites

Ayant ainsi préparé ta matière sois seulement soigneux à gouverner ton feu, car toute l’œuvre en dépend, depuis le commencement jusqu’à la fin.

Notre feu n’est que commun et naturel, et le fourneau vulgaire, et bien que les anciens sages et mes prédécesseurs aient écrit que notre feu n’est feu commun, je te dis néanmoins en vérité, que c’est qu’ils ont tous caché selon leur coutume, car notre matière est vile, et l’œuvre que l’on conduit seulement par le régime du feu, est aisée à faire.

Le feu de lampe avec esprit de vin n’y est pas propre, car il s’y fait de trop grand coût et dépenses. Le fient de cheval n’est que perte et destruction, et notre matière ne peu jamais par son moyen venir à perfection.

La multitude et variété de fourneaux n’est qu’inutilité superflue, et superfluité inutile, car il ne faut en notre triple vaisseau que varier et changer les degrés du feu.

Prends donc garde que les trompeurs ne te déçoivent en la variété des fourneau, car le notre est vulgaire, le feu commun et la matière est abjecte. Le matras ressemble en figure au contour et rotondité de la terre, tu n’as que faire d’avoir d’avantage d’instruction, à savoir gouverner ton feu, et bâtir ton fourneau, car qui a la matière trouvera bientôt un fourneau, et qui a de la farine ne met guère à trouver un four, et ne se doit pas beaucoup de faire cuire du pain.

Il n’est pas besoin d’écrire amplement de ce point, prends seulement garde à la chaleur, et fait que tu puisses discerner le chaud d’avec le froid, si tu frappe le but, tu aura tout fait, et sera parvenu à la fin désirée de l’art, pour reconnaissance de laquelle soit perpétuellement loué Dieu, auteur de toute la Nature.

Ainsi-soit-il.

COLLOQUE DE L’ESPRIT
de mercure à Frère Albert

L’esprit.

Quelle est l’occasion, Albert, que tu m’as tant fait de conjuration pour me faire venir ?

Albert.

Je te la veux dire, moyennant que tu me donnes assurance pour mon corps, ma vie et mon Ame, et que je n’aurai aucun déplaisir de toi.

L’esprit.

Il n’est pas de mon pouvoir de te faire du déplaisir, ni ne suis pas venu auprès de toi pour cela, mais si tu ne quittes ton appellation, tu es déjà recommandé à un autre qui te châtiera toi, et tes semblables, et jouera bien son jeu au salut de ton âme, je ne puis t’avancer ni reculer, si j’étais un homme je voudrai bien être lavé et pour ce répond moi à mes demandes.

Albert.

Je te prie ne sois fâché contre moi, car je suis un homme débile, et tu es un esprit puissant et subtil, et pour ce dis-moi premièrement si tu es bon ou mauvais, ou qui tu es.

L’esprit.

Je ne suis ni bon ni mauvais, mais je suis un esprit des sept Planètes qui gouverne la moyenne nature, ils ont le commandement de gouverner les quatre différentes parties du monde, savoir le Firmament, les animaux, les végétaux, et partie des minéraux, et nous sommes sept qui par notre agilité conduisons dans les trois parties inférieures, les ascendant et descendant, et opérons en eux, car les planètes ne peuvent pas descendre corporellement ici bas, mais leur esprit, lequel aide les choses qui sont disposées à engendrer par la vertu des quatre Eléments. Celui qui a cette intelligence se pourra disposer à l’œuvre.

Albert.

Je suis grandement joyeux que tu me donne une si belle intelligence, et que j’ai compris par toi que je n’ai jamais fait d’aucun Philosophe, mais je te prie accorde moi encore une demande, et je te dirai le sujet pour lequel je t’ai appelé, et te le déclarerai par ordre si tu me veux dire ton nom.

L’esprit.

Mon nom je suis l’Esprit des Planètes, non pas le Dieu du Mercure, comme tu me qualifie par tes appellations, et ne suis pas venu par force d’icelle, mais par le permission de Dieu, je suis venu sans contrainte, aussi qu’il a été donné à chacun homme un esprit serviable de Dieu, mais il s’en trouve peu qui s’en rendent dignes, pour ce n’aie point peur de ma noirceur, car elle sera pour le commencement de ta richesse. Car au commencement de la création tout était en ténèbres, et après l’agréable rougeur du matin, le Soleil se lève tout en sang et feu, si tu crois à cette heure mes paroles qui ne sont pas humaines, mais une voix raisonnante selon ma nature, je te veux écouter amiablement et te donner bonne adresse, sors donc hors de ton appellation et m’y laisse entrer, assis toi à table et que j’écrive avec soin ce que je te dirai, mais dis-moi premièrement le sujet pourquoi tu m’a fait venir et ne sois point cauteleux, mais simple et succinct à tes demandes.

Albert.

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, Amen. La très sainte et une inséparable Trinité, et inséparable Déité unique. Mercure je te demande que tu me dises la vérité, si ce que les anciens ont écrit de la Pierre des Philosophes, ou de la teinture est véritablement en la nature, ou si c’est une subtile spéculation.

L’esprit.

Sache que les Philosophes par prévoyance ont écrit diverses choses afin que les ignorants qui ne tendent qu’à l’or et à l’argent fussent abusés, ainsi le plus grand secret de la nature, et les vertus naturelles qui font à tous chercher la vérité, se trouvera que Dieu a mis dans la nature, et que l’homme ne peut pas connaître, si on ne lui montre clairement, et encore ne le peut-il comprendre, à cause de son aveuglement, et qu’il ne peut pas se connaître soi même.

Albert.

J’entends par tes paroles, bien qu’elles soient obscures, que tu entends l’or très fin.

L’esprit.

En partie tu as bien entendu, mais il y a encore une nuée trouble devant tes yeux, c’est le plus fin or, mais non pas celui qui est affiné dans la fournaise, mais celui que la nature même par son serviteur Vulcain a affiné sans science, à la mode de lui est tiré le double Mercure, et quand tu auras icelui tu pourras disputer avec ton Abbé, et lui dire : Azot et ignis tibi sufficunt. Il est donc manifeste qu’il n’est plus que fin or, auquel Dieu en la création lui a donné cette vertu pour être manifesté aux hommes, afin que chacun se puisse savoir, s’il est bien illuminé de Dieu.

Albert.

Oui, où se peut trouver cet or ?

L’esprit.

Au dessous du Ciel, en plusieurs montagnes et vallées, tous les homme l’ont devant les yeux et ne le connaissent pas.

Albert.

Combien en faut-il pour l’œuvre ?

L’esprit.

Si tu en as deux onces tu peux acheter la couronne du plus grand monarque du monde, et garder le reste.

Albert.

Avec l’aide de Dieu nous en trouverons bien autant, et quand on en aura achevé deux once, c’est assez pour le commencement comme je crois que vous le dites.

L’esprit.

Mais tu ne sais pas le corps comme moi qui suis esprit, je ne parle pas du corps, mais bien plus de l’esprit, comment veux-tu peser l’esprit, qui est en si petite quantité, au prix de ce qui est tiré de son corps, mais après en vertu surpassant en grande quantité ledit corps, si tu veux rendre cet esprit net de son corps corporel, et le transmuer en un corps spirituel, tu pourras dire à ton Abbé, Ignis et Azot tibi sufficiunt.

Albert.

O céleste parole, comment dois-je faire cela ?

L’esprit.

Solve et coagula, dissous et coagule. 1° operamo solvere 2° Coagulare.

Albert.

Que tes paroles sont succinctes et difficiles à entendre, et malaisées à comprendre, mais toute science est là dedans, je dois dissoudre le corps de l’or, et par dissolution tirer l’esprit teingent, c’est sans doute le double Mercure de Bernard, d’où est tiré ce corps ce n’est pas le fin or, mais la teinture qui est cachée en lui, de cela on tire le double Mercure.

L’esprit.

Maintenant le voile est en partie ôté de devant tes yeux, tu as bien entendu, entends maintenant quel corps c’est

Albert.

Avec quoi dois-je dissoudre le corps de l’or ?

L’esprit.

Par soi même, et ce qui est le plus proche de lui.

Albert.

Cette parole est pesante, voire plus pesante que la science même, je te prie montre-moi cela et me dis le moyen et le tour de main de la vraie dissolution.

L’esprit.

Moi tout esprit, maintenant je ne le puis montrer, car je n’ai point de main, mais si j’avais un corps comme toi, je voudrais faire toute l’œuvre, cherche soigneusement dans ton Bernard, tu trouveras là dedans le moyen et le tour de main de la vraie dissolution, avec toutes les circonstances, écrite trois fois, deux fois vraie, et une fois faux, à cause des ignorant.

Albert.

O moi misérable ! J’ai tant vu Bernard que j’en suis quasi au mourir, et n’ai pu comprendre cela, encore que par son enseignement je connais le Roi, mais la Fontaine m’est inconnue, et partant, je te prie montre-moi la fontaine.

L’esprit.

Tu veux être trop savant bien tôt, je ne te le peux pas montrer, il faut que tu aie le Roi premièrement, car on n’échauffe pas le bain, que le Roi n’y soit, va chercher ton Abbé et dis lui qu’il te fasse profusion de dix livres du meilleur 98756 ÆSÆ d’Orient, tout ainsi qu’il vient du ventre de sa mère sans feu, après je te veux déclarer tout ce que tu n’entends pas, sois secret, et ne montre point ton écrit à ton Abbé sur peine de la vie, ni que tu m’as vu, ôte de toi toutes tes appellations et conjurations, et demeure toujours en bonne volonté, priant Dieu qu’il te donne un bon esprit, autrement je n’oserai plus retourner vers toi, ainsi je veux être ton bon ami, et autant de fois que tu auras besoin de mon conseil, je me trouverai auprès de toi.

Albert.

Ha! Demeure encore un peu, dis-moi si je vivrai assez longtemps pour faire la teinture.

L’esprit.

Oui, tu l’achèveras, mais ton Abbé ne vivra pas tant, tu l’auras après sa mort, et si tu ne te gouvernes sagement, elle te causera de grands inconvénients, et partant prends bien garde à toi, et à qui tu la montreras, car cette teinture t’amènera de grands aveuglements, garde bien ton livre et ta teinture, afin qu’on ne les trouve point sur toi, autrement tu courreras grande fortune, et sera mis en prison, voire même à la mort, sois donc bien sage et te tiens joyeux, car plusieurs de grande et basse qualité s’efforcent que le secret ne soit point manifesté, car ils ne peuvent en autre corps dire vérité qu’en une unique chose, qui est tout en tout, pour dire la vérité, le reste ne sert que pour abuser les ignorants, et te dirai en peu de paroles la pure vérité, qui est ce que tous les Philosophes par leurs écrits sont demeurés d’accord, de cette pierre et teinture contenue en la nature.

Albert.

Dis-moi qui est cette unique chose.

L’esprit.

Toi qui es bon artiste et véritable, tu dois avoir appris de ton Bernard que c’est que l’esprit de son double Mercure, et tu es quasi devenu fol en ta première matière et Azot, tu es encore bien loin du vrai centre, car tu cherches la vie avec les morts et la plus parfaite et incorruptible force de toutes les forces naturelles, dans des matières imparfaites et dans des choses corruptibles, sache en vérité que notre rouge teinture est tirée pure et nette de la plus parfaite créature, sur laquelle le Soleil ait jamais jeté ses yeux, laquelle unique chose par les esprits plus parfaits est de la composition des inséparables qualités des quatre Eléments, et par la concordance des sept Planètes ont été joints ensemble, et sans aucune aide ou science d’homme, a été parfaite en son degré de perfection, lequel aussi par une incroyable augmentation de sa propre semence a été doué naturellement, et ses parties si bien liées ensemble qu’il ne peut être détruit par aucun Elément sans l’aide de l’art, et lors cette unique chose est sujette à corruption, je t’ai assez déclaré pour ce coup de quelle matière le Philosophes ont tiré leur teinture, si tu entends et connais ce qui est compris en cette unique parole, tu entendras toute la science, c’est assez dit à celui à qui Dieu ouvre les yeux, on pourrait bien ici comprendre l’or. Mais on ne l’entendra pas bien, car il y a des créatures créées plus nobles que l’or, lesquelles il faut chercher où la vérité se trouve, que Dieu a mis en la nature, et que l’homme ne peut pas connaître, si on le lui montre tout clairement, et encore ne peut-il pas comprendre à cause de son aveuglement, et qu’il ne peut pas connaître soit même.

Louange à Dieu.

EXPLICATION DE
l’Esprit sur les qualités de la première matière.

L’humidité est la première chose qui anime le composé, la chose naturelle ou l’humidité vivifiante ou vivicative, ou Ame, ou Air, par une dissolution de la terre et congélation de l’esprit.

Car notre magistère n’est que parfaitement congeler, dissoudre le corps et congeler l’esprit.

Et telles opérations ont telle alliance ensemble que jamais le corps ne se dissout que l’esprit ne se congèle, et l’esprit ne se congèle point que le corps ne se dissolve, ce qui s’accorde à ce que dit Raymond Lulle, et autres Philosophes et l’œuvre d’icelle n’est que dissoudre et congeler, et c’est toute la circulation et imbibition de notre Eau Mercuriale, laquelle les Philosophes commandent.

Car si de matière de terre doit être fait le feux, il faut qu’elle soit subtiliée et préparée.

Par laquelle Eau les corps sont subtiliés et ramenés en la première matière, et prochaine à la pierre ou Elixir des Philosophes.

Car comme l’enfant nourri au ventre de la mère par sa nourrissement naturel, par son sang menstrual, aussi notre Pierre doit être multipliée et croître en quantité et qualités plus forte, parce qu’il faut qu’elle soit nourrie de sa graisse et propre nature et substance. C’est ce que les Philosophes ont totalement scellé et tenu caché, comme le plus grand secret.

Cette humidité grasse, les Philosophes l’ont appelée eau Mercuriale, Eau permanente ou demeurant au feu, et aussi eau divine, c’est la clef de toute l’œuvre.

Cette eau n’est pas eau de rivière ou de fontaine, comme est avis aux ignorants ou falcificateurs.

Notre eau n’est que vapeur et eau qui est dite mondifiant ou nettoyant, blanchissant et revivifiant et rejetant la noirceur des corps, laquelle est appelée eau puante.

Cette eau Mercuriale n’est autre chose que l’esprit des corps convertis en nature de quintessence.

Cette eau est appelée vinaigre très fort, et est connue de peu de gens ; en notre pierre est contenu deux substances d’une nature, l’une volatile et l’autre fixe, lesquelles et chacune d’icelles est appelée argent vif.

Et c’est d’où naît la pierre, après la première conjonction d’iceux, et non pas devant, et faut que les corps soient tournés en non-corps, et iceux en esprit.

LES DOUZE SIGNES
du Zodiaque qui sont cités en cet œuvre des douze Clefs.

Aquarius ♒ Janvier
Pisces ♓ Février
Aries ♈ Mars
Taurus ♉ Avril
Gemini ♊ Mai
Cancer ♋ Juin
Leo ♌ Juillet
Virgo ♍ Août
Libra ♎ Septembre
Scorpius ♏ Octobre
Sagitarius ♐ Novembre
Capricornus ♑ Décembre

STANCES À L’AUTEUR.

I.
D’une substance seule on voit naître trois choses,
Et trois unis ensemble il en naît l’unité,
Dieu ayant tout réduit par sa divinité,
Fit les diversités que nature a décloses

II.
Une essence de soi de nature semblable,
Une chère liqueur tirée de son compost,
Dont l’Artiste a le soin, laquelle nous forclot,
De tout soin de travail et de toute misère

III.
Mais par ce seul moyen de si sainte entreprises,
Faut regarder le temps lorsque elle veut dormir,
Et dans son temple saint lui donner et fournir
L’Air, le Feu gracieux, et aussi sa chemise,

IV.
Deux spermes nous aurons en un compost remis,
Réunis, adaptés au jardin d’excellence,
Où les oiseaux seront qui auront la puissance
De réveiller ceux là qui étaient endormis.

V.
Vous qui voulez servir au temple de Mémoire,
Ayez égard au temps d’excellente beauté,
Car le Ciel Cristallin de très grande clarté,
Nous fera voir un jour le pourpre sanguinaire

VI.
Comme l’enfant qui est nourri de la mamelle,
Nous aurons même soin de ce qu’est procréé,
Jusqu’au temps que le lait lui ait plus avancé
Son corps, pour lui donner viande qui l’excelle.

VII.
Lors robuste en naissance et plein de majesté,
Nous aurons un grand Roi qui aura la puissance
De gouverner les siens, et par sa prévoyance,
Les pauvres et chétifs il mettra en santé.

AUTRES STANCES EN FORME DE VOEU.

I.
Sainte Flamme du Ciel, sage et sainte conduite,
Qui d’un rien de tout as fait de suite en suite,
Disposant les humains par un étroit devoir,
Collauder ton saint nom, ton sacré saint savoir.

II.
L’ordre que tu as mis en l’Art la Nature,
Nous fait voir en tes faits une riche structure,
Que la Terre et les Cieux qui sont édifiée
D’un suprême vouloir ta main a ordonné.

III.
Et puis après ce corps ou tu as mis notre âme,
Est agité toujours de ta divine flamme,
Laquelle un temps vivant recherche le mourir,
Pour le mortel survivre en l’immortel désir.

IV.
Car la vie et la mort gît en ta connaissance,
Que l’immortalité survit par sa naissance
Pour suivre les sentiers de la vie avenir,
Tu veux que bien vivant soyons prêt à mourir.

V.
Et l’homme ayant vécu selon ta sainte grâce,
Mourant il survivra te voyant face à face,
Etant reçu de toi pour sa dernière fin,
Où est ton saint Soleil et le lieu Cristallin.

FIN






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Maj : 20/12/2024