Le Message retrouvé🔗 catalogues
L’Horloge de la nuit et du jour de Dieuⁱ
Auteurs | Dates | Type | Lieu | Thèmes | Statut |
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Louis Cattiaux | publ. 1946 | Littérature Poésie | publ. France | Mysticisme Christianisme Hermésisme Alchimie፧ |
► La rédaction de l’ouvrage poétique débute en 1938, sa publication date de 1946 mais il ne s’agit que des douze premiers chapitres. L’auteur augmentera l’œuvre jusque sa mort, sans parvenir à l’achever, produisant 40 chapitres.
► L’œuvre présente une mystique chrétienne teintée d’hermésisme et d’alchimie፧. Elle se montre sous une forme spécifique : il s’agit d’une suite de sentences formées en plusieurs blocs et présentées deux par deux formant, selon l’auteur, un couple d’opposé terre/ciel présentant une équivalence.
◆ Concernant des commentaires sur l’œuvre, il est bienvenu de se reporter d’abord aux articles d’Hooghvorst. Les revues Le Miroir d’Isis, Le Fil d’Ariane et la Revue Arca , ont en outre, proposé un certain nombre d’articles sur Cattiaux et Le Message retrouvé. 𝕍 enfin les éditions Beya qui font paraître dans leur catalogue tant Cattiaux qu’Hooghvorst.
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☩ Le site Le Message retrouvé est entièrement dédié à l’œuvre et la propose en téléchargement, basé sur l’édition de 1978.
☩ Texte : version numérique du Message Retrouvé, Louis Cattiaux, 1946.
À la gloire de Dieu* et pour le service des hommes qui liront avec les yeux de l’esprit et du cœur les signes inscrits dans la chair du monde.
« Rentre et repose, ou sors et brille, mais demeure toujours en un. »
Ce livre n’est pas pour tous, mais seulement pour ceux à qui il est donné de croire l’incroyable.
* LVI: le feu secret qui suscite les univers, qui les entretient, et qui les consume.
▲
Père
doré qui
êtes partout
et qui reposez
dans le soleil et
dans la terre sainte.
Donnez-nous l’intel-
ligence de vos formes
et l’amour de votre Être.
Effacez notre tache, tirez-nous
de la boue où nous sommes
tombés. Faites-nous semblables à
la sainte Mère et engendrez-nous
dans l’amour parfait. Père caché et très
évident. Possesseur de la lumière éternelle.
Créateur magique des mondes. Guérissez nos
corps, apaisez nos âmes, libérez nos esprits.
Faites-nous héritiers de la gloire où brillent
vos enfants bien-aimés. Faites-le, Seigneur.
Mère brillante qui êtes en tout et qui transformez
les étoiles et la mer. Accordez-nous le secret de
votre lumière et l’amour de votre pureté.
Baptisez-nous dans l’eau et dans le feu
divins, et recevez-nous dans votre sein
vivant. Mûrissez-nous jusqu’à la per-
fection de l’amour. Mère lumineuse
entourée de ténèbres. Substance de
la vie et source du bonheur.
Semence bénéfique de Dieu.
Nourrissez nos corps, dé-
saltérez nos âmes, éclairez
nos esprits. Montrez-
nous la route qui
mène au Soleil
bien-aimé. La-
vez-nous,
Mère
sainte.
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LA LUMIÈRE
Comme une terre promise abreuvée d’innocence je me livre à celui qui débrouille ma nuit, et mon cœur se décante dans le repos, et luit.
★
Ô Sulamite, ma seule amie, je suis ton Salomon seul au monde. Sol et Séléné en Sel unis. Salut des mythes et Salam des monts !
★
Antique solitude des forêts primordiales où brille l’émeraude émanée des étoiles ! Celui qui vous trouva possède le secret divin qu’un maître certain nous légua dans le pain et le vin !
⟴LIVRE I
La pluie rend la vie à la terre stérile, image de la résurrection.
Jour de ténèbres et d’obscurité, Jour de nuages et de sombres nuées.
VÉRITÉ NUE
LA POUSSE VERTE
1. Celui qui est dans l’erreur essaie de l’imposer aux autres. Celui qui possède la vérité s’efforce de l’appliquer à lui-même. C’est la marque qui ne trompe pas.
1’. La vérité qui sépare et qui unit. Uns. Deux. Un et rien de plus. « Quelle que soit la chose que nous avons décidé de faire, persévérons jusqu’à ce que l’absurde ou la lumière de Dieu nous délivre et nous rende libres dans l’acte et dans le repos. »
2. Les hommes purs arrivent jusqu’à Dieu sans clercs et sans savants, car ils sont déjà saints dans le Seigneur qui les instruit comme il veut, quand il veut et où il veut.
2’. La fin est comme le commencement, mais le milieu nous illumine. « La Prière, l’Étoile, la Pierre. »
3. L’homme supérieur évite aux autres le mal qu’il a vaincu. L’homme inférieur inflige à tous le mal qui l’a assujetti.
3’. La mort sépare ce que la vie a uni, et l’eau délivre le prisonnier de ses chaînes.
4. On peut nuire à quelqu’un contre son gré. On ne saurait lui faire du bien contre sa volonté.
4’. La pierre déliée ne revient pas visiblement, cependant elle brille comme la lune dans tout son éclat.
5. Celui qui peut faire revivre a seul le droit de tuer.
5’. On arrose ce qui doit refleurir.
6. Dieu reconnaît ses fils à l’accomplissement de son œuvre.
6’. Il trie les semences et fait paraître le fruit magique.
7. Il n’y a pas de salut collectif, c’est une croyance des médiocres et des paresseux.
7’. Celui qui surnage se nomme le vivant.
8. Celui qui n’a rien à défendre n’a personne à combattre.
8’. La nudité du Père.
9. Le sage est seul avec Dieu comme Dieu est seul avec lui-même.
9’. Tout repose dans le cercle de l’or lumineux.
10. Les morts se rassemblent pour prier. Les vivants s’isolent pour s’entretenir avec Dieu.
10’. Le cri qu’on n’entend pas et qui arrive. La réponse qui jaillit du sein de l’abîme.
11. Le sage enseigne seulement les hommes de sa trempe.
11’. Le feu s’allie au feu pour durcir le sang de la terre.
12. Le plus simple à enseigner est le plus difficile à comprendre.
12’. La boue nourricière demeure abandonnée sur le chemin.
13. Celui qui est strict pour lui-même est indulgent avec les autres.
13’. La perfection de la sphère engendre une moindre friction.
14. Celui qui est intelligent examine la création afin de connaître le créateur.
14’. En consumant tout, on obtient la fumée et les cendres et quelquefois aussi la lumière de Dieu.
15. « Fou au monde, sage en Dieu. » Telle est la devise des vivants.
15’. Manger, boire, travailler et dormir n’est pas la vie du croyant.
16. La confusion et la contradiction de l’esprit sont l’image même de la mort. « Spectateur immobile, attentif et sans passion, tel est l’éveillé. »
16’. L’excès du malheur et l’excès du bonheur procurent l’oubli de soi pour un temps. L’union divine l’engendre pour toujours.
17. Beaucoup sont arrivés et ne sont jamais partis. Ils se trompent et trompent les autres.
17’. Les vases de terre renferment une chose précieuse, mais ils ne durent pas longtemps quand la chose les abandonne.
18. Le fou interroge les autres. Le sage s’interroge lui-même, dit-on. Tous les deux sont près de Dieu, mais un seul le sait.
18’. Qui peut différencier le feu du feu ? Qui peut incarner le soleil dans l’étoile du matin issue de la terre ténébreuse ?
19. Le sage voile la vérité en la mettant en évidence.
19’. Ce qui touche l’œil n’est pas vu.
20. Disputer avec des ignorants, c’est agiter la boue pour qu’elle s’éclaircisse.
20’. La terre demeure au fond. La vie va en haut. Dieu seul peut les séparer et les unir à nouveau.
21. Toutes les œuvres du monde ne sauraient être comparées à la plus infime créature de Dieu.
21’. La plus petite fleur représente l’Univers. Mais l’homme seul le contient entièrement.
22. Le mal et la haine sont tellement associés à la mort qu’ils deviennent inconscients par la faiblesse et la médiocrité de nos cœurs. Mais le bien et l’amour sont si bien attachés à la vie qu’ils subsistent seulement dans la conscience en éveil et dans l’activité d’un cœur aimant.
22’. Nous devons nous détacher des formes créées, mais c’est afin de posséder la création dans sa substance première et dans son essence cachée. Ainsi, plus le repos augmente, plus l’attention doit grandir afin de survivre à la dissolution de l’eau et à la coagulation du feu. « On ne choisit rien quand on est mort. »
23. La science des hommes est la violation des lois naturelles et divines. Elle tue tout et ne ressuscite rien.
23’. Beaucoup de travail pour mal faire, et beaucoup de travail pour défaire.
24. L’intuition associée à la bonne volonté engendre la puissance de l’amour qui mène à la perfection de l’union dans la paix.
24’. L’eau et le feu multiplient et perfectionnent toute la création visible et toute la création cachée.
25. Il faut observer patiemment la nature avant d’agir, sinon on devient insensé devant Dieu, insupportable aux autres et finalement odieux à soi-même.
25’. Le jardinier est le plus savant des hommes, mais il ne le sait pas, parce qu’il travaille sur des semences obscurcies et sur une terre mélangée de mort.
26. La sagesse vraie, la connaissance ultime isole l’homme de ses semblables plus sûrement que ne pourrait le faire n’importe quel crime, n’importe quelle lèpre, n’importe quelle mort. L’union avec Dieu est la vraie récompense du parfait.
26’. Le noyau est caché dans la chair, l’amande se tient sous le bois et le germe repose dans l’eau nourricière. « Qui séparera la lumière des ténèbres, et qui manifestera le feu caché du Seigneur ? Qui transformera le lait virginal en la consistance corporelle du Fils nouveau-né? »
27. Ce qui tue le faible fortifie le fort. Ce qui décime l’impie multiplie le croyant.
27’. L’épreuve dénude la vérité et la fait resplendir pleinement.
28. Les chiens aboient après ce qui les domine, ou après ce qui leur échappe.
28’. La montagne se rit du vent, mais elle reçoit l’eau et le feu qui la fécondent.
29. La condition essentielle de toute cure, c’est la volonté de guérir; on ne saurait sauver ceux qui ont choisi la mort et qui s’y maintiennent volontairement.
29’. L’eau fait tout refleurir, et le feu mûrit le monde nouveau jusqu’à la terre sainte promise aux sages. « Ô lumière cachée ! »
30. Le plus petit atome est comme le plus grand Univers, et la masse des hommes, comme une parcelle de Dieu.
30’. Le sperme est caché dans le corps de la terre et dans celui de la pluie.
31. Tout est dans Tout; Lumière dans Lumière.
31’. Le germe se tient dans le sperme.
32. Tout est dans Rien; Lumière dans l’Ombre.
32’. Le mixte universel.
33. Rien n’est dans Rien; Ombre dans l’Ombre.
33’. La mort enveloppe le ciel et la terre.
34. Celui qui méprise l’enseignement des anciens sages, se condamne à l’ignorance pour toujours.
34’. Ceux qui cultivent la terre manquent souvent du principal aliment céleste qui est la bénédiction de Dieu.
35. La nature met toute lumière en évidence et amène toute chose à sa perfection.
35’. Le sage dispose la semence et Dieu l’ouvre par le moyen de l’eau et du feu.
36. Les sages disent aux insensés : Vous détruisez les corps, mais nous sauvons l’esprit; nous retournerons tous dans la terre, mais nous ne la posséderons pas également.
36’. Le monde a été fait avec l’eau et avec la terre. Il redeviendra comme un limon avant d’être refait comme une terre.
37. Arroser les pierres pour obtenir du fruit est une opération plus aisée que de parler de Dieu aux railleurs pour les instruire.
37’. Dieu connaît l’intérieur de toute chose. Il est Juge par le temps dans l’éternité.
38. On ne peut être esclave du monde et ami de Dieu.
38’. On nettoie le flacon avant d’y mettre le vin céleste.
39. Dieu par lui-même produit la Mère, Dieu par la Mère engendre le Fils, le Fils par la Mère multiplie Dieu. Ainsi Dieu n’a ni commencement ni fin.
39’. Les opérations divines sont instantanées et soumises à la foi. Les opérations naturelles sont lentes et soumises à l’espérance. Les opérations humaines sont aveugles et soumises à la charité.
40. Celui qui est instruit ne méprise aucune religion ni aucun enseignement des anciens sages.
40’. La terre recouvre le diamant sublime.
41. L’homme doit passer par la mortification et les ténèbres de la mort, avant de parvenir jusqu’à Dieu.
41’. Le feu et l’eau purifient la terre, mais c’est Dieu qui l’anime à nouveau.
42. Le clairvoyant loue Dieu pour la perfection de son œuvre.
42’. Les vers vivent du feu, mais ils ne le voient pas.
43. Se fier à un impie, c’est lancer une pierre et croire qu’elle ne retombera pas.
43’. La planche pourrie n’enrichit que le fumier.
44. L’eau qui lave et qui donne la vie est un esprit très délié qui vient du ciel et qui se fixe dans la terre.
44’. Le feu qui anime et qui mûrit est une âme très pure qui vient du soleil et qui unit le ciel et la terre.
45. La vraie sagesse consiste à séparer ce qui est bon de ce qui est mauvais, et à unir ce qui est bon avec ce qui est meilleur.
45’. L’eau et le feu purgent la création mixte jusqu’à l’étoile du renouvellement et jusqu’au soleil de l’achèvement.
46. Celui qui est intelligent compare minutieusement les paroles des sages pour découvrir le lieu où ils s’accordent tous.
46’. Il faut rentrer par où on est sorti si on veut reposer dans la paix du Parfait.
47. La rage venimeuse et raisonnante des ignorants sanctionne toutes les œuvres saintes.
47’. La nature donne des leçons, elle n’en reçoit pas.
48. Incapables d’atteindre ce qui les dépasse, ils essaient de tout rabaisser jusqu’à eux. Ne pouvant souffrir la beauté, ils s’efforcent de souiller tout ce qui les entoure. Impuissants à saisir la vérité, ils tentent de déformer tout ce qu’ils voient et entendent mal.
48’. « La mort dans la boue, l’enfer du mélange. » Les médiocres ne pourront pas toujours enterrer la vérité de Dieu. Les croyants l’ébruiteront à nouveau jusqu’aux extrémités de la terre et la feront germer jusqu’aux cieux.
49. Les hommes révoltés sont comme des rats pris au piège. Dans leur confusion délirante, ils s’entre-déchirent et entament leur propre chair par l’effet d’une rage aveugle et désespérée.
49’. Ils se disputent les excréments et délaissent le baume. Ils transforment les pierres en fumée, mais qui transformera la fumée en pierre sainte ?
50. Ceux qui envisagent la vie comme la recherche du pouvoir d’anéantir tout ce qui existe autour d’eux, ne récoltent que la mort.
50’. La vérité ne peut être saisie que par le sage et elle ne peut être cuite que par lui.
51. Le propre de l’ignorant, c’est de vouloir à tout prix convaincre les autres de systèmes qui le rassurent momentanément.
51’. « Dans les limbes, tout est confondu et à naître. » Dieu attend de nous la mort intellectuelle et la naissance spirituelle du cœur.
52. La vraie philosophie est basée sur la connaissance de la réalité divine parfaitement éprouvée, qui libère de toutes les servitudes du monde.
52’. La mort est une lumière voilée de terreur; le sage la considère avec sérénité et l’expérimente avec intelligence et profit.
53. La fausse science est cet échafaudage de pensées délirantes bâti dans l’ignorance des lois naturelles, et qui s’écroule constamment dans le désespoir, la folie et la mort.
53’. L’habit devient guenille, et la guenille redevient habit; celui qui les porte et qui les rejette ne change pas.
54. L’une édifie dans la vie au moyen de la mort, l’autre bâtit dans la mort au moyen de la vie.
54’. Ce qui paraît impossible s’accomplit quelquefois aisément, et ce qui semble facile est souvent irréalisable.
55. Ceux qui s’attribuent les titres de savants et de philosophes, sont soumis aux effets du mal qu’ils portent en eux et qu’ils ne savent pas rejeter. Ils ignorent la cause de leur chute et le moyen de leur délivrance.
55’. La MORT sert a tous, mais un seul l’emploie comme il faut. « Bien peu savent que la richesse première et dernière est cachée dans le cœur des hommes exilés. »
56. Ils fabriquent et distribuent la mort sous le prétexte hypocrite de rechercher la vie, mais leurs œuvres prouvent en définitive leur orgueil et leur démence.
56’. Une seule graine renferme tout le mystère du monde. Qui la fera reverdir ? Et qui la fera fructifier ? « La vie est pour ceux qui la respectent, qui l’aiment, qui l’aident et qui l’accouchent. »
57. C’est parce que l’humanité a le cœur affaibli et obscur qu’elle repousse les fortes émotions de l’amour divin.
57’. La perle est cachée dans l’abîme, et le soleil demeure dans la perle.
58. Tout est esprit, Tout est matière, selon que l’Unique se dilate ou se condense.
58’. Dieu habitera le limon de la terre purifiée.
59. La science divine se sert des lois naturelles comme moyens. Elle transforme tout et ne tue rien. Elle consolide le sperme et multiplie le germe. Elle manifeste la vie en se servant de la mort.
59’. La création de Dieu s’accomplit avec aisance, comme tout ce qui s’épure et se perfectionne par le va-et-vient de la grâce délivrante et de l’amour unifiant.
60. Les hommes vivants font tellement peur aux morts qu’on attend leur disparition pour annoncer qu’ils existent.
60’. L’eau céleste entame tout et n’est entamée par rien; c’est elle qui nous délivre du tombeau.
61. Les paroles des sages sont excellentes, mais ceux qui prétendent les expliquer sont souvent mauvais.
61’. La nourriture trop fortement chauffée est morte et impropre à l’entretien de la vie cachée.
62. Trop de complications et trop de subtilités amènent l’anarchie et la mort.
62’. La nature enseigne celui qui la regarde en face et qui l’explore jusqu’au fondement secret.
63. Les hommes vulgaires haïssent le sage, mais lui ne méprise pas les instruments de son travail.
63’. Dans l’homme le plus corrompu subsiste une lumière sublime et vivante.
64. Ce qui passe pour fou, ce qui ressemble à un rêve, ce qui paraît incroyable. Voilà ce que le sage étudie avec amour.
64’. La vie dans l’ombre de la mort. La pierre cubique et la pierre triangulaire cachées dans la sphère du chaos.
65. Ce que le monde méprise, ce qui est rejeté par tous, ce qui paraît vil et sans valeur. Voilà ce que le sage examine avec soin.
65’. La boue de l’abîme, l’humilité de la terre, le voile de la mort. « La pierre fondamentale et l’eau de la résurrection. »
66. Celui qui sait se passer de l’approbation des hommes, n’est pas tenté de faire un travail inutile.
66’. La liberté se conquiert sur les passions, sur les désirs et sur la mort.
67. Il n’y a pas de plus grande punition que d’ignorer Dieu dans le monde et il n’y a pas de plus grande joie que de le connaître dans son cœur.
67’. Entre le sage et la brute, il y a un abîme que Dieu seul peut combler. « Pardonnons l’incompréhension et prions pour la conversion de nos ennemis et de nos persécuteurs. »
68. Par l’homme on arrive plus facilement à Dieu que par l’Univers tout entier.
68’. En scrutant l’image on reconnaît facilement le modèle.
69. Celui qui s’imagine être fort au milieu des hommes, est le plus faible des êtres dans la solitude.
69’. Celui qui est véridique avec lui-même n’est injuste envers personne.
70. Personne ne cherchera Dieu pour nous. C’est une croyance des paresseux et des lâches.
70’. On ne profite bien que de la nourriture qu’on choisit en soi-même.
71. Les religions se combattent quand Dieu est mal servi et mal aimé.
71’. Les disputes font paraître l’intérêt véritable.
72. Quand nous repoussons un sage, un saint, un artiste ou un poète, nous augmentons sa gloire et nous multiplions nos maux.
72’. L’arbre produit ses fruits sans se soucier de celui qui les mangera, mais il lui faut la pluie et le soleil comme à tous les vivants.
73. Ce sont toujours les mêmes qui enseignent le monde et qui sont le plus méprisés pendant leur vie et le plus trahis après leur mort. Ce sont toujours les mêmes qui trompent l’humanité et qui sont le plus honorés de leur vivant et le plus respectés après leur mort.
73’. Le monde préfère le poison fabriqué plutôt que l’eau naturelle du soleil et de la lune. « Ô individus endormis des foules agonisantes, votre égarement lamentable ne saurait réjouir les simples enfants de Dieu; vous réveillerez-vous à la voix du Seigneur qui vous prie d’amour ? »
74. Les plus mauvais vengent les meilleurs sans le savoir, et tous concourent à l’illumination de l’homme par l’homme qui aboutit à la nature divine. « Celui qui connaît le sens caché des Écritures saintes, n’utilise pas le verbe de Dieu pour maudire les hommes égarés dans la mort. »
74’. Notre frère, c’est ce sage ou bien ce fou, c’est ce saint ou bien ce criminel, c’est ce chef ou bien ce mendiant, c’est cet enfant ou bien ce mort. « Ô splendeur enterrée ! Eau sainte qui délivre nos âmes de la terre étrangère. »
L’élan de la foi qui touche les cœurs est ardu pour les mortels et méprisé par eux.
Quand la foi n’est pas totale, ce n’est pas la foi.
⟴LIVRE II
Il est dur de quitter les voies familières et présentes pour retourner aux anciennes, car les apparences sont délicieuses et l’invisible est incroyable.
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites, parce que vous courez la mer et la terre pour faire un prosélyte, et quand il l’est devenu, vous faites de lui un fils de la géhenne deux fois plus que vous !
ÈVE TRI UNE
LA VIE PURE
1. Les hommes nouveaux font toujours scandale.
1’. Le réveil brutal rend toute chose effrayante.
2. Instruire les hommes vulgaires des secrets de Dieu, c’est susciter le désir et l’orgueil délirants, c’est engendrer le désordre et le malheur pour toujours.
2’. Les joyaux divins ne parent que les hommes purs et que les femmes nettes. « Ceux qui resplendissent le plus en Dieu paraissent souvent les plus obscurs dans le monde. »
3. Il y a un travail qui lie dans la mort, c’est celui du monde. Il y en a un autre qui délie de la mort, c’est celui de Dieu.
3’. Les hommes font paraître la mort par le moyen du feu. La nature fait paraître la vie par le moyen de l’eau.
4. Le premier s’accomplit difficilement et ne produit que la tristesse et la mort. Le second s’exécute facilement et engendre la joie et la vie éternelle.
4’. L’esprit droit et simple pénètre facilement jusqu’au centre de la terre où repose l’or vivant. « C’est la pauvreté du vide total qu’il nous faut atteindre afin d’être emplis de Dieu exactement. »
5. Il faut être intelligent et instruit par Dieu pour reconnaître l’évidence de la création.
5’. La malice des hommes les égare dans le nombre, et l’orgueil les scelle dans la boue.
6. La science des hommes est un fumier recouvert de clinquant. La science de Dieu est un or recouvert de boue.
6’. La croûte terrestre égare les plus subtils observateurs, mais la mer intérieure illumine l’homme simple et croyant.
7. Le propre de la vérité, c’est qu’elle suffit à elle-même; celui qui la possède n’essaie de convaincre personne.
7’. Celui qui est rassasié ne dispute pas aux chiens l’ordure du chemin dont il connaît l’origine et la fin.
8. N’accusez pas l’outil si vous êtes le mauvais ouvrier, et ne criez pas au meurtre si vous livrez votre vie à la mort.
8’. La grande bataille élimine la crasse morte et fait paraître la lumière mouvante de Dieu.
9. Un seul peut avoir raison contre mille, et un saint dire vrai contre le monde entier.
9’. Un tas de boue ne renferme qu’un grain d’or pur.
10. Il y a autant de mérite à se taire quand on a trouvé qu’il y en a à chercher quand on ne connaît rien.
10’. Dieu ouvre les yeux à ses enfants, et ferme la bouche à ses amis.
11. La simplicité et l’amour devenus étrangers aux hommes font que la parole la plus claire est la plus délaissée.
11’. Quoi de plus méprisé que le vêtement de Dieu ? Quoi de plus méconnu que la lumière du soleil ?
12. Réduisons par notre exemple la médiocrité et l’hésitation des cœurs tièdes.
12’. Faire ce qu’on ne prêche pas et prêcher ce qu’on a fait seulement.
13. L’aiguillon de la mort est là pour obliger les hommes à rechercher le pourquoi de toutes choses et d’eux-mêmes.
13’. Peu d’hommes méditent les changements du monde jusqu’au centre secret de la nature illuminante et illuminée.
14. Le travail qui augmente les besoins est vain. Celui qui les diminue est sacré. Le monde pratique le premier. Les sages aident au second.
14’. Dieu fait surgir les fruits de la terre par le moyen de l’eau et du feu unis en un. « Ô miracle de résurrection ! »
15’. Quand on leur offre l’eau pure ils répondent : « Rendez-nous le poison auquel nous sommes habitués ».
15’. Oublier sa misère pendant un instant, c’est la retrouver grandie de toute une éternité.
16. Combien réfléchissent à l’œuvre générale de Dieu ? Combien sont enseignés par le renouvellement de toutes choses ? Combien accomplissent l’œuvre particulière du Seigneur ?
16’. Le grand travail qui fait peur, celui qui libère de l’ombre de la mort, celui qui nivelle les montagnes, celui qui fait germer la terre, celui qui fait briller la vie et qui la fixe dans le Seigneur glorieux.
17. Il n’y a personne au-dessus de celui qui connaît Dieu, excepté Dieu lui-même.
17’. Il nage sur la grande eau, le vivant d’éternité, l’Unique.
18. Celui qui n’est pas stupéfait et en admiration devant le mystère de l’homme et devant les miracles de la nature, ne découvrira jamais Dieu.
18’. Les yeux neufs et innocents voient Dieu dans sa première nudité et revêtu de la splendeur dernière.
19. Les ignorants parlent beaucoup et n’observent rien. Le sage se tait et examine tout pour découvrir l’Unique.
19’. La connaissance de Dieu est la seule réalité qui sauve de la mort.
20. L’ignorant prétend ceux qui ne demandent rien.instruire L’homme savant se tait et attend qu’on l’interroge.
20’. Dieu prodigue tout ce qui est précieux. Le monde accapare tout ce qui est sans valeur.
21. Honoré ou méprisé, le sage demeure égal à lui-même.
21’. L’or qui sommeille dans la boue est aussi pur que celui qui brille dans le soleil.
22. Tout le temps qui n’est pas consacré à Dieu est un temps perdu. Tout travail qui n’aboutit pas à lui est un travail inutile.
22’. Les égarés regimbent ici, parce qu’ils préfèrent l’agitation qui les maintient dans la paresse de la mort.
23. Ils croient follement créer avec leurs mains, sans comprendre qu’ils ne savent même pas faire des mains.
23’. La science de la science consiste à préparer les choses et à laisser faire Dieu.
24. Le premier devoir pour le plus petit comme pour le plus grand, c’est acquérir l’intelligence en priant Dieu, pour connaître l’évidence de la création.
24’. L’amour de l’or le fait rechercher jusque dans l’ordure, mais peu d’hommes sont capables de le saisir dans le ciel et de le fixer dans la terre.
25. La plus grande bataille et la plus grande victoire, c’est acquérir la générosité du cœur envers tous les êtres en découvrant Dieu en soi.
25’. Le soleil visible et le soleil invisible mûrissent toutes choses jusqu’à la perfection aurée du fruit très parfait.
26. Tous les savants du monde jugent stupidement de l’œuvre de Dieu, parce qu’ils considèrent seulement l’ouvrage et pas l’ouvrier.
26’. La matière moyenne donne la connaissance des essences extrêmes.
27. Ont-ils vu comment la terre produit l’eau ? Savent-ils par quelle voie l’eau engendre la terre ?
27’. Le brouillard condense la pluie, et les ténèbres couvent la lumière.
28. Diront-ils dans quelle proportion l’eau amollit la terre ? Et ensuite comment la terre consolide l’eau ?
28’. L’arc-en-ciel annonce les noces du ciel et de la terre.
29. Et de quelle façon tout retourne enfin en terre par le moyen du feu ?
29’. Le fruit rouge capable de sauver le monde.
30. Ils demeurent ignorants, orgueilleux et stupides, Dieu se moque d’eux et ils trompent le monde.
30’. Les sages proclament leur ignorance devant Dieu.
31. Ils se flattent d’être les maîtres du monde, mais aucun n’ose avouer sa misère.
31’. Le fils de Dieu surmonte la mort en trois jours.
32. Leur vaine suffisance ne les empêche pas de tomber lourdement à la fin et de retourner au chaos boueux.
32’. Les limbes sont l’antichambre de Dieu, qu’il faut traverser pour parvenir au Père nouveau-né.
33. Leur science est née des interprétations sinistres de l’enseignement des anciens sages.
33’. La complication engendre la folie et la mort inextricables.
34. Elle varie comme l’ombre et comme le vent.
34’. Le feu revêt toutes les formes, mais demeure fixe dans son intérieur.
35. La science de Dieu est immuable comme le soleil et comme l’or. « Nous passerons par le feu et par l’eau, et le soleil de Dieu nous embrasera pour toujours. »
35’. Tous les sages professent le même enseignement. L’eau dans la terre, et Dieu dans l’homme.
36. La partie ne peut juger la totalité de l’Être, et celui qui est à la périphérie ne peut voir comme celui qui se trouve au centre.
36’. Le feu n’est visible qu’au milieu du ciel. Il demeure caché dans le centre de la terre et dans l’eau moyenne.
37. Il appartient maintenant à l’homme d’accomplir le premier pas vers Dieu, puisqu’il a aussi fait le premier pas vers l’ombre.
37’. La liberté accordée à l’homme lui permet toutes les folies et toute la sagesse. La curiosité qui l’a perdu peut aussi le sauver.
38. Comme un aimant, Dieu fera aussitôt parcourir à l’homme le double du chemin.
38’. La lumière descend sur la terre et remonte au ciel pour rassembler en Dieu la poussière d’humanité dispersée aux abîmes.
39. Il n’y a de véritable force et de vraie faiblesse que du cœur. Tous les secrets du monde sont contenus en lui.
39’. L’eau dans la graine et le feu dans l’eau sont comme l’eau de la pierre et comme la pierre de l’eau.
40. La plus grande récompense c’est éclairer un autre homme après avoir découvert la lumière en soi.
40’. Peu de disciples savent profiter de la leçon des hommes sages, et découvrir le don naturel de Dieu.
41. L’imagination est l’outil qui découvre Dieu. La patience est celui qui le met en évidence.
41’. L’eau dissout toute sorte de chose, mais le feu n’en coagule qu’une seule.
42. C’est au milieu de la corruption que la vérité apparaît clairement.
42’. La sainte Mère brille au milieu des ténèbres du monde.
43. La création de l’Univers s’accomplit dans la solitude acceptée et suffisant à elle-même.
43’. Il n’est rien ajouté à l’eau vierge si ce n’est le feu pour la mûrir.
44. Quand le symbole est une réalité, il est impossible de le découvrir sans l’aide de Dieu.
44’. L’évidence du mystère aveugle les plus savants.
45. L’aveuglement et l’orgueil des hommes sont devenus tels qu’ils transforment tous les biens en maux au nom de la science et du progrès.
45’. Ce qui est trop fortement cuit ne recèle que la mort et n’engendre que la mort.
46. La vraie réussite s’accomplit au profit de tous et aux dépens de personne.
46’. Dieu comble ses enfants sans privation pour quiconque.
47. Lorsque les églises et les états s’appuient sur la force du monde, ils se soumettent à la mort parce que la puissance de Dieu les abandonne.
47’. Ceux qui possèdent le vrai pouvoir spirituel contrôlent sans effort la puissance temporelle; cependant la contrainte et la violence leur demeurent étrangères.
48. Nous voudrions que votre peine ne soit pas d’accuser celui qui vous reprend, mais plutôt d’être fâché de prêcher la vérité et de ne pas l’observer.
48’. En suscitant des saints plutôt que des savants, nous mériterons enfin un sage.
49. Ceux qui repoussent la fille et l’enfant se condamnent gratuitement à la mort.
49’. Ils sont abandonnés dans le chemin et couverts par l’ordure.
50. Dieu n’attend pas leur approbation pour mettre au jour ce qu’il lui a plu de créer.
50’. L’eau sainte vole au ciel et s’enfonce dans la terre pour mouvoir toutes choses.
51. Le sage recueille la mère et la loge jusqu’à ce que l’enfant paraisse au jour.
51’. Seul celui qui a acquis la connaissance de Dieu sur les trois plans de la création peut être nommé délivré pour toujours.
52. Dieu se moque des sciences, des lois et de la morale des hommes.
52’. Les hommes passent, mais la doctrine de l’Esprit demeure éternellement.
53. Tous les événements bons ou mauvais sont utiles pour celui qui les fait servir à son instruction.
53’. Le monde entier aide l’homme qui cherche Dieu, mais rare est celui qui comprend et qui accepte la leçon mystérieuse.
54. Que sont même les livres saints comparés au mystère de vie qui subsiste dans le soleil et dans la terre ? Cependant, ils renferment la clef qui ouvre et qui ferme la source de l’abîme et le sceau qui couvre le germe du Seigneur des mondes.
54’. Celui qui comprend loue le Seigneur dans son cœur. Celui qui croit entendre et celui qui ne saisit rien doivent prier et se taire.
55. La vérité suffit à elle-même. Tout ce qu’on y ajoute l’obscurcit.
55’. C’est dans les lieux communs qu’apparaît l’évidence du mystère.
56. Dieu ouvre les yeux à qui lui plaît sans l’aide d’aucun savant.
56’. L’Esprit opère devant tous. Peu le voient. Un seul le saisit et le fixe.
57. Les sciences professées par les hommes exigent de la subtilité et beaucoup de peines pour être possédées en partie. La science enseignée par Dieu demande la simplicité et la patience pour être connue dans sa totalité.
57’. La connaissance de l’arbre est moins importante que celle du fruit, et celle-ci est moins utile que la connaissance du noyau. Enfin c’est l’amande qu’il nous faut connaître dans sa pureté et c’est le germe qu’il nous faut manifester dans sa perfection.
58. L’injustice qui nous écrase est là pour nous rappeler que Dieu nous attend avec sa justice.
58’. La mort chasse la mort et fait paraître la vie cachée.
59. Celui qui est vraiment dévoué à Dieu ne porte aucune marque spéciale pour le signaler à la vénération des foules. Il est nu et pauvre au monde.
59’. La terre pure séparée de sa mort. La lune blanche sortie de son ombre. Le soleil rouge lavé de ses taches.
60. Les hommes ignorants méprisent la terre et le ciel qui les ont fait naître et qui les nourrissent. Les hommes sages s’efforcent d’unir ce qui est bas avec ce qui est haut pour ne faire qu’une seule chose.
60’. L’eau sort de terre et retourne en terre jusqu’à l’épanouissement de la fleur blanche et jusqu’au mûrissement du fruit pourpre.
61. Il n’y a pas de nouvelle vérité. Il y a seulement des formes et des expressions nouvelles de l’éternelle vie très cachée et très évidente.
61’. Celui qui m’incarne, dit l’homme céleste, connaît la voie sainte des anciens sages de Dieu.
62. Il faut être très instruit et très puissant pour redevenir simple et humble comme un petit enfant.
62’. Dieu : le fou que nous aimons, le sage qui nous épouvante !
63. Dieu permet la tentation afin que nous soyons équitablement jugés par nous-mêmes. C’est une justice telle que toute contestation augmente notre peine.
63’. Celui qui est en Dieu commande même aux astres, car il possède le corps et l’esprit purs unis dans l’âme parfaite.
64. Le signe du mensonge, c’est le changement, celui de la vérité, c’est l’immutabilité.
64’. Le feu jugera le monde pourri, mais les vivants de Dieu sortiront sains et saufs de l’épreuve terrifiante. Eux seuls !
65. La plus grande joie que l’homme puisse éprouver, c’est la parfaite manifestation de sa force en Dieu.
65’. Le soleil fixe et parfait issu de la pure et vivante lumière qu’il engendre au commencement.
66. Dieu qui est la perfection de la science et de l’amour, n’offre et n’accepte que la science et l’amour parfaits.
66’. Le trésor enseveli dans la terre. Le grand concentré de l’Univers.
67. La réflexion doit nécessairement précéder toute expérimentation pour parvenir à la vraie connaissance.
67’. La fin du doute : L’expérience de Dieu par la connaissance de la nature et de l’homme.
68. La liberté, c’est tout savoir et se taire, Tout avoir et ne rien posséder, Tout pouvoir et reposer.
68’. La quintessence du ciel et de la terre, qui produit le soleil et qui le reçoit en mariage.
69. Le naturel et le surnaturel sont mêlés si intimement que Dieu seul peut les séparer et les réunir.
69’. En retournant la terre REA, nous découvrirons l’AER céleste qui fait l’ERA divine.
70. Celui qui travaille plus que ne l’exigent les besoins naturels, épouse l’enfer et la mort.
70’. La nature produit tout par l’eau et par le feu. Le sage perfectionne le monde de la même manière.
71. La recherche de la science de Dieu est le seul travail qui se passe de toute approbation humaine. Elle comble tellement ceux qui l’atteignent qu’ils sont en état de tout donner, alors que le monde ne peut plus rien leur offrir.
71’. La mère universelle existant par Dieu qui la modèle à son gré. La fécondante du ciel. La fécondée de Dieu. La féconde de la terre. « La vérité est une malédiction pour ceux qui l’approchent et qui ne la reçoivent pas. »
72. Quand les meilleurs hommes semblent perdus pour le monde, ils sont gagnés à Dieu qui possède tout.
72’. La réunion des quatre éléments forme la cinquième essence, racine de la lune et du soleil.
73. Le maître peut libérer des prisonniers repentants, mais il ne délivre pas les esclaves volontaires de la mort.
73’. Sous la bête, le Dieu secret, et dans la boue, la perle cachée.
74. Dieu a créé le monde qui se perpétue en soi-même. Là se trouve l’enseignement unique.
74’. Le corps-esprit accomplit aisément toute chose, car il est déjà en tout depuis le commencement.
75. Les hommes préfèrent leurs propres systèmes qui s’écroulent, leurs inventions qui tuent et leur travail qui enchaîne.
75’. Le monde mixte, trompeur et trompé. La roue qui ne se repose pas.
76. Dieu se moque des savants du monde parce qu’ils le considèrent comme étranger à son propre ouvrage. Ainsi plus ils voient de merveilles, plus ils deviennent insensés.
76’. L’extrême humiliation de la mort est l’entrée obligatoire à la splendeur de la vie céleste, car la séparation terrestre est le commencement du ciel manifesté.
77. Dieu est tout-puissant. Il renouvelle toutes choses sans effort.
77’. Le commencement dans la terre. Le milieu dans l’eau du ciel. La fin dans le soleil.
78. On peut tout comprendre avec son inspiration. On peut tout examiner avec son aide. On peut tout épurer avec sa science. On peut tout perfectionner avec son art. Il possède tous les noms et n’en a aucun.
78’. La terre produit l’eau et se nourrit de l’eau. L’eau engendre l’air et se vivifie de l’air. L’air devient feu et s’alimente du feu. Le feu tourne en terre et sort de la terre.
79. Rien ne fait jamais défaut à celui qui s’appuie sur Dieu.
79’. Le camphre d’or où réside toute la vertu de la terre et du ciel.
80. Celui qui a obtenu l’amitié de Dieu n’est ni gai ni triste. Il demeure dans la paix du Parfait et il aide les hommes réconciliés dans la Mère aimante.
80’. Le poète fou et saint qui entend Dieu et qui le traduit. Il flambe en éclairant le monde et parle de la vie aux rochers de la terre jusqu’à les éveiller de leur mort solitaire. Sa joie et sa peine sont incommunicables.
81. La plus grande volonté, c’est la plus grande patience. La plus grande patience, c’est la plus grande acceptation. La plus grande acceptation, c’est la plus grande sagesse. La plus grande sagesse, c’est la volonté et la voie de Dieu.
81’. Mille noms et mille visages, sur l’unique pureté contenue dans notre cœur. «Ô lumière universelle des mondes ! » «Ô feu très secret de l’Unique ! » «Ô perfection très sainte de l’Union ! »
82. C’est en confrontant les doctrines de tous les livres saints qu’on peut découvrir la vérité de l’Unique.
82’. Le Père au centre. Le Fils à la périphérie. L’Esprit Saint entre deux. Tous en Un toujours.
83. Étudions les triples mystères anciens. Révérons les doctrines et les fables sacrées. Cherchons le bien qui subsiste dans le mal. Méditons les ouvrages des prophètes et ceux des saints philosophes. Comprenons qu’il n’y a qu’un seul Dieu, une seule science, et une seule création partout et toujours.
83’. Toute humidité sera chassée de la terre, et le feu consumera la crasse immonde jusqu’à ce que le sel virginal paraisse, auquel sera rendue l’eau céleste pour former le nouveau monde de Dieu. « Qui nous fera entendre cette parole du commencement et de la fin des temps ? Qui nous montrera le germe dénudé de la création parfaite du Seigneur ? »
84. Heureux celui qui se tait jusqu’au temps de la connaissance, parce que son ignorance ne se retournera pas contre lui pour l’accabler au jour de la séparation.
84’. Quand on cherche Dieu, on n’a pas le temps de s’occuper du monde, comme lorsqu’on court après le monde, on ne peut pas reposer dans l’Unique.
85. Celui qui se décourage à la première ou à la millième tentative, n’est pas digne de posséder le don de Dieu.
85’. L’eau de la terre et la terre de l’eau, voilà le mystère du Seigneur incarné dans la chair du monde.
86. L’unique voie qui mène à la possession de Dieu, c’est la connaissance de la nature et de l’homme.
86’. Les métamorphoses du monde enseignent le clairvoyant et le ramènent à la source universelle de la vie.
87. Le don exige le commandement, la médiocrité demeure dans l’obéissance. Quand la règle est violée, les sociétés sombrent dans le chaos.
87’. Le feu domine finalement l’eau dans la création cachée et transforme tout en terre sainte.
88. Connaître les trois fondations héréditaires de l’homme, c’est posséder la science. L’âme qui vient de Dieu, l’esprit qui vient des astres, le corps qui vient de la terre.
88’. Celui qui délivre l’homme enseveli, reçoit tout du Père, par le moyen de la Mère et du Fils manifestés clairement. « Nous ne prêchons ni le vent, ni la fumée, ni la cendre, nous prêchons la vie sauve en âme, en esprit et en corps ressuscités. »
89. Les querelles proviennent de la confusion des esprits, de l’emportement des passions, et de l’inexactitude du langage.
89’. La terre couve l’aigle lumineux. Qui le saisira à sa sortie de l’œuf ? Et qui l’élèvera jusqu’à son retour à la terre sainte ?
90. L’homme fort commande sans parler et il est obéi. Le faible crie sans cesse et personne ne l’écoute.
90’. Écouter et regarder en soi pour connaître Dieu dans l’Univers, c’est la voie directe.
91. Il n’y a pas de plus grande malédiction que d’être verrouillé dans l’orgueil de l’esprit et dans la grossièreté du sentiment.
91’. La folie apparente du secret de Dieu exclut les orgueilleux, les cupides et les impies.
Nous sommes enfants des saints et nous attendons cette vie que Dieu doit donner à ceux qui ne lui retirent jamais leur fidélité.
Beaucoup paraissent hors de l’Église qui sont dedans ; beaucoup paraissent dedans qui sont dehors.
⟴LIVRE III
Je suis dans le Père, et le Père est en moi.
Ô Père, tu es dans mon cœur et nul ne te peut connaître si ce n’est moi ton fils.
UN ÊTRE VIE
GLOBE SANS TACHE
1. La prière est le moyen le plus accompli du développement de la volonté en Dieu.
1’. L’eau qui jaillit de la terre sainte retombe en pluie d’or sur le monde enténébré.
2. Dominer les autres est une facile illusion. Dominer soi-même est une dure réalité.
2’. L’étude du monde moyen donne la connaissance du grand Univers.
3. Qui est assez grand pour demeurer caché? Qui est assez connu pour rester anonyme ? Qui est assez généreux pour tout posséder ? Qui est assez puissant pour ne rien exiger ?
3’. Tous voient l’ancêtre, quelques-uns le reconnaissent, un seul le réveille et délivre le monde du péché. « Donne-nous ton NOM secret, ô Seigneur, si tu juges que nos cœurs sont assez purs pour ne pas en mourir. »
4. Toute la science des hommes leur a-t-elle jamais fait repousser un cheveu ? Effacé une ride ? Redonné la jeunesse ? Les a-t-elle sauvés de la mort, comme fait l’amour de l’Unique pour ses amis secrets ?
4’. Liquéfier la terre et concentrer l’eau, puis marier la terre à l’eau et jouir de la paix du Seigneur dans la pierre sanctifiée par l’Union.
5. La dispersion et l’agitation engendrent la triste folie du monde.
5’. L’amour s’emparera de la vertu du soleil, et la multipliera jusqu’au repos du Seigneur ultime.
6. Demeurons silencieux et solitaires, scrutons attentivement la nature mouvante, prions Dieu avec amour et dépassement, ainsi nous arriverons aisément à la lumière qui enfante l’Univers.
6’. Les noces célestes font jaillir la clarté des étoiles. Les noces terrestres manifestent le poids et la vertu de l’or lumineux.
7. Quand un saint guérit un malade, il lui apprend ensuite à aider les autres. Ainsi il le guérit deux fois.
7’. De Saturne à la lune et au soleil, il n’y a qu’une voie qui est l’épuration patiente du corps brut jusqu’à l’union de l’esprit net avec l’âme parfaite.
8. Comment saisirons-nous le mystère des choses cachées, si nous ne comprenons pas l’évidence de celles qui nous aveuglent ?
8’. L’astre externe se joint au soleil interne pour engendrer l’unique clarté. « Ô beauté secrète ! »
9. De l’œuf couvé sort un poulet, mais personne n’y prend garde.
9’. La lumière des astres brille au ciel et à l’intérieur de la terre.
10. L’accoutumance à la mort de l’esprit nous masque les miracles de Dieu et de la nature.
10’. C’est elle qui libère la fontaine de vie où sommeille le germe du ciel et de la terre.
11. Il est superflu d’attaquer la science des hommes, puisqu’elle se détruit elle-même.
11’. Tout ce qui s’accomplit en dehors des lois naturelles est mort et engendre la mort.
12. On ne peut se débarrasser d’un méchant qu’en essayant de l’amender. Le temps et le malheur en viennent facilement à bout et séparent en lui ce qui est bon de ce qui est mauvais.
12’. La vraie nature de l’homme est la lumière céleste couverte par l’ombre de la mort. « Le chercheur d’idéal est un fou dangereux. Le chercheur de réalité transcendante est un sage bénéfique. »
13. À force d’intransigeance et de rigueur imbéciles, on écarte les hommes droits des choses saintes.
13’. Celui qui demeure pauvre en Dieu peut posséder le monde sans danger de mourir.
14. La simplicité et la paresse des foules font du dieu vivant une idole, et de la religion la peur.
14’. La vie du soleil est visible au ciel, et sensible sous l’écorce de la terre.
15. Disputer avec un ignorant, c’est devenir plus faible que lui.
15’. La corruption met toute pureté en évidence.
16. Le sage repose dans la plénitude de l’unique lumière. Le fou s’agite dans le vide des ténèbres multiples.
16’. Nous devinons Dieu dans le temps d’un souffle, mais lui nous considère pendant l’éternité.
17. La vérité se cache sous le voile des fables et des paraboles, il faut un esprit très droit et très pénétrant pour la découvrir, comme il faut un œil bien exercé pour reconnaître le diamant sous l’enveloppe qui le protège.
17’. Dans le centre de l’Univers et dans le cœur de l’homme, sont contenus les mystères de Dieu. Qui creusera l’abîme ? Qui manifestera la vie de la terre ? Et qui consolidera la rosée du ciel ?
18. Les philosophes divins, les saints, les poètes, les artistes et les enfants, pensent et agissent souvent en Dieu.
18’. L’oubli de soi grandit l’homme jusqu’à l’origine sans limite dont est revêtu l’Inconnu.
19. Cependant, quand les premiers parlent, tous doivent écouter humblement et se taire.
19’. La connaissance fait reposer l’homme dans le centre immuable qui porte la mer mouvante du monde.
20. Les hommes grossiers ne sont jamais étonnés devant la création stupéfiante de Dieu. Ils ne voient rien, n’admirent rien, n’aiment rien, ne comprennent rien et ne trouvent rien.
20’. Les sens privés de l’esprit rampent misérablement sur la croûte terrestre; mais l’esprit sans les sens pénètre jusqu’au tréfonds du ciel et de la terre. Cependant, c’est l’amour qui nous fait reposer dans l’unique clarté.
21. La force de la véritable philosophie, c’est de considérer ce qui est et non pas ce qu’on croit être.
21’. La lumière du bois présage le Dieu dans l’homme, et le fruit de notre terre nous fait héritiers du Père magnifique.
22. Peu d’hommes sont capables d’agir en Dieu dans la veille, dans le rêve et dans la mort.
22’. Ceux qui sont morts à l’eau sainte sont doublement privés du feu céleste.
23. Les fonctions de l’homme supérieur sont parfaites et complètes, et c’est en cela qu’il se rapproche de Dieu.
23’. Il ne suffit pas d’atteindre la lumière pendant quelques instants; il faut pouvoir s’y maintenir durant toute l’éternité.
24. La plus infime partie de l’Univers est une image du tout, et suffit à elle-même.
24’. Le cœur du ciel et de la terre est comme un œuf caché dans la mer du monde.
25. La naissance et la mort, l’action et le repos, la lumière et les ténèbres, l’union et la séparation, viennent du mouvement des quatre qui font les changements du monde.
25’. L’imagination du Seigneur vit sous la terre et vole dans le ciel pour animer les mondes. Qui la saisira dans ses mains ? Et qui la fixera dans son cœur ?
26. Le repos de Dieu s’établit dans la pureté, lorsque les éléments sont unis dans un équilibre parfait.
26’. La joie et l’étonnement de celui qui se découvre en Dieu, n’ont pas de fin.
27. On ne tue pas les morts pour les instruire ni pour les sauver, on les baptise de feu et d’eau et on les confie à la terre et au ciel.
27’. La patience de la grâce nous délivre des plus sombres prisons. La douceur de l’amour fait fleurir notre vie cachée.
28. Le monde est pluriel, mais l’homme est singulier.
28’. La grande connaissance demeure au fond de nous.
29. La vérité ne perd jamais les hommes, ce sont eux qui la délaissent.
29’. Dans les ténèbres, la lumière est une avec Dieu depuis le commencement.
30. L’homme sage ne demande rien à ceux qui croient tout avoir et qui ont peur de tout perdre.
30’. Celui qui connaît l’issue de toute chose est sage parmi les sages, dieu parmi les dieux et fou au milieu des hommes vulgaires.
31. Ceux qui, réduits au pain et à l’eau, sont encore joyeux, viennent plus facilement à bout du monde que le monde ne vient à bout d’eux.
31’. On ne peut vaincre la folie de la mort dans le monde qu’en pratiquant la sagesse de la vie en Dieu.
32. La haine est le point extrême de la faiblesse dans la séparation, comme l’amour est le point culminant de la puissance dans l’union.
32’. La dureté et la sécheresse de la terre pour la mort. La souplesse et l’humidité de l’eau pour la vie. Le combat des deux fait paraître la gloire du tout.
33. Les hommes soupirent après les étoiles sans savoir que le soleil roule sous leurs pieds et repose quelquefois dans leurs mains d’aveugles. « La pierre brute deviendra prière, et la prière deviendra pierre précieuse. »
33’. Tous voient le ciel à découvert. Quelques-uns utilisent l’influence des étoiles. Une poignée capte la lumière de la lune. Mais un seul incarne la vie du soleil très parfait.
34. La nature enseigne le sage, et le sage aide la nature afin que le fruit paraisse à la vie et devienne parfait.
34’. Celui qui sait unir les contraires de même nature possède la science.
35. Un simple berger peut être plus instruit que cent mille savants réunis dans le monde, et un misérable idiot peut montrer au sage la lumière du Parfait.
35’. Celui qui possède le sel de la terre assaisonne le monde à son goût, il saupoudre tout mal jusqu’à le faire disparaître en témoignage de la glorieuse vertu de Dieu.
36. Dieu est présent aussi longtemps que nous sommes là.
36’. La perfection qui s’accomplit en secret ne suscite aucune entrave.
37. Ce qui paraît absurde et incroyable, est souvent une barrière destinée à arrêter les hommes remplis d’orgueil et de malignité.
37’. En élevant la terre jusqu’au ciel et en abaissant le feu jusqu’au tombeau, nous obtiendrons la gloire de Dieu par le moyen de l’eau et de l’air moyens.
38. Celui qui sait tout est comme celui qui ne sait rien. Cependant, l’un repose et l’autre s’agite, l’un se connaît, l’autre est connu, l’un crée, l’autre est créé.
38’. Tous les deux sont en un, mais un seul se connaît au-dedans et au-dehors et subsiste dans la gratuité du don perpétuel.
39. L’ange et le démon nous sont incompréhensibles, mais la nature humaine nous éclaire merveilleusement.
39’. « L’homme épuré engendre le monde parfait. » Fuyons les méchants et leurs œuvres, car tout est impie en eux et va à la mort.
40. La voie de la sagesse, de la sainteté et du génie, c’est la solitude intérieure où couve l’étoile de notre naissance divine.
40’. Celui qui sème et qui récolte la lumière du soleil, possède la plus haute vertu et le plus grand trésor du monde total.
41. Chaque terre produit au jour ce que Dieu y a enfermé dès le commencement et rien d’autre.
41’. La vérité apparaît d’abord crue, il faut ensuite la cuire pour l’offrir aux hommes.
42. Il est aussi vain de vouloir se passer de tout que d’essayer de tout posséder dans ce monde.
42’. L’homme instruit demande tout à Dieu, mais il n’imagine aucun moyen, afin de ne pas entraver le don du ciel.
43. Celui qui sait tout ne discute de rien. Celui qui a tout ne refuse rien. Celui qui peut tout ne se flatte de rien. Celui qui a l’amour ne méprise rien.
43’. Le soleil tout-puissant éveille la vie jusque dans la terre morte et la fait germer jusqu’au ciel de résurrection, mais c’est l’eau mère qui fait fructifier la semence de l’or pur.
44. Nous sommes souvent fautifs quand nous croyons les autres coupables. Il faut une grande lucidité et une grande loyauté pour découvrir cela.
44’. Le sage voit le défaut et la vertu de toute chose, mais il est trop occupé à rejeter l’un et à glorifier l’autre, pour en parler.
45. Il vaut cent mille fois mieux être le dernier devant Dieu que le premier parmi les hommes.
45’. L’homme intelligent élimine les envieux, en proclamant sa nullité devant tous.
46. La sagesse de Dieu dépasse de beaucoup notre courte vue et notre faible intelligence.
46’. C’est la prière jaillissante de tout l’être qui rompt les frontières du corps et nous fait un avec Dieu.
47. La puissance première, suprême principe, créateur et pivot du monde, est comme Dieu reposant dans la vie au milieu de la mort.
47’. Le commencement des commencements, le mystère des mystères, le voile protecteur de l’éternité.
48. L’Univers est le cadre de l’homme, et l’homme est le cadre de Dieu.
48’. Le centre du centre est comme le feu au milieu de la grande eau.
49. Le plus facile et le plus difficile au monde, c’est savoir qui nous sommes.
49’. Celle qui nous délivre de toute obscurité. Celui qui perfectionne toute pureté.
50. Quand le monde nous repousse, c’est parce que Dieu nous attire; mais combien répondent à l’amour par l’amour ?
50’. Celui qui est digne de recevoir l’instruction, se désigne à Dieu par la force de son désir et par la puissance de son amour.
51. Aucune parole ne doit être acceptée sans un examen rigoureux et long, afin de séparer le vrai du faux.
51’. L’aboutissement de la science, c’est l’expérimentation de Dieu dans la sainte Mère.
52. Dans l’œuvre de Dieu, le mouvement et le temps sont les juges qui font paraître la vérité.
52’. Concentré, il se dilue; dilué, il se concentre.
53. Celui qui n’augmente pas le travail nécessaire à sa vie, est un homme sage et libre.
53’. Pour un saint qui atteint Dieu, des millions de morts retombent dans la fosse commune.
54. Quand nous croyons perdre ou acquérir quelque chose ici-bas, offrons-le à Dieu. Ainsi nous serons toujours heureux en tout.
54’. Celui qui convoite l’Univers ne s’embarrasse pas de l’ombre du monde.
55. Dieu rêve les créations pour sa connaissance et pour sa joie.
55’. L’oiseau qui sort du rocher retourne à la pierre.
56. Le sage est seul avec Dieu, comme Dieu est seul avec lui-même.
56’. La lumière se dilate jusqu’à l’éther impondérable, et se concentre jusqu’au soleil fixe et pesant.
57. Les mystères de Dieu ne doivent être proposés qu’aux hommes saints. C’est un crime d’en parler à ceux qui demeurent volontairement dans la mort immonde.
57’. La nuée qui vole au-dessus des montagnes, niche dans les cavernes de la terre où elle couve l’unique clarté.
58. L’Univers et l’atome forment le corps unique de Dieu. Qui les cuira au feu doux de l’amour ?
58’. Le sage brille au-dedans et paraît obscur au-dehors. Il ressemble à l’origine du monde qui repose ignorée de tous.
59. Appliquer uniquement notre volonté à trouver Dieu en nous-mêmes, c’est abréger au maximum le temps de notre exil. « Efforçons-nous à ne rien faire afin que Dieu puisse nous parler et afin que ses anges puissent nous servir sans entraves. »
59’. Le froid et le sec paraissent au-dehors. Le chaud et le sec se manifestent au-dedans. L’humide relie le ciel et la terre.
60. La nuit contient le jour. Le mort couvre le vif. Le dur reçoit le mou. Ainsi Dieu manifeste la vie, et la vie manifeste Dieu.
60’. En plaçant le dedans au-dehors, nous ferons paraître l’invisible dans le visible et la lumière de Dieu illuminera la terre des hommes.
61. L’ignorant parle toujours de ce qu’il ne connaît pas. — L’homme instruit s’entretient quelquefois de ce qu’il connaît. — Le sage écoute et se tait.
61’. Entre les deux faces de Dieu, il n’y a que la différence de la pierre à la pierre, mais l’une est obscure et l’autre brille magnifiquement.
62. La plus parfaite joie, c’est adorer Dieu. La plus haute science, c’est imiter son œuvre. Le plus grand trésor, c’est le découvrir et le conserver en soi.
62’. Si tu veux connaître le commencement, étudie la fin et si tu veux parvenir à la fin, prends le commencement. « Désunir n’est pas disperser. Réunir n’est pas ajouter. »
63. L’amour inexprimable n’admet rien autre que lui-même.
63’. L’eau qui sort de la terre retourne à la mer vivante du grand monde.
64. Le repos contient le mouvement. Le mouvement engendre le changement. Le changement purge la création.
64’. La création épurée manifeste Dieu en trinité une et en unité triple. « Consumer n’est pas tuer. Cuire n’est pas détruire. »
65. Celui qui a trouvé Dieu n’oblige personne à croire. La plénitude de l’amour et de la connaissance lui suffit.
65’. Tout ce qui est véridique au-dedans est aussi valable au-dehors, car les deux ne font qu’un en trois.
66. Celui qui sait et qui peut est comme celui qui est.
66’. Le feu central mûrit la lumière céleste.
67. La honte est l’unique châtiment de celui qui reconnaît son ignorance. Dieu est réellement grand et généreux.
67’. Il n’y a rien dans l’Univers qui ne soit aussi dans l’homme. Le grand monde peut donc délivrer le petit et le petit peut aussi rassembler le grand.
68. Quand un peuple méprise, maltraite ou tue ses sages, ses saints, ses enfants, ses poètes et ses artistes, la nation est près de sa fin.
68’. La haine que les médiocres portent à la connaissance, à l’amour, à la vie, à la grandeur, à la beauté, n’a pas de borne.
69. En se présentant aux autres comme ignorant et incapable, on obtient facilement la paix nécessaire à la quête de Dieu.
69’. La réalité la mieux éprouvée par le saint paraît justement absurde au plus grand nombre.
70. Celui qui fait le bien, ne se met pas en peine du mal qu’on fait autour de lui.
70’. La vie instinctive domptée, canalisée et sublimée dans sa source mène à la sainteté.
71. Celui qui instruit les foules est rejeté par tous, ensuite il attire tout le monde; c’est la justice de Dieu. « Les sophistes nous amusent bien un temps, mais ils nous laissent le cœur et les mains vides, à la fin. »
71’. Dieu, qui est vie et feu, manifeste l’Esprit Saint par la mort et par la résurrection de son Fils. « Parmi tous ces intelligents qui nous décrivent le monde où nous sommes prisonniers, quel est celui qui s’en sort et qui nous en délivre ? »
72. Le saint est seul avec Dieu au milieu des hommes vulgaires, comme le mercure et l’or sont unis parmi les déchets de la terre.
72’. L’acceptation et le détachement guérissent toutes les folies, parce qu’ils mènent à l’oubli de soi qui est la sagesse de Dieu.
73. Il existe des esprits faits pour se rencontrer et pour communier entre eux; leur nombre varie peu à travers les âges.
73’. Les combinaisons du perpétuel devenir sont infinies. Dieu seul demeure inchangé dans son vêtement de vie.
74. Les marques extérieures du mérite sont la preuve de l’impuissance et la juste compensation offerte aux médiocres.
74’. Celui qui cherche Dieu en pensée et en action doit écarter les apparences de la mort, qui s’opposent au retour de l’or céleste.
75. La médiocrité assure contre les trop grandes douleurs et contre les trop grandes joies.
75’. La précaution inutile et la mort mitoyenne.
76. Les saints ne sont pas aimés du monde parce qu’ils exigent trop des gens vulgaires.
76’. Une seconde d’intuition révèle ce que mille ans de travaux ne permettent pas d’entrevoir.
77. Quand un bon enseignement est donné à des hommes médiocres, ils le rendent plus néfaste que l’ignorance même.
77’. L’eau est universelle, les semences sont particulières. L’une dissout, les autres consolident, mais une seule chose contient Dieu en secret.
78. Tout ce qui est public s’avilit et se perd. Tout ce qui demeure secret garde sa vertu et son prix.
78’. Sublime vierge revêtue de terreur. Aliment vivant du monde. Nourrice du soleil. Sainte Mère des hommes.
79. L’imbécillité est un frein appliqué à la malfaisance, car elle empêche le choix systématique de ce qui est mauvais pour les autres et pour soi.
79’. La nature se dévoile devant les hommes simples et patients, mais aucune contrainte ne saurait l’obliger à se montrer nue aux sots et aux orgueilleux.
80. La limitation des désirs et l’acceptation du changement engendrent le détachement, la liberté et le repos nécessaires à la recherche du Parfait.
80’. Celui qui veut entrer en Dieu doit devenir comme Dieu, c’est-à-dire très pur et très parfait comme l’eau et comme le feu célestes.
81. Sans la volonté de guérir, il n’y a pas de cure possible ; il faut donc interroger tout malade avant de rien entreprendre.
81’. La prudence du sage consiste à instruire ceux qui le demandent et à ne forcer personne à croire ou à savoir.
82. La femme désagrège l’homme jusqu’à l’eau de l’air. L’homme consolide la femme jusqu’au feu de la terre. De ces deux jaillit l’infini de la création parfaite qui manifeste la gloire de l’Unique sur la terre des vivants.
82’. La liquéfaction et la végétation de la terre sont le premier mystère. La solidification et l’animation de l’eau forment le second mystère. L’alliance de la première eau avec la seconde terre constitue le troisième mystère.
83. Il faut faire en sorte que chacun soit jugé par ses actes et par ses pensées; c’est le vrai jugement de Dieu que personne ne saurait contester sans se condamner davantage.
83’. Si notre chance semble être trop mauvaise, consacrons-la à Dieu qui la fera devenir excellente, car le Savant sait délivrer et mûrir notre lumière enfouie dans la mort.
84. Le don inné, qui vient du passé, détermine l’état présent, qui prépare à son tour le don à venir.
84’. Aucune injustice dans l’état de chacun, par conséquent le silence et l’acceptation conviennent également à tous.
85. Il est plus aisé d’abaisser une grande œuvre jusqu’à soi que de s’élever jusqu’à elle, mais il est indispensable de croître et de mûrir après avoir germé.
85’. Dans les limites où l’eau monte et descend, et là où la lumière des astres et le feu central se joignent, la vie prend corps : sous terre, sur terre, dans l’eau et dans l’air.
86. Savoir, c’est comprendre que la plus petite chose créée par Dieu vaut mieux que toutes les œuvres humaines réunies.
86’. Quand nous serons préparés à suivre la mort sans nous retourner, nous pourrons jouer avec le monde sans crainte de mourir.
87. Le seul but utile ici-bas, c’est atteindre Dieu; tout le reste est comme un rêve, comme la poussière et comme la mort.
87’. Vivre, aimer, désirer, souffrir, expérimenter, connaître, choisir, arriver au repos, c’est le destin de l’homme.
88. La projection patiente et résolue de la volonté vers un but choisi, est le secret de la réalisation du désir.
88’. La prière inspirée constitue le moyen, et Dieu est le but. « Sens aiguisés, muscles abandonnés, jambes pliées, bouche fermée, souffle coupé, sang purifié, tête vidée, cœur apaisé. »
89. Le sage ne condamne pas la folie des hommes, parce qu’il se souvient d’en être sorti depuis peu.
89’. Dans le meilleur homme, quelque chose de mauvais demeure, et dans le plus mauvais subsiste une étincelle de lumière.
90. Le bonheur, c’est adorer Dieu en paix et user du monde comme en rêve.
90’. Nous verrons le monde sans illusion quand nous aurons trouvé Dieu.
91. Effacer le malheur et pardonner les offenses n’est pas les oublier, c’est les dominer seulement, afin de ne pas tomber dans l’ornière de la haine.
91’. Épargnons la vie qui nous entoure, ainsi nous augmenterons celle qui subsiste au-dedans de nous.
92. Si la vérité réjouit et éclaire l’homme sage, elle blesse et égare l’ignorant; c’est pourquoi elle demeure voilée dans le monde.
92’. Celui qui cherche le secret de Dieu trouvera la vie s’il demeure simple et droit, sinon la folie et la mort le disperseront aux abîmes.
93. L’homme supérieur accomplit tout solitairement. Les hommes inférieurs corrompent tout en commun.
93’. Le feu et l’eau séparent ce qui est mêlé dans le monde, et concentrent ce qui est uni par Dieu.
94. L’épreuve confirme les saints et enseigne les impies. « Celui qui accepte est vite délivré de la pression du malheur, car il reçoit aussitôt le remède divin. »
94’. Celui qui a vaincu le monde, dans le monde et par le monde, est déclaré vainqueur devant Dieu. « La première charité, c’est penser aux autres, la dernière, c’est penser à Dieu uniquement. »
95. Si l’obéissance des inférieurs doit être basée sur le désir de se perfectionner, l’autorité des supérieurs doit se justifier par la volonté d’aider et d’instruire.
95’. Seuls les hommes sages connaissent l’art d’enseigner le monde par l’absurde, mais nul ne les entend plus. « Fais bien ce que tu as à faire parmi les hommes, mais n’en escompte rien et n’y crois surtout pas. »
96. Si le livre aide un homme à parvenir jusqu’à Dieu ou à l’approcher, il n’aura pas été écrit en vain.
96’. Chaque chose émerge de son chaos et se perfectionne en soi-même.
97. La lumière du monde sort des ténèbres universelles pour engendrer le jour de Dieu.
97’. Elle sera trouvée par peu d’hommes qui en valent beaucoup.
98. Il y a deux enseignements et plusieurs sens. Dieu les mettra en évidence, ou les voilera à son gré.
98’. La vierge resplendissante et son fils doré reparaîtront sur la terre des vivants.
99. En bénissant ceux qui croient nous dépouiller et nous contraindre, nous ne perdrons rien de plus, mais au contraire, nous deviendrons plus riches de leurs dépouilles et plus assurés de leur défaite ultime ou de leur conversion imprévue.
99’. Tous ceux qui prêchent Dieu parlent la même langue, mais nous les entendons différemment.
100. Donner la forme à la nature, c’est le propre de Dieu. — Détruire l’apparence, c’est l’œuvre des fous et quelquefois, celui des sages. — Imiter les procédés naturels, c’est le travail de l’artiste. — Contrefaire les aspects du monde, c’est la folie de l’ignorant.
100’. La création,
La science,
L’art,
L’artifice.N’expliquons rien à personne. Efforçons-nous plutôt de trouver et de manifester la vérité de vie qui enseignera tout à tous.
101. Le plus grand parmi les hommes, c’est celui qui peut accorder l’enseignement de la nature avec celui des livres saints pour ne faire qu’une seule chose.
101’. Confier la direction des hommes à ceux qui en ont le plus grand amour et la plus grande connaissance, c’est honorer Dieu et le servir utilement.
102. Les religions, les arts, les sciences et les lois ne doivent pas être soumis aux hommes médiocres qui dégradent tout.
102’. La terre redeviendra comme la boue, comme la vie et comme l’or sous le souffle du Très-Haut.
103. Si nous entendons directement l’enseignement du Seigneur, abandonnons-nous à lui et laissons les livres aux suivants qui le cherchent à tâtons.
103’. Tout appartient à Dieu, même la mort, qui le dissimule sagement. « Ceux qui disent à présent : “C’est obscur”, s’écrieront au jour du jugement : “C’était aveuglant et nous n’avons rien vu”. »
103’’. Les intelligents expliquent tout, mais ils entrent dans la fosse et ils n’en ressortent pas. Alors à quoi bon toute leur science ?
Il en est du royaume de Dieu comme d’un homme qui jette la semence en terre : qu’il dorme ou qu’il veille, la nuit et le jour, la semence germe et croît sans qu’il sache comment, car la terre produit d’elle-même son fruit.
La vérité germera de la terre, et notre terre donnera son fruit.
⟴LIVRE IV
La pierre rejetée par ceux qui bâtissaient est devenue la pierre angulaire du faîte. C’est l’ouvrage du Seigneur et c’est une merveille devant nos yeux.
Oh ! que je sois régénéré, que mon esprit soit purifié et sublimé, que souffle en moi l’Esprit d’en haut, que je voie le feu divin.
VERTU NIÉE
LE VOILE
1. L’admiration et l’étude des œuvres naturelles mènent à l’amour et à la connaissance de Dieu.
1’. La terre noire endormie. La vivante lumière du monde. Le Sauveur rouge très parfait.
2. Les alternatives de la foi et du doute font tout le drame de notre quête divine.
2’. Tout ce qui s’éloigne de la nature va à la mort, et tout ce qui pénètre l’homme aboutit à Dieu.
3. L’abandon à la volonté divine, c’est l’aveu difficile de notre ignorance et de notre impuissance.
3’. Donnons et recevons tout avec détachement, afin de connaître l’unité des hommes en Dieu.
4. Le sage qui perd un ami demeure sans surprise et sans tristesse, parce qu’il est depuis longtemps seul avec Dieu. « Les vrais amis demeurent toujours unis dans le Seigneur doré. »
4’. L’amour nous délivre de la solitude, en nous faisant un avec les hommes sur la terre, et il nous mène à la connaissance, en nous faisant un avec Dieu dans le ciel.
5. Il faut examiner attentivement tous nos désirs terrestres pour comprendre qu’ils sont vains, et que l’amour et la connaissance de Dieu sont la seule fin désirable.
5’. La voie de la connaissance réside dans la confiance de l’amour, qui est la foi parfaite dans le pouvoir de l’Esprit saint en action.
6. La connaissance du bien et du mal provoqua la chute du premier dieu créé.
6’. L’étude de la nature et de l’homme mène à la connaissance de l’Univers divin.
7. Emprisonné dans la mort, il ne peut être délivré que par sa partie demeurée pure et libre en Dieu.
7’. C’est dans l’eau qui a baigné le lépreux que se cache la clarté des étoiles.
8. La connaissance du secret divin libère du monde moyen. Le nouvel état de pureté sera conscient et plus accompli que le premier.
8’. Elle offre l’argent et l’or, le diamant et le rubis, mais tous repoussent sa main parce qu’elle est noire.
9. On évite les troubles en faisant participer les hommes doués et vivants aux charges et aux bénéfices de la nation.
9’. Les morts mêmes enseignent le saint que les hommes repoussent stupidement de leurs vies obscurcies.
10. Le juste qui est enterré vivant brise tout ce qui s’oppose à sa résurrection.
10’. Celui qui aide un homme en détresse secourt sa propre vie.
11. Celui qui médite sur la fin de toutes choses acquiert la vraie science. L’aspect en est disgracieux, mais le fruit est doré et vivant.
11’. La triple vie et la double mort engendrent l’Univers moyen. Qui devancera le partage de la fin des temps ?
12. Le sage parle peu, observe tout et agit rarement. Il connaît l’inanité de tout ce qui n’aboutit pas à Dieu.
12’. La sagesse, c’est ne rien préjuger du monde, mais considérer ce qui le transforme, afin de découvrir ce qui est.
13. Tout homme doit faire bénéficier ses semblables des dons qu’il a reçus de Dieu, afin de participer à la délivrance générale et particulière de l’Univers mixte.
13’. Celui qui lit dans les âmes est véridique envers tous, mais bien peu sont à l’aise devant lui, car il dénonce les fardeaux secrets de nos vies obscurcies.
14. Toute joie, tout amour et toute vie sont dans la contemplation, dans la connaissance et dans la possession de Dieu. « Témoignons notre foi en Dieu par la vérité du Livre qui manifeste la lumière dans nos cœurs. »
14’. Ceux qui ont trouvé l’Unique oublient tout, comme ils se sont oubliés en tout. « Celui qui dit un mot à son Seigneur a gagné sa journée, mais celui qui entend un mot de son Seigneur a gagné sa vie. »
15. Toute désolation, toute haine et toute mort se trouvent dans les soucis du monde, dans la fréquentation des hommes vulgaires, et dans la possession extérieure.
15’. Dieu fait secrètement envie à ceux qui l’ont perdu, parce que tout le reste leur fait toujours défaut.
16. Il est aisé d’imposer sa loi par la force, il est difficile de la propager par l’exemple.
16’. La loi endigue l’homme, le devoir le grandit, la servitude l’avilit, mais l’amour le dresse jusqu’à Dieu.
17. Ne méprisons aucune pensée ni aucun travail de notre père, car c’est par eux que nous sommes vivants. « Le voyant de Dieu contemple émerveillé la mer cubique où paraissent et où s’évanouissent les univers du rêve divin. »
17’. Tout est en corps et en esprit. Tout est en bas et tout est en haut. Cela vit et se transforme perpétuellement. Tout est triple et double et cependant unique. Cela monte et cela descend. Tout est femelle au-dehors et mâle au-dedans.
18. La vérité gît dans la parole délaissée des anciens sages. Qui la mettra au jour ? Et qui l’enfouira de nouveau ?
18’. L’ancêtre des jours nous sourit à travers la mort, mais il demeure sans nom et sans figure dans l’éternité.
19. Les fils de Dieu sont envoyés par l’amour pour ramener à leur source les hommes égarés dans les immobiles ténèbres de la mort. Chasser ou tuer un de ces messagers, c’est renvoyer à Dieu son pardon et se condamner à l’exil pour toujours.
19’. La lumière du soleil, de la lune et des étoiles féconde perpétuellement l’eau du ciel qui porte la semence jusque dans les profondeurs de la terre d’où surgit la vie des êtres et des choses.
20. La justice secrète veut que les hommes remplis de Dieu soient jalousés et persécutés par ceux qui en manquent le plus.
20’. Prions le Seigneur pour qu’il éclaire nos ennemis comme nos amis, car si nous devons tout aimer en Dieu, hors de lui, nous devons tout redouter.
21. Le sage enseigne le monde dans le repos et le silence. Le fou trouble tout par son agitation et par ses cris.
21’. Méditons Dieu jusqu’à ce que toute réflexion disparaisse et que notre lumière devienne une avec lui.
22. Seigneur, accorde-nous l’amour et la connaissance que nous pouvons supporter sans mourir et pardonne à notre aveuglement lamentable.
22’. Aidons discrètement ceux qui souffrent, afin d’éviter les remerciements ou les insultes des ignorants, qui croient acquérir ou perdre quelque chose ici-bas.
23. Injuste et menteur avec les hommes, on acquiert les biens de ce monde. Simple et droit devant Dieu, on obtient la vie éternelle de son règne.
23’. Quand la mort dominera sur le monde, la vie sainte sera bien près de paraître. « Ce qui se fait au grand jour ne s’accomplit pas nécessairement au grand air. »
24. L’orgueilleux est vomi par l’Univers tout entier. Il demeure seul enfoui dans la boue morte.
24’. au-dehors Mort. Orgueil. Ignorance. au-dedans Mare. Occultum. Igneum.
25. Le mélange général a été produit par l’arrêt infime de la contemplation de Dieu par l’homme qui voulut connaître le Rien et le Tout, en mangeant le fruit mélangé de mort.
25’. Avant le commencement, tout demeurait dans le repos des dures ténèbres de la mort. Le feu en s’éveillant dans l’eau ordonna le chaos, et les quatre éléments engendrèrent l’esprit vivant de l’Univers.
26. Ainsi naquit l’être moyen par la chute d’une parcelle de l’être lumineux dans le non-être ténébreux.
26’. Le chaud et le sec animèrent au-dedans la jeune lumière de Dieu, et le froid et l’humide la manifestèrent au-dehors; sept fois le feu intérieur divisa l’Unique, et les étoiles parurent dans leur rang.
27. La séparation et la réunion s’accompliront par le rassemblement des parties vivantes et par le rejet de la portion morte. L’accomplissement et le perfectionnement s’opéreront par la concentration de la lumière et par le mariage ultime du ciel et de la terre.
27’. En dernier lieu, tout reposa dans le soleil parfait. Ainsi la lumière divine manifesta sa noble origine. Dieu se contempla dans l’homme et lui donna son âme. Il leur recommanda alors de ne pas chercher à connaître leur limite, afin de demeurer immortels.
28. L’amour accomplira la délivrance totale; ceux qui en sont privés demeureront dans la mort.
28’. Personne ne saurait parvenir jusqu’à Dieu sans passer par la sainte Mère universelle.
29. Dieu attire ce qui lui ressemble et repousse ce qui lui est étranger. Il ne saurait s’unir qu’à une chose parfaitement épurée.
29’. Celui qui aime vraiment n’a aucune étroitesse d’esprit; c’est pour cela qu’il est haï des médiocres.
30. La variété du mélange d’une partie de l’Être avec le non-être produit la hiérarchie des créatures depuis le ciel jusqu’à l’enfer.
30’. Celui qui possède la sainte lumière est complet et vivant comme son Père céleste et comme sa Mère terrestre.
31. L’Être s’enterre et ressuscite pour sa seule connaissance et pour sa seule perfection.
31’. Le premier sage qui reconnut Dieu n’avait pas de livres. La nature l’enseignait, et il aidait la nature.
32. Ami de Dieu, instruit de son œuvre. — Consacré à Dieu, le cherchant en soi-même. — Artiste, faisant paraître la nature sainte. — Guérisseur, soulageant ses frères. — Instructeur, dirigeant les hommes vers leur perfection. — Producteur, accomplissant patiemment le travail nécessaire à la vie. — Pacificateur, en paix avec ses semblables, maintenant l’ordre dans sa maison.
32’. « Révérons nos instructeurs divins comme les plus belles images de Dieu ici-bas. » Notre vie dans ce monde est un jeu perpétuel de déguisements, tantôt attirants et tantôt repoussants, comiques ou tragiques, qui mettent la perspicacité de chacun à l’épreuve. Heureux celui qui découvrira, sous l’écorce de l’ombre, la nudité triomphante du Seigneur intangible.
33. Toute tristesse vient de l’importance qu’on attribue à soi-même et aux autres. Toute joie vient de la confiance qu’on a en Dieu.
33’. Les hommes peuvent bien s’oublier en Dieu, puisque lui-même n’a pas craint de s’oublier dans l’humanité.
34. Le malheur est venu par l’abus de la liberté que Dieu nous a accordée. Le bonheur se retrouvera dans l’observance des lois qu’il nous a données.
34’. C’est en passant par la mort hideuse que nous rejoindrons la vie sublime du Parfait. « L’eau du ciel et la lumière de Dieu nous feront germer certainement. »
35. Le mal spirituel et corporel apparaît par la diminution de l’Être pur qui subsiste en nous, et par l’augmentation du non-être impur qui nous enserre de toutes parts.
35’. L’embrasement du monde précédera la bénédiction et la venue du Seigneur, mais combien seront préparés à faire face à la tempête du feu ? Ceux qui auront mangé l’incombustible !
36. La prière spontanée, le repos solitaire, la méditation profonde, la nourriture simple et le mouvement mesuré entretiennent l’âme, l’esprit et le corps du sage.
36’. Le centre de l’Univers repose dans le cœur de l’homme, mais pour le délivrer, il faut premièrement que l’esprit libre vienne au secours de l’esprit prisonnier des ténèbres.
37. Les sages, amis de Dieu, possèdent la perfection du monde dans une seule chose méprisée de tous.
37’. C’est la bénédiction de Dieu qui envoie l’eau de vie, et c’est son amour qui incarne le feu saint.
38. Plus l’ascension est élevée, plus le risque de tomber devient grand. Fixons donc toujours le Seigneur et ne regardons pas en arrière.
38’. Acceptons les échecs qui nous rapprochent de Dieu et défions-nous des réussites qui nous maintiennent dans la mort.
39. L’Être et le non-être sont les pôles du tout entre lesquels paraissent les mélanges de l’Univers mixte.
39’. La femme qui a introduit la mort dans le monde, est destinée à l’effacer dans l’homme, avec l’aide de Dieu.
40. Les ténèbres recèlent la lumière. Le mal couvre le bien, et la mort masque la vie.
40’. Il n’y a rien dans le monde qui ne soit entaché de boue, sauf la glorieuse vêture du Seigneur dans le ciel.
41. Le point le plus éloigné de Dieu est une absence complète de Dieu, et le point le plus proche est une présence totale de Dieu. Les points moyens forment l’Univers gradué.
41’. Tout ce qui est au-dedans doit rejoindre ce qui est au-dehors, et tout ce qui est au-dehors doit rejoindre ce qui est au-dedans pour engendrer le soleil de la résurrection glorieuse.
42. Quand la première séparation se fera, il ne subsistera que l’Être et le non-être, qui sera rejeté. Quand la seconde séparation s’accomplira, il demeurera l’Être en unité, qui sera exalté.
42’. Pensons à Dieu au moment de la mort et nous serons avec lui à l’heure de la vie pour le perfectionnement ultime et pour la multiplication dernière.
43. Quand nous mourrons, nous nous réveillerons en Dieu et nous nous souviendrons de notre vie comme d’un rêve absurde.
43’. Éventrons les mondes et rassemblons leur lumière dans le soleil de pierre. « Le très pesant rubis du Seigneur. »
44. Il est plus efficace de vaincre le monde en l’affrontant que de ne pas être vaincu en se dérobant. Mais les deux victoires ont leur récompense propre.
44’. On peut tout espérer d’un révolté, d’un meurtrier, même d’un fou. On ne saurait rien attendre d’un médiocre.
45. Toutes les habitudes mènent à la mort. Le ronronnement et l’assoupissement des cloîtres sont autant à craindre que les tentations du monde.
45’. Celui qui regarde trop le ciel laisse brûler son dîner, et celui qui ne voit que la terre oublie sa pureté.
46. Les sages naturels ont institué les sociétés, les religions et les arts. Inclinons-nous devant eux, comme ils sont agenouillés devant Dieu.
46’. Les fils du Seigneur sont les frères du soleil éternel, ils brillent déjà de l’éclat des joyaux célestes et possèdent la densité de l’or épuré.
47. Le blanc dans le noir et le rouge dans le blanc, voilà toute la création présente.
47’. Celui qui connaît la Mère délivre l’homme et pénètre jusqu’à Dieu.
48. Dieu est comme un feu fixe et sec, caché dans un feu mouvant et humide. Celui qui le découvre possède la maîtrise de la vie.
48’. Le sage parle et se tait dans le même instant. Il découvre tout, mais ne vilipende rien.
49. Dieu est incompréhensible pour tout autre que lui-même. La science opère extérieurement. La connaissance accomplit tout en dedans.
49’. Quand je pense à lui, mon cœur se fond dans l’eau, et mon esprit vole dans son immensité, mais le poids de l’amour me fixe dans la paix du centre secret.
50. L’étude des transmutations est le commencement et la fin de la sagesse. « Qui rendra consistant l’esprit moyen du ciel et de la terre ? »
50’. Le sperme est la partie la plus concentrée et la plus pure du corps. Le germe est la portion la plus parfaite et la plus fixe du sperme.
51. Il faut reconnaître humblement la loi du monde et conformer notre vie à la sagesse de Dieu qui a tout établi pour notre perfectionnement ultime.
51’. L’eau est unique dans tout l’Univers, mais elle se différencie dans chaque création dont l’homme est la plus accomplie.
52. C’est en étudiant l’œuvre qu’on arrive à connaître le maître qui l’a faite.
52’. La vérité repose dans l’intérieur de chaque terre.
53. Il appartient à chacun d’imiter Dieu et de séparer le vrai du faux.
53’. L’esprit éclaire manifestement l’homme épuré, car l’Unique Splendeur habite en nous depuis le commencement.
54. Le plus grand mal est comme le plus grand oubli de Dieu, et le plus grand bien est comparable à sa plus grande présence.
54’. Il vaut mieux ne pas être enseigné par Dieu que s’obstiner à ne pas l’entendre. « Repose-toi et tu seras animé, vide-toi et tu seras rempli. »
55. La correction du malheur est sans objet pour celui qui va au plus court vers Dieu. Celui-là éprouve volontairement par la pensée toutes les joies et toutes les souffrances des hommes. Il a une immense bonne volonté envers Dieu et se confie à lui totalement.
55’. Celui qui possède l’amour et la connaissance agit sans pécher, car il coopère avec la puissance du Seigneur, qui est toute pureté et toute force dans la vie éternelle et libre. « L’humilité parfaite ne peut aller sans la pauvreté totale, et l’amour saint ne peut paraître sans ces deux-là. »
56. Le travail consacré à la recherche de Dieu apporte seul la délivrance des liens du monde.
56’. La parole de vie vient de la connaissance par le canal de l’amour.
57. Aucune créature ne saurait être préférée à Dieu, même si cette créature porte Dieu en soi.
57’. Du Dieu total et caché émane l’Être visible et parfait.
58. Il est plus sage d’obéir à la volonté divine qui nous connaît, que d’essayer d’échapper à la loi que nous ne comprenons pas.
58’. Les échecs du monde nous ramènent sagement dans la voie de Dieu. « Ce qui n’a jamais été perdu entièrement, ne saurait être oublié tout à fait. »
59. L’homme impatient affiche son ignorance; celui qui sait attendre voit son désir se réaliser.
59’. La faux du temps sépare toute vérité, mais c’est le feu secret qui la met en évidence et qui la mûrit.
60. Les mille et mille univers qui nous submergent sont comme la millionième partie d’une goutte du sang divin. Le plus infime atome renferme des mondes inconcevables. Ainsi l’Univers est en Dieu, et Dieu est dans l’Univers.
60’. Il vaut mieux regarder en soi et se taire. Ô germinative lumière ! Ô fruit très pesant du soleil ! Ô mariage secret des identiques contraires ! Ô splendeur fructifiante de l’unique beauté!
61. Dieu par la nature refait sans effort tout ce que les hommes s’imaginent détruire avec beaucoup de peine. Ainsi Dieu par la nature enseigne subtilement l’observateur clairvoyant.
61’. De « un total » qui sont cinq, par « un secret » qui sont quatre, est fait « un vivant » qui sont trois. Mâle et femelle en deux qui engendre le « un vainqueur » qui est le point dans le cercle.
62. La gloire du monde rend l’homme triste et vain; c’est une fumée qui aveugle les plus clairvoyants. Celui qui la cueille change sa vie contre le vent.
62’. La gloire de Dieu est une nuée qui illumine et vivifie celui qui l’atteint. Ô bénédiction !
63. Les esprits montent et descendent pour laver la terre de ses souillures afin que Dieu puisse venir l’habiter à nouveau.
63’. Il est sorti de la mort et s’est fixé dans le soleil glorieux. Ô rédemption !
64. Celui qui met sa confiance en Dieu acquiert la paix de l’esprit et du cœur qui rend les tribulations du monde indifférentes.
64’. Ceux qui savent aller nus puisent dans le trésor de Dieu. Ô pureté!
65. Celui qui se tient au-dessus des louanges et des reproches, a vaincu le monde présent, car il communie déjà avec Dieu.
65’. La douceur du feu fait jaillir la source des étoiles. Ô germination !
66. C’est Dieu seul qui procure la sauvegarde et la consolation, et tout fait défaut à l’heure de la mort s’il est absent de nous-même.
66’. La pureté de l’eau porte le souffle de vie au-delà de la mort. Ô transfiguration !
67. Ceux qui méprisent l’enseignement des anciens sages, entassent la folie sur l’ignorance et provoquent la mort de tous.
67’. Le chemin de la délivrance est partout visible dans ce monde. Ô pluie fécondante !
68. Le travail du monde est illusoire et de peu de profit, mais le temps consacré à la recherche de Dieu n’est jamais perdu pour personne.
68’. La foi approche la merveille du monde. La patience la met en lumière. L’amour multiplie sa vertu.
69. Le détachement des choses créées est la condition de l’amour de Dieu.
69’. Celui qui est en Dieu reconnaît aisément l’unité de l’Univers.
70. Ce qui paraît impossible au début, semble aisé à la fin. Ce qui est dur et mort, redeviendra souple et vivant.
70’. Prions Dieu afin qu’il nous permette d’entendre, de voir et de goûter ce qui est en lui.
71. La méconnaissance des lois naturelles enfonce l’homme dans le désordre et la douleur d’une révolte inutile. L’observation de cet enseignement universel libère sa vie des liens de la mort.
71’. Qui redeviendra élève de la nature et enfant de Dieu, afin que l’eau du ciel et de la terre délivre notre vie et nous fasse semblables à la Mère sainte, ensuite au Fils très saint et très parfait ?
72. Il y a un sens caché et une parole claire. Dieu ouvrira l’entendement à celui qui est simple, aimant et fidèle.
72’. Qui saisira la clarté qui monte au ciel ? Et qui fixera la lumière qui descend sur la terre ?
73. Reprendre un savant ignorant, c’est s’en faire un ennemi et l’enfoncer dans son erreur pour toujours, car il raisonne sur tout, il explique les mystères et dévoile les Écritures, mais il ne possède rien en vérité, pas même l’écorce des choses.
73’. Celui qui s’attache à l’écorce des choses ne perçoit que la mort. Celui qui découvre l’essence de l’Univers, atteint la vie éternelle. « Le repos de la sagesse, c’est être sorti de la mort et c’est ne plus y rentrer. »
74. Il vaut mieux agir par l’exemple sans vouloir convaincre personne, ainsi tous peuvent se convertir sans paraître céder à quiconque.
74’. Aimer la création, la pénétrer et se taire : telle est la sagesse du sage, et telle est la prudence du saint.
75. Comment croire ce que les saints voient en nous, quand nous n’entendons pas ce qui se passe au-dedans de nous-même ?
75’. Le feu central vit actuellement dans l’eau céleste, sous le voile de la terre étrangère.
76. Éloignons-nous des fous, abandonnons-les à leurs agitations contraires. Le malheur va les instruire gratuitement et les calmer pour longtemps.
76’. C’est au moment du conflit avec soi-même ou avec les autres qu’il faut surtout recourir à Dieu, parce qu’il est l’amour et la paix inaltérables.
77. Recherchons celui qui bouge peu, qui parle peu et qui médite beaucoup. Dieu l’éclaire et le délivrera pour toujours.
77’. Ceux qui affichent la sainteté ne la portent pas toujours en eux, car le dehors dans ce monde est rarement identique au dedans.
78. Ne répondons ni à la raillerie, ni à la grossièreté, ni à l’injure. Plaignons dans notre cœur celui qui se montre inférieur à l’amour.
78’. Remettons nos ennemis dans les mains de Dieu, afin qu’il les instruise comme nous-mêmes, par la misère, le deuil, la maladie, la vieillesse, l’abandon et la mort.
79. La plus sage réponse peut provoquer la plus grande fureur, et le meilleur enseignement peut engendrer les pires folies.
79’. Consacrons nos pensées et nos actions à Dieu, afin qu’aucun mal n’en résulte pour personne.
80. Dieu vit et attend dans chacun de nous. Il suffit de mourir au monde et à soi-même pour l’entendre et pour le voir aussitôt.
80’. Le feu et l’eau délivreront l’Univers des ténèbres de la mort et le glorifieront jusqu’au noyau vivant de l’unité première et dernière.
81. La mort sépare ce qui est mauvais et rassemble tout ce qui est bon, mais il lui faut l’aide de la vie céleste.
81’. Quand le corps est vaincu, l’esprit paraît pur et libre, et l’âme sainte les unit en Dieu pour toujours.
82. Quelques sages inconnus possèdent la terre sainte et mystérieuse de Dieu.
82’. Personne ne les écoute, et ils ne parlent presque plus.
83. Celui qui voit et aime Dieu à travers toutes les apparences du monde, est seul à ne pas s’étonner et à ne pas souffrir quand tout s’évanouit.
83’. La lune et le soleil ressortiront de la mer à la fin de la longue nuit, et je louerai le secret de mon Seigneur dans l’éternité de son don magnifique.
84. L’homme qui aide la nature suscite la vie. Quand il la torture, il engendre la mort.
84’. La fin verra le feu pur transformer l’eau du monde en sa propre nature.
85. Celui qui reconnaît son ignorance, son impuissance et ses fautes, n’a pas de concurrent à redouter, et Dieu peut lui parler sans entrave.
85’. Celui qui part de ce qui est, arrive rapidement à ce qui sera. Et celui qui accepte tout avec amour, reconnaît vite le secours miraculeux de la Providence cachée du Seigneur.
86. Chaque persécution que le monde inflige au sage rapproche celui-ci de Dieu, et l’éloigne de la mort.
86’. Chaque méchanceté augmente le vêtement de mort de celui qui la pense ou qui la commet.
87. C’est l’humilité qui prend conscience de notre ignorance et de notre impuissance d’hommes égarés. C’est l’orgueil qui croit en notre science et en notre pouvoir de dieux déchus.
87’. La faiblesse de l’eau se meut dans le ciel. La force du feu demeure dans la terre. De ces deux réunis émane l’Être parfait.
88. Il est risqué de rechercher la science pour soi-même, mais il est encore plus dangereux d’instruire les hommes de ce qu’ils ne veulent pas entendre.
88’. Ne nous lassons pas de l’obscurité apparente des livres saints. Essayons plutôt de la pénétrer jusqu’à la nuée de l’amour et jusqu’au soleil de la connaissance.
89. Rien ne peut être dit clairement sans provoquer l’incrédulité, ou la cupidité, ou la haine, ou la mort.
89’. Le connaisseur conserve évidente et secrète la clef du ciel et de la terre.
90. La création est comme l’actualisation du pouvoir imaginatif de Dieu, qui, par une extension de lui-même, manifeste la vie jusqu’aux limites de la mort.
90’. Le corps-esprit est sans commencement et sans fin. Quand il se dédouble, les univers naissent dans l’amour; c’est le temps du mouvement. Quand il se réunit, les mondes disparaissent dans la connaissance; c’est le temps du repos.
91. La nature enseigne le secret des êtres et des choses; peu d’hommes savent comprendre ce qu’ils voient.
91’. Le temps fera éclater les pierres jusqu’au ciel et les ramènera en terre sainte.
92. Il n’y a qu’un Dieu, qu’une vérité, qu’un enseignement; mais la confusion des mots et la subtilité des pensées masquent l’évidence de la vie éternelle et mouvante.
92’. L’eau monte de l’abîme de mort et descend du ciel de vie par la puissance de l’amour qui unit toute pureté en Dieu.
93. L’esprit de vérité est un don de Dieu; l’étude des lois naturelles et la méditation des livres saints le développent jusqu’à l’entendement de l’incompréhensible.
93’. Instruire ceux qui ne recherchent rien, c’est troubler l’ordre du monde, et lire ceci sans méditer, c’est semer et ne pas arroser.
94. Le sage qui s’est donné à Dieu n’éprouve aucune peine à se prêter aux hommes.
94’. Si nous ne trouvons pas le Dieu qui vit caché au-dedans de nous, nous ne connaîtrons jamais celui qui demeure libre au centre de l’Univers.
95. Il cultive la terre féconde et abandonne les malins à leur orgueilleuse ignorance.
95’. Celui qui ne cherche à convaincre personne ne craint aucune dispute.
96. Conservons dans nos cœurs le souvenir de ceux qui nous ont appris à aimer Dieu. Évoquons-les avec le père. Bénissons-les avec le vivant. Prions Dieu pour qu’il les comble de son amour dans l’éternité du grand souffle alterné.
96’. Notre vie est éternellement grosse de Dieu. Qui le fera paraître avant le terme de la mort et de la résurrection du grand monde ? « La nature délivrera la nature, et l’enfant mystérieux naîtra de l’unique mère. »
97. Le saint vit sur la terre comme en prison. L’heure de la mort marque la fin de son exil.
97’. Celui qui sourit à la désolation du malheur, voit bientôt paraître la lumière de Dieu.
98. Chacun se forge une fausse image du monde et s’efforce vainement de la faire coïncider avec la véritable. « L’éducation convient à tous, mais l’instruction n’est profitable qu’à quelques-uns et la révélation ne sert qu’à un seul. »
98’. Dieu a manifesté la nature et créé l’homme. L’homme accouche la nature. La nature accouche l’homme. Ainsi la nature et l’homme reproduisent Dieu.
La vérité vient de Dieu. L’homme est libre de croire ou de persister dans l’incrédulité.
C’est Dieu qui révèle les choses profondes et cachées, qui sait ce qui est dans les ténèbres, et la lumière demeure avec lui.
⟴LIVRE V
Le feu ne fondait pas cet aliment céleste semblable au givre et fusible comme lui.
Car ce qui résistait à l’action destructrice du feu se fondait aisément, échauffé par le moindre rayon de soleil.
TRÊVE UNIE
LA MÈRE CÉLESTE
1. Celui qui a placé sa confiance et son amour en Dieu, peut tout perdre ou tout acquérir ici-bas; il ne s’en soucie plus.
1’. Le Seigneur reconnaît ses fils à la folie de leur amour qui fait la sagesse de leur vœu.
2. L’homme supérieur illumine et vivifie tout ce qui l’approche. L’inférieur obscurcit et tue tout ce qui le touche.
2’. L’eau purifie la souillure du monde. Le feu perfectionne la vertu de l’eau.
3. Menons les guerriers devant les ossements des morts et demandons-leur : « Placez vos amis à droite et mettez vos ennemis à gauche; enseignez-nous la justice ».
3’. Derrière les changements du monde, demeure l’essence éternelle de la vie. Qui peut la reconnaître à présent ?
4. Dieu seul peut réunir ce que la mort a dispersé. Il placera les terres mortes au-dehors et réunira les soleils dans son cœur. À lui le jugement, la lumière et la gloire.
4’. Le feu créateur reposait dans l’eau vive, et tout était caché sous le manteau de la mort ténébreuse.
5. L’envoyé de Dieu n’éprouve aucune prudence quand le feu du Seigneur le possède.
5’. Le saint épargne l’existence des autres en sacrifiant la sienne.
6. L’ami de Dieu est toute réserve quand la lumière du ciel est sienne.
6’. Le sage aide tous les hommes en menant sa vie vers la perfection.
7. Ceux qui tentent Dieu se verrouillent dans la mort.
7’. Le héros tue tout le monde et se tue.
8. La victoire s’obtient sur la bête qui vit en nous et ne veut pas céder.
8’. Ce qui force Dieu détruit l’homme, et ce qui brime l’homme efface Dieu.
9. Prions pour que la mort nous trouve louant Dieu en vraie poésie et l’adorant en pur amour.
9’. Celui qui a obtenu l’eau de la terre doit chercher la terre de l’eau pour parfaire l’œuvre du Seigneur.
10. La perfection serait de penser et d’agir comme si le monde nous appartenait et que nous l’ayons remis à Dieu.
10’. Le voyageur du ciel et de la terre pèse au plus bas de l’enfer, et vole au plus haut firmament.
11. Le Krist, invité à la noce, s’y rendait sans façon et participait aux agapes sans déchoir. « La perfection dans l’amour, la simplicité dans l’accomplissement. »
11’. Entre l’eau et le vin, il y a place pour le sang de la terre et entre la boue et le froment, il y a place pour le corps du soleil.
12. La méditation tue les morts et éclaire les vivants. Les vaines discussions égarent tout le monde.
12’. Celui qui possède l’or ne dispute avec personne pour affirmer sa richesse.
13. On ne peut s’entretenir avec Dieu que dans la paix intérieure, comme on ne peut converser avec les hommes que dans le calme extérieur.
13’. La lumière du ciel jaillit du grand silence de la mort par l’effet de la grâce et de l’amour agissants.
14. La pensée de la mort n’est plus un frein à la folie des hommes, parce que le monde devenu ignorant et faible repousse cette vision avec horreur, ou s’y livre avec passion et aveuglement.
14’. On reconnaît l’ignorant à l’ennui, au mépris ou à la colère qu’il éprouve devant l’enseignement naturel de Dieu.
15. La misère, l’esclavage, la maladie, la vieillesse et la mort nous ramènent constamment vers la seule réalité qui est Dieu.
15’. Celui qui ne détourne pas le regard de la fin misérable de toute chose, voit bientôt resplendir la gloire du Seigneur.
16. La plus grande révolte contre le monde doit aboutir à la plus totale soumission envers Dieu.
16’. L’absurdité du malheur nous démontre clairement la vanité de nos jugements et de nos actes.
17. Dieu délivre seulement ceux qui l’implorent avec un désir furieux et un amour insensé.
17’. Celui qui renonce à la terre et au ciel reçoit Dieu sans entrave.
18. Les saints sont haïs par les hommes vulgaires, comme étant les vivants exemples de ce qu’ils ne sont pas.
18’. L’or se sépare de la boue par son propre poids, et quelquefois par sa grande légèreté.
19. Dieu communique sa science et infuse son amour à ceux qu’il reconnaît pour ses fils.
19’. Les enfants de l’amour sont engendrés par le feu céleste; c’est pourquoi ils sont vivants dans l’éternité.
20. Les doigts de la main suffisent à dénombrer les élus d’un moment de la terre. « Ô vivants joyaux cachés parmi la foule éteinte des hommes aveugles ! »
20’. Il n’y a aucun encouragement ici-bas pour les sages et pour les saints. Les persécutions qu’ils subissent dans ce monde ajoutent à leur prix devant Dieu.
21. La connaissance originelle comporte une immense tentation pour l’homme mortel. Elle n’est révélée qu’aux cœurs purs, humbles et fidèles.
21’. Dieu est comme un trésor enfoui dans la terre que nous foulons aux pieds et comme un secret caché dans la pluie qui tombe sur nos têtes.
22. Ceux qui possèdent la science demeurent soigneusement cachés, sauf un seul qui enseigne la voie aux hommes purs.
22’. Celui qui possède l’amour et la sagesse ne juge rien ni personne.
23. Prions Dieu pour qu’il nous fasse rencontrer un instructeur véridique avant le jour du jugement et prions-le afin de reconnaître son envoyé quand il se présentera à nous.
23’. Tout ce qui est patiemment souhaité est facilement obtenu. Il suffit de bien choisir au commencement, afin de ne pas récriminer à la fin.
24. Retournons à Dieu les louanges qui nous sont adressées, puisque les dons qui les motivent proviennent tous de lui.
24’. L’eau céleste engendre l’Univers, qui la manifeste à son tour dans la pierre sainte et parfaite.
25. C’est dans le malheur et au moment de la mort que l’homme révèle ce qu’il porte en lui.
25’. L’eau vivante d’éternité est le singulier pluriel des mondes visibles et invisibles.
26. La prière vécue une minute vaut mieux que la leçon morte ruminée pendant toute une vie.
26’. Le saint qui prie Dieu dans son cœur est plus efficace que toutes les armées du monde réunies.
27. Prêcher la renonciation et s’accrocher aux richesses, c’est se condamner à la double mort.
27’. Celui qui possède le feu secret peut tout acquérir et tout renoncer sans dommage.
28. Il vaut mieux user discrètement des choses du monde et louer Dieu pour les occasions qu’il nous offre.
28’. La sainteté des peuples paraît au détachement et à la simplicité des maîtres.
29. Celui qui s’occupe seulement de ses affaires, évite les ennemis gratuits et la dispersion aveugle.
29’. En demeurant inconnu dans le monde, on échappe à la malveillance des médiocres, des envieux et des fourbes.
30. Celui qui collabore à l’œuvre de Dieu acquiert la vie substantielle et la paix pour toujours.
30’. Le sage joint son action à celle du ciel et de la terre, car il connaît le commencement, le milieu et la fin de toute chose ici-bas.
31. Celui qui se plaint des hommes ou de Dieu affiche son ignorance ou sa présomption.
31’. Celui qui plaint les hommes et qui loue Dieu, prouve son amour et sa connaissance.
32. Il n’y a ni paix, ni sécurité pour personne dans ce monde. Le malheur nous tient constamment éveillés; c’est par excellence l’instructeur des hommes égarés.
32’. Tout ce qui est venu de la boue retournera en boue, jusqu’à ce que le soleil s’empare de toute la pureté du monde et la fixe dans la nouvelle terre de Dieu.
33. Les remèdes souverains sont souvent les plus amers au goût.
33’. La pénétration de la pensée des sages mène l’homme le plus ordinaire jusqu’à Dieu.
34. L’homme vulgaire est comme un bouchon dans la mer démontée du monde. Celui qui a l’amour de Dieu demeure ferme en tous lieux et en toutes occasions; c’est un sujet d’étonnement pour ceux qui l’entourent.
34’. Le saint aide la foule des hommes, mais ceux-ci ne peuvent rien pour ou contre son avancement, car c’est le Seigneur qui nous éveille ou qui nous endort à son gré.
35. L’épreuve trempe les forts et enseigne les faibles. C’est la loi du monde.
35’. Tout ce que nous envoyons nous revient augmenté, et nous devenons ce que nous avons choisi d’être.
36. Celui qui parvient à la vérité divine rit, pleure, admire, loue et bénit éternellement.
36’. L’étoile du matin nous guide jusqu’à la lune de douceur et jusqu’au soleil de force.
37. L’idolâtrie de soi-même conduit à la folie dans la mort. L’amour de Dieu mène à la sagesse ultime dans la vie impassible.
37’. L’homme qui relie la lumière aux ténèbres participe au monde total.
38. En évitant les compétitions mondaines, on acquiert facilement la liberté de prier et de chercher Dieu.
38’. N’imposons rien par la violence, pas même la vérité si cela doit provoquer la dispute et la haine.
39. L’ignorant torture la nature par tous les moyens et dans tous les domaines. Celui qui est instruit la découvre par une seule voie et dans un seul lieu.
39’. La grâce et l’amour nous délivrent des immondices et nous unissent à Dieu dans le secret de la substance et de l’essence premières.
40. Celui qui découvre la vérité de Dieu sourit même au malheur et à la mort.
40’. Quand nous posséderons la vérité unie, aucune contradiction ni aucun acquiescement ne pourront ébranler notre jugement.
41. Celui qui obéit à Dieu déplaît aux hommes vulgaires.
41’. Dieu aimante ses fils jusqu’à les délivrer de l’exil avant le temps marqué.
42. Nos joies et nos douleurs n’intéressent pas le monde; offrons-les à celui qui accueille amoureusement ses enfants, parce qu’il est la somme de tous les ancêtres.
42’. L’amour saint est comme un va-et-vient qui relie entre eux et à leur source les hommes égarés dans la mort.
43. S’il faut parler, louons la perfection des œuvres de Dieu. Si nous devons nous taire, prions-le dans notre cœur afin de le connaître mieux.
43’. La connaissance est comme la réunion de l’homme avec son origine éternelle, vivante et libre.
44. L’entrée de la science, c’est observer le monde sans préjugé et étudier comment il se perpétue dans la vie et dans la mort.
44’. La sagesse n’a pas commencé et elle ne finira pas, tout comme l’Unique qu’elle couve dans son sein.
45. Plus on appartient à l’Être, plus le monde devient irréel; plus on se donne au monde, plus Dieu semble inexistant.
45’. L’amour a commencé avec la première séparation; il reposera avec la dernière réintégration dans l’identification de l’union totale.
46. La limitation des désirs assure la liberté et le repos de l’homme intelligent.
46’. Prions devant Dieu, afin qu’il nous réengendre dans la sainteté de l’amour parfait.
47. L’union avec Dieu engendre la joie et la paix sans mélange.
47’. Il n’y a aucun point commun entre l’œuvre de Dieu et la science des hommes révoltés.
48. La force et la sécurité du saint, c’est être ignoré par le monde corrompu.
48’. La vertu de chaque être est cachée dans sa semence.
49. La gloire de la sagesse est de converser avec Dieu et de ne jamais se confier aux hommes impies.
49’. Les quatre éléments forment l’alphabet avec lequel Dieu enseigne les hommes clairvoyants.
50. Notre plate raison nous dérobe l’évidence de la science divine.
50’. Dieu moque les savants du monde d’une façon inouïe.
51. Dieu possède le don de l’humour parfait. Il se joue des orgueilleux, des malins et des cupides.
51’. Combien se détournent de la futile agitation du monde ? Combien se penchent sur les agonies et sur les résurrections de la terre ?
52. Celui qui a acquis la maîtrise de soi-même peut seul commander aux autres hommes.
52’. L’homme qui possède la connaissance de l’amour se perpétue éternellement.
53. Pensons d’abord à Dieu, et il pourvoira à nos besoins ordinaires et extraordinaires.
53’. Le silence, le repos et le détachement entretiennent l’énergie du sage.
54. La santé, la richesse, la gloire et la science des hommes sont des fumées vite dissipées par le malheur.
54’. Le secret de la vraie réussite consiste à suivre toujours la plus grande pente de l’amour.
55. La puissance et la grandeur véritables s’accompagnent toujours d’une grande tolérance.
55’. La pierre sainte n’écrase que les impies et les profanateurs.
56. Celui qui est instruit considère le monde comme le voile qui couvre la réalité vivante de Dieu.
56’. Derrière les changements du monde se meut la sainte Mère des hommes, et en elle repose le Père mystérieux.
57. Si le monde nous méconnaît ou nous repousse, tournons-nous vers Dieu, qui nous connaît et qui nous aime depuis toujours.
57’. Quelle différence subsiste-t-il entre le fleuve et la goutte de rosée, quand ils ont rejoint l’océan primordial ?
58. Passer pour fou, incapable, paresseux ou idiot et ne pas s’en affliger, ressemble à de la sagesse.
58’. Le sage sourit même à la mort. Il sait qu’aucune parcelle de Dieu ne peut être détruite.
59. Ce qui fait le plus défaut aux hommes vulgaires, c’est de ne pas admirer, de ne pas aimer et de ne pas connaître Dieu.
59’. Il est comme le point central de la sphère lumineuse épurée.
60. On ne saurait sauver quelqu’un contre son gré, mais on peut le perdre sans son consentement.
60’. La chute de l’homme fut provoquée par le froid de la mort. L’assomption de la Mère est libre dans la chaleur de l’amour.
61. User du monde comme d’un prêt consenti par Dieu, et l’en remercier en toute circonstance : voilà l’intelligence.
61’. Accomplissons parfaitement ce que nous avons décidé de faire, mais ne considérons aucune chose de ce monde comme définitive.
62. N’accepter aucune parole sans en avoir fait mille fois le tour, et ne parler que de ce qu’on connaît bien : voilà la prudence.
62’. Celui qui fixe le feu au-dedans de la terre épurée devient maître de soi et du monde total.
63. Il faut une grande perspicacité et une droiture absolue de l’esprit pour voir le monde tel qu’il est, et non pas tel que nous l’imaginons.
63’. La mort fait paraître le renouvellement de toute chose par la vie qui sort et qui rentre sans que nous sachions la saisir et la fixer.
64. Il y a plus de profit et de joie à s’entretenir pendant une minute avec Dieu que de disputer durant toute une vie avec les hommes.
64’. Celui qui atteint Dieu perfectionne l’humanité tout entière, car il attire alors comme un aimant sa propre substance enfouie dans la tombe.
65. La raison d’être de toutes choses, c’est Dieu qui est sans raison d’être.
65’. L’Être demeure toujours maître de la création fractionnée.
66. Dieu nous a suscités pour être les témoins de sa splendeur, et pour partager sa gloire au commencement et à la fin de la création.
66’. L’Esprit Saint fait paraître l’âme pure et exalte le corps net. « Ô sainte trinité, soleil admirable de la grâce, de l’amour et de la connaissance ! »
67. Il vaut mieux subir mille injustices que d’en commettre une seule.
67’. Imaginer est plus troublant que faire ou que subir.
68. Dieu dans le centre de la vie. La vie au milieu de la mort. Ainsi tout est exposé à la vue de chacun.
68’. Le mystère de Dieu est un trésor qu’il faut soigneusement garder en soi-même, jusqu’au temps du jugement universel, sous peine d’être tué par le monde ou de tuer le monde.
69. L’intelligence de l’eau et la possession de la terre font l’homme modeste et silencieux.
69’. Ce qui est obscur au commencement paraît lumineux à la fin.
70. Celui qui croit en Dieu n’économise rien. Celui qui le connaît ne possède rien.
70’. En se retirant de ce qui est vain, on parvient rapidement à la solitude et à la liberté nécessaires à la quête de Dieu.
71. C’est l’amour qui unit la parcelle à la totalité, et c’est la connaissance qui maintient le tout en un.
71’. Le rejet des passions du monde est la condition de l’union divine.
72. L’un est comme l’eau mouvante. L’autre est comme l’or impassible.
72’. De l’union de l’homme et de la femme naîtra l’Univers glorieux.
73. La volonté divine n’est pas violente, et sa perfection ne se hâte jamais.
73’. Celle-ci ouvre la terre jusqu’au milieu de l’enfer. Celle-là édifie la lumière jusqu’au ciel.
74. La plus dangereuse folie, c’est obliger à vivre ceux qui n’en ont pas envie et instruire ceux qui ne le demandent pas.
74’. Tout ce qui contraint l’homme répugne à Dieu.
75. La loi du perfectionnement s’accomplit dans l’épreuve, dont la plus excellente est la vie incarnée.
75’. Du mouvement au repos et du repos au mouvement, il n’y a que le temps du jugement de Dieu.
76. Celui qui reçoit le plus de crachats sans s’essuyer, est déclaré vainqueur sur la terre et dans le ciel.
76’. Celui qui a maîtrisé les passions voit à travers la nuit du monde resplendir la lumière du Parfait.
77. Peu d’hommes sont capables de subir victorieusement l’épreuve de l’humiliation.
77’. Les maîtres se servent de la subtilité de la grâce pour faire paraître la fidélité de l’amour.
78. Celui qui s’éprouve et qui s’humilie volontairement, éloigne le malheur et la honte.
78’. La victoire secrète sur le monde se parfait dans la solitude de Dieu.
79. La réussite isole l’homme de ses compagnons terrestres. L’échec le renvoie à la masse commune, cependant celui qui atteint Dieu n’est plus jamais seul.
79’. La destinée des hommes est inscrite dans les astres et se résorbe en eux; mais celui qui a fixé sa vie en Dieu échappe aux alternatives du destin.
80. Le victorieux porte la lumière du monde. Le vaincu demeure honteusement dans l’ombre. « Qui recevra la couronne glorieuse et vivante des mains du Seigneur de justice ? »
80’. Celui qui explique n’a pas compris. Celui qui a compris cherche l’eau de la terre et du ciel. Celui qui a l’eau de la terre et du ciel y sème le soleil.
81. La fonction du ciel et de la terre est d’abaisser ce qui est haut et d’élever ce qui est bas pour accomplir l’œuvre de Dieu.
81’. La perfection de l’or céleste manifeste la gloire et la puissance de Dieu dans sa création épurée.
82. On peut tout détruire dans le monde, excepté l’origine du monde.
82’. Il se dérobe dans la boue ténébreuse et figée.
83. Tout ce qui est extraordinaire et beau s’accomplit dans la solitude de la création divine.
83’. Le travail forcé n’engendre que la tristesse et la mort.
84. Sortir de Dieu, c’est tomber dans le nombre de la mort. Rentrer en Dieu, c’est renaître à l’unité de la vie.
84’. Celui qui cherche à plaire ou à déplaire aux hommes, ne pénétrera jamais jusqu’à Dieu.
85. L’homme instruit recherche le contenu de toute chose et aide aux changements du monde. L’ignorant ne perçoit que l’écorce des choses et contrecarre les transformations de la nature.
85’. Les amis de Dieu ne sont pas aimés du monde, tout comme les amis du monde ne sont pas aimés de Dieu; cependant tous subsistent dans la main du divin connaisseur.
86. Celui qui admire et qui aime véritablement Dieu, n’a qu’un désir : retourner à lui.
86’. Ceux qui disputent au sujet de Dieu ne sont pas en lui.
87. Celui qui a rejoint la Mère et le Père n’est plus troublé par les apparences du monde. Il use avec détachement des choses de la terre et se plie avec indifférence aux nécessités de la vie incarnée.
87’. En considérant les êtres et les choses sans désir, on voit ce qu’ils sont véritablement, et celui qui ne brime personne connaîtra la liberté et le repos de Dieu.
88. L’âme prisonnière ne peut échapper à la désolation de la mort sans le secours de sa source demeurée vivante et libre.
88’. La multitude mouvante des étoiles accomplit sa destinée dans la fixité du soleil ultime.
89. Dieu peut délivrer notre vie de la boue qui l’enserre de toutes parts et qui l’étouffe jusqu’à la mort. Lui seul peut la féconder et l’amener jusqu’à la perfection d’une génération infinie.
89’. Extraire le parfum et rejeter le poison. Réduire la terre en eau et refaire l’eau en terre. Cuire le ciel et la terre jusqu’à l’enfantement du soleil très parfait.
90. La méditation délie l’esprit, libère l’âme et purifie le corps des saints; mais elle épouvante et tue les hommes vulgaires.
90’. Celui qui flotte dans le monde comme le bois dérive sur le fleuve, baigne vite dans l’océan divin.
91. Ne rejetons pas la plus infime leçon du malheur, dans la crainte d’en recevoir aussitôt une plus grande.
91’. Travailler à se connaître, c’est aider toute l’humanité à renaître.
92. Le malheur ne poursuit pas longtemps celui qui fait face et qui sourit sans contrainte, car la constance de l’amour efface nos taches et décharge des fardeaux de la mort.
92’. En nous abstenant des œuvres de mort et en participant à celles de la vie, nous diminuerons la somme du malheur nécessaire à notre instruction.
93. La recherche de Dieu engendre une telle passion et procure un si grand contentement que tous les ennuis du monde en sont comme effacés.
93’. Fuyons les médiocres qui nous parlent de Dieu, car les morts ne sont pas qualifiés pour présenter le vivant.
94. La science de Dieu revêt un masque terrifiant afin d’éloigner les hommes pusillanimes.
94’. Sous la puanteur de la mort se cache le parfum de la rose.
95. L’évidence de la création et le mystère de l’enseignement des sages ne peuvent être entendus sans l’aide de Dieu.
95’. L’eau qui sort de la terre engendre le soleil de résurrection par la puissance de l’amour fécondant du Très-Haut.
Qui donc pourrait vivifier une chose morte en lui donnant le mouvement ?
Ils meurent avant d’avoir connu la Sagesse.
⟴LIVRE VI
Si la femme a été tirée de l’homme, l’homme aussi naît de la femme, et tout vient de Dieu.
Je me révèle à toi qui es marié plutôt qu’au célibataire.
UNITÉ RÊVE
LE CERCLE ÉTERNEL
1. Si nous sommes intelligents, prions Dieu pour devenir intelligents.
1’. L’ignorance du sage est comme la science de Dieu.
2. Celui qui connaît le corps, l’âme et l’esprit, la façon dont ils se séparent et comment ils se rejoignent, est seul juge parmi les hommes. Cependant, il n’intervient pas dans leurs querelles.
2’. Le malheur et la mort départagent efficacement tous les hommes, mais peu d’entre eux achèvent le travail de la grande épuration.
3. Mourir à soi-même, c’est naître à Dieu ; peu savent cela et quelques-uns à peine l’osent.
3’. C’est l’eau sainte et la terre pure qui formèrent l’amalgame premier.
4. Imaginons toutes les joies et tous les malheurs, afin d’abréger le temps de notre expérience et pour arriver plus rapidement au repos désiré.
4’. Cherchons premièrement l’abandon dans la grâce, et tout le reste fleurira et mûrira à son heure.
5. La croix unit le feu et la terre qui sont au centre, et le cercle unit l’air et l’eau qui les entourent.
5’. Tout ce qui va au ciel part du pied de la croix, et tout ce qui va en terre provient du ciel le plus élevé.
6. La plus utile et la plus haute fonction de l’homme, c’est examiner l’œuvre qui le contient, afin d’y reconnaître Dieu, de le rendre évident et de le glorifier dans son être.
6’. La voie du retour mène à notre seigneur le soleil et au soleil de Notre Seigneur, qui est au centre du centre.
7. Voilà le véritable travail d’affranchissement. Tout le reste est une immense illusion de la nécessité.
7’. Plus nous serons intelligents en Dieu, plus nous paraîtrons idiots dans le monde.
8. Les pratiques extérieures ne sauraient à elles seules élever l’homme jusqu’à Dieu, mais elles l’empêchent de tomber jusqu’à la bête.
8’. Il y a un grand enseignement caché dans les sacrements de l’Église de Krist. Qui le découvrira ? Qui le réalisera ? Et qui l’appliquera à nouveau ?
9. Les religions les plus sublimes laissent les hommes entre la vie et la mort, parce que personne ne cherche à les pénétrer et à les éprouver.
9’. C’est l’or céleste qu’il nous faut, car la maladie de la mort n’épuise pas nos désirs.
10. La guerre, l’épidémie et la famine réveillent les hommes de leur torpeur. Combien peu comprennent la vanité de ce monde prisonnier de la mort !
10’. Celui qui possède en soi la semence de Dieu, la verra germer dans la pureté de son âme libérée ; mais celui qui n’a pas ce feu desséchera même au contact de l’eau de la grâce.
11. Il vaut mieux risquer la folie et la mort en cherchant Dieu dans le nombre que de croupir dans cette stérile agitation qu’est la fainéantise spirituelle du monde.
11’. Notre raison est le mur qui nous fait douter du ciel. L’absurde est celui qui nous fait renoncer à l’exil sur la terre.
12. Quand tout se disloquera et s’écroulera en nous, Dieu agira dans nos cœurs, et la désolation de la mort se changera en lumière de vie.
12’. Ce qui descend au plus bas est cela même qui monte au plus haut, pour rassembler l’Univers épars.
13. L’amour et la connaissance de Dieu font oublier tout ce qui n’est pas lui, au-dedans et au-dehors de nous-mêmes.
13’. Quand la désolation et l’abomination de la mort seront parvenues à leur comble, la pureté de la vie sainte brillera sur un monde réconcilié.
14. Le malheur conserve l’homme éveillé au milieu même de la mort.
14’. Nous sourirons de nos agonies quand nous aurons rejoint celui qui féconde la vie et qui la concentre jusqu’à lui.
15. Nous ne voyons rien, nous ne comprenons rien de ce qui est en nous et hors de nous. Accorde-nous, Père des eaux, l’intelligence de tes lois, l’amour de toi-même et la connaissance de ton œuvre.
15’. Il est bon que la jeunesse repousse la pourriture du monde. Il est excellent que l’âge mûr considère les deux faces de l’Univers. Il est saint que la fin atteigne la pureté cachée.
16. On ne peut être en même temps orgueilleux avec les hommes et simple devant Dieu.
16’. Faire notre soumission et revenir à Dieu, c’est échanger notre charogne morte contre la pierre céleste.
17. En nous accusant du mal qui arrive et en remerciant Dieu du bien qui se présente, nous sommes assurés de ne jamais nous tromper.
17’. Impossible de rejoindre Dieu et sa grâce sans retraverser les ténèbres franchies lors de la première séparation.
18. La vraie philosophie, c’est la recherche de l’origine et de la fin de toutes choses.
18’. La sainte quête de Dieu s’accomplit dans les ténèbres de la nature et dans l’humilité de l’homme.
19. La nature et les anciens sages enseignent presque à découvert les secrets divins, mais c’est Dieu seul qui en donne la compréhension.
19’. La connaissance procédera au-dedans par trois fois : l’eau paraîtra la première, le feu ensuite, enfin l’eau et le feu s’uniront en Dieu.
20. Nous sommes tombés dans la terre étrangère par désobéissance à la vie intérieure. Nous retournerons à notre source par renoncement à la mort du dehors. « Dieu ne nous a pas mis un coutelas dans une main et une torche dans l’autre pour tout tuer et pour tout consumer ici-bas. »
20’. C’est notre liberté divine qui permet de nous enfoncer dans la mort ou de revenir vers la lumière, sans autres limites que la raison de l’absurde qui nous fait repentir et la folie de l’amour qui nous fait connaisseurs et possesseurs.
21. Le sage n’impose rien à personne. Il perfectionne constamment sa science dans la contemplation de Dieu, et communique prudemment son enseignement à ceux qui sont capables de le recevoir.
21’. Ils offrirent au sage connaisseur des monceaux de pièces d’or, des sacs de pierres précieuses, puis des champs, des villes et des armées, enfin les continents et les océans de la terre, mais lui réclama un peu de boue pour préparer sa moisson.
22. Les livres saints inspirés sont les guides de l’humanité et forment l’héritage le plus précieux des ancêtres.
22’. Ceux qui connaissent le mouvement et le repos de l’Être, les ténèbres et la mort du non-être, peuvent seuls enseigner sans vieillir et sans faillir.
23. Les poètes chantent le désespoir du Dieu déchu, mais aucun n’apporte le remède au mal qui nous terrasse. Les artistes prodiguent les œuvres admirables, mais aucune ne nous transporte jusqu’au feu vivant.
23’. La femme épurée délivrera l’homme, et celui-ci la mènera jusqu’au repos de Dieu dans le soleil très pesant de la fin des temps. « Ô pyramidale beauté de la pierre angulaire ! »
24. On ne peut approcher l’unique soleil sans éprouver l’admiration, l’amour et la reconnaissance pour celui qui se donne aussi entièrement à nous.
24’. Le chemin qui mène à Dieu est parsemé de terreur, de désolation et de mort, qui sont les vêtements extérieurs de l’unique clarté.
25. Celui qui est simple avec Dieu et avec les hommes, sera comblé dans ce monde et dans l’autre.
25’. L’Art de Dieu est exempt de tout effort et de tout ennui, car la patience du Seigneur est infinie et son amour est doux et parfait.
26. Le sommet de l’amour, c’est découvrir Dieu dans l’homme et le feu dans l’eau. Le sommet de la science, c’est unir les contraires de même nature jusqu’à la perfection concentrée du rubis solaire.
26’. Celui qui aide à sauver un seul homme fait plus que celui qui tente de les consoler tous. « Puissions-nous arriver devant notre Seigneur, croulant sous le poids de la moisson et de la vendange ! »
27. Il faut beaucoup de temps et de peines pour apprendre que nous ne savons rien, que nous ne pouvons rien, que nous ne sommes rien par nous-mêmes, mais que nous savons tout, que nous pouvons tout et que nous sommes tout en Dieu.
27’. Celui qui atteint le Seigneur ne sait plus se conduire ; c’est Dieu qui le mène vers la vérité cachée dans l’humilité première méprisée par les ignorants et par les savants du monde.
28. Celui qui a trouvé Dieu sait que le monde actuel est comme une boue puante, et que le monde à venir sera comme une terre parfaitement purifiée.
28’. Le sage n’est ni poli ni grossier, il est véridique ; c’est pour cela que peu de personnes peuvent supporter de l’entendre.
29. User sagement des biens et supporter les maux de ce monde permet de recueillir l’eau du ciel et d’amasser le sel de la terre.
29’. Le maître enseigne les disciples, mais c’est Dieu qui donne l’intelligence des paroles précieuses.
30. Celui qui n’aspire pas désespérément au royaume secret, sera tôt ou tard écrasé par le monde sans profit pour personne.
30’. Tout ce que nous demanderons à Dieu dans la douceur et dans la violence de l’amour nous sera accordé, car c’est la clef qui ouvre et qui ferme le trésor mystérieux de la vie.
31. Quand nous découvrirons l’œuvre étonnante, nous serons écrasés par la surprise et par l’admiration, très honteux de notre souillure ; et quand nous obtiendrons la grâce, l’amour et la connaissance, nous serons anéantis et transformés en Dieu.
31’. Quand nous l’aurons pressenti dans notre cœur, rien ne pourra jamais nous le faire oublier. Mais quand nous l’aurons goûté dans notre corps, rien ne pourra jamais nous en séparer, car nous serons en lui en esprit, et lui sera en nous en acte.
32. Plus le ciel nous confère de dons, plus l’occasion de nous élever ou de tomber devient grande.
32’. Prions Dieu afin de savoir ce que nous devons demander, avant d’être confondus avec les morts.
33. L’ignorant qui se tait fait aussi bien que l’homme instruit qui parle.
33’. Celui qui maîtrise les stimuli du corps, du cœur et de l’esprit, devient maître du dedans et du dehors.
34. Celui qui a trouvé Dieu et son amour ne peut plus être oublié, car Dieu est la vie, l’amour et l’union.
34’. Personne ne saurait naître à la lumière sans transformer sa condition présente.
35. Celui qui persiste dans l’imbécile alliance de la mort, demeure séparé du Seigneur pour toujours.
35’. La porte étroite est comme une fente à ras de terre ; quelques-uns la découvrent bien, mais peu d’hommes se trouvent assez nus pour y passer sans entrave.
36. Qui est Dieu ? Qui sommes-nous ? Voilà la quête, voilà la sagesse et voilà le repos.
36’. L’analyse psychologique fait paraître Dieu dans la conscience, l’analyse physique le montre en action dans le monde.
37. Dieu est tout, l’homme est moyen, l’ombre n’est rien. « C’est bien la mort qui pue, et c’est bien la vie qui exhale ce parfum inoubliable. »
37’. Ne rejetons pas ce qui est bon à cause de ce qui est mauvais, mais séparons patiemment chaque chose et exaltons la meilleure.
38. Tout ce que fait la lumière, l’ombre le défait et tout ce que défait celle-ci, la première le refait. Ainsi l’homme est comme un mort qui vit, et Dieu comme un vivant qui meurt.
38’. Attelons-nous aux mystères de Dieu dès le premier temps, car la purification est douloureuse, le perfectionnement est long et l’union divine est très secrète.
39. La séparation est le commencement du travail secret qui mène à Dieu. La réunion en est le terme.
39’. Celui qui se séparera de l’immonde trouvera Dieu concentré dans sa vie.
40. Le fils de Dieu peut voir et comprendre ce que nul autre ne saurait même entendre ou soupçonner, car celui qui est instruit par l’Unique entend avec les oreilles et voit avec les yeux de l’Esprit Saint.
40’. Laissons les stupides à leur stupidité et les intelligents à leur intelligence, car nous ne paierons pas pour eux au jour du règlement des comptes ; mais embrassons la Mère ancienne, afin d’être faits un avec le Père nouveau-né.
41. Toute espérance, toute vie, tout amour et toute science sont en Dieu seul, et lui est en nous toujours attentif et toujours vivant.
41’. Celui qui a séparé le ciel et la terre les réunira à nouveau et les multipliera dans la perfection de l’or vivant.
42. La femme a brouillé l’homme avec le monde entier, cependant elle le réconciliera avec Dieu.
42’. Quand nous aurons trouvé le refuge de la Mère, il nous faudra chercher l’impassible repos du Père.
43. Celui qui se tient au dernier rang n’a pas à lutter contre ceux qui aspirent aux premières places, et la sortie lui est grandement facilitée à la fin.
43’. Il nous faut descendre l’échelle de la création avant de pouvoir remonter jusqu’à Dieu et nous fixer en lui.
44. Celui qui atteint l’Être est seul à goûter la paix au milieu du monde en folie.
44’. Le vrai repos est dans le centre de la lumière où demeure le Seigneur très parfait.
45. Chacun répondra pour soi au jour du jugement. Pourquoi nous occuper des fautes du voisin et pourquoi négliger les nôtres ?
45’. Le Livre départagera beaucoup d’hommes dans le monde, car certains seront confirmés dans la vie, et d’autres seront enfoncés dans la mort.
46. C’est au moment où nous nous croyons forts que nous découvrons notre faiblesse ; c’est quand nous pensons être arrivés que nous nous apercevons n’être jamais partis.
46’. Celui qui ne descend pas volontairement dans la grande eau, y est précipité un jour ou l’autre et se noie misérablement.
47. Celui qui repousse les hommes ne doit pas s’étonner s’il n’est pas secouru par eux, et celui qui se retire de Dieu ne doit pas se plaindre s’il est abandonné de tout.
47’. Le malheur et la corruption sépareront la pureté de la boue, et chaque chose se rassemblera dans sa propre sphère soit pour être exaltée, soit pour être rejetée.
48. La sagesse permet de tout acquérir et de tout perdre sans être troublé. Elle possède une grande puissance cachée.
48’. La vraie révolte contre ce monde ne se fait connaître qu’à Dieu, qui la rend muette et patiente à l’extrême.
49. On peut s’entendre avec tous les hommes en ne parlant pas. On peut se fâcher avec son meilleur ami en prononçant un seul mot.
49’. Le premier homme venu, s’il laissait paraître sa lumière, enseignerait comme un dieu et resplendirait comme un astre.
50. L’homme illuminé aime Dieu jusqu’à s’oublier en lui. L’homme aveuglé s’admire jusqu’à ne plus se reconnaître en rien.
50’. Ayant reçu son Dieu, il fut revêtu de la splendeur première et participa dans son corps glorieux à la fête éternelle du Père et de la Mère.
51. En jugeant mal les hommes, on se prive à coup sûr de tout ce qu’ils ont conservé de bon.
51’. C’est la grâce du Seigneur qui nous délivre de la mort et qui nous lave de toutes nos souillures.
52. L’homme, semé dans le monde, ne peut germer sans l’aide de la grâce et de l’amour demeurés libres.
52’. Qui débondera les sources d’eaux ? Qui fera germer la terre sainte ? Qui moissonnera la Providence du Seigneur ?
53. L’homme intelligent et instruit use avec prudence du feu et de l’eau nécessaires à la vie.
53’. Il assemble les contraires avec poids et mesure, car il faut beaucoup de ciel pour mélanger avec un peu de terre.
54. Le sage sait que Dieu accomplit toutes ses œuvres sans effort, et que nous exécutons les nôtres avec beaucoup de peines.
54’. Le sage vénère également le commencement, le milieu et la fin du travail fécondant du ciel et de la terre.
55. Le saint accepte de vivre et de mourir sans récriminer, afin de mieux entendre l’enseignement secret du Seigneur.
55’. Nous savons que tout change, excepté l’immuable qui meut l’Univers.
56. L’homme prodigieux est celui qui aime Dieu, celui qui le découvre en soi et celui qui devient un avec le Parfait. Aussi le saint agit-il dans ce monde comme si rien n’était séparé par la mort du péché.
56’. Parler de Dieu, aimer Dieu, connaître Dieu et posséder Dieu sont des choses différentes. La première édifie, la seconde excite, la troisième instruit, la dernière délivre et fait reposer pour toujours.
57. La prière est l’art parfait de communiquer avec Dieu. Elle mène à l’amour qui console, à la connaissance qui illumine et à l’union qui sauve.
57’. La reine de l’Univers est faible et molle comme la vie, cependant elle détruit tout ce qui est fort et dur comme la mort.
58. Il est dangereux de renoncer au monde sans l’avoir expérimenté, parce que la tentation subsiste longtemps encore.
58’. Pour tout avoir il faut d’abord savoir se passer de tout et ensuite renoncer à tout, quand on a obtenu toute chose.
59. Il est aventureux d’éprouver le monde avant d’y renoncer, car le risque de s’y perdre est grand.
59’. Quand nous nous connaîtrons pleinement, nous saurons que nous ne possédons plus rien, pas même nous.
60. Il est prudent de tout posséder et de tout renoncer en esprit, afin de ne pas être surpris par l’événement.
60’. Chercher hors de soi, c’est se fractionner indéfiniment dans mort ; chercher en soi, c’est augmenter infiniment jusqu’à l’unité de la vie essentielle.
61. Il est saint de considérer attentivement le bien et le mal avant de rien entreprendre, et il est sage de ne pas forcer le feu quand on a bien choisi.
61’. Le sage s’accorde avec le contenu unique de toutes choses ; il porte le monde visible comme un vêtement passager.
62. Trop de gens prétendent nous enseigner le sens caché des Écritures alors que visiblement ils ne jouissent pas des bénédictions que procure une telle connaissance, car les œuvres de vie doivent sanctionner les paroles saintes et sages, à l’exemple de la création qui manifeste la vertu du verbe divin. « Si nous sommes ignorants, étudions les livres saints et si nous nous croyons instruits, devenons simples en Dieu. »
62’. Beaucoup de savants croient nous révéler le secret des êtres et des choses, mais aucun n’est capable de nous communiquer la lumière du ciel qui importe seule, étant la vérité et la vie de Dieu. « Ils se disputent et se battent stupidement au sujet de la coquille, mais le sage possesseur se tient éloigné de la confusion des mots vides et savoure l’amande en secret. »
Pour rétablir la piété, je prends naissance à divers âges.
Négliger la racine et soigner les rameaux, c’est impossible.
⟴LIVRE VII
C’est la bénédiction de Dieu qui procure la richesse, et toute la peine qu’on prend n’y ajoute rien.
Ta parole, Seigneur, est une rosée de lumière.
VU ET RENIÉ
LE SAUVEUR
1. L’ouvrage de Dieu s’accomplit dans le temps, et la lumière est la récompense du patient imitateur.
1’. Nous chercherons Dieu, premièrement avec une grande fatigue et finalement dans un grand délassement.
2. Le sage admirable est celui qui dénude la terre, qui dispose la semence et qui attend la moisson.
2’. C’est l’âme du grand monde qui délivrera et qui recevra l’âme de l’homme, avec sa semence particulière.
3. Nos pensées et nos démarches sont vaines si Dieu ne les approuve pas. C’est lui qui les dirige mystérieusement, par la joie ou par la tristesse de l’esprit, par la plénitude ou par la désolation du cœur, par l’euphorie ou par la souffrance du corps brut.
3’. Quand la mort invite le sage à faire un pas avec elle, celui-ci en accomplit deux, et la mort se trouve bientôt dépassée et seule. « Ô jeu mystérieux et divin de l’oubli et de la connaissance de soi ! »
4. L’amour de Dieu, qui fait l’illumination de l’homme, mène à la connaissance unique. Tout le reste est alors comme une boue inutile qui ne recèle que la mort.
4’. Il nous faudra tout rendre à la terre et au ciel. Prions seulement pour que cela ne se produise pas avant que nous ayons accompli volontairement ce sacrifice en nous-mêmes.
5. Pauvre ou riche, méprisé ou glorieux, l’homme intelligent et instruit adore Dieu sans plus considérer ce qui l’entoure.
5’. Prions pour arriver à la mort du monde, déjà morts au monde.
6. Le génie manifeste l’appel inconscient vers Dieu à travers les douleurs et les ténèbres de l’exil. La sainteté est l’offrande volontaire de soi dans la joie du retour à l’origine de la vie. La sagesse est la possession détachée de l’Univers et de soi-même.
6’. Celui qui renonce au monde extérieur de son propre mouvement ou sous les coups du sort, conquiert finalement le monde intérieur de la grâce, de l’amour et de l’union. « Le repos qui aime, qui connaît, qui possède et qui peut. »
7. Tout le secret, c’est vouloir ce qu’on désire, et désirer Dieu jusqu’à ne plus savoir ce qu’on désire.
7’. Le mouvement qui engendre la création n’ajoute et ne retranche rien à l’Être.
8. On ne comprend la vanité du monde qu’en expérimentant ses mirages et en méditant ses revers.
8’. Le mal est comme la face extérieure du Dieu total, et le bien est comme l’Être intérieur dans sa chair.
9. Il faut beaucoup d’études, beaucoup de temps, beaucoup de douleurs, beaucoup d’amour et beaucoup de savoir pour redevenir simple et naturel, mais c’est alors une simplicité qui se connaît et qui se garde.
9’. Nous trouverons au-dehors mille choses pour nous distraire, mais nous n’en découvrirons pas une qui soit capable de nous contenter vraiment comme la paix du dedans.
10. La vérité est nue et simple, les hommes la voient plus ou moins nettement selon la pureté, selon l’amour et selon la connaissance de chacun.
10’. C’est la grâce qui sauve ce qu’il y a de bon en nous. C’est l’amour qui le perfectionne, mais c’est la connaissance qui accomplit l’union mystérieuse et dernière.
11. Ceux qui viennent de Dieu emploient le même langage et se transmettent l’enseignement véridique à travers les âges.
11’. La bénédiction du ciel multipliera le généreux et illuminera le croyant.
12. Celui qui connaît Dieu supporte facilement de passer pour ignorant. Il demeure dans sa joie et fait preuve d’indulgence envers tous les êtres.
12’. Le soleil ne peut habiter qu’une terre pure séparée de toute fèce.
13. La méditation amène d’abord un grand vertige, puis une immense désillusion et la solitude poignante comme la mort. Ensuite elle mène à l’admiration intense de la Mère et à l’amour ébloui du Père. Enfin elle donne la paix dans l’union qui engendre le Fils très parfait.
13’. Éloignons toute passion et tout attachement pour le monde. Approfondissons la mort jusque dans ses abîmes ténébreux. Purifions notre vie jusqu’à la lumière première. Aimantons Dieu jusqu’à ce qu’il engendre en nous le soleil de perfection.
14. Celui qui se confie aux hommes ignore tout de ceux-ci et méconnaît Dieu. « La médiocrité, c’est tout attendre des autres et rien de Dieu ni de soi-même. »
14’. C’est dans l’abjection terrestre que nous connaîtrons le mieux la sainteté, mais c’est seulement dans la gloire céleste que nous reproduirons pleinement Dieu.
15. Présentement, Dieu ne juge et ne condamne personne, mais nous demeurons redevables pour nos pensées, pour nos paroles et pour nos actes.
15’. Ce qu’il a décidé pour chacun, nul ne peut le savoir avant le terme de l’accomplissement.
16. Celui qui veut plaire aux hommes évince Dieu, car on ne peut contenter la multitude et l’Unique.
16’. La grâce de Dieu est comme une eau immaculée qui délivre les univers et les ramène au Seigneur ultime et premier.
17. Celui qui peut se connaître et s’amender devient facilement maître de soi-même et du monde.
17’. Il n’y a qu’un petit nombre d’hommes capables d’apprécier l’obscure origine du ciel et de la terre.
18. La connaissance de soi-même permet de supporter tous les jugements et tous les abandons en silence.
18’. Celui qui se lèvera à la fin des temps commandera au ciel et à la terre, et tous lui obéiront comme le cœur se soumet à l’amour.
19. S’il paraît inutile de nous vaincre, demandons-nous au moins s’il est possible de nous commander.
19’. Tout ce que nous repoussons et tout ce que nous retenons nous écrase, mais tout ce que nous acceptons et tout ce que nous donnons nous délivre.
20. Il est plus aisé d’entraîner tous les hommes à la conquête du monde que d’en amener un seul à la possession de soi-même. « Le saint pleure sur les égarés et fuit les hypocrites. Le sage patiente avec les ignorants et sourit même aux méchants. »
20’. La nature enseigne le monde, mais les hommes préfèrent déraisonner avec subtilité pour n’aboutir à rien, plutôt que la suivre pas à pas pour connaître ce qu’ils sont.
21. Celui qui se prépare à la mort avec application ne sera pas surpris au jour de la séparation et de la réunion.
21’. Le sage est comme un noyau qu’on abandonne avec indifférence, et comme un os qu’on jette avec mépris.
22. Il est difficile de se plier à la volonté de l’Être, parce qu’il est dur de reconnaître notre ignorance et notre impuissance actuelles.
22’. L’enfant de Dieu pénétrera aisément dans les détours du Livre et suivra fidèlement la voie qui mène au plus que Parfait.
23. La mort étonne douloureusement ceux qui ignorent la pérennité de l’âme divine et la discontinuité du support terrestre.
23’. L’égout du monde exhale pour tous la pourriture, mais le sage est seul à déceler l’antique parfum enseveli dans la mort.
24. La grâce de Dieu est comme l’eau céleste qui fait tout reverdir.
24’. Bénissons la sainte Mère, car si nous sommes sortis par elle, nous rentrerons aussi par son ministère.
25. La Mère ne se montre nue qu’aux âmes pures et simples ; ainsi celui qui s’endormira en Dieu s’éveillera en sa présence.
25’. Quand nous aurons conquis l’immortalité particulière, il nous faudra y renoncer pour pénétrer dans le repos de Dieu.
26. Comme il nous faudra un jour tout abandonner, il est sage de nous exercer à ne plus rien posséder dès maintenant.
26’. Efforçons-nous à devenir comme l’or, qui est incorruptible et souple à l’extrême dans sa précieuse pureté.
27. Les désirs qui ne sont pas orientés vers Dieu accentuent notre deuil et nous enfoncent dans la mort.
27’. Voir toujours Dieu derrière les apparences qui s’offrent à nous, permet d’user du monde sans devenir son esclave.
28. Le désir fervent dirigé par une volonté patiente, devient une force qui peut séparer et unir, tuer au monde et vivifier en Dieu.
28’. Le mal n’est pas ce qui nous contrarie, c’est ce qui nous empêche d’être simples et purs. Le bien n’est pas non plus ce qui nous flatte, c’est ce qui nous rapproche de Dieu et ce qui nous unit à lui.
29. La mort est un phénomène qu’il faut étudier longtemps avant de pouvoir le dominer réellement par la puissance du Dieu vivant incarné en nous.
29’. Celui qui s’ouvre à Dieu germera comme un noyau qu’on arrose, mais celui qui se ferme à la vie deviendra comme une pierre qu’on écarte du chemin.
30. Que notre dernier souffle, que notre ultime pensée soient en Dieu, afin que nous jouissions de la délivrance tant attendue.
30’. Communier, c’est faire passer Dieu en nous et passer en lui, c’est absorber la vie et être absorbé par elle.
31. L’homme a été créé libre, mais il ne le sait plus, sinon il retournerait immédiatement à sa source qui est Dieu.
31’. Suivons ceux qui nous enseignent la générosité, et nous aurons l’abondance en tout.
32. Celui qui est instruit éloigne l’illusion et fait paraître la réalité divine. Il sait que tout sort de l’Unique et que tout rentre en lui. Il se connaît pleinement et devient vivant et libre comme son Père et comme sa Mère éternels.
32’. L’eau précieuse paraît méprisable dans sa simplicité, c’est pourquoi le monde la délaisse, mais la terre morte qui semble ornée de tant de promesses coûte la vie aux hommes soumis à l’apparence.
33. Ainsi tout ce qui est entré dans l’homme universel doit nécessairement en sortir, car il est lui-même la cause et l’effet, et ceci fait que tout ce qui est sorti doit rentrer en lui et l’amener à la perfection d’une nouvelle génération parfaitement accomplie.
33’. Il faut avoir la patience de briser l’os pour en goûter la moelle, et prendre le temps d’examiner la terre avant d’explorer le ciel, afin de ne pas oublier la vie à force de courir après son ombre.
34. Tout ce que l’homme sème il le récolte, et tout ce qu’il reçoit il le restitue. Ainsi la vie cachée n’a ni commencement ni fin.
34’. Tournons-nous vers la pierre sainte qui nous a engendrés au commencement, et nous connaîtrons la grâce, l’amour et la gloire de Dieu.
35. La nature moyenne de l’homme ne lui permet pas de débrouiller le vrai du faux sans l’aide de Dieu.
35’. Trop de subtilités mènent à la folie, et trop de désirs conduisent à l’esclavage.
36. La multitude des expériences décevantes accomplies dans le monde amène rarement l’homme à rechercher Dieu en lui-même.
36’. L’art du jardinier, l’art du potier et celui du médecin s’unissent dans l’art du sage, pour manifester la lumière de Dieu dans le monde.
37. Il y a des hommes immenses comme l’Univers, et d’autres qui sont aussi petits qu’un atome. L’amour augmente les généreux par l’union avec Dieu. La haine diminue les médiocres par le fractionnement dans la mort.
37’. Sois comme celui qui EST, sans lieu, sans espace et sans temps dans l’éternité du mouvement, et deviens comme celui qui NAÎT avec corps, avec mesure et avec poids dans l’éternité du repos. « Seul celui qui a rejoint le cœur de l’Unique n’est plus sujet au changement. »
37’’. Une mort engendre l’autre, et une vie présage la suivante; c’est la justice de Dieu.
38. L’ange est tombé pour avoir détourné sa face de son dieu, et l’homme est mort pour avoir voulu connaître les limites de son être.
38’. La sagesse, c’est préférer la qualité cachée de chaque chose plutôt que le vêtement ténébreux du monde.
39. La patience de l’amour consiste à tout remettre dans les mains de Dieu et à demeurer éveillé dans la nuit de ce monde.
39’. L’homme sage emploie le feu pour mûrir ; les autres s’en servent pour tuer.
40. Commander aux hommes, c’est s’identifier à eux par l’amour et agir comme on le désire.
40’. Le vivant est obéi par tout l’Univers, et la grande eau même est sa servante.
41. La première prière d’un homme exige une grande générosité du cœur et un grand courage de l’esprit. Elle peut être aidée par la joie ou par la douleur, mais il est préférable qu’elle soit le fruit d’une claire méditation.
41’. Dieu fait briller sa lumière dans les plus sombres abîmes et l’amour fortifie ensuite l’être secret, selon la foi de l’esprit et selon la générosité du cœur.
42. Le Sauveur s’incarne dans la neige du nord et se manifeste dans le sable du midi.
42’. Un saint vaut mieux que la nation qui le rejette, et un sage vaut plus que le monde qui l’ignore.
43. La lumière du soleil est comme la vie secrète des semences que modèle le feu du Seigneur.
43’. La grande eau alimente l’Univers et demeure entière. Le grand feu sauve le monde et repose dans sa propre unité.
44. Celui qui rejette le noyau obéit à la loi sans le savoir, et quelque chose peut être recueilli par le monde, mais celui qui plante collabore avec Dieu, et le fruit n’appartient qu’à lui seul.
44’. Celui qui sait d’où sort la vie et où elle rentre, abandonne le monde et médite en adorant l’Unique.
45. Partager les joies et les douleurs des autres, c’est augmenter notre expérience au-delà de toute limite ; c’est converser avec la folie ; c’est apprendre à aimer le repos.
45’. Saisissons la vérité du Livre avant l’heure de la mort, car il serait alors trop tard pour l’appliquer utilement.
46. La partie est l’image du tout, et l’homme est comme l’Univers, cependant l’un est à demi voilé tandis que l’autre l’est entièrement.
46’. Le sage est comme une pépite d’or cachée dans une poche de sel qu’enferme une montagne de pierre dressée au milieu du désert.
47. Tout ce que l’homme désire peut être obtenu par le ministère du Père et de la Mère qui veillent en lui comme dans l’Univers.
47’. L’homme inspiré mènera la nature à son terme qui est Dieu. « Nous n’avons pas achevé notre demande et nous voilà exaucés au-delà même de notre vœu. »
48. Le bonheur, c’est rassembler nos désirs dans la grande lumière, afin de demeurer libres en Dieu.
48’. Considérons l’eau de notre rocher et nous verrons briller les étoiles, la lune et le soleil en nous-mêmes.
49. Chaque chose est imprégnée par celui qui l’a possédée. Ainsi en chaque homme persiste le parfum de Dieu.
49’. C’est la grande eau qui mènera le ferment de l’homme jusqu’à Dieu.
50. Qui mettra en vue le vivant, le très pur, le plus que Parfait ?
50’. La grâce ne peut ouvrir que les cœurs généreux déjà pourvus d’eau céleste.
51. L’homme a été créé libre pour demeurer avec Dieu, il expérimente à présent qu’en dehors du feu créateur, il n’y a que ténèbres palpables et mort.
51’. La vie de ce monde est comme un jeu caché, destiné à éprouver la perspicacité des enfants de Dieu.
52. L’innommable est comme l’union des trois puretés cachées dans les ténèbres du commencement.
52’. La nature sort de terre et se perfectionne en soi-même jusqu’à la paix de Dieu.
53. Les âmes et les corps alourdis tombent facilement dans l’orgie. Les âmes et les corps épuisés déraillent vite dans le délire. Les âmes et les corps épurés se soutiennent aisément dans la vérité.
53’. « Aider la nature ne signifie jamais la priver ou la forcer. » C’est en expérimentant l’œuvre de Dieu et sa promesse sainte que nous serons sauvés ici-bas, et non pas en y croyant sans rien disposer, sans rien épurer et sans rien mûrir.
54. Le sage préfère l’actualité divine à tous les passés, à tous les présents et à tous les futurs du monde.
54’. « L’ignorance qui se connaît est une sagesse qui se tait. » La volonté de Dieu, c’est l’absence de tout jugement préconçu dans l’homme.
55. L’extérieur est multiple, apparent et illusoire. L’intérieur est unique, caché et réel. Le tout n’a pas de nom.
55’. L’origine de la lumière sainte est un secret que Dieu révèle aux élus de son cœur.
56. La connaissance de l’Unique est comme la sagesse et comme la folie des sages. La recherche du multiple est comme la folie et comme la sagesse du monde.
56’. Aucun être ne saurait disparaître tout à fait dans la mort, mais tous peuvent y croupir et s’y enfoncer indéfiniment, ou au contraire en sortir pour renaître à la totalité de la vie libre et pure.
57. Les trois émanations de l’Être furent comme émulsionnées dans le non-être et formèrent la hiérarchie des mondes.
57’. La nature cachée sera délivrée, épurée et magnifiée jusqu’à son origine divine, pour devenir l’épouse du Seigneur magnifique.
58. Tout ce qui existe comporte donc une partie divine si diminuée soit-elle.
58’. Le mal a fragmenté l’homme à l’infini, mais il ne saurait le tuer complètement.
59. Ainsi il faut tout examiner attentivement avant de rien rejeter ou de rien accepter dans l’œuvre proposée.
59’. Dieu ne peut se nommer néant, comme disent certains esprits confus et mal instruits, qui jettent ainsi le trouble chez ceux qui cherchent la vérité.
60. Plus une créature se trouve éloignée de sa source, plus elle est imparfaite, impure et proche de la mort.
60’. Confier le Livre à un railleur, c’est l’enfoncer dans son égarement et ajouter à son fardeau secret.
61. Le Livre est consacré à la gloire de Dieu, pour la délivrance des hommes et pour la plénitude des saints et des sages. « Une grande doctrine présentée par des médiocres peut paraître une ineptie. »
61’. La connaissance ultime s’exercera au-dedans et au-dehors, car elle rejoindra un lieu unique comme le feu divin, qui se meut dans le temps infini de la grande eau.
62. L’intelligence des livres saints sera accordée aux enfants de Dieu selon la capacité de leur amour pour lui.
62’. Celui qui demeure dans l’adoration secrète, est porté par l’eau du Seigneur.
63. Certains hommes recevront ici une magnifique révélation et pleureront de joie. D’autres n’y verront qu’une absurdité sans nom et ricaneront de mépris.
63’. Dieu nous instruit avec amour et avec patience, mais le malheur sanctionne sa parole infaillible. Ne nous séparons donc jamais des livres saints qui filent le lien qui nous unit au Seigneur de toute sagesse.
64. L’impureté, l’orgueil et l’avarice aveuglent tellement les hommes pervers, qu’ignorant toujours leur propre égarement, ceux-ci s’enfoncent de plus en plus dans la mort très opaque et très puante.
64’. Instruire une brute ou lui témoigner de l’intérêt avant qu’elle ne le sollicite, c’est s’exposer inutilement aux injures et aux coups. « Seule la grâce divine fait fleurir notre vie cachée, et seul l’amour du Seigneur la fixe dans l’éternité. »
Ô terre, je dépose cet homme dans ton sein. Puisses-tu me le rendre restauré lors de la triomphante régénération du monde !… Puissions-nous faire partie de ceux qui aideront à la régénération du monde !
À moi qui veux vous adorer, ô Seigneur sage, avec la bonne pensée, donnez-moi selon la justice, les succès de l’un et de l’autre monde, le corporel et celui de la pensée, pour me soutenir par eux et me mettre dans la félicité.
⟴LIVRE VIII
Le Seigneur fait produire à la terre ses médicaments, et l’homme sensé ne les dédaigne pas.
Et Dieu le fit sortir du jardin d’Éden pour qu’il cultivât la terre d’où il avait été pris.
TRIÉ EN VUE
L’AMOUR
1. La spiritualisation du corps fait paraître l’eau et l’air qui nous animent et qui nous entretiennent. La corporification de l’esprit engendre la terre et le feu qui nous soutiennent et qui nous multiplient. Qui pèsera la part de chaque chose ?
1’. L’homme sans la femme est comme une pierre dans le fond desséché d’un torrent ; et la femme sans l’homme est comme un nuage égaré sur la mer. « Qui fera l’union des contraires au moyen du semblable ? »
2. La connaissance de l’homme intérieur procure l’illumination et la possession de Dieu. « Qui saurait marcher comme un aveugle confiant en la seule voix du Très-Haut ? »
2’. « Tout sort de Dieu et tout rentre en lui. » Celui qui connaît cela ne fait plus attention ni au monde ni à lui-même.
3. Le Père du monde qui habite la Mère universelle est inaccessible à la souillure des ténèbres du dehors.
3’. Ainsi ceux qui regardent toujours au-dehors demeurent dans la mort.
4. La sainte Mère demeure cachée dans le centre de la terre, ou bien resplendit au ciel selon la volonté du Père.
4’. La création peut changer de forme, elle ne saurait changer d’être.
5. La mortification du corps doit préparer la purification de l’esprit et la régénération de l’âme.
5’. Celui qui se détourne du mystère de la mort, ne connaîtra jamais la puissance et la gloire de Dieu.
6. Quand les pieds seront sains, les yeux verront clair.
6’. L’homme descend dans la terre et monte au ciel, afin de connaître la totalité mystérieuse de son être.
7. Quand les railleurs seront submergés dans la fange de la mort, nous leur demanderons : « Où en êtes-vous de vos bons mots ? » et il n’y aura que des hurlements de bêtes pour toute réponse.
7’. Si nous ne pouvons être comme celui qui instruit, efforçons-nous au moins de ne pas ressembler à ceux qui égarent. « Seigneur, délivre-nous de l’esprit rebelle qui nous mange le cœur. »
8. Nous sommes tous des figurations plus ou moins voilées du Seigneur. Personne ne saurait donc se présenter comme étant son image parfaite, ni comme étant son ombre absolue.
8’. Celui qui connaît l’inanité du monde apparent, sourit aux mirages de l’eau qui l’anime et recherche la pierre qui le soutient.
9. Ceux qui ont vu le Seigneur à découvert peuvent seuls enseigner les hommes et rétablir leurs lois, mais ils ne violentent aucune créature à l’exemple de Dieu, leur père.
9’. Les grands sages et les grands prophètes sont les bergers des immenses troupeaux d’hommes qui appartiennent à Dieu.
10. Dieu est comme un soleil caché dans le centre de chaque terre, et comme un soleil visible dans le milieu de chaque ciel.
10’. La sagesse véritable ressemble à la folie de Dieu, qui est la sauvegarde de la vie dans la mort.
11. La nature lumineuse est la première et la plus belle manifestation du Seigneur. L’homme pur est la dernière et la plus parfaite création de Dieu et de la nature. Là est le résumé de l’Univers.
11’. Quarante est le chiffre de l’espérance, du dépouillement, de la transformation et du mûrissement. « Impossible de séparer Dieu de l’humanité présente, aussi ce que nous demandons au ciel nous est souvent offert par les hommes. »
12. À quoi bon dénoncer et réprimer les erreurs des autres, si nous sommes incapables de découvrir et de corriger nos propres fautes ?
12’. Celui qui est intelligent et instruit, tait son savoir et déplore son ignorance, mais celui qui connaît et qui possède la vie pure est déjà établi dans la paix du Parfait.
13. Personne ne peut s’examiner extérieurement sans rencontrer l’obscurité du mensonge. Comment quelqu’un pourrait-il se connaître intérieurement sans trouver la lumière véritable ?
13’. Celui qui pacifiera la mer du monde reposera dans le noyau vivant de l’or pur. « Ô splendeur, ô miracle de l’eau et du feu unis en Un ! »
14. Demandons à Dieu ce qui peut nous servir à l’atteindre, soit la grâce, soit l’amour, soit la connaissance, soit le repos ; et ne nous occupons pas des moyens qu’il emploie pour nous sauver. Le Seigneur ne refuse rien aux croyants.
14’. La puissance première était dans l’eau vierge. La puissance dernière sera dans la terre sainte. « L’homme habile met en évidence la lumière de chaque chose et de chaque être. »
15. Celui qui semble abandonné produira un trésor inestimable, et l’être apparemment déshérité se révélera beau comme un dieu. La douceur de la grâce et la puissance de l’amour accomplissent tous les miracles.
15’. Ne confondons pas le repos de l’Être avec le néant du non-être, comme font les ignorants qui se trompent sur les mots, parce qu’ils ne connaissent pas la nature secrète des choses. Ainsi beaucoup d’intelligents célèbres bâtissent sur cette erreur et aboutissent au désespoir des apparences de l’absurde.
16. Celui qui a la connaissance de Dieu est rempli d’amour pour tous les êtres, car il perçoit la lumière qui les anime depuis le commencement.
16’. Chaque fils de Dieu qui enseigne dans le monde revient au Père, démesurément grandi par la multitude des êtres conquis dans l’amour.
17. L’homme corporel meurt avec tristesse. L’homme astral passe avec courage. L’homme spirituel rejoint Dieu avec joie.
17’. Avant de pouvoir sauter dans le vide divin, il faut gravir longtemps les chemins de l’ascèse, sous peine de sombrer dans la boue du chaos.
18. La vraie possession, c’est la science de Dieu éprouvée dans le secret du cœur. La possession illusoire, c’est la science des hommes pratiquée dans le monde.
18’. L’ignorant parle de supprimer le mal, le sage se contente de le séparer et de le rejeter, afin de glorifier le bien sans entrave.
19. On peut connaître l’Univers sans bouger, en s’identifiant à celui qui le contient et qui l’anime.
19’. Les hommes intelligents selon le monde n’aboutissent qu’au doute, au désespoir, à la mort ; c’est la marque de l’ignorance dans laquelle l’humanité demeure prisonnière.
20. Le savoir sans le pouvoir est comme une graine sans eau, comme l’esprit sans le corps et comme le Seigneur sans sa création.
20’. Il vous a été dit : « Ne parlez pas contre l’esprit », et nous ajouterons : « Ne blasphémez pas la terre », car vous ne connaissez ni l’un ni l’autre dans leur union intégrale.
21. Celui qui cherche Dieu hors de soi ne rencontre que la confusion des ténèbres infinies et la mort.
21’. La grande nuit protège le noyau de lumière où le feu se délecte éternellement.
22. Celui qui se réfugie en Dieu échappe aux hallucinations du monde transitoire.
22’. Le Seigneur se maintient en lui-même, par lui-même, pour lui-même.
23. Tous les mystères se réduisent à une terrifiante et admirable réalité : « Dieu en nous, nous en Dieu ».
23’. La vie dans le repos mène au repos dans la vie.
24. Celui qui s’examine dans la mort et dans la vie, apprend à connaître Dieu.
24’. La paix du centre commande au mouvement éternel de la roue céleste.
25. Celui qui connaît la Mère pénètre toutes les choses du monde et délivre aisément celui qu’il aime.
25’. Elle paraîtra nue dans le ciel pour recevoir la gloire du soleil bien-aimé.
26. Les hommes souhaitent bien la lumière et la paix, mais à la condition que cela ne dissipe pas leurs ténèbres et n’entrave pas leur agitation.
26’. L’abstention du poison mitigé est le fait des saints, mais sa séparation est le travail du sage.
27. Dieu se cache dans les ténèbres de la mort et se manifeste dans la lumière de la vie.
27’. D’un regard l’amant a pénétré l’aimée, et celle-ci a reproduit l’amant.
28. Celui qui le voit partout, qui l’aime en tout et qui le manifeste en lui-même, est vraiment éclairé.
28’. Le soleil nichera dans nos âmes dévoilées, et nous serons faits uns dans l’Unique.
29. La connaissance et la maîtrise parfaites de soi-même font la fin du changement.
29’. L’émeraude terrestre présage le diamant lunaire et le rubis solaire.
30. La foi est comme la certitude de Dieu en nous-mêmes, et la connaissance est comme la preuve de sa présence intime.
30’. Les ténèbres secrètes couvent la lumière immortelle du Parfait.
31. Celui qui n’a pas la soif de l’eau vive et celui qui ne prend pas le temps nécessaire pour la puiser, ne seront jamais sages.
31’. La fontaine qui jaillit de la terre de Dieu vivifie l’Univers tout entier.
32. Faire paraître l’unité divine cachée sous la diversité du monde, c’est l’œuvre de la nature. Incorporer le plus haut esprit avec le corps le plus bas et les amener à la perfection absolue, c’est l’œuvre de l’art.
32’. L’amour obéit à Dieu, et Dieu consent tout à l’amour, mais c’est par le moyen de la grâce qu’il nous délie et qu’il nous enlace.
33. La nature nous fournit tout ce qui est nécessaire à la vie ; il suffit de lui venir en aide sans rien forcer ni détruire.
33’. Ceux qui se contentent de l’ombre du monde, sont bien peu exigeants envers Dieu.
34. Le sage est seul à pouvoir considérer ses deux faces, sans reculer d’effroi.
34’. L’entrée dans la nuit est le commencement de l’illumination.
35. Les fous s’entretiennent de ce qui n’est pas ou de ce qui ne les regarde pas ; ils n’aiment personne et sont en désaccord avec tous les hommes, et avec eux-mêmes.
35’. La connaissance spéculative est au savoir possédant comme une jambe de bois est à un membre sain.
36. L’insensé donne asile à la multitude anarchique de l’enfer. Le saint habite dans l’unité pacifiante de Dieu. Le sage aime tout, connaît tout, possède tout et remet tout.
36’. Tout repose dans notre cœur, dans notre esprit et dans nos mains. Peu le croient, quelques-uns le pressentent, un seul l’expérimente.
37. Celui qui sait tout et celui qui ne sait rien savent se taire, mais celui qui est à demi instruit ne peut se retenir de parler. « Faire de grandes œuvres et les considérer comme un néant, voilà l’intelligence devant Dieu. »
37’. « La vérité de Dieu ne coïncide jamais avec les passions du monde. » Il faut une audace inouïe pour écouter la voix intérieure qui nous contrarie toujours, mais il faut un courage d’idiot pour obtempérer aveuglément à ses injonctions saintes.
38. La sainte Mère est légère comme l’air et changeante comme l’eau. Le Père sacré est pesant comme la terre et immuable comme le feu. L’union des quatre engendre le triple Fils, qui manifeste la création prodigieuse de l’Unique.
38’. Ceux qui méprisent la nature tout en louant Dieu, sont comme des ânes chargés de cailloux qui foulent l’or du chemin. Ils se fatiguent inutilement et n’aboutissent à rien de durable.
39. J’ai demandé l’impossible à l’Innommé, et lui s’est donné aussitôt. Cependant, je n’ai aucun mérite et je ne possède pas d’intelligence, mais je l’aime au-delà de toute raison et de toute science.
39’. « L’étonnement de l’étonnement. » Le plus beau titre qu’un sage puisse désirer après « fils de Dieu », c’est celui d’« accoucheur d’âmes ».
40. Le moyen pour connaître et pour être connu, c’est prier en soi-même ; c’est mettre en évidence la semence particulière en se servant de l’eau universelle.
40’. Le rien enveloppe le tout qui demeure en soi. « Le noyau, l’amande, le germe. »
41. À quoi pourraient nous servir les multiples connaissances extérieures, si nous ignorons le centre qui les résume toutes ?
41’. Le feu qui anime l’Univers demeure caché dans la terre et resplendit dans le ciel.
42. Le sage s’entretient avec Dieu et ne dispute avec personne. « Comme ils sont beaux cependant et comme ils resplendissent, ceux qui se lèvent pour prêcher la vérité de Dieu avant l’éclair foudroyant de la fin ! »
42’. Celui qui reçoit Dieu dans son cœur, dans son esprit et dans son corps, est élu parmi les élus et il marche sur la mer des mondes.
43. La grâce, la persévérance et l’amour mènent à la connaissance de toutes choses.
43’. Il est difficile de voir et d’entendre ce qui existe en soi-même.
44. On commence par aimer ce qu’on possède et on finit par être possédé par ce qu’on aime.
44’. L’accumulation du travail extérieur est une proie offerte au malheur. L’accumulation de l’amour intérieur est un trésor qui sauve de la mort.
45. Celui qui se fait obéir sans parler est digne du pouvoir, car il communique par le cœur et commande par l’esprit.
45’. Bénis soient les maîtres qui nous mènent jusqu’à la racine secrète du feu. Leur mémoire se perpétuera dans les cœurs reconnaissants.
46. Tout ce qui n’est pas vivement ressenti, ardemment désiré et animé par la foi, est nul et sans effet.
46’. Ô feu coulant qui dissout et qui coagule, notre Seigneur fécondant !
47. Le monde est un équilibre entre la vie et la mort, c’est l’expression du plus grand mystère visible.
47’. La nature est profondément enfouie dans la terre, et hautement placée dans le ciel ; mais il existe un lieu particulier où elle est plus cachée et plus évidente que partout ailleurs.
48. Ainsi le bien et le mal forment la totalité qu’on ne peut nommer que par le silence. « Il est vain d’essayer de lutter contre Satan, il vaut mieux prier pour sa conversion et pour la nôtre. »
48’. Il y a ici une grande perdition pour les malins, mais aussi une grande récompense pour les cœurs simples et détachés.
49. La mort ressemble à l’immobilité des ténèbres dans le froid. La vie est comme le mouvement de la lumière dans le chaud. Le monde est un mélange qui subsiste par le désir et par le changement dans l’éternité.
49’. Celui qui a dépouillé le monde de son vêtement d’illusion, sourit au bien suprême qui paraît dans le centre de l’immensité mouvante de la vie. « Et nul n’a été violenté, pas même soi ! »
50. L’amour de Dieu mène à la répulsion terrestre et à l’attraction céleste. Ainsi Dieu et l’homme s’unissent dans un certain milieu, qui constitue le mystère de la terre et du ciel.
50’. Celui qui veut parvenir jusqu’à Dieu doit abandonner tous les préjugés du monde et toutes les certitudes de la raison humaine, pour ne suivre que la nature illuminative cachée dans les ténèbres de la création primordiale.
51. Être Dieu, c’est être un avec soi-même dans la totalité de l’être, au-dedans et au-dehors.
51’. Le sommet de tout, qui est la possession de tout, aboutit au renoncement à tout, qui est la profondeur de tout.
52. La volonté divine s’accomplit du dedans au dehors et se parfait du dehors au dedans.
52’. L’eau sort de la terre et retourne en terre pour séparer le monde de l’immonde.
53. Ainsi Dieu libère sans détruire et perfectionne sans forcer. Il commande et tout lui obéit. Il paraît et tout lui sourit. Il repose et tout rentre en lui.
53’. La grâce et l’amour de Dieu se manifestent mystérieusement par les échecs que nous essuyons dans le monde, et son redoutable jugement s’exerce étonnamment par les réussites qu’il nous permet ici-bas.
54. Toute délivrance et toute perfection s’accomplissent donc dans le cœur de l’homme par le ministère de la grâce et de l’amour de Dieu, et non pas brutalement sur les corps par la contrainte des individus.
54’. Le feu de Dieu édifie la vie. Celui des hommes la consume. Cependant la douceur du second peut manifester la vertu du premier.
55. Pour qu’un homme puisse être rempli de Dieu, il faut nécessairement qu’il se vide de toute l’immondice terrestre qui l’obscurcit. Alors l’union s’accomplit aussitôt.
55’. Le sage en Dieu est comme un ignorant parmi la multitude des savants, cependant il est seul à connaître le commencement et la fin de toutes choses.
56. Les hommes vulgaires affectent de l’orgueil pour le travail qui leur est imposé et pour celui qu’ils se donnent, afin de masquer la pauvreté spirituelle qui les accable. Ils se trompent et trompent les ignorants. « Seul le précieux sang du Fils céleste et terrestre peut nous délivrer du poison antique introduit par la femme dévoyée dans le monde présent. »
56’. Le sage se glorifie uniquement d’être en Dieu, c’est-à-dire qu’il repose et qu’il se tait le plus souvent possible, car l’union des hommes en Dieu ne peut s’accomplir que sur la montagne sainte dans l’unité du silence reposant.
57. La misère, la maladie, la vieillesse, le doute et la mort devraient nous précipiter dans les bras de celui qui nous propose la richesse, la santé, la jeunesse, la connaissance et la vie.
57’. Peu d’hommes détestent véritablement le mal qui est dans la mort, et bien peu recherchent le bien qui est avec la vie.
58. Dieu se manifeste à l’homme quand il est désiré, aimé et reconnu par celui-ci, dans le silence de l’union : « Là où le vide de l’esprit engendre la plénitude de l’âme ».
58’. Rejetons tout ce qui est compliqué et tout ce qui est mal commode, afin de ne pas multiplier les tentations qui nous éloignent de l’Unique.
59. Tout est possible pour le croyant, rien ne réussit pour celui qui doute.
59’. Ils sont devant la création comme des bêtes devant une porte verrouillée qu’aucune main ne sait manœuvrer.
60. Le fait d’être Dieu et homme dépasse toute science, parce que c’est la plus complète expérimentation du tout dans le tout.
60’. Celui qui veut être grand dans la vie doit devenir imperceptible dans le monde et ne plus exister dans la mort.
61. L’action divine est proportionnée à la pureté de la créature, qui s’acquiert par la mortification, c’est-à-dire par l’eau de la grâce et par le feu de l’amour.
61’. Sainte Mère qui paraissez au milieu de la détresse du monde, accordez-nous la délivrance et l’oubli de nos maux.
62. La lettre est peu de chose quand on veut bien considérer l’esprit qui l’illumine et l’âme qui l’anime.
62’. L’ignorance rampe sur la croûte de la terre, la connaissance pénètre jusqu’au centre de la mer du grand monde.
63. La vie éternelle, c’est la sortie de soi-même et la rentrée en Dieu. « La Mère lumineuse est la substance de tout ce qui vit. Le Père brillant est l’essence de tout ce qui se meut. »
63’. Le saint peut sembler idiot et le sage peut paraître égaré, mais ni l’un ni l’autre ne sont jamais médiocres dans le monde et en Dieu.
Seul celui qui n’est pas exclusivement accaparé par la lutte pour l’existence, peut sagement apprécier la vie.
Ceux qui me comprennent sont rares, c’est la mesure de ma valeur, certes.
⟴LIVRE IX
Toute notre œuvre, c’est vous, Seigneur, qui l’avez faite pour nous.
Il élèvera la pierre du sommet au milieu des acclamations.
VUE TRI NÉE
L’ACCOMPLISSEMENT
1. Dieu est comme un océan infini d’essence lumineuse et vivante, dans lequel tout se pénètre et se connaît par l’amour.
1’. La grâce et l’amour présagent le chemin de la connaissance et du repos.
2. S’il plut à Dieu de se faire homme, il appartient maintenant à l’homme de se refaire Dieu.
2’. J’ai cherché la vérité jusque dans la corruption du monde et j’ai séparé la vie de la mort.
3. Le monde présent est comme un mélange intime de lumière et de ténèbre.
3’. Celui qui libérera sa vie sera délivré par elle.
4. Les choses créées sont irréelles par rapport à Dieu, mais elles sont réelles entre elles, pendant le temps de leur apparition.
4’. Les yeux de l’esprit perçoivent aisément l’évidence de l’éternité, et les mains de la connaissance la manifestent sans effort.
5. Le monde actuel n’est ni réel, ni irréel, ni bon, ni mauvais. Il est formé par une portion de la lumière divine fractionnée à l’infini dans les ténèbres du non-être.
5’. Dieu subsiste éternellement au-dedans et au-dehors, sans pourquoi ni comment. Tel est le mystère de l’éternité.
6. Voilà la chute de Lucifer et l’exil d’Adam.
6’. Qui sauvera son âme de la boue ? Qui la délivrera de la prison de la mort ?
7. Le retour à Dieu est comme la séparation d’avec les ténèbres et comme la réunion avec la lumière primordiale.
7’. La grâce libère sans effort ce que la plus grande violence ne saurait entamer à la longue.
8. Voilà la rédemption d’Adam.
8’. Qui présentera la vierge sainte au soleil fécondant ?
9. Les saints demeurent dans la boue pour aider leurs frères qui sont une partie d’eux-mêmes, comme ils sont une parcelle de Dieu.
9’. Celui qui s’expose pour les autres reçoit mille crachats pour une fleur. C’est la loi du rachat. « Qui ne s’exposerait pour le Seigneur d’amour ? »
10. Toute connaissance qui n’est pas expérimentée est nulle, parce que sans effet.
10’. Les fils de Dieu délivrent de la misère, de la maladie, de la vieillesse, du doute et de la mort. C’est la marque qui ne trompe pas.
11. L’homme redoutable est celui qui veut faire obligatoirement le bonheur des autres ; ensuite vient celui qui veut faire leur malheur.
11’. Les discussions sont des ignorances qui s’affrontent dans la mort ; et les disputeurs, des fantômes qui se battent dans le vide.
12. Le crâne poli d’un mort nous reflète la vérité mieux que n’importe quel miroir magique.
12’. Les saints peuvent aider le monde entier, mais personne ne les interroge, et quand ils parlent nul ne les écoute.
13. Tout vient du dedans. Tout retourne à l’intérieur. Tout se maintient dans le centre.
13’. L’examen du monde circulaire ramène l’homme clairvoyant jusqu’à Dieu.
14. Vivre, c’est communiquer avec Dieu sans obstacle ; mourir, c’est être séparé de lui par l’immondice.
14’. La beauté du génie, la pureté de la grâce et la sainteté de l’amour font enrager les médiocres jusqu’à la mort.
15. La confusion mentale, l’inaptitude au discernement et au choix, l’absence du pouvoir de synthèse et de clarté sont les marques de la médiocrité des êtres vulgaires.
15’. La sainte Mère de Dieu secourt les hommes purs et généreux, cependant les ignorants disent : « Dieu ne nous donne pas à manger », car ils ne reçoivent pas ce qui leur est envoyé, ou bien ils le reçoivent avec ingratitude.
16. La lumière du soleil contient toutes les autres lumières, elle est comme l’essence de la vie.
16’. Quand nous serions secs comme des pierres, la grâce du Seigneur nous ferait encore germer jusqu’au ciel.
17. Réduire sa nature, l’épurer et la perfectionner, c’est se connaître et devenir comme Dieu. « Il nous faut semer si nous voulons récolter un jour. »
17’. Celui qui atteint la Mère demeure dans la joie, et celui qui pénètre jusqu’au Père se fixe dans la paix.
18. Le bonheur est tout avoir et ne rien posséder ; n’être attaché à rien, pas même à soi ; c’est tout faire et tout supporter pour l’amour de l’Unique.
18’. Celui qui rejoint Dieu ne peut plus se perdre, car le Seigneur est comme une garde à soi-même et aux siens.
19. Nous ne renonçons efficacement qu’à ce que nous possédons réellement ou à ce que nous pouvons avoir certainement.
19’. Quand nous serons brisés, purifiés, vidés et nus, nous verrons Dieu clairement, et il pénétrera en nous sans obstacle.
20. Les pensées et les visions sublimes ou atroces doivent être acceptées également et réduites au même principe divin par la méditation parfaite.
20’. Celui qui est avancé ne prie plus Dieu, il le loue ; enfin il se tait en lui pour toujours.
21. Dieu enseigne ceux qui désirent apprendre, mais seulement jusqu’à la limite où ils osent connaître, afin que nul ne périsse.
21’. Le croyant retourne à sa source comme le grain enfoui va vers la lumière, et ceci est un grand exemple de l’amour céleste et de la foi terrestre.
22. La paix du cœur et de l’esprit s’obtient en offrant à Dieu tout ce qui nous comble et tout ce qui nous vide.
22’. Nous ne gagnerons ni terre ni ciel en écrasant d’autres hommes, mais nous récolterons certainement la malédiction de Dieu.
23. L’assemblée des astres est comme la mer lumineuse où Dieu se meut entre les commencements et les fins, et où il repose entre les fins et les commencements.
23’. Les hommes sages ne se désolent ni ne se réjouissent des bouleversements du monde, car ils savent que le Père et le Fils demeurent immuablement unis au sein de la Mère mouvante.
24. En remettant tout à Dieu, nous nous débarrasserons aussi de nous-mêmes.
24’. Le vivant qui pénètre la grande eau flotte et vogue sans effort.
25. Il n’est rien qui déplaise tant aux hommes que la vérité sur eux-mêmes, parce que la nudité de l’esprit, comme celle du corps, n’est supportée avantageusement que par ceux qui sont parfaits.
25’. Il ne suffit pas que Dieu soit caché en nous, il faut aussi qu’il y brille démesurément, comme l’étoile de notre naissance nouvelle. « Dieu ne va pas aux médiocres, et les médiocres ne vont pas à Dieu. »
26. La création des univers est comme l’expérimentation d’une partie de Dieu par lui-même.
26’. Nous prions pour être brisés et pour que nos lumières soient réunies dans l’amour de l’Unique.
27. Il n’y a pas d’instruction possible et il n’y a pas de paix certaine pour celui qui s’occupe des affaires du monde.
27’. Le plus sage des hommes ne saurait s’empêcher de pleurer sur la souffrance de tous les êtres.
28. Krist dut chasser les marchands du temple avant de pouvoir s’y faire entendre. Ferons-nous pas aussi le vide en nous pour entendre la voix du Seigneur ?
28’. Si nos cœurs savaient communier avec Dieu et avec les hommes, nos lèvres demeureraient closes.
29. Aider à vivre ceux qui nous entourent est une façon intelligente et prudente de s’enrichir.
29’. Celui qui s’attache à trois choses, alors que deux suffisent et qu’une seule est vraiment nécessaire, prépare pour tous le désordre et la ruine.
30. Tout ce qui se détruit rapidement est du monde. Tout ce qui est immuable est de Dieu.
30’. Pour atteindre la vie essentielle, il nous faudra premièrement devenir absents comme des morts.
31. La lumière nous vient des astres et retourne aux astres qui la restituent à Dieu.
31’. L’homme pur et parfait est le point d’équilibre le plus accompli de l’Univers.
32. Le mélange des lumières fait la diversité infinie de la création et manifeste l’unité du créateur.
32’. Hors de nous, c’est encore nous, car nous sommes une parcelle de celui qui contient la création visible et invisible.
33. Le repos alterne avec le mouvement dans l’œuvre de Dieu. Celui qui unit ces deux en un, n’a plus de passion pour le monde transitoire.
33’. La grâce libère tout sans rien forcer et sans rien détruire ; c’est elle qu’il nous faut au commencement.
34. L’eau sainte délivre, épure, élève et bénit. La terre de Dieu nourrit, unit, fixe et consacre. Les deux travaillent sous la direction du feu premier et dernier.
34’. L’enseignement des sages est à l’image du monde moyen, où la lumière subsiste sous une croûte obscure. « Ne discutons pas, exerçons-nous plutôt jusqu’à la parfaite connaissance de notre Art. »
35. Dieu comble l’amour obéissant, au-delà de toute limite. — C’est le baptême dans l’eau de la genèse qui nous donne le glorieux corps du pardon. — C’est la communion mystérieuse du vrai sang et du vrai corps de l’Unique qui nous communique l’âme divine de la rédemption. — C’est l’onction par l’huile sainte de la pierre qui nous confirme dans la paix de la réconciliation. — C’est la bénédiction secrète du mariage ultime qui nous lie et qui nous multiplie dans la gloire de l’union.
35’. Nous n’avons plus d’honneur, plus de fierté, plus de courage et plus de vertu ; nous sommes sans savoir et sans intelligence ; nos talents sont comme la fumée, et notre force ressemble à de l’eau répandue. Notre piété demeure comme une boîte vide, et nos jours sont devenus insensibles sous l’ardeur du regard divin. Mais la grâce multiplie l’amour secret qui habite notre cœur, et nous goûtons déjà la douceur du feu transcendant.
36. L’homme est le principal ferment de la régénération du monde ; son action sur la terre est comparable au travail du levain sur toute la masse d’une pâte.
36’. Il y a ici plus qu’une morale et plus qu’une ascèse, plus qu’une philosophie et plus qu’une mystique. Il y a la clef de la restitution de l’homme et du monde en Dieu.
37. Celui qui aime les hommes malgré leurs faiblesses, sera aimé de Dieu malgré ses taches.
37’. Si nous obéissons une fois à la haine, elle commandera cent fois et se souviendra mille.
38. Qui sera assez audacieux pour demander l’impossible à Dieu ? Qui sera assez saint pour l’obtenir sans dommage ?
38’. La grâce de Dieu nous imbibera de nouveau, et nous deviendrons comme de la boue avant d’être refaits comme de l’or.
39. Le mensonge, la lâcheté, la trahison et la haine sont les marques spécifiques de la faiblesse des hommes vulgaires.
39’. L’amour vrai et la connaissance ultime supportent tout, pardonnent tout, accordent tout.
40. Ce qu’il y a de meilleur dans l’homme et dans le monde, est ce qui s’y trouve de plus simple.
40’. En rejetant tout ce qui nous encombre et tout ce qui complique notre vie, nous atteindrons rapidement le désert où Dieu se fait entendre.
41. Rien ne procure autant de joie que d’aimer tous les hommes en Dieu, après avoir reconnu le Seigneur en chacun d’eux. « Le crime unique, c’est être séparé de Dieu. »
41’. Nous pouvons rapidement atteindre Dieu en mourant au monde et à nous-mêmes, et éviter ainsi les expériences absurdes qui vont du bonheur déguisé au malheur très certain.
42. On ne peut aimer Dieu et détester les hommes, mais on doit craindre l’un et les autres pendant tout le temps de notre exil.
42’. Que les paroles du Livre ne soient jamais une condamnation pour les croyants, mais qu’elles ajoutent encore, si possible, à la gloire de Dieu, en les faisant devenir enfants de la grande eau !
43. La connaissance vraie s’accompagne de modestie et de silence.
43’. Acceptons de paraître idiots, pauvres et inutiles, afin de demeurer libres en Dieu.
44. Quand ce qui est supérieur abandonne ce qui est inférieur, le corps se décompose tout entier. Mais quand ce qui est supérieur s’unit à ce qui est inférieur, le corps se recompose dans son intégrité.
44’. L’eau nous soutiendra lorsque nous aurons abandonné toute terre, et le feu nous affermira jusqu’à l’île sainte de l’amour et de la connaissance.
45. Il n’y a personne aussi libre qu’un sage, et personne aussi occupé qu’un fou.
45’. C’est au-delà des prières, dans le repos de l’esprit, que Dieu manifestera sa gloire en nous.
46. Il faut supplier et tromper les hommes pour conserver le droit d’agoniser dans ce monde, alors qu’il suffit de prier et d’aimer Dieu pour obtenir la vie éternelle.
46’. Un seul mot, un seul fait peuvent engager l’homme le plus enterré dans la voie de la réconciliation et de la délivrance. « N’ayons jamais raison contre quiconque, communiquons seulement la vérité à ceux qui l’aiment. »
47. Tout ce qui nous paraît indispensable et urgent présentement, nous semblera inutile et vide à l’heure de la mort.
47’. La raison et la folie du monde s’effacent rapidement devant la sagesse de Dieu qui pénètre tout.
48. Exerçons-nous dès à présent à tout abandonner et à nous tourner vers Dieu, avant que tout nous délaisse et se retourne contre nous.
48’. Il n’y a qu’une séparation, qu’une solitude et qu’une mort redoutables, qui sont l’absence de Dieu et l’oubli de son amour.
49. Celui qui connaît sa solitude devant Dieu n’éprouve aucune appréhension à l’heure de la mort. La goutte de rosée est comme la mer qui la produit et qui la recueille.
49’. La volonté de Dieu consiste à ramener l’homme jusqu’à la perfection de sa propre personne. « Il se propulse par le verbe. Il repose par le silence.»
50. La folie des hommes consiste dans la recherche de l’infini dans la mort. La sagesse de Dieu réside dans l’examen de l’unité de la vie. Ainsi l’homme savant est celui qui interroge son Seigneur, qui entend sa réponse et qui y conforme sa vie.
50’. L’Innommé ne saurait supprimer le mal, cette nuit qui l’entoure et qui le cache, comme il ne saurait créer le bien, cette lumière qui l’habille et qui le garde ; mais il peut mélanger ou séparer la lumière et les ténèbres extérieures, pour la connaissance des puissances et des limites de son Être et de son non-être.
51. La misère et la richesse s’opposent également à la recherche de Dieu et à la paix de l’âme.
51’. Il y a plusieurs voies qui mènent à la sainteté ; mais il n’y en a qu’une qui conduit à la sagesse.
52. La prière est comme un entretien secret entre le Dieu créé et le Dieu incréé, c’est-à-dire comme le lien d’amour qui unit le fini à l’infini et qui permet à la totalité de se connaître en Un.
52’. Nous savons que nous approchons Dieu, quand nous sommes magnifiquement soutenus dans le malheur et quand nous parvenons à sourire à la vie, à travers les fumées de la mort.
53. L’art consiste à faire paraître le surnaturel caché dans le naturel.
53’. Dans tout ce qu’il entreprend, le sage ne compte que sur Dieu et sur lui-même.
54. Plus le ciel est vu d’en bas, plus il paraît beau et profond. Ainsi dans l’humiliation et dans le malheur, peut-on souvent mieux apercevoir Dieu qu’au milieu des plaisirs et de la gloire du monde.
54’. Dieu médite sa voie dans la grande nuit de l’homme ; c’est pourquoi la foi doit accompagner jusqu’au bout celui qui accomplit son œuvre, car la purification se fait premièrement au-dedans, ensuite elle paraît au-dehors et resplendit pleinement dans l’union.
55. La nature fournit l’aliment, et c’est le feu intérieur qui le digère et qui le transmue. Celui qui prétend faire mieux n’est qu’un présomptueux ignorant.
55’. L’homme devient son propre instructeur, son propre juge et son propre sauveur, quand il pénètre jusqu’au centre secret de son cœur.
56. L’enseignement du sage déplaît aux hommes vulgaires, parce qu’il met en évidence la fin de chaque être et l’ombre de chaque chose.
56’. Si nous sommes résolus à croître en Dieu, rien de mauvais ne nous retardera dans ce monde.
57. La meilleure vengeance, c’est de prier Dieu pour qu’il enseigne nos ennemis comme nous-mêmes.
57’. Il n’y a qu’une vie universelle, qui est comme un jeu d’ombres et de lumières sur la surface mouvante des eaux de l’abîme.
58. Le dégoût du monde et le repentir de notre égarement forment le chemin ordinaire du retour à Dieu.
58’. L’esprit orgueilleux s’enfoncera toujours plus et demeurera scellé dans la terre et dans l’eau mortes.
59. La grâce et l’amour accompagnent ensuite le chercheur sur la route royale des élus.
59’. Il n’y a qu’une connaissance, qu’une union et qu’un repos véritables, qui sont dans la fixité accomplie du feu céleste.
60. Personne ne nous demande de libérer la grâce. Personne ne nous implore de parfaire l’amour. Personne ne nous requiert de dévoiler l’union. Personne ne nous somme de manifester l’Unique. Si nous faisons quelqu’une de ces choses, que ce soit gratuitement et à nos risques et périls, pour l’amour des croyants.
60’. L’origine de la vie et de la mort doit être tenue secrète, afin que la majesté divine ne puisse être profanée par le premier venu, comme cela s’est produit une fois déjà en Adam. « Ô bienfaisante douleur de l’exil ! » « Ô multipliante vertu du soleil ! » « Ô sublime accomplissement de l’innocence qui sait ! »
61. Beaucoup bénéficieront de la lumière du Seigneur au grand jour de la réunion, et les saints habiteront son soleil au jour de l’accomplissement. Mais il n’y aura que quelques sages qui connaîtront l’origine secrète du tout et du rien.
61’. L’esprit est caché dans le corps, et l’âme se manifeste par la séparation et par l’union de ces deux dans l’éternité de l’Unique.
Dieu a choisi les choses viles du monde et les plus méprisées, celles qui ne sont point, pour réduire à néant celles qui sont, afin que personne ne se glorifie devant Dieu.
Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous issus du même Père.
⟴LIVRE X
Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens, ma colombe qui te tiens dans la fente du rocher.
S’ils arrosaient d’un tel vin la terre d’un tombeau, le mort retrouverait son âme, et son corps serait revivifié.
IVRE ET NUE
LA SAGESSE
1. Le commencement de la révolte est le rejet de tout ce qui blesse ; la fin, est l’acceptation de tout ce qui tue.
1’. L’abandon de soi, l’acceptation des remèdes et la pratique de l’amour divin délivrent l’homme des contraintes du monde.
2. L’ignorant brime la vie et construit dans la mort. Le sage sépare la mort et perfectionne la vie.
2’. Il vaut mieux tenter de sortir de notre prison plutôt que d’essayer de l’aménager et de nous y installer.
3. Ce qui paraît trop simple dissimule souvent une vérité sublime, et ce qui est compliqué cache presque toujours le mensonge et la mort.
3’. Quoi de plus léger que la lumière du soleil ? Cependant c’est elle qui donne le poids à toutes les choses du monde.
4. Aucune religion ne détient le monopole de Dieu, puisqu’il est unique et qu’elles sont diverses.
4’. Tout sert à celui qui a la volonté d’apprendre : la mort comme la vie.
5. Celui qui recherche Dieu n’a que lui-même à dépouiller et à connaître.
5’. La foi aveugle obtient de Dieu ce que la raison n’ose pas concevoir.
6. Celui qui a trouvé le bonheur peut seul en indiquer le chemin, mais peu l’écoutent, et personne ne le croit.
6’. Le détachement du monde et l’abandon en Dieu engendrent une délivrance rapide.
7. Toute science, toute religion et toute juridiction qui s’éloigne des lois naturelles et divines, est fausse et mène à la mort.
7’. Par la nature, on pénètre jusqu’à l’homme, et par l’homme, on arrive à Dieu.
8. Celui qui connaît et qui possède la lumière de la terre sainte, ne s’agite plus, n’étudie plus, ne parle plus ; il communique avec le ciel et enseigne le monde par son exemple.
8’. La paix est comme la fixation de la vie dans la pureté de la terre de Dieu. « Ô perfection rénovatrice des mondes, tu montes et tu descends sans effort. »
9. Les savants du monde masquent leur ignorance par des mots insensés et par des subtilités folles. Ils ne parviennent à rien de vrai ni de durable.
9’. Tout ce qui est ennuyeux et compliqué n’est pas de Dieu. Mais la bonne volonté utilise au mieux tout ce qui se présente sans discuter et sans juger témérairement la vie qui est encore voilée.
10. Personne n’est aussi attaché aux richesses et à la gloire apparente de ce monde que les mauvais pasteurs qui le mènent à la mort, par la haine, par le mensonge et par la cupidité.
10’. Honorons dans le tabernacle de notre cœur la mémoire de ceux qui nous conduisent vers Dieu, et bénissons-les dans le Parfait.
11. Celui qui a rejeté la mort et affermi sa vie en Dieu, lira le Livre en tremblant de surprise et en pleurant de joie.
11’. L’inaccessible se meut sous nos yeux, et repose dans nos mains. Qui le rendra visible ? Et qui lui donnera le poids de l’incarnation divine ?
12. L’intelligence tortueuse, les subtilités délirantes, la ruse, la malice et le rapt ne serviront ici à rien.
12’. Aucune main d’homme ne saurait forcer l’entrée du jardin de Dieu.
13. La modestie et l’amour sont la parure et la sauvegarde du sage.
13’. Qui admirera la partie la plus belle de soi-même ? Qui s’humiliera devant Dieu ?
14. Nous naissons maître ou esclave selon les dons de Dieu, mais les hommes faussent la justice divine par leur orgueilleux et cupide aveuglement. « Apprends-nous, Seigneur, notre propre désir, afin que nous ne soyons pas tentés de demander ce qui ne nous convient pas. »
14’. Nous pouvons railler les croyances, corrompre les églises, compliquer les lois, renverser les pouvoirs, violenter la nature et bouleverser les nations ; nous ne changerons ainsi rien aux ténèbres de nos cœurs où patiente la lumière du monde.
15. La vraie connaissance est actuelle et vivante, silencieuse et cachée.
15’. Le sage voit la nature dépouillée de ses voiles et contemple l’homme dans sa gloire céleste.
16. Celui qui promet est fêté. Celui qui donne est méprisé. Celui qui prend est admiré. Celui qui reçoit est humilié. Celui qui remet est délivré. Celui qui bénit est comblé. Celui qui trouve est aimé.
16’. Les sages ont parlé sans détours, mais les hommes ont bouché leurs oreilles. Les saints ont opéré devant tous, mais les foules ont détourné les yeux. Dieu consumera la pierre dans laquelle l’humanité a enseveli son cœur.
17. Celui qui aime bien n’est attaché à rien, parce qu’il aime en Dieu et non pas pour lui-même.
17’. La haine emprunte souvent le visage du devoir et se réclame de l’amour de l’humanité pour mieux séduire les hommes.
18. La médiocrité, la haine, l’orgueil, l’avarice et la malice sont des obstacles insurmontables à la grâce, à l’amour, à la connaissance, à la possession et au repos en Dieu.
18’. Devenons purs et transparents comme le cristal, et les rayons divins nous illumineront et nous féconderont pleinement.
19. Acceptons également le bon et le mauvais et laissons à la méditation du temps le soin de les séparer en nous, car les sages ont dit : « La patience est l’échelle des philosophes, et l’humilité est la porte de leur jardin secret ».
19’. Ne nous laissons pas entraîner par les jugements et par les passions aveugles du monde vulgaire. Consacrons plutôt notre temps et notre force à rechercher celui qui persiste à travers la douleur et la mort, dans la joie de la vie délivrée.
20. Il nous faut nécessairement tout abandonner, tout retrouver et tout remettre à Dieu pour être comme le Parfait qui, après s’être fractionné dans le nombre, se retrouve dans l’unité.
20’. Ceux qui se passionnent encore pour le monde après avoir connu le Livre, sont aveuglés ou faibles à l’extrême, cependant Dieu ne les abandonnera jamais complètement.
21. La ruse de l’ignorant, c’est expliquer l’inexplicable avec des mots insensés, jusqu’à ce que la confusion soit devenue telle que personne n’ose contredire, dans la crainte de paraître arriéré et stupide.
21’. Les méchants et les fous peuvent devenir saints et sages, en se tournant vers le Dieu qui sommeille dans leur cœur depuis le début de leur égarement. « Celui qui mange la vie héritera la vie. Celui qui mange la mort héritera la mort. »
22. Il est ridicule de parler de ce qu’on ne connaît pas, surtout avec des mots inconnus ou empruntés.
22’. Renonçons à être compris, encouragés ou admirés par le monde, car il n’y a que la réussite en Dieu qui compte vraiment.
23. Accepter ce qui vient et laisser aller ce qui part, c’est la sagesse au-delà du désir et de la renonciation.
23’. Fuyons le malheur, il nous poursuivra. Faisons-lui face, il s’effacera.
24. Les seules défenses efficaces dont nous disposons contre les tentations du monde, sont celles que nous édifions en nous-mêmes, et non pas celles que nous empruntons aux autres.
24’. Celui qui agit avec détachement n’est souillé par aucune action. Celui qui médite sans désir n’est terni par aucune pensée.
25. Le comble de la folie, c’est de spéculer sur l’avenir, regretter le passé et ignorer le présent qui repose en nous.
25’. L’homme intelligent repousse tout travail et toute agitation inutiles. Il concentre ses pensées en Dieu et le recherche en lui-même.
26. La femme douce et nette est une bénédiction odorante du Seigneur. La femme acariâtre et souillée est une malédiction puante de l’enfer.
26’. La vie et la mort se rient de notre stupide aveuglement qui ne sait ni séparer ni unir la merveilleuse lumière du Seigneur.
27. Celui qui sait maintenir sa vie dans la grâce, dans l’amour et dans la sagesse, plaint ceux qui parlent tant pour ne rien dire, ceux qui s’agitent tant pour ne rien faire, ceux qui étudient tant pour ne rien savoir et ceux qui travaillent tant pour ne rien posséder.
27’. Tous peuvent étudier le Livre, mais ceux qui n’entendent rien ou qui entendent peu, doivent aimer et croire simplement dans leur cœur, afin que la fidélité de l’amour contrebalance en eux les effets de l’ignorance.
28. Le saint demeure inconnu parmi les hommes déchaînés et cupides, comme Dieu reste caché aux yeux des orgueilleux et des brutes qui violentent tout.
28’. La nature grossière et butée de certains individus ne peut être amendée que par les coups répétés du malheur. Prions Dieu afin de n’être ni juges ni exécuteurs.
29. Ce qui ne peut être réalisé naturellement et surnaturellement est vain, parce que sans fondement et sans être.
29’. C’est par la grâce de la Mère que le Fils multiplie l’amour du Père.
30. Les faux prophètes abusent les ignorants, mais ils sont dénoncés par leurs œuvres qui n’aboutissent qu’à la confusion et à la mort.
30’. Celui qui est instruit se maintient dans la solitude, dans le dépouillement et dans la paix de l’Être parfait.
31. Les sages enseignent les hommes doués et perspicaces ; leur œuvre est reconnue par les illuminés du Seigneur.
31’. La sainte adoration méprise les vêtements, les postures, les rites et les langages conventionnels.
32. L’amour de Dieu et des hommes ne doit jamais aller jusqu’à la démence, qui est une destruction de soi et des autres.
32’. L’illumination est souvent expansive. La sagesse n’est jamais fanatique.
33. Notre recherche consiste à découvrir la vie, notre but est de nous fondre en elle et de la fixer en nous. Tout le reste est un rêve sans importance.
33’. La grâce et l’amour de Dieu délivrent de toute faute. La connaissance et la possession du Seigneur libèrent de toute servitude.
34. L’homme pur et parfait ne recevra pas plus de neuf femmes nettes et pas moins de trois.
34’. Un saint envoyé de Dieu justifie, équilibre et féconde tout un peuple de croyants unis par la grâce et par l’amour.
35. Depuis l’instant de la conception jusqu’au moment de l’enfantement, la vierge demeurera sous la garde du sage.
35’. Les changements du monde purgent la création ; le perfectionnement intérieur conduit au repos dans la paix éternelle.
36. L’or divin est le corps le plus accompli du monde. Qui saura le laver ? Et qui saura le cuire ?
36’. L’aide apportée à l’humanité est un baume répandu sur soi-même.
37. Celui qui connaît les deux faces de la création et qui invoque Dieu dans son cœur, commande aux mirages du monde, dans la veille, dans le rêve et dans la mort.
37’. Ceux qui ne comprennent rien s’écrient : « Personne ne sait rien qui vaille » et les voilà rassurés dans leur nuit.
38. Le fou ignore le sage, mais celui-ci connaît son égarement et peut le délivrer s’il en est prié saintement. « Ne mentons jamais pour flatter le monde, car de toute façon, le monde nous abandonnera finalement. »
38’. Le défaut apparent des êtres et des choses, trompe beaucoup d’hommes intelligents, et la beauté secrète du monde ne se manifeste qu’aux sages et aux saints.
39. La parole de Dieu engendre la joie, et sa possession procure le bonheur.
39’. L’union sainte nous fait échapper aux enchantements et aux désolations du monde.
40. Quand un croyant nous reprend, examinons premièrement s’il n’y a pas une petite part de vérité dans ce qu’il nous dit, et nous finirons par découvrir que l’image présentée est très en dessous de la réalité.
40’. Celui qui adore Dieu en pensée et en action, ne saurait pécher, car c’est le Seigneur qui parle et agit en lui. « Soyons entièrement nous-mêmes dans la liberté de l’Unique sans souci des contingences de notre prison terrestre. »
41. Il vaut mieux arriver en morceaux jusqu’à Dieu plutôt que demeurer entier dans la mort.
41’. Le destin de l’homme, c’est Dieu, et Dieu est comme l’unité de l’Être dans l’immensité de la vie.
42. Tout perfectionnement s’accomplit par la mort, par la résurrection et par la multiplication de l’Être.
42’. Le sage expérimente tout avec patience et avec détachement, jusqu’à ce qu’il ait découvert l’unique clarté et multiplié la semence divine.
43. Acceptons tout patiemment, usons de tout modestement, abandonnons tout sagement. Ainsi nous aurons tout et nous ne serons possédés par rien, nous goûterons au monde et nous ne serons pas empoisonnés, nous manierons le feu et nous ne serons pas consumés. N’enfonçons personne dans la mort par des reproches tardifs, ni par des exclusions vaines, ni par des condamnations hasardeuses. Offrons l’amour qui comprend tout, qui excuse tout, qui réconforte, qui éclaire et qui ramène sans contrainte dans la voie de la vérité de l’Unique. « Ne prenons jamais le ton d’un maître avec quiconque, afin de ne pas heurter la liberté de Dieu qui sommeille en chacun de nous. »
43’. L’humanité égarée ne sait plus se nourrir, ni se reposer, ni se reproduire. Elle a oublié la prière, la méditation et les jeux. Ses hommes ne connaissent plus la terre, leur peau a oublié le soleil, le vent et la pluie, et leurs yeux ne voient plus les étoiles. Leurs bouches ne goûtent plus aux herbes salutaires, leurs nez sont enfumés et leurs oreilles ne résonnent plus que du bruit de la mort. Ils ont perdu la simplicité et l’intelligence de leur nature première. Ils ont émoussé l’étonnement qui les portait jusqu’à Dieu, et la vision du monde qui les entoure ne les instruit plus. Ils sont devenus insensés et malheureux par leur orgueilleuse folie. Ils se déchirent et dépècent le monde avec l’obstination d’une folie aveugle.
44. L’ignorant détruit les créatures furieusement, il disperse et rassemble mille choses au hasard.
44’. La façon dont tout disparaît nous enseigne clairement comment le monde se renouvelle.
45. Le sage délie le monde doucement, il sépare et conjoint une seule chose selon la nature.
45’. L’homme instruit connaît l’essence générale de l’Univers et le germe particulier de chaque être.
46. Dieu est ce que nous possédons de plus clair et de plus caché en nous-mêmes.
46’. Connaissant et possédant l’eau et le feu dans la terre sainte, l’homme sage ne redoute rien et ne désire rien.
47. La multitude des lumières dispersées dans le ciel et dans la terre est comme une parcelle plus ou moins concentrée de la substance de la vie.
47’. Quand les soleils s’uniront, les mondes seront éclaboussés d’une lumière qui les aimantera jusqu’à Dieu.
48. Celui qui recule devant la terreur et la puanteur de la mort, demeure dans les ténèbres de l’ignorance.
48’. Vous monterez dans ma lumière et vous plongerez dans mes ténèbres jusqu’à ce que vous m’ayez retrouvé, dit le Seigneur Dieu.
49. Il faut rompre le noyau pour dégager la semence, et il faut consumer l’homme pour libérer sa lumière.
49’. Là où l’eau et le feu n’agissent pas, les hommes travaillent en vain.
50. Le plus grand don offert ou reçu est comme la plus grande épreuve de fidélité envers Dieu.
50’. Les soleils ajoutent à leur perfection en condensant la lumière éparse jusqu’à la fixité de leur être glorieux.
51. Dieu nous a donné la vie et la liberté, et nous nous sommes offert l’emprisonnement et la mort.
51’. Nous redeviendrons comme la lumière qui nous a donné naissance, et comme la lune et comme le soleil qui nous font croître et multiplier.
52. Si un homme faiblit après avoir approché Dieu, il retombe dans une mort encore plus opaque.
52’. Là où il n’y a pas mélange de choses contraires, la mort est impuissante.
53. L’homme saint et sage ne juge personne, il instruit par l’exemple, comme fait la nature du Seigneur.
53’. Le mystère de Dieu est tellement à découvert dans le monde que les sages sont muets d’étonnement et frappés de stupeur.
54. Nous retenons les fèces du monde et nous laissons échapper notre vie dans le temps, voilà la stupidité qui nous fait héritiers de la mort. Abandonnons le filtre plein d’ordures et sublimons patiemment notre vie en Dieu jusqu’à la perfection de la paix éternelle.
54’. Nous divisons par le feu de la terre. Nous épurons par l’eau moyenne. Nous unissons par le feu céleste. Nous multiplions par l’eau et par la terre saintes.
55. Celui qui travaille à unir les hommes met la main à la restitution de l’unité de l’être.
55’. C’est dans nos cœurs que repose la sagesse cachée du Seigneur.
56. Les doutes, les sarcasmes, les tentations et les persécutions du monde sont des obstacles difficiles à surmonter. Mais la foi, la prière, la grâce et l’amour viennent à bout de toutes les écorces ténébreuses.
56’. Le sage ne se détourne pas de la corruption du monde, il sépare ce qui est bon et le perfectionne en soi-même. Ainsi, le saint se sépare aussi du monde pour mieux atteindre Dieu.
57. Nous pouvons sans danger être riches en dons dans le monde, si nous demeurons pauvres en esprit devant Dieu.
57’. Il y a celui qui cherche, celui qui aime, celui qui connaît, mais celui qui possède est seul comme celui qui est.
58. Le dévouement envers les autres est la meilleure charité pour soi-même.
58’. La grâce est comme l’eau qui délivre, et l’amour est comme le feu qui unit.
59. Nous prierons efficacement dans le désir, dans l’imagination et dans l’amour ; et non pas avec les lèvres, avec les gestes et avec la peur.
59’. Dieu est comme l’eau qui rassemble les univers, et comme le feu qui les mûrit.
60. Ne pouvant plaire à tous, efforçons-nous au moins de ne pas contrarier le Père et la Mère qui nous ont engendrés au commencement et qui subsistent en nous mystérieusement. « Le sage médite sur la lumière du monde jusqu’à ce qu’il l’ait trouvée. Ensuite, il médite sur son contenu jusqu’à ce qu’il l’ait manifesté. »
60’. Nous vous adorons, Eau, mère des eaux, car le feu vivant est dans votre centre, et vous êtes excellente sur toutes les autres lumières. Le soleil est votre production magnifique. Sainte Mère du feu, secourez-nous à présent et à l’heure du passage difficile. Qu’il soit fait ainsi !
61. Celui qui est comblé des biens apparents de ce monde, est connu et aimé de Dieu pour sa fidélité unique ; ou bien il est abandonné comme incurable et comme étant déjà mort.
61’. Dieu ne châtie personne, c’est notre alliance avec le mal et son extirpation qui nous font endurer tant de maux ici-bas.
62. Dieu comble ceux qui sont assez sages pour obéir aux lois de la création par amour pour lui, mais il ne dédaigne pas d’exaucer parfois ceux qui sont assez fous pour oser commander au monde en son NOM.
62’. Il nous faut prendre le baume avec le poison, puis les séparer l’un de l’autre pour avoir la vérité pure.
63. Les fils de Dieu rassemblent la vie du milieu même de la mort et la glorifient ici-bas.
63’. Celui qui modèle la lumière à sa voix et qui l’anime de son souffle, est comme Dieu.
64. Tous perdent leur temps et leur vie devant Dieu : croyants et impies, honnêtes gens et criminels, travailleurs et fainéants, intelligents et idiots, ascètes et débauchés, savants et ignorants, génies et médiocres, glorieux et ignorés, doués et maladroits, jeunes et vieux, riches et pauvres, civilisés et sauvages, tous ! excepté celui qui cherche follement son Seigneur ici-bas sans distraction et sans repos, excepté celui qui met la main au limon premier et qui fait l’œuvre de Dieu.
64’. Les savants et les intelligents seront ridiculisés devant Dieu et chassés loin de sa lumière ; seuls les simples et les croyants trouveront grâce devant lui. Quant aux sages et aux saints, leur cœur est depuis toujours avec le Seigneur de sagesse et d’amour. « Le Livre où Dieu a écrit son secret, c’est le ciel et la terre. Aussi, l’homme saint et sage étudie la science du Seigneur dans la paix du jardin d’Éden. »
65. Nous ne changerons pas la nature des êtres et des choses par nos petits travaux et, si nous la contenons un moment, elle surgira ensuite plus forte que jamais. Mais Dieu est tout-puissant, car il change même les ténèbres en lumière de vie.
65’. Oh ! qui nous donnera la foi absurde et la persévérance folle ? Oh ! qui nous apprendra la simplicité dérisoire et l’humilité toute nue ? Oh ! qui fera briller devant nous la sainte lumière de Dieu afin que nous devenions comme l’or du Parfait ?
À celui qui vaincra, je donnerai à manger du fruit de l’arbre de vie qui est dans le paradis de Dieu.
C’est moi l’origine, la dissolution, le lieu, le dépôt, la semence, l’inaltérable. C’est moi le berceau et le sépulcre de tout le monde… C’est la science des sciences, le secret des rois, la lustration suprême.
⟴LIVRE XI
Tu es une terre qui n’a pas été purifiée, qui n’a pas été lavée par la pluie.
Ce livre a été composé par Isis pour son frère Osiris, afin de faire revivre son âme, de ranimer son corps et de rendre la vigueur et la jeunesse à tous ses membres divins, afin qu’il soit finalement réuni au Soleil, son père.
RIVE TÉNUE
TERRE VIVANTE
1. L’homme le plus fou peut devenir sage si Dieu l’éclaire, mais le sage ne saurait devenir insensé, parce que c’est le Seigneur qui le soutient.
1’. Il vaut mieux paraître idiot en louant Dieu que passer pour intelligent en niant l’évidence de la vie.
2. Le travail qui convient aux ignorants et qui les maintient dans l’obéissance et dans l’ordre, ne saurait s’appliquer aux hommes instruits et maîtres d’eux-mêmes.
2’. Si nous ne trouvons pas Dieu pendant notre veille, nous ne le posséderons pas davantage durant notre sommeil.
3. Les subtilités intellectuelles sont piètres choses eu égard à la connaissance du monde total.
3’. Jetons notre science au feu, et elle nous produira enfin quelque chose de bon, comme la simplicité des cendres.
4. Le sage et le fou ne doutent pas, cependant l’un possède et l’autre est possédé.
4’. Abandonnons toute vaine malice, et Dieu paraîtra nu devant nos yeux éblouis.
5. La vie en Dieu est d’abord douceur, allégresse et libération, ensuite elle se perd dans la contemplation de l’Être sans analyse possible.
5’. Celui qui atteint Dieu en esprit et en corps est comme la quintessence du ciel et de la terre.
6. La grande révolte, c’est chercher Dieu sans arrêt. La vraie réussite, c’est l’atteindre sans retour.
6’. Dans le lieu caché, le joyau lumineux vit actuellement. « En faisant le bien, le mal disparaît de lui-même. En combattant le mal, on risque fort de s’y enliser encore plus. »
7. Celui qui s’imagine mal faire ou bien faire selon les hommes, pèche par ignorance. Celui qui est instruit dispose les choses et laisse à Dieu le soin d’accomplir son œuvre.
7’. Il n’y a pas de loi pour celui qui habite la loi, car il est déjà la loi et l’amour avec l’Unique. « Que les ignorants n’expliquent rien, et la vie ne sera plus divisée. »
8. La joie de Dieu est dans l’union des sages et dans la prière des saints, comme elle est dans l’inspiration des artistes, dans les jeux des enfants et dans les chants de toute la nature.
8’. Celui qui est véridique est rapidement délivré du monde des médiocres, car la lumière se sépare par elle-même des ténèbres qui l’environnent.
9. Le Livre est poussière et cendre comparé à la vivante réalité de Dieu. Cependant, il donne le moyen de reconnaître la source du ciel et de la terre.
9’. La connaissance libère le sage, et la foi sauve le saint ; mais c’est l’amour qui les unit en Dieu.
10. La morale des hommes sages ne viole pas les lois naturelles.
10’. Ce sont nos mains qui préparent la terre, mais c’est la bénédiction du Seigneur qui lui fait produire son fruit.
11. Ce qui flatte la brute peut torturer le saint, et ce qui plaît au sage peut répugner au vulgaire.
11’. J’oublierai ceux qui ne se sont pas souvenus de moi, dit l’Unique.
12. Une vie de travail, de plaisir, de repos, de souffrance, de résignation ou de révolte ne vaut pas une minute consacrée à chercher Dieu en soi-même.
12’. Celui qui franchira la barrière du feu liquide, atteindra la vraie connaissance de l’amour.
13. La résignation est comme le renoncement à Dieu, car elle nous maintient dans la crasse qui nous sépare de lui.
13’. Remettons tout à Dieu, et nous posséderons le monde sans dommage.
14. Le bonheur est là où il n’y a ni séparation, ni changement, ni mort.
14’. Comment pourrait-il y avoir un repos pour le sage tant qu’une portion de l’Être demeure exilée dans la mort ?
15. Celui qui sait où mène la mort a bien rempli sa vie.
15’. Dieu offre la lumière et ne reçoit qu’elle.
16. Le bon médecin aide la nature, et le sage patiente avec tous les hommes.
16’. Il faut se servir de la fin de tout pour connaître le commencement de tout.
17. Aucune croyance ne saurait être rendue obligatoire. Dieu hait les persécuteurs et les médiocres.
17’. Si vous rencontrez Dieu, ne le criez pas sur les toits et surtout n’essayez de convaincre personne.
18. Le sage et le fou ignorent la peur, cependant l’un domine la mort, et l’autre en est l’aliment.
18’. C’est l’absurde qui délivre des prisons de l’esprit.
19. Quand on voudra faire de vous des héros, vous ne serez pas loin de devenir des morts.
19’. Détache avant qu’on arrache.
20. Le malheur sauve ceux que la routine entraînait vers la mort.
20’. C’est l’excès de l’amour qui nous ramène à Dieu, jamais la médiocrité satisfaite d’elle-même.
21. Le sommeil, la prière, l’amour, le travail et la drogue font oublier le malheur pour un temps ; mais seule la connaissance de Dieu nous en délivre pour toujours.
21’. Tout ce que l’homme a entraîné dans sa chute sera réhabilité avec lui, et la création revivra apaisée dans le sein de l’Unique Splendeur.
22. Reprendre un insensé, c’est l’enfoncer dans sa folie et se faire un ennemi gratuitement.
22’. Ne frappons que par compassion et seulement pour instruire quand le Seigneur l’exige formellement.
23. Discuter avec un inférieur c’est tomber à son rang et perdre toute chance d’être entendu.
23’. Le vivant va aux morts pour les sauver, mais ceux-ci essaient stupidement de le tuer, car ils ne reconnaissent pas la lumière qui habite l’Univers.
24. Celui qui a vraiment raison n’entreprend jamais de le prouver, car il sait que le malheur même n’est pas entendu.
24’. La sainteté, c’est la confiance en Dieu, c’est la générosité envers tous, c’est l’abondance en tout, c’est la joie pour soi.
25. La ronce et le méchant s’écartent avec le bâton ; celui qui y met la main s’empêtre et se déchire inutilement.
25’. La sagesse dernière est comme l’innocence première, avec cette seule différence que l’une se connaît et que l’autre s’ignore.
26. C’est la connaissance première et dernière qui fait l’enseignement de tous les livres saints. « Ô trésor inestimable foulé aux pieds par les hommes ignorants ! »
26’. Que les croyants qui aiment le Livre prient dans leurs cœurs et disent : « Que celui qui nous a parlé de ta grâce, de ton amour et de ta science, soit ivre de toi à jamais, ô Seigneur ! »
27. Peu d’hommes se perfectionnent dans la paix, car beaucoup s’y ennuient et s’y amollissent ; et peu sont enseignés par le malheur, parce que presque tous s’y raidissent ou s’y désespèrent.
27’. Nous jouons avec tout ce que nous croyons être, mais nous ne conserverons que ce qui est véritablement. « L’incombustible pureté. »
28. Qui libérera son âme de la terre étrangère ? Et qui fera descendre le Seigneur dans la terre sainte ?
28’. Quand la forme disparaît, la substance de l’eau émerge du chaos et manifeste l’essence du feu divin.
29. C’est par la folie de l’amour que nous approchons Dieu, et c’est par la raison du monde que nous nous en éloignons.
29’. Observons le spectacle du monde jusqu’à rire ou à pleurer, mais n’y participons jamais sérieusement, sous peine de nous perdre dans sa nuit.
30. Dieu vit et se meut au-delà de toute raison humaine.
30’. La plus petite expérience de Dieu vaut mieux que toutes les théologies du monde.
31. Si nous voulons parvenir jusqu’au Père et recevoir l’héritage promis, il nous faut premièrement ne plus être orphelins dans les ténèbres de la mort, et secondement nous fixer dans la Mère sainte où l’amour nous mûrira.
31’. Le propre de l’amour, c’est la confiance et le don illimité de soi-même dans la liberté de l’Être. Mais quand paraît la moindre contrainte, disparaissent aussitôt l’amour et la liberté.
32. Le mal n’a pas d’existence intrinsèque, il apparaît comme le ralentisseur de toute parcelle de vie qui s’éloigne de la source du bien éternel qui est l’Être Dieu.
32’. Correction pour les autres, injustice pour soi-même ; tel paraît le malheur pour les ignorants.
33. Les soleils meurent et renaissent dans l’eau et dans la terre nourricières.
33’. Ce qui a été désuni par le feu ne peut être réuni que par lui.
34. Ne nous engageons pour personne. Dieu seul peut assumer un tel fardeau, car il sait délivrer des rets de la mort.
34’. La malice nous a perdu, la simplicité nous sauvera, et nous habiterons à nouveau le jardin de délices.
35. Trop de liberté mène l’ignorant à l’esclavage de la mort.
35’. Si quelque chose nous ennuie, examinons si cela est utile aux autres ou à nous-mêmes.
36. Celui qui est sorti de la mort connaît seul la valeur du repos dans la vie retrouvée.
36’. Ô splendeur, ô vie, ô noyau, c’est toi que nous adorons, ô Éternel des éternités !
37. Ne violons pas les limites que Dieu nous a fixées, afin de ne pas nous enfoncer dans une mort plus opaque.
37’. Soyons devant Dieu comme un cadavre dans les mains de l’embaumeur qui prépare la résurrection.
38. La fin de notre révolte sera la fin de notre agitation. Le malheur nous lassera un jour, et nous nous souviendrons de Dieu, et nous retournerons à lui.
38’. Les sages de ce monde s’humilieront devant le simple qui possède Dieu et sa lumière.
39. Dieu sourit à la révolte des hommes, car il sait qu’ils reviendront plus sages et plus aimants après leur migration dans les ténèbres de la mort.
39’. Celui qui connaît et qui possède la vérité, ne se fatigue pas à avoir raison contre quiconque.
40. Nous pouvons nous perdre éternellement si l’absurde ne nous arrête pas sur le chemin de l’égarement et si l’amour ne nous ramène pas à notre origine sainte.
40’. Pour certains, Dieu est une sublime réalité. Pour d’autres, il semble être une folie incroyable. « Les intelligents ont repoussé le Livre, et les savants du monde n’y ont rien compris. »
41. Dieu ne punit personne, le malheur est seulement l’effet de notre éloignement de la source première.
41’. La vérité resplendit éternellement, mais son vêtement terrestre est obscur.
42. Celui qui remet tous ses dons à Dieu rejoint la simplicité divine, qui est comme l’humilité parfaite.
42’. Quand nous donnerons et quand nous recevrons sans souci, nous serons près de Dieu.
43. Le malheur est illusoire par rapport à l’Être, cependant c’est lui qui ramène l’homme à sa source.
43’. Les lois de Dieu et celles de la nature oppriment ceux qui les violent, et délivrent ceux qui les observent.
44. Le savant connaît beaucoup de choses, mais n’en possède aucune. Le sage n’en possède qu’une seule et connaît toutes les autres.
44’. C’est en montant et en descendant que nous découvrirons le mouvement et le repos de Dieu.
45. Ne prenons parti pour rien ni pour personne ; cherchons Dieu qui est plus urgent que tout le monde ensemble.
45’. Le sage agit gratuitement parce qu’il sait que tout est en Dieu.
46. L’homme prend conscience dans la séparation, dans l’absence et dans le retour.
46’. Nous demeurons unis en Dieu, mais nous sommes plusieurs dans le monde, selon les lieux et selon les temps.
47. C’est Dieu qui commande, et c’est la déité qui exécute. C’est l’homme qui ensemence, et c’est la femme qui accouche.
47’. Comme l’eau a servi à former toutes choses, ainsi toutes choses redeviendront comme l’eau.
48. En détruisant les êtres et les choses, nous ne trouverons jamais Dieu, mais nous nous fractionnerons et nous nous enfoncerons davantage dans la mort.
48’. Les enfants de l’Unique imitent l’œuvre du Père et vivent déjà en paix dans le monde présent.
49. Les dialectiques habiles n’égarent pas les connaisseurs, car la lumière sainte oriente toutes leurs pensées vers l’Unique.
49’. C’est l’œuvre qui provoque les discussions, et non pas celles-ci qui engendrent celle-là.
50. Notre foi est comme le parfum et comme le souvenir de l’invisible mer du monde, où repose le Parfait.
50’. Le sage et le saint ne se lassent pas d’admirer et de louer la création de Dieu.
51. L’amour de Dieu est comme le souvenir intense de notre liberté et de notre unité première dans la pureté du ciel.
51’. La réalisation du souhait est fonction de la précision de l’image conçue, de la puissance de projection du désir et de la régularité patiente de la prière.
52. La lumière de nos cœurs crie vers Dieu à travers les ténèbres du corps qui l’emprisonnent, et le Père délivre l’égarée, et le Fils paraît dans la splendeur de l’union.
52’. Il y a une grande beauté et une grande vertu dans l’œuvre du Seigneur ; c’est pour cela qu’il travaille toujours par-dessus et ne la rejette pas.
53. L’ignorant méconnaît l’instruction ancienne et brouille la vérité présente.
53’. Il y a de l’intelligence à reconnaître l’origine du malheur qui nous couche jusqu’à terre.
54. Quand on ne peut amender l’arbre stérile, le feu le rend aux cendres nourricières et à l’eau fécondante.
54’. La seule perfection est ascension, descension et repos.
55. Personne ne viendra à bout de celui qui dit non, si ce n’est l’absurdité de ce non devenue évidente dans la mort.
55’. La sainteté est comme une malédiction pour ceux qui l’ont vue, qui l’ont entendue et qui ne l’ont pas reconnue.
56. J’ai admiré la patience lumineuse de la vie et j’ai loué celui qui la mûrit jusqu’au repos de Dieu.
56’. L’intelligence de l’eau et la mémoire de la terre forment le corps-esprit de l’Univers, mais c’est l’amour du feu qui lui confère l’âme vivante.
57. Appliquons-nous à devenir immenses, afin de recevoir Dieu dans sa totalité.
57’. Il n’y a rien à comprendre là où tout doit être senti.
58. La connaissance vraie implique la possession, l’absorption et la transmutation.
58’. C’est la nature divine qui nous console, qui nous guérit, qui nous instruit et qui nous sauve.
59. Celui qui a tout laissé venir et qui a tout laissé partir peut se tourner utilement vers Dieu, car il est déjà en lui.
59’. La bénédiction de Dieu coulera sur celui qui est nu, et la grâce du dedans et celle du dehors ne feront qu’une seule eau.
60. Les amis de Dieu sont puissants, mais ils paraissent comme des vers. Ils possèdent toutes choses, et on les traite en misérables. Ils habitent avec la sagesse, et le monde les croit fous. Ils débordent d’amour, et ils paraissent durs.
60’. L’expression la plus accomplie de l’amour est la générosité et la patience envers tous les êtres de la création. À l’exemple du Seigneur que nous mangeons et qui nous mange, le sage montre la lumière de vie aux êtres égarés dans la mort.
61. La meilleure pensée, la plus belle action, sont celles qui nous rapprochent le plus de la gratuité divine.
61’. L’acceptation, le détachement et l’oubli de soi sont la perfection de l’amour en Dieu.
62. L’amour de Dieu est le commencement du savoir, et sa possession est la fin de la science.
62’. Le premier devoir, c’est faire paraître Dieu en soi ; le second, c’est contribuer à le manifester dans les autres.
63. La timidité est presque toujours un orgueil qui ne dit pas son nom. Qui mendiera sa vie au TrèsHaut ?
63’. Celui qui s’est délivré de la volonté de bien faire et de la peur de mal faire, est près de la liberté de Dieu.
64. Celui qui se contient est un sage, mais celui qui se brime est un fou.
64’. Le saint qui veut aller à Dieu doit se libérer des liens du péché et de ceux de la vertu.
65. Tous les maîtres ont été traités d’orgueilleux par ceux qui ne pouvaient les suivre, mais ils sourient sans répondre, car ils savent qu’ils se sont oubliés en Dieu pour toujours.
65’. Observons les morts de ce monde pour comprendre à quel rêve insensé ressemble leur ignorance de Dieu.
66. C’est la grâce qui délivre, c’est l’amour qui rassemble, c’est la connaissance qui perfectionne et c’est l’union qui fait reposer.
66’. La sagesse n’a pas commencé et ne finira jamais. En elle se manifeste l’amour en unité.
67. Quand la bouche s’agite, écoutons les paroles du cœur et nous connaîtrons la vérité sur ceux qui nous entretiennent.
67’. Le faible qui dit oui et qui n’agit jamais, amasse le mépris des hommes et se sépare de Dieu, car la planche pourrie n’est bonne ni à l’eau ni au feu.
68. Les obligations du monde semblent bien peu urgentes à celui qui cherche Dieu.
68’. Celui qui est instruit demande à Dieu. Celui qui ne l’est pas demande aux hommes.
69. Peu d’hommes ont été favorisés ici-bas par la connaissance possessive, car peu de saints parmi les meilleurs sont capables d’acquérir la puissance divine sans dommage pour eux-mêmes et pour les autres.
69’. Être possédé de Dieu, c’est être saint. Posséder Dieu, c’est être sage. Mais pénétrer Dieu, c’est être insensé et c’est devenir comme Dieu qui est le sens premier et dernier.
70. Quand nous atteindrons Dieu, n’omettons pas de tout lui remettre, sinon nous le perdrions aussitôt.
70’. Notre amour et notre connaissance se fondront dans l’union divine, et le repos vivant sera notre récompense éternelle.
71. Le langage peut changer, l’esprit du Livre ne vieillira pas, car il enseigne le commencement et la fin de la création apparente et cachée.
71’. Le Livre est pour le plus subtil et pour le plus épais, car il participe du ciel et de la terre. Chacun y puisera selon sa capacité.
72. Vaincre le monde en le combattant ou en le fuyant, telle est l’alternative apparente qui s’offre à tous, si nous voulons éviter les écrasements, les déchirements et l’enlisement. Cependant le sage connaît une troisième solution qui délivre de tout mal, de toute servitude et de toute ignorance, car c’est elle qui sépare patiemment en nous la vie de la mort.
72’. La perfection de l’Un manifesté émane de l’union du joyau d’or et du lotus lumineux, issus par la puissance du souffle divin du chaos ténébreux et caché. « Le dernier-né est l’enfant chéri du Père et de la Mère, et le frère bien-aimé des grandes âmes. »
Insensé, ce que tu sèmes ne reprend pas vie si d’abord il ne meurt… Le corps est semé corruptible, il ressuscite incorruptible ; il est semé méprisable, il ressuscite glorieux ; il est semé infirme, il ressuscite plein de force ; il est semé corps animal, il ressuscite corps spirituel.
Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas pour faire le miracle d’une seule chose.
⟴LIVRE XII
C’est une source fermée, une fontaine scellée.
Je suis tout ce qui a été, tout ce qui est et tout ce qui sera, et mon voile jamais aucun mortel ne l’a encore soulevé. Le fruit que j’ai engendré a été le Soleil.
NUIT RÊVÉE
LA SOURCE
1. C’est la connaissance parfaite qui nous démontre notre ignorance absolue. « Celui qui préjuge du choix de Dieu, se retranche de l’amour de son Seigneur. »
1’. C’est par la pure gratuité de nos pensées et de nos actes, que nous acquerrons et que nous conserverons la paix du cœur.
2. Notre gloire, c’est laisser Dieu opérer en nous sans entrave. « L’intellect est l’épée flamboyante et tournoyante qui nous défend l’entrée du jardin d’Éden. »
2’. L’amour saint est comme un va-et-vient qui relie entre elles et à leur source divine, les créatures égarées dans la mort.
3. L’arbre de vie est planté au centre du jardin de paradis, mais l’arbre de la connaissance du bien et du mal pousse à cheval sur le mur de clôture.
3’. Le sage médite sur le rien d’où est sorti le tout. Il est gardien de la sagesse issue du ciel et de la terre.
4. L’homme est le terme moyen de l’Univers gradué et l’expression de son plus grand mystère.
4’. C’est dans la lumière céleste que demeure la vie du monde, mais elle agit aussi quelquefois dans l’ombre terrestre.
5. L’homme a été fait de la meilleure partie du ciel et de la terre, et s’il était nettoyé de sa crasse, on le verrait resplendir comme les étoiles, comme la lune et comme le soleil.
5’. Le Livre enseigne à sortir de la mort et à reposer dans la vie, mais combien parmi les croyants se passionnent pour ce mystère ?
6. La contrainte est une chose totalement étrangère à Dieu et au sage, car ils habitent la liberté où il n’y a ni obscurité ni mort.
6’. Les médiocres croupiront dans la mort, jusqu’à ce qu’ils s’ouvrent dans l’abandon de la grâce et dans la générosité de l’amour.
7. Commandons une fois à notre agitation et nous jouirons de la vie, au milieu même de la mort du monde.
7’. Conservons le détachement et l’allégresse de la sainteté, et tout nous deviendra aisé et simple.
8. Le sage est comme la pierre précieuse cachée sous sa gangue.
8’. Que notre vertu secrète soit l’union avec Dieu.
9. Ceux en qui ne se trouvent ni bassesse ni médiocrité, sont repoussés et maintenus à l’écart par le monde, qui les renvoie ainsi à Dieu sans le savoir.
9’. Soyons riches au point de ne plus rien posséder. Soyons aimants jusqu’à pouvoir tout donner. Soyons fidèles jusqu’à lasser les ténèbres.
10. L’accommodation au monde est comme l’oubli de Dieu.
10’. La désunion et l’union font paraître l’impassible.
11. Nous souffrirons dans les mondes pendant des temps immenses, nous jouerons dans la mère durant des éternités, mais nous reposerons seulement en Dieu pour toujours.
11’. L’amour commença avec la première séparation. Il reposera avec la dernière réintégration, dans la connaissance possessive et unitive du Seigneur des mondes.
12. Il y a un état plus haut que toute prière, qui est l’absence, la présence et l’union. Ce degré appartient aux maîtres.
12’. Le cœur de l’homme est comme une pierre qui scelle l’entrée du trésor de Dieu.
13. Quand nous éprouverons une grande fatigue pour l’agonie de ce monde, nous serons prêts à vivre en Dieu.
13’. Dissous dans l’eau de la grâce et dans le feu de l’amour, il manifeste la lumière sainte où tous se meuvent, et où quelques-uns reposent.
14. Celui qui s’est oublié en Dieu demeure indifférent aux promesses et aux menaces de ce monde.
14’. La grande purification, c’est aimer, contempler, connaître, posséder et reposer.
15. La sagesse du sage est comme une ignorance qui se connaît et qui se tait.
15’. Le silence permet de tout entendre et de tout dire, sans exciter l’incrédulité ou la colère des médiocres.
16. Lorsque nous aurons tout obtenu dans l’esprit, dans le cœur et dans les mains, nous comprendrons qu’il n’y a de désirable que le repos dans le centre du centre.
16’. Celui qui ne rugit pas dans son cœur et qui ne verse pas les larmes du désespoir au milieu de la mort de ce monde, ne peut être instruit de Dieu.
17. Considérons l’instabilité du monde présent et tournons-nous vers Dieu, avant que le changement ait brisé nos volontés et nos attachements particuliers.
17’. Triples fous qui croyez pouvoir vous organiser définitivement dans la boue mouvante du monde ; la grande marée va effacer vos ouvrages et vous ramener à l’humilité nue.
18. Sans les leçons du malheur et sans les échecs de ce monde, combien d’hommes seraient pour toujours enfoncés dans la mort ?
18’. Il nous faut vivre en esprit de plus en plus, sous peine de demeurer esclaves sur la terre étrangère pendant l’éternité.
19. Nous honorerons Dieu en faisant connaître le Livre à ceux qui cherchent une issue à leurs peines.
19’. Rien n’est plus urgent que la recherche de Dieu, et rien n’est plus vain que la dispute humaine.
20. Le Livre est puissant comme le feu et conciliant comme l’eau, subtil comme l’air et fidèle comme la terre.
20’. Dieu ne parle qu’à Dieu et n’est entendu que par Dieu.
21. Les médiocres pensent avoir peur de la mort, mais c’est la vie qu’ils redoutent par-dessus tout en réalité.
21’. Offrons chaque jour une louange à l’Unique, afin que sa joie demeure avec nous.
22. L’art de guérir est noble, car il préfigure l’art de la régénération, qui est saint.
22’. Il est plus avantageux d’être sauvé par un simple rempli d’expérience, plutôt que d’être tué par un savant bourré de science.
23. Aucune joie ni aucune douleur de ce monde ne sauraient nous faire oublier l’agonie de la terre.
23’. La clairvoyance envers soi-même est la forme la plus accomplie du courage.
24. Nul ne peut changer la nature, mais quelques-uns savent la purifier et la mûrir pleinement.
24’. Dieu est partout, mais il n’est trouvé que par ceux qui le cherchent dans les limbes du monde.
25. Considérons la paix intérieure et demeurons le plus possible absents de ce monde.
25’. La sagesse est comme l’union avec le centre vivant, éternel et libre.
26. Dieu fait mouvoir les mondes en attirant ce qui est lumineux et en repoussant ce qui est obscur.
26’. Le soleil féconde la vie qui monte et qui descend. Il est comme le centre de chaque monde, soit infiniment grand, soit infiniment petit.
27. Un peu de poussière ternit une masse d’or, et un petit défaut masque quelquefois une grande sainteté.
27’. Peu d’hommes goûtent les belles choses du monde, et moins encore admirent celles qui sont sages.
28. Il n’y a qu’un malheur véritable ici-bas, c’est ignorer Dieu et son repos. « Ô Père mystérieux et caché ! » « Ô Mère lumineuse et vivante ! » « Ô Fils rayonnant et parfait ! »
28’. Profitons du plus petit répit que nous accorde le monde pour converser avec celui qui est toujours attentif au-dedans de nous-mêmes.
29. Celui qui croit parvenir jusqu’à Dieu sans connaître l’homme et la nature, est plus ignorant qu’un ver de terre.
29’. Tout ce qui tombe du ciel s’accumule dans nos âmes jusqu’à ce que la lumière nous délivre de la mort.
30. La médiocrité, c’est ne pas donner et ne pas recevoir librement ; c’est ne pas aimer et ne pas augmenter ; c’est n’avoir ni générosité ni don ; c’est haïr la grandeur, la beauté, le génie, la sainteté et la pureté ; c’est être séparé de la grâce et privé de l’amour ; c’est penser et agir bassement ; c’est être faible et lâche dans toutes les circonstances de la vie cachée ; c’est opprimer le dedans et être écrasé par le dehors.
30’. Démasque-toi, dépouille-toi, et la Mère t’apparaîtra sans voile ; mais prends garde que nul n’ajoute ou ne retranche sous peine de troubler la vérité qui t’éclaire et qui t’anime. « Si nous pouvions voir le monde à découvert, nous serions pétrifiés par la surprise et écrasés par la honte de notre exil volontaire, car Dieu est la conscience de la vie, et la vie est le corps de Dieu. »
31. On peut être médiocre, on ne saurait s’en glorifier.
31’. Tout ce que nous accomplissons avec amour est exempt de l’ennui.
32. Pas de repos sans connaissance. Pas de connaissance sans amour. Pas d’amour sans la grâce. Pas de grâce sans abandon.
32’. Celui qui féconde se tient dans le soleil. Celle qui nourrit demeure dans la terre. Celle qui délivre se meut dans le ciel. Celui qui unifie repose dans le cœur.
33. La lumière première fut tirée du chaos par Dieu et quintessenciée en Adam. Celui-ci ne fit que remélanger cette lumière sublime avec les ténèbres extérieures du non-être ; par curiosité, présomption, vanité et désobéissance.
33’. L’union de l’eau et de la terre fait paraître la pureté du vêtement lumineux du Seigneur, et le feu manifeste la vertu secrète du trésor de Dieu.
34. Le nouvel Adam, vrai fils de Dieu qui est venu, qui vient et qui viendra, sépare à nouveau la lumière des ténèbres par humilité, amour et obéissance à la loi de l’Unique.
34’. C’est la femme et l’homme intérieurs qu’il nous faut faire émerger du chaos, par le secours divin de la grâce ouvrante et de l’amour fécondant.
35. La première révolte exila l’homme sur la terre étrangère. La seconde le porte à s’y organiser confortablement. La troisième le fait renoncer à ce monde et le ramène vers Dieu.
35’. La mortification qui prépare à la vie nouvelle s’accomplit dans les ténèbres de la foi et dans la vacuité de l’être.
36. La volonté particulière de l’homme ne fait qu’accentuer toujours plus la faillite de sa révolte contre Dieu.
36’. Dieu ne nous demande pas de plaire, il nous demande d’être simples et vrais.
37. Celui qui a expérimenté l’humiliation et la tristesse de la mort extérieure, apprécie comme il faut la joie de la vie retrouvée et la gloire du Seigneur reconnu.
37’. C’est l’abandon, la grâce et l’amour qui délivrent des prisons de la mort et qui nous font accéder aux demeures du ciel ; mais c’est la connaissance possessive qui nous fixe dans le centre secret.
38. Il appartient à chacun de nous de susciter Dieu en soi avec sa foi particulière, soit patiente, soit douce, soit hardie, soit volontaire, ou même violente ; mais toujours animée du feu de l’amour.
38’. Le saint qui prie pour connaître son Seigneur se garde bien d’imaginer le lieu, le moment et l’ordonnance de la rencontre, afin de ne pas faire obstacle à l’union mystérieuse de l’Unique.
39. Dieu peut demeurer sourd à toutes sortes de prières, mais il ne saurait résister longtemps à la générosité de l’amour.
39’. L’intention profonde détermine les moyens de l’accomplissement, soit au bien, soit au mal.
40. La science des hommes a mis le monde à feu et à sang. Que serait-ce si la science de Dieu tombait dans les mains des méchants ?
40’. L’intelligence sans l’amour est comme un engrenage sans huile qui, malgré sa perfection, finit par grincer insupportablement.
41. Même le sage, qui connaît la pérennité du support du monde, pleure quelquefois comme un petit enfant devant la douleur des séparations.
41’. La vérité possède mille habits, mais elle n’a qu’un seul corps, qu’un seul esprit et qu’une seule âme en l’Un.
41’’. Ainsi, si le Livre nous était pesé au poids de notre or, s’il nous était compté au nombre de nos jours et s’il nous était mesuré à la quantité de notre sang, ce serait encore peu de chose eu égard au don du Seigneur.
42. N’attendons pas d’être hébétés par le malheur pour nous tourner vers Dieu.
42’. Quand une tentation devient trop violente, offrons-la à Dieu qui rend tout supportable.
43. Les vanités du monde ne sont ici d’aucune utilité, car il ne s’agit pas d’être surchargé de mémoire ou gonflé d’importance, mais plutôt d’être simple et nu comme au dernier jour de la création et comme au premier jour de notre naissance.
43’. Nous rejoindrons le trésor de Dieu et nous demeurerons dans sa splendeur et dans sa paix, pour toujours. « Il n’y a que l’eau sainte qui puisse nous laver de la crasse ténébreuse et nous faire revivre dans la lumière du Seigneur. »
44. Les médiocres au pouvoir abattent un peuple plus certainement que ne sauraient faire tous ses ennemis coalisés. « Le Seigneur s’obscurcit dans la coque, mais il demeure lumineux dans le centre secret de sa création. »
44’. Celui qui est au sommet de l’amour et de la connaissance, est comme un vase rempli du nectar des dieux où tous les êtres s’abreuvent ; mais celui qui demeure à mi-chemin du savoir, est comme une cruche pleine de cendres qui ne sert à personne.
45. Là où la tentation n’existe pas, il n’y a ni combat, ni défaite, ni victoire, mais plutôt repos pour les élus, stagnation pour les médiocres et mort pour les rebelles.
45’. Utilisons modestement les biens de ce monde afin de ne pas nous priver du nécessaire, d’une part ; et afin de ne pas être exclus de la surabondance de Dieu, d’autre part.
46. C’est tout de suite qu’il nous faut Dieu et son royaume, afin d’échapper au vertige de l’abîme ouvert dans ce monde.
46’. Dieu est plus proche de l’homme que d’aucun autre corps terrestre, excepté le sel de la terre.
47. Dépouillons ceux qui nous recommandent la misère et assommons ceux qui nous prêchent la résignation, pour voir s’ils disent vrai.
47’. C’est l’identification avec Dieu qui donne la toute-puissance et la gratuité parfaites.
48. Soutenons ceux qui cherchent l’Unique, afin qu’étant parvenus à la vie, ils nous aident à gravir l’échelle de la création.
48’. Celui qui possède la lumière dans sa pureté première, est coadjuteur de Dieu.
49. Mon Nom est comme un point d’or dans le tabernacle des ancêtres. Qui le fera briller sur la terre ? dit le Seigneur. Et qui le fera resplendir dans le ciel ? demande l’Unique.
49’. Celui qui n’a pas la patience de l’eau, la constance de la terre, la subtilité de l’air et la pureté du feu, qui séparent et qui unissent, n’entrera pas dans la gloire du Seigneur.
50. Il y a une chose que Dieu ne saurait faire : c’est se détruire.
50’. Matière. Matrice. Matras. Mater. Patrie. Partie. Pâtre. Pater.
51. Celui qui ne peut atteindre Dieu dans l’extase, tente de s’en approcher par l’ivresse vulgaire, car chacun essaie à sa façon de trouver le repos de l’Unique.
51’. C’est dans l’apparente folie de Dieu que subsiste la raison profonde de l’Univers, comme l’étincelle du feu demeure cachée dans la pierre brute.
52. Le propre du saint est de se prêter aux hommes et de se donner à Dieu.
52’. L’étude de la création ne saurait se passer de l’amour du créateur.
53. Faites à autrui ce que vous désirez qu’on vous fasse, et la rosée du soleil fera refleurir toute la terre des hommes.
53’. Il n’y a que la pureté de l’enfance, celle de la sainteté et celle de l’amour qui puissent approcher Dieu.
54. Les sages renonceront à leur sagesse pour s’unir à Dieu, et les saints oublieront leur sainteté pour rejoindre l’unique clarté.
54’. Ce monde est comme une maison de fous, et nous n’en sortirons qu’en devenant plus fous que les plus fous, c’est-à-dire sages en Dieu.
55. Le passé est comme le temps de la folie. Le présent est comme le temps de l’ignorance. Le futur est comme le temps de l’illusion. Seule la vie en Dieu est comme la sagesse éternelle.
55’. Attachons-nous à Dieu dès le temps présent, afin que lorsque le malheur arrivera, il passe sur nous comme l’eau glisse sur les plumes du canard. « Ô vérité brillante qui efface toute souillure de mort ! » vit.
56. Nous devons nous reconnaître dans tous ceux qui souffrent et qui manquent de secours, et leur offrir l’eau nécessaire à la purification et le feu indispensable à l’union.
56’. Le fou tue et disperse ce qui Le sage vivifie et concentre ce qui semble mort. « Une seule substance, une seule essence. Une seule nourriture, un seul breuvage. »
57. Tout ce qui nous ennuie est précisément ce qui nous est inutile pour l’instant ; c’est pourquoi chacun va vers ce qui l’attire le plus, afin d’expérimenter le monde avec le meilleur profit.
57’. Il vaut mieux bégayer le Nom de Dieu dans notre cœur plutôt que le nommer savamment par les lèvres des autres.
58. Le travail est une chaîne et un boulet imposés à l’orgueil et à la révolte de l’homme déchu. La douleur est un mors et une bride passés au mensonge et à la désobéissance de la femme infidèle.
58’. Il faut être fou pour s’enorgueillir d’une plaie et dément pour l’entretenir dans l’espoir d’obtenir un soulagement, car il n’y a que le médicament du ciel et de la terre qui délivre de tout mal et de toute mort.
59. Il vaut mieux devenir inconscient dans la vérité que demeurer conscient dans le mensonge.
59’. La voie tortueuse est fatigante, et la voie droite si aisée. « La sagesse ne violente rien, cependant elle découvre toute chose. »
60. L’orgueilleux ne doit ni se plaindre, ni pleurer, ni maudire, puisqu’il a choisi de vivre seul au milieu des ténèbres de la mort.
60’. L’air pur et les herbes amères font le sang propre. Le détachement et l’oubli de soi font l’âme nette.
61. C’est la faculté d’expansion, de don et d’amour qui nous fait un avec Dieu.
61’. L’anarchie de l’amour prépare la voie du Seigneur.
62. L’orgueil considère le dehors. L’humilité regarde en soi. La sagesse fixe Dieu.
62’. Sans l’épreuve, personne ne se connaît ni ne se possède vraiment.
63. Prions pour devenir simples et souples à l’extrême, afin de posséder la joie qui ne finit jamais.
63’. Notre sauvegarde réside dans la générosité envers tous les êtres et envers nous-mêmes.
64. Il vaut mieux dissiper dans la charité, plutôt qu’économiser pour la destruction.
64’. Commençons par donner, afin de recevoir sans pécher.
65. Tout ce qui vient de l’homme est humain, même ce qui semble inhumain.
65’. Ne nous raidissons devant rien et nous ne serons brisés par rien.
66. Toute la création est précieuse devant Dieu, car son changement fait paraître le sel de la vie.
66’. L’homme ne subsiste que par ses échanges avec Dieu à travers la création.
67. Prions d’abord avec humilité et avec persévérance dans les ténèbres de la foi. Ensuite, nous louerons avec abandon et avec reconnaissance dans la lumière de l’amour. Enfin, nous adorerons avec dépassement et avec intégration dans l’unité de la connaissance.
67’. Celui qui est révolté par la faiblesse et par l’égarement des hommes, doit s’efforcer à la sainteté, afin d’effacer en lui ce qui lui déplaît tant chez les autres. « Quand notre rêve sera comme notre veille et quand notre veille sera comme l’absence du monde et comme la présence de Dieu, l’unité sera réalisée en nous. »
68. La puissance de l’homme réside dans la générosité de la justice. Celle de la femme est dans la grâce de la vertu.
68’. Celui qui observe les commandements de son cœur, peut ignorer ceux des hommes vulgaires, car il les dépasse déjà tous dans l’amour de Dieu.
69. Celui qui a bouclé le cercle de la création, sait qu’il n’existe rien en dehors de l’essence première et dernière, où repose le germe des créations merveilleuses de l’éternité.
69’. L’équilibre des contraires s’établit dans l’accomplissement de l’amour parfait et dans le repos de la connaissance ultime. « Nous mangerons le soleil glorieux et nous serons vivants à jamais. »
70. La violence peut terrasser le monde pour un temps, elle ne saurait convaincre personne.
70’. Quand nous craindrons pour nos vies comme nous craignons pour celle d’une fourmi, nous serons près d’être instruits.
71. La création est comme un délire dont le générateur conserve le contrôle de justesse.
71’. En joignant le ciel et la terre, nous obtiendrons la gloire de Dieu.
72. Être absent n’est pas s’enivrer grossièrement : c’est demeurer vide de désirs afin que Dieu puisse nous visiter librement.
72’. LA GRÂCE qui ouvre.
73. Accepter n’est pas se coucher et attendre : c’est bien faire ce qu’on doit, et ne pas considérer le résultat.
73’. L’AMOUR qui fait germer.
74. Être détaché n’est pas devenir insensible à la création : c’est tout laisser venir, et tout laisser aller sans contrainte.
74’. LA PURETÉ qui éclaire.
75. S’oublier n’est pas se retrancher du monde et de l’humanité : c’est se fondre en eux jusqu’à pouvoir tout aimer, et ne rien juger.
75’. LE SAVOIR qui unit.
76. Reposer n’est pas demeurer dans la mort : c’est vivre en Dieu, et ne pas s’immiscer dans la marche du monde ni dans les affaires des hommes.
76’. LA PAIX qui équilibre.
77. Après s’être perdu en Dieu, la plus grande joie consiste à s’y retrouver. « Qui se présentera pur et entier devant le Seigneur afin d’être fait un avec l’Unique ? »
77’. LA GRATUITÉ qui perpétue.
Il y a trois solutions possibles pour les hommes ici-bas :
Compter uniquement sur soi, comme font les ignorants égarés dans la nuit du monde.
Compter sur soi et sur Dieu, comme font les croyants qui ont entendu parler de la lumière du commencement.
Compter sur Dieu seulement, comme font les sages et les saints qui connaissent ou qui approchent l’origine et la fin de toute chose.
Confie-toi de tout ton cœur en Dieu et ne t’appuie pas sur ta propre intelligence.
Pour recevoir le royaume, l’unique moyen est de ne rien faire pour cela. Tant que l’on agit pour y parvenir, on ne peut gagner le royaume.
⟴LIVRE XIII
Maudit soit l’homme qui se confie en l’homme ! Béni soit l’homme qui se confie en Dieu !
N’éteignez pas l’Esprit, ne méprisez pas les prophéties, éprouvez toutes choses et retenez ce qui est bon.
VUE… ET RIEN
LE MILIEU
1. Celui qui parle au-dehors demeure dans l’ignorance. Celui qui se tait au-dedans habite avec la sagesse.
1’. N’abandonne pas ton Dieu, et lui ne te quittera pas, et vous serez en un toujours.
2. L’identification avec Dieu engendre la puissance et la liberté parfaites.
2’. L’illumination transfigure celui qui devient vide après avoir cherché longtemps.
3. Le conquérant des trois mondes reposera pour toujours dans la mer translucide du commencement des commencements.
3’. J’ai fait une absence de ma prière et une hébétude de ma louange. Ah ! quand saurai-je faire une mort de mon amour afin d’être rétabli dans ta vie impérissable ?
4. C’est la pacification de tout l’être qui mène à la vision intérieure et à l’union divine.
4’. Pleurons d’être si pleins du monde et si vides de l’Unique.
5. C’est la contemplation de l’unité première et dernière qui engendre l’union et la paix véritables.
5’. Nous sommes tous en Dieu, mais peu le savent et quelques-uns à peine l’expérimentent dans ce monde.
6. Espérons sa présence nuit et jour, sans jamais nous lasser, car lorsque nous serons mûrs, nous tomberons de nous-mêmes dans ses bras.
6’. Toutes nos pensées et tous nos actes sont ineptes ou menteurs. Le sage le sait, le saint le croit, le poète le soupçonne quelquefois.
7. Si nous aimons vraiment Dieu, rejetons tout ce qui n’est pas lui, afin qu’il se manifeste en nous sans entrave. Oublions sectes et sectaires, sciences et savants, lois et juristes, patries et politiques, esclaves et maîtres, et ne servons que notre paix intérieure en prenant seulement conseil de notre conscience profonde.
7’. C’est dans la foi et dans la patience que la Mère est trouvée, et elle agit aussitôt. C’est elle qui délivre et qui guérit. L’eau du ciel fait germer la terre, mais tous demeurent sourds et aveugles devant le miracle de Dieu, car ils se croient plus intelligents et plus savants que le créateur des mondes innombrables.
8. Laissons aller et venir la vie, car elle est mouvement et changement ; celui qui l’habite ne varie pas.
8’. Celui qui s’endurcit dans le combat, comment fera-t-il ensuite pour être pénétré par l’amour ?
9. Ne soyons pas trop scrupuleux sur ce qui nous vient, afin de ne pas l’être trop non plus sur ce qui nous quitte.
9’. Un voleur qui donne est plus près de Dieu qu’un juste qui conserve ce qu’il a reçu.
10. Nul ignorant ne saurait blasphémer le Nom de Dieu, puisque personne ne le connaît sauf celui qui vit déjà l’éternité.
10’. Il n’y a rien de tragique dans le monde, excepté l’idée que nous nous faisons des choses du monde.
11. Méditons Dieu et sa lumière en sortant de la nuit, et pensons-y en y entrant afin que le lien ne soit pas rompu entre nous et lui.
11’. Aimons sans autre espoir que l’amour, que la connaissance et que le repos dans la paix du Parfait.
12. Il joue à nous faire peur dans le monde, mais quand nous nous éveillons en lui, il rit avec nous de nos visions délirantes.
12’. C’est le dédoublement infini de l’Unique qui fait la création, et c’est la réunion des parties qui fait le repos.
13. Abandonnons nos droits et nos possessions et nous serons délivrés de nos devoirs et de nos charges.
13’. Celui qui dit : « Dieu n’existe pas » affirme la réalité de la création.
14. Laissons Dieu parler et agir à notre place et ne nous occupons pas du résultat.
14’. Interrogeons le Seigneur en toute circonstance et nous connaîtrons la vérité sur tout.
15. Ne nous confions en rien ni en personne, sauf en Dieu, et nous ne serons déchirés par rien ni par personne, car le Seigneur est seul à ne pas décevoir ceux qui se donnent à lui.
15’. Ne nous questionnons pas, interrogeons-le plutôt. Ainsi nous ne nous encombrerons pas de ce qui nous fait envie, mais nous accomplirons ce qui nous est utile.
16. Enseigne-nous les prières vigoureuses comme les ruts de l’amour. — Procure-nous les élans qui porteront nos âmes au-delà de l’abîme. — Chante-nous le NOM qui force les portes de la mort. — Nourris-nous de l’essence que charrie l’or vivant. — Offre-nous le soleil rédempteur de nos vies égarées.
16’. Quand notre raison, notre volonté et notre intelligence seront annihilées par la longueur et par la violence de notre quête, l’innocence, la grâce et l’amour nous livreront alors le secret tant recherché de l’Unique Splendeur. « Ô pauvre idiot, il suffit de te taire et de ne plus t’agiter pour que le Parfait t’anime à nouveau dans ta perfection première. »
17. La pire fainéantise, c’est désespérer de Dieu et de soi-même.
17’. Prospectons notre cœur et nous serons éclairés par notre propre lumière.
18. Nous aurons beau croire, beau voir et même toucher, si nous ne possédons pas la Mère éternelle et le Père divin, nous n’atteindrons jamais le Fils saint.
18’. La vertu du lion maîtrisé l’emporte sur la douceur naturelle de l’agneau, et ces deux réunis engendrent la perfection du Seigneur ultime.
19. L’aimantation de l’amour se communique à ceux qui sont assez purs pour lui livrer passage. Ainsi d’aimantés, ils deviennent aimants à leur tour, et la chaîne de la réintégration qui se forme dans le monde se fond en Dieu.
19’. Notre curiosité du Seigneur est une grâce ignorée, mais notre amour pour lui est une bénédiction confirmée. La porte et la clé. « Ô sainte lumière qui brille dans la grotte mystérieuse d’Adam ! »
20. L’aventure extraordinaire n’est pas d’accomplir des actions périlleuses dans des pays étranges. C’est plutôt rechercher la Mère et le Père divins cachés derrière la banalité apparente des choses de ce monde.
20’. Il y a peu de croyants dans le monde qui sont réellement dégoûtés par la lèpre qui les couvre et qui les empoisonne toujours plus. Tout ce qu’on pensera et tout ce qu’on dira d’eux n’ajoutera et ne retranchera rien à ce qu’ils sont réellement.
21. Quand le monde jugera notre patience comme une stupidité, notre foi comme une idiotie et notre amour comme une folie, nous serons proches de la perfection.
21’. Notre révolte contre le monde correspond à la condamnation de notre propre égarement, mais peu savent cela.
22. Nous apprendrons que nous sommes prêts pour la quête divine quand nous serons las de nous fuir, las de nous passionner, las de nous mentir, las de nous égarer, las de nous révolter, las de nous distraire, de nous agiter et de nous disperser dans le monde. Alors nous ne considérerons plus la place que nous occupons ici-bas, mais plutôt le vide ou la plénitude de nos cœurs, qui importe seulement. Alors la foi sera en nous comme la surabondance des puissances de la vie divine qui déborde nos limites étroites sous la poussée irrésistible de l’amour.
22’. Bâtis ta maison, cultive ton jardin, tisse ton vêtement, couds ta chaussure, coupe ton bois, fais ton pain, enterre le mort, arrose la terre, accouche la femme, élève l’enfant. Mets la main une fois à cela et médite le commencement et la fin du monde moyen, afin de connaître le début du monde inférieur qui s’unit à la perfection du monde supérieur. Ainsi tu te souviendras d’où tu viens, tu comprendras où tu es et tu sauras où tu vas, et la délivrance de la paix habitera en toi pour toujours.
23. Peu d’hommes se rendent dignes du don de Dieu qui est la liberté de l’être dans la vie éternelle ; c’est pourquoi tant de créatures se débattent ou languissent dans les entraves de la mort. Faisons donc de notre vie une perpétuelle action de grâce, et sachons que tout ce que nous imaginons et que nous nommons avec foi et amour, est réalisé dans le ciel et sera bientôt manifesté sur la terre.
23’. Il faut nécessairement que les malins, les orgueilleux et les violents expérimentent l’absurdité de leurs systèmes. Malheureusement, cela se fait d’abord sur le dos des innocents avant de se retourner contre eux. Cessons donc d’être si intelligents dans le monde afin de devenir toujours plus simples en Dieu. « La pire tromperie, c’est avoir les mains propres et le cœur sale. »
24. Chacun de nous doit supporter jusqu’au bout sans récriminer la charge qu’il a choisie en s’enfonçant dans les ténèbres du dehors. Car c’est la germination solitaire qui trie le bon grain et qui prépare la moisson fructueuse.
24’. Quand nous nous sentons tentés au-delà de nos forces, ou de notre intelligence, ou de notre amour, prions en nous-mêmes pour que le révolté se soumette et revienne à Dieu comme un fils prodigue recueilli et introduit par l’amour maternel.
25. En haïssant et en condamnant ceux qui sont égarés, nous les enfonçons dans l’erreur. En les aimant sans les juger, nous les aidons à sortir du chaos de la mort.
25’. Exerçons-nous à pratiquer les vertus opposées aux vices qui nous répugnent tant chez les autres. Ainsi le mal visible servira à nous ramener au bien caché.
26. Même ceux qui savent qu’on flotte sur la mer sans bouger, n’osent pas se lancer nus en Dieu.
26’. Briser premièrement les barrières du dedans afin de devenir un en soi, et secondement briser celles du dehors afin d’être fait un dans la totalité de l’Être.
27. Agissons gratuitement le plus souvent possible afin de ne pas nous laisser prendre aux pièges de l’apparence des nombres et des comptes.
27’. Essayons d’acquérir le détachement des formes temporelles afin d’atteindre la connaissance du dedans, qui nous fera jouir pleinement de la vie cachée.
28. La crasse extrinsèque et la substance intrinsèque de l’Univers sont incréées, infinies et contiennent celui qui ne peut être nommé que par le silence. Mais les formes émanées du centre secret sont créées, finies et temporelles dans le monde mixte.
28’. Toutes les vagues de la création passent et s’effacent, mais la mer du grand monde et celui qui l’anime subsistent éternellement. « Le comble du repos aboutit à l’acte créateur, le comble du mouvement mène au repos régénérateur. »
29. Ne nous émouvons de rien, mais soyons attentifs à tout ce qui survient au monde et à nous-mêmes, afin d’apprendre à distinguer la réalité divine des apparences de la création mélangée.
29’. Prions Dieu en nous-mêmes afin de reconnaître le moyen qui permet de découvrir la substance cachée sous la croûte de la terre étrangère.
30. Si nous ne rencontrons pas le maître, devenons le maître en libérant notre Dieu au-dedans et au-dehors de nous-mêmes.
30’. Conversons uniquement avec notre âme, elle nous apprendra tout ce que nous désirons connaître.
31. Le saint amour se rit des systèmes, des méthodes, des logiques, des complications, et même de la mort ; car il enjambe du même pas folie et raison, ténèbres et lumière pour se fixer dans la paix de l’Unique.
31’. L’aimée se soumet au désir de l’amant, et l’amant accomplit le désir de l’aimée. Ainsi manifestent-ils l’unité de l’amour parfait.
32. N’accusons personne des difficultés qui surviennent, ne serait-ce que pour ne pas les augmenter inutilement. Demeurons le plus possible dans le repos et dans le silence de Dieu jusqu’à ne faire qu’un avec l’Un ; ainsi nous commanderons aisément aux êtres et aux choses du monde total sans rien violenter. Le sage et le saint sont seuls véritablement dégoûtés par la crasse de l’immonde ; le premier la sépare et la rejette ici-bas, le second patiente avec elle jusqu’au temps du jugement général.
32’. Notre lumière se sépare elle-même des ténèbres qui l’emprisonnent. Il suffit que nous n’y mettions pas obstacle par notre agitation dans le monde et par notre volonté particulière, qui s’opposent à la décantation secrète du chaos de l’abîme ; car la sagesse est comme notre union intime avec l’essence et avec la substance premières, qui forment le support indestructible de la création changeante. « Il y a une chair sur le noyau, mais il y a une chair bien plus précieuse dans le noyau, et dans cette chair précieuse il y a aussi un autre noyau très secret et très saint. »
33. Quand nous saurons demeurer absents de nous-mêmes au point que Dieu puisse nous emplir entièrement, tout nous sera possible sans effort et sans peine.
33’. Quand nous aurons pacifié et clarifié le dedans, le dehors nous obéira de même et nous paraîtra aussi lucide.
34. Considérons en nous-mêmes et en chacun des êtres l’image ensevelie du Seigneur afin d’aimer tout selon la réalité de la vie, au lieu de haïr selon les apparences de la mort.
34’. Par leur louange intime, les saints produisent une harmonie qui réjouit toute la création, mais par leur opération secrète, les sages concourent à la réintégration de l’Univers en Dieu.
35. Mille petites simplifications sur mille petits ennuis font une vie toute remplie de lumière.
35’. L’amour envers tous les êtres engendre la clairvoyance et la paix pour soi-même.
36. La véritable perspicacité, c’est déceler Dieu sous son vêtement de lumière après avoir découvert la vie sous son enveloppe de ténèbres.
36’. Quand nous croirons l’avoir vu, nous n’aurons aperçu que l’ombre de son habit, et quand nous penserons l’avoir touché, nous n’aurons effleuré que la poussière de ses pas.
37. Nous obtiendrons du Seigneur tout ce que nous lui demanderons. Faisons donc bien attention à ce que nous choisissons afin de ne pas demeurer ridiculement au-dessous du don de Dieu.
37’. Celui qui pénètre la connaissance risque la mort, la folie ou l’aveuglement, mais s’il ressort indemne protégé par l’amour, Dieu l’établit dans son éternité et dans sa royauté.
38. L’ignorance est comme la force au-dehors et comme la faiblesse au-dedans. La sainteté est comme la faiblesse au-dehors et comme la force au-dedans. La sagesse est comme la force au-dedans et au-dehors, et quelquefois aussi comme la faiblesse au-dehors et au-dedans ; c’est-à-dire comme Dieu dans la sainte ignorance de l’amour, qui se garde ou qui se perd à son gré. « Ô mystère du choix et du don de l’Unique ! »
38’. Celui qui lira jusqu’au bout le Livre des contraires et qui saura les unir dans le NOM unique, double, quadruple et octuple, paraîtra sage aux sages, saint aux saints et fou aux fous. Ainsi beaucoup ont discouru magnifiquement sur Dieu, sur ses attributs et sur sa création, mais combien ont entrevu le bout de sa robe et combien ont baisé la trace de ses pas ? Mais combien donc alors ont contemplé la splendeur de son corps, et combien, ô stupeur, ont goûté les délices de son cœur ?
39. Quand nous verrons notre ennemi abattu et demandant du secours, précipitons-nous pour l’aider ; car c’est l’occasion unique qui s’offre à nous pour en faire un ami. En attendant, prions en nous-mêmes pour sa conversion, ainsi il nous laissera vite en paix.
39’. La malédiction de Dieu est comme l’ignorance ou comme le renvoi de sa bénédiction. Ainsi ce n’est jamais lui qui condamne, mais c’est nous qui demeurons stupidement et orgueilleusement ensevelis dans la solitude de la mort.
40. Quand nous aurons tout séparé, tout classé, tout étiqueté et tout empaillé, il nous faudra finalement tout réunir et tout unifier dans la vie, sous peine de rester scellés dans la lettre et dans le nombre de la mort.
40’. Celui qui peut joindre à la pénétration de l’esprit l’élan du cœur et la pureté de la vie, ne connaîtra ni le doute, ni le désespoir, ni la mort ; car Dieu l’abreuvera à la source des vivants.
41. Dans ce monde tout n’est que vêtements qui nous isolent et possessions qui nous enchaînent. C’est pour cela qu’il nous faut devenir nus et pauvres, afin de pénétrer sans obstacles dans le sein de la Mère éternelle, où repose le vivant secret de l’Unique.
41’. Nous possédons tous la même lumière, mais elle est plus ou moins voilée et ralentie selon l’épaisseur des écorces ténébreuses qui nous séparent de l’aimant premier. Mais la vie incarnée décante et éclaire l’homme attentif et reposé.
42. L’amour le plus direct et le plus dénudé donne la paix. La nourriture la plus simple et la mieux préparée donne la santé. La connaissance la plus humble et la plus unifiée donne la richesse.
42’. Abstenons-nous de rêver le monde dans le monde et par le monde si nous voulons palper la vérité de l’Unique. « Il n’y a pas de vide universel. Il n’y a qu’un plein total, mais c’est un plein translucide qui fait croire au vide. »
43. Si chacun se simplifiait sans attendre que le voisin commence, toute l’humanité serait vite resplendissante de beauté et de sainteté.
43’. Méditer, c’est cuire doucement le corps et l’esprit jusqu’à la glorification de l’âme.
44. Celui qui s’ouvre entièrement à l’amour n’est plus sujet à l’enseignement de l’absurde.
44’. Ceux qui savent séparer mais qui n’ont pas appris à conjoindre, ne reposeront jamais dans l’unité de l’essence cachée.
45. Toutes les choses créées servent de véhicules pour remonter à la source ou pour s’en éloigner. Abandonnons-les de bonne grâce à chaque étape du voyage divin.
45’. C’est seulement dans la solitude, au milieu du malheur et à l’heure de la mort, que nous mesurerons l’assurance de notre foi et la pureté de notre amour en Dieu.
46. L’intelligence des nourritures corporelles et celle des nourritures spirituelles, c’est non seulement bien choisir ce qui nous convient, mais c’est aussi rejeter ce qui ne nous convient pas, afin de conserver uniquement en nous ce baume qui entretient et qui perfectionne le corps et l’esprit, jusqu’à la glorification de l’âme dans le Seigneur merveilleux.
46’. C’est la douce et longue méditation qui rend toutes choses fixes et parfaites, car elle sépare au commencement pour mieux conjoindre à la fin. C’est donc en devenant simples et nus que nous verrons Un en tout, et Tout en Un. La bonne volonté en Dieu utilise au mieux tout ce qui se présente, mais ne désire rien. Elle est comme l’attention très soutenue au milieu de la quiétude la plus parfaite.
46’’. « Les élus monteront habiter le soleil de vie. Les réprouvés descendront habiter la pierre morte. » Ceci n’est pas une fable.
47. La paix du sage est comme l’unification des trois mondes ; c’est une réintégration particulière de la création, c’est le repos des formes dans le centre de l’essence pacifiée, et non pas leur destruction.
47’. Si nous sommes dérangés par le monde, c’est parce que nous ne sommes plus en Dieu. Rien ne saurait en effet brimer celui qui baigne dans la lumière du commencement et de la fin des temps.
48. Ceux qui par l’amour et par la connaissance enseignent la voie du retour à l’Unique, sont sages parmi les saints, mais ceux qui pénètrent le secret du Seigneur par le silence de l’adoration, sont saints parmi les sages. Ainsi les biens de la terre par les affaires terrestres, les biens du ciel par le commerce céleste, mais Dieu par Dieu seulement.
48’. Les mots du Livre ne sont rien, c’est la lumière palpable de l’Unique qui est tout. Quand nous la posséderons dans notre tête, dans notre cœur et dans nos mains, nous n’aurons plus besoin ni de l’enseignement, ni de la consolation, ni du travail, ni des soins de quiconque, car c’est le Seigneur en personne qui sera en nous et qui nous fera vivre en lui.
49. Il y a l’Être, il y a l’acte, il y a le repos, et il y a tous ceux qui essaient d’expliquer l’un ou l’autre parce qu’ils ne sont pas en cette unité qui se suffit à elle-même.
49’. C’est le verbe qui diversifie la substance première, et c’est le silence qui l’unifie à nouveau. Ainsi l’art qui donne la forme à la matière est une noble fonction de l’homme parce qu’elle le rapproche de son créateur.
50. Dans la création, tout n’est que prêts et que restitutions. Ainsi après avoir remis nos corps à la terre et nos esprits au ciel, il nous faudra finalement remettre aussi nos âmes à Dieu, qui réunira tout pour la pureté ou pour l’immondice, au jour du jugement.
50’. C’est Dieu qui crée et qui anime les formes, et c’est la nature qui les entretient et qui les multiplie jusqu’au temps du retour à leur source initiale.
51. Tous les mystères sont contenus dans la sueur de la terre et dans la rosée du ciel.
51’. L’oiseau divin fait son nid dans la poussière de la terre des hommes.
52. Seul le sage ne se déguise ni au-dehors, ni au-dedans, car il sait que le manteau de l’ombre protège naturellement la lumière du Seigneur.
52’. La naissance du monde est comme l’expansion de l’Unique. La fin de la création sera comme le repos de l’UN.
53. C’est le feu divin qui manifeste la lumière sainte et c’est lui qui propulse les formes dans la vie ; et quand quelque chose s’égare dans la mort, c’est encore lui qui l’en délivre.
53’. Les œuvres des hommes sont devenues une tentation formidable pour ceux qui ne s’aperçoivent pas qu’elles ne recèlent que la mort.
54. Chaque prêtre, chaque chef, chaque juge, chaque législateur doivent expérimenter la condition humaine des plus humbles pour connaître les besoins de chacun, afin de maintenir vivants l’amour, la justice et la paix parmi les enfants des hommes.
54’. Au commencement, notre curiosité indiscrète nous a coûté la liberté du ciel ; à présent, notre science extérieure pourrait bien nous ôter ce qui nous reste de vie dans ce monde. « Le Seigneur réserve ses dons les plus grands pour ceux de ses enfants qui subissent les revers du monde en riant. »
55. La folie de la sagesse et de la sainteté, c’est ne plus prendre au sérieux les mirages du monde ; c’est accepter les crachats et dire merci parce qu’ils lavent, et recevoir les coups avec reconnaissance parce qu’ils ouvrent ; c’est avoir le respect de la boue et clouter ses sandales avec l’or ; c’est sourire de l’absurde et apprendre aux autres à en pleurer. C’est pressentir au-delà de toute raison la liberté parfaite et le repos absolu dans le sein lumineux de l’Unique.
55’. Supporter les injustices, les injures et les brimades personnelles n’empêche pas de relever celles faites aux faibles et aux saints. « Le tentateur et le tenté se réuniront un jour dans le tentant, comme l’amant et l’aimée subsisteront finalement dans l’Amen. » « Nous n’entendons que l’écho de ta voix, nous n’apercevons que le reflet de ta clarté, et nous voilà tout abasourdis, tout aveuglés et sans force devant ta grandeur. »
56. C’est notre Dieu qu’il faut libérer au-dedans, et non pas celui des autres qu’il faut prier au-dehors. « Le centre du centre. »
56’. Apprenons à bien faire avec notre cœur, ensuite avec notre esprit, enfin avec nos mains ; et demeurons silencieux et en repos jusqu’au temps de l’union.
57. Remercions et louons Dieu en toutes circonstances, ainsi il nous délivrera des maux de l’immonde et il nous comblera des biens célestes et terrestres. La chose est certaine.
57’. Quand quelque chose nous contrarie ici-bas, recherchons si notre désir est encore en Dieu. Ainsi nous reprendrons la bonne route au lieu de nous débattre inutilement dans les marécages de la mort.
58. Il ne faut jamais perdre de vue la pérennité de l’essence de la création, afin de ne pas être égaré par les formes montantes et descendantes du monde transitoire.
58’. Celui qui pacifiera et qui décantera la mer intérieure, reposera pour toujours dans la paix de la lumière du Seigneur. « En corrigeant l’aigreur des humeurs, on corrige aussi l’aigreur de l’esprit. »
59. C’est la vie mélangée au non- être du dehors qui est souffrance, car la substance pure des commencements demeure jouissance éternelle en soi.
59’. Ce qui n’est pas est ce qui ne peut se transformer en soi-même, par soi-même, pour soi-même. Néant, ténèbres et mort extérieure.
60. Le plus infime abandon de notre volonté particulière est comme le premier gage de notre couronnement céleste.
60’. Ne nous agitons au sujet de rien, car la mort même ne saurait plus alors nous calmer.
Celui qui tombera sur cette pierre sera brisé, et celui sur qui elle tombera, elle l’écrasera.
Tous suivent leur propre chemin, chacun selon son profit, du premier jusqu’au dernier.
⟴LIVRE XIV
Né avec un corps composé, vous êtes soumis à la loi de la dissolution.
La dissolution est inhérente à toutes les formations ; travaillez sans relâche à votre délivrance.
ENIVRE TUE
LA PRÉSENCE
1. Quand nous serons instruits par le Seigneur, notre crasse nous fera horreur et celle des autres nous causera de l’épouvante. Alors nous prierons pour que notre tache soit effacée et pour que le fardeau de tous soit allégé.
1’. Quand nous connaîtrons que nous sommes aveugles, sourds et stupides, la crainte de Dieu ne sera plus pour nous une énigme. Et quand nous verrons sa lumière, l’amour du Seigneur nous illuminera et nous vivifiera pour toujours.
2. Nous observerons les commandements de Dieu et nous réjouirons par nos dons secrets le cœur des pauvres et des malheureux.
2’. « Le grain semé meurt et renaît à la vie, mais nul ne s’étonne et personne n’admire le miracle de Dieu. »
3. « Ne jamais désespérer de Dieu et de soi », telle est la loi du salut. Nous devons donc persévérer, faire confiance au Seigneur et agir selon sa loi, car c’est l’acte de foi du semeur et l’acte d’amour du ciel et de la terre qui nous sauvent de la mort. Mais combien pénétreront ce mystère, et combien l’accompliront avant l’heure du jugement ?
3’. Le Livre est de Dieu et il retournera à Dieu, et nous, qui sommes de la terre, nous retournerons aussi à la terre, et nul ne pourra rejoindre le Seigneur sans avoir été lavé par sa bénédiction et sans avoir été réanimé par son Esprit Saint, car c’est là le jugement tant espéré par les uns et tant redouté par les autres.
4. C’est par la lecture et par la méditation des livres saints que nous entretenons et que nous développons en nous le feu sacré du Seigneur.
4’. Celui qui lit le Livre aux siens réveille la vie dans leurs cœurs et les fait germer devant Dieu. Rien n’en sera perdu, car les croyants seront confirmés et les railleurs seront éprouvés.
5. Qui se chargera du Livre et qui le présentera aux croyants ? La bénédiction de Dieu coule sur ceux-là. « Nous chercherons au-dehors, puis nous chercherons au-dedans. »
5’. Ce n’est pas un devoir d’aller à Dieu, c’est le plus grand des plaisirs. « Nous manifesterons au-dehors, mais nous garderons au-dedans. »
6. La persévérance dans la pratique des lois divines et naturelles procure l’immunité et mène à la liberté de la vie pure et sainte.
6’. Le Seigneur enverra ses ondées sur la semence qu’il a cachée en terre. Il la fera germer certainement.
7. Faire la queue aux spectacles de la folie, croupir devant les guichets de la famine, se bousculer aux portillons de la mort, s’épuiser au service des machines, végéter dans des trous sans lumière et sans air, écouter, lire, respirer, boire et manger la mort, voilà ce que les hommes appellent à présent « vivre librement ».
7’. Plus l’homme s’éloigne de Dieu, plus il lui faut travailler et craindre, entasser et manquer, souffrir et douter, s’agiter et se détruire. Insensé qui prétend vivre sans l’aide du Seigneur, il perd son eau comme un os qui se dessèche, et nulle main d’homme ne le délivrera du désert et de l’ombre de la mort où il agonise.
8. Le Seigneur a ensemencé et nous avons produit le Livre pour tous les hommes de dessus la terre, pour tous ceux qui sont et pour tous ceux qui viennent, de toutes races et de toutes nations. Pour tous ceux qui ont de l’intelligence et qui ont mis leur foi dans la toute-puissance de Dieu.
8’. La sagesse de Dieu est voilée par une obscurité et par un chaos sans nom, mais elle brille quelquefois comme une lumière très pure. La sagesse de l’homme est comme un crépuscule et comme une aurore qui gravite entre ces deux pôles.
9. Et nous n’avons réclamé de salaire à quiconque ici-bas, car le don du vivant d’éternité sera notre lot prodigieux et réel.
9’. Souvenons-nous que le culte des saints ancêtres complète le culte de Dieu, qui est le vivant d’éternité. « Adorons le soleil de vie et ne méprisons pas les cendres des ancêtres. »
10. Dieu est véritablement magnanime, car il nous délivre de la mort. Il est véritablement patient, car il attend que nous revenions à lui.
10’. Quand nous pourrons subir les abandons, les trahisons, les reproches, les moqueries, les injures, les coups et la mort sans murmurer, nous serons proches de Dieu et de son salut.
11. Laissons donc là amour-propre, intelligence, raison et volonté particulière, pour aller vers le Seigneur comme l’enfant retourne à sa mère quand il est las de jouer avec l’eau fangeuse du ruisseau.
11’. Limitons nos soins au maintien de la vie incarnée et nous disposerons du temps nécessaire à la quête du Parfait.
12. Pouvons-nous lire le Livre et ne pas louer Dieu dans notre cœur lorsqu’il nous inonde de lumière ? Pouvons-nous recevoir la parole inouïe et ne pas bénir le Seigneur qui nous offre la vérité qui affranchit ? Pouvons-nous entrevoir la délivrance de la mort et ne pas pleurer de joie ?
12’. Nous aimanterons en nous la lumière du Parfait pour la sauvegarde et pour le renouvellement de toute la création. Qui peut vérifier cette chose à présent ? Qui peut éprouver la vérité du Livre ici-bas ? Qui peut tenir dans sa main le poids de la hauteur ?
13. Dirons-nous aux fils d’un même Père et d’une même Mère que l’un est légitime et que l’autre est bâtard ? Ou que l’un est blanc et que l’autre est noir ? Ou bien que celui qui garde le patrimoine est plus estimable que celui qui recouvre les créances anciennes ?
13’. Ne voyons-nous pas que c’est la lumière qui éclaire les hommes et le monde, et que les astres ne sont que les instruments de sa manifestation ? — Quand la torche s’éteint, il ne demeure qu’un tison de bois mort.
14. Redoutons le moment de confusion où le Père, la Mère et le Fils ne ratifieront pas nos jugements aveugles, l’instant stupéfiant où nous ne verrons qu’un Dieu là où nous aurons cru discerner la pluralité, le temps cruel où celui que nous aurons méconnu et rejeté ne nous reconnaîtra pas et nous rejettera à son tour.
14’. Confondrons-nous encore longtemps l’outil avec l’ouvrier ? Et rendrons-nous un culte profane aux propagateurs de l’Unique ? — Lui seul a droit à notre hommage et à notre don. — Ses fils qui lui ont tout remis le savent bien. Ils le proclament hautement depuis le commencement, et nul parmi eux ne s’est fait passer pour Dieu.
15. Il y a eu le Livre des sacrifices et des rites, le Livre des morts et de l’attente, le Livre de la voie et de l’eau, le Livre du feu et de la purification.
15’. Avons-nous des oreilles pour entendre la parole ? Avons-nous des mains pour purifier la terre ? Avons-nous des yeux pour voir la lumière ?
16. Il y a eu le Livre de la révélation et du commencement, les Livres de la loi et de la justice, les Livres de la grâce et de l’amour, le Livre du jugement et de la fin, le Livre de l’ensemencement et du renouvellement.
16’. Avons-nous des narines pour humer le parfum ? Avons-nous un palais pour goûter le nectar ? Avons-nous une bouche pour baiser la pierre sainte ?
17. Il y a eu le Livre de la foi et de la résurrection, le Livre du secret et de la connaissance, le Livre de l’obéissance et de l’imitation.
17’. Avons-nous une langue pour louer Dieu ? Avons-nous un corps à purifier ? Avons-nous un esprit à simplifier ? Avons-nous une âme à incarner ?
18. Dieu nous envoie à présent le Livre de la science et de l’union et le suivant qui est le Livre de l’accomplissement et de la multiplication.
18’. Avons-nous un tout à glorifier ? Avons-nous une intelligence pour manifester la fleur et le fruit ?
19. Mais dans chacun d’eux, les autres sont déjà contenus en entier, et ce que l’un dit en secret l’autre le proclame devant tous.
19’. Avons-nous un amour pour les multiplier ? Avons-nous une sagesse pour les recueillir et pour les faire servir à la gloire du Tout-Puissant ?
20. Si nous demeurons tellement sourds et aveugles pour le bien, efforçons-nous d’être également muets et inertes pour le mal.
20’. Celui qui jure par un livre saint et qui rejette les autres écrits des prophètes, nie les membres de l’Unique.
21. Et si nous sommes si stupides devant la création de Dieu, n’expliquons pas aux autres la parole que nous ne comprenons pas.
21’. Il est préférable d’arriver entier jusqu’à Dieu plutôt que d’y parvenir en morceaux. Cependant, il vaut mieux y arriver en pièces que pas du tout.
22. Examinons le bien et le mal qui arrivent aux autres et à nous-mêmes, et louons le Seigneur pour la façon magistrale dont il enseigne les aveugles et les clairvoyants.
22’. Efforçons-nous d’être comme Dieu qui unit en lui avec fruit les contraires de même nature. « Les sages et les saints de Dieu bénissent le Livre qui confirme et qui honore leur parole inspirée. »
23. Les vagues de la mer n’ont pas d’existence particulière permanente, cependant la mer existe bien dans ses parties et dans son ensemble.
23’. L’Absolu est inconnaissable dans sa totalité, mais il peut être approché dans ses parties qui sont comme des images du tout.
24. Travaillons pour entretenir notre vie, n’œuvrons jamais pour amasser des richesses.
24’. Soyons satisfaits de ce que nous possédons, et pensons que c’est encore beaucoup de superflu.
25. Soyons intelligents pour tout ce qui concerne l’amour et le bien, mais devenons idiots pour tout ce qui se rapporte à la haine et au mal.
25’. Les gens qui vantent leur pureté sont mille fois plus pourris que les pécheurs qu’ils dénigrent habituellement.
26. Fuyons l’illusion du passé et celle de l’avenir en nous établissant dans la présence divine, qui est comme l’actualité de l’éternité.
26’. Si tu cherches le monde, cours après lui ; mais si tu désires Dieu, attends qu’il vienne à toi.
27. Ce qui fait enrager le plus les cuistres, c’est de ne pouvoir intégrer les sages et les saints dans leur plate raison de médiocres incurables. « L’obscurité de la plénitude n’est pas l’obscurité du vide, car la lumière habite la première, et les ténèbres peuplent la seconde. »
27’. Les fils de Dieu fraternisent dans le centre de l’« Unique Merveille », car leurs enseignements sont Un pour ceux qui pénètrent saintement la parole divine, au lieu de l’examiner curieusement du dehors.
28. On ne sert pas Dieu en contraignant les hommes, en torturant les bêtes et en forçant la nature ; mais plutôt en aimant l’Être incréé à travers tous les êtres créés et en accomplissant son œuvre cachée.
28’. Les sages n’inventent rien, ils remettent seulement les hommes dans la voie de la lumière et de l’amour qui aboutit à Dieu. « Qui purifiera son corps ? » « Qui simplifiera son esprit ? » « Qui incarnera son âme ? »
29. Les puissants et les riches s’opposent généralement aux sages et aux saints parce que ces derniers exigent la liberté pour tous les hommes et la générosité envers tous les êtres. « Il nous appartient uniquement de labourer, car c’est le Seigneur qui fait germer et qui mûrit la semence sainte. »
29’. Il n’y a qu’un crime devant Dieu : être médiocre et ne rien aimer librement, pas même soi. Il n’y a aussi qu’un péché : le manque de vie pure, odorante et lumineuse en nous. Et il n’y a qu’une sanction : la mort puante et ténébreuse qui nous enserre de toutes parts.
30. Pratiquons notre propre règle et ne nous occupons pas de celle du voisin, si ce n’est pour emprunter ce qui nous semble utile à l’obtention et à la conservation de la paix en Dieu.
30’. C’est l’agitation dans le monde qui fait l’enfer temporel, et c’est le repos en Dieu qui fait le ciel d’éternité. « Qui nous donnera le pain de la terre et du ciel ? Qui nous donnera le vin de l’eau et du feu ? Qui nous donnera le sang du vivant d’éternité ? »
31. Le véritable sage est celui qui voit les deux faces de Dieu et qui contemple ce qui est caché au-dedans. Car c’est dans l’union des contraires que paraît la vérité de l’Unique.
31’. Le secret des sages, c’est Dieu et sa lumière placés à la portée du cœur et de la main de l’homme sanctifié par l’amour.
32. Les hommes soumis à la vie d’exil, à la faim, au froid, à la douleur, à la maladie, à la décrépitude, au doute, à l’apparence, à la solitude, au désespoir et à la mort, doivent s’entraider pour vivre et espérer, sans oublier toutefois de chercher la voie de la pureté divine qui mène là où rien ne fait défaut à personne.
32’. Ceux qui ne disposent pas du conseil secret de Dieu et qui ne puisent pas directement dans sa Providence cachée, sont obligés de recourir à l’opinion et à la science des hommes pour se gouverner, pour s’entretenir et pour se guérir ici-bas. Mais là n’est pas la vérité du Seigneur.
33. Accomplissons ce qui est nécessaire pour entretenir nos vies terrestres, mais quand nous devons mourir, offrons-nous joyeusement et saintement à Dieu qui accueille, qui pardonne, qui console et qui rénove au-delà de toute limite.
33’. Nous ne sommes réellement frères qu’en Dieu, car c’est le seul lieu où il n’y a ni séparation, ni obscurité, ni mort. Aussi la révélation des fils de Dieu ne se fait entendre clairement qu’aux cœurs épurés par l’amour.
34. Ceux qui, recevant le Livre, ne le lisent pas et ceux qui, l’ayant lu, ne répondent pas dans leur cœur, se proclament satisfaits dans la mort puante de l’immonde. Ils se jugent eux-mêmes et leurs plaintes ultérieures ne seront pas reçues.
34’. L’amour, qui est la nourriture de l’âme, n’a pas besoin d’être digéré comme la grâce et comme le manger, qui sont les nourritures de l’esprit et du corps, car il est déjà comme le feu divin : accompli et parfait.
35. Les sages qui connaissent le dedans des êtres et des choses, sont touchés par la disparition de ceux qui leur sont chers. Comment les hommes ordinaires qui ne connaissent que le dehors du monde, n’en seraient-ils pas cruellement déchirés ?
35’. Le mal a pris corps par l’égarement de l’homme, et une partie de la création s’est perdue avec lui. Le mal cessera par le retour de l’homme à sa source, et celui-ci aimantera à nouveau le monde jusqu’à la pureté du vivant d’éternité.
36. Gloire au Père qui l’engendre mystérieusement. Louange à la Mère qui le manifeste clairement. Amour au Fils qui s’offre à tous. Reconnaissance aux sages qui le recueillent, qui l’élèvent et qui l’abaissent pour le salut du monde, dans la terre des vivants.
36’. Le soleil de Dieu rassemblera les lumières égarées dans la mort, et la vie concentrée manifestera la gloire de l’Unique, pour la communion mystérieuse des sages et des saints, dans le corps, dans le sang et dans l’esprit unis du Très-Parfait.
37. Nous demanderons premièrement à vivre afin d’apprendre à louer Dieu. Ensuite nous demanderons à mourir pour mieux nous taire en lui.
37’. Quand on nous offrirait le ciel et la terre et toute la création intermédiaire, nous demanderions toujours LUI, LUI, LUI, parce qu’il est la semence sans laquelle rien ne serait.
38. Le divin don de liberté veut que l’homme égaré dans la mort ne puisse rejoindre la source vivante et pure que par cet autre don divin que constitue l’aimantation réciproque de l’amour.
38’. Les fils de Dieu possèdent l’Unique et sont possédés par lui dès ce monde. Ainsi l’amour secret réalise pour quelques élus le don total de l’UN à l’Un en l’Un, avant la séparation et avant le jugement universels.
39. Quand nous mettrons en balance les œuvres de toute notre vie avec les minutes qui précèdent la mort, nous serons terrifiés par la légèreté des premières, comparées au poids des secondes.
39’. C’est dans la privation seulement que nous mesurerons notre amour pour Dieu, car dans l’abondance nous ne saurions que louer le sien envers nous.
40. En nous considérant comme responsables de toutes les difficultés et de tous les maux qui nous briment dans ce monde, nous serons délivrés du souci de les attribuer aux autres, et en les supportant patiemment nous en serons bientôt délivrés, si nous n’abandonnons pas le Seigneur des âmes.
40’. Le silence et le jeûne absorbent efficacement les stimuli de l’impatience et de la colère, comme l’amour de Dieu et l’oubli de soi étouffent les semences de la cupidité et de l’orgueil. « La vie éternelle est comme la fixité du feu de la conscience parmi les créations mouvantes de l’eau mère. »
41. Celui qui a tout remis à Dieu y compris lui-même, n’éprouve plus la tentation de rien violenter pour affirmer un isolement auquel il a définitivement renoncé. « Par sa vision dénudée et par son détachement inhumain, le saint est un objet de scandale pour ceux qui demeurent soumis aux apparences et livrés aux attaches de ce monde. »
41’. C’est par l’étude assidue des livres sacrés que la grâce et que l’amour du Seigneur sont éveillés en nous, et c’est par la pratique des œuvres saintes qu’ils sont manifestés dans le monde ; aussi nous ne pouvons légitimement être fiers ici-bas que de notre bonne volonté envers tout et tous.
42. Quand nous serons las de le pourchasser avec notre raison, il faudra bien que nous nous décidions à l’attirer par la folie de notre amour, sous peine de nous éteindre pour toujours dans la cendre et dans l’eau mortes.
42’. Où sont les fils bien-aimés toujours repoussés par les hommes et toujours attirés par l’amour ? Là où l’absurde de la raison va engendrer la raison de l’absurde. Là où l’antique souche va refleurir et donner son fruit doré.
43. La grande douleur du saint ici-bas, c’est de se heurter à l’aveuglement stupide des impies aussi souvent qu’au sectarisme vaniteux des croyants.
43’. L’amour de Dieu ne saurait justifier aucune violence envers soi-même ou envers les autres créatures. « Il ne s’agit pas de refouler les passions, ce qui provoque des accidents funestes ; il faut plutôt leur ôter l’occasion de naître. »
44. Les médiocres ensevelissent Dieu au plus profond de leur mort ; c’est pour cela qu’ils haïssent tant la liberté de la vie qui manifeste l’esprit du Seigneur, et qu’ils étiquettent la lettre de toutes les Écritures saintes, croyant clouer les prophètes comme ils fixent des insectes dans leurs collections de poussières éventées.
44’. Ils tentent vainement de se rassurer dans leur nuit, mais la pourriture de la confusion et la sécheresse de la mort sont leur héritage assuré. « Le saint possède seul la conscience exacte de son égarement et de sa responsabilité anciens et présents. C’est pour cela qu’il pleure et qu’il quête tous les jours de sa vie, la lumière perdue par l’ancien. »
45. Que celui qui ne voit et qui n’entend rien dans le Livre, regarde et écoute dans le monde ; et s’il ne voit et n’entend rien dans le monde, qu’il regarde et qu’il écoute en lui-même ; et s’il ne voit et n’entend rien en lui-même, qu’il se couche dans la mort ; mais surtout qu’il se taise afin de n’entraîner personne dans sa solitude aveugle et sourde.
45’. La tristesse vient du regret inconscient de la vie libre en Dieu. L’amour naît par l’approche de la source aimée. La connaissance paraît par l’union avec l’Impassible. « Nous recevons tous le même amour, mais nous ne le reconnaissons pas tous de la même façon ni au même moment. »
46. Ceux qui louent Dieu dans le secret de leurs cœurs sont seuls admis dans la création intérieure ; tous les autres sont des parasites qu’il tolère sur sa peau par l’effet de sa miséricorde infinie.
46’. Celui qui est éclairé s’intitule « fainéant, idiot et inutile », car c’est sa seule justification devant « le Paisible, le Saint et le Gratuit ».
47. Nous ne sommes grands ni par les dons reçus ni par les privations endurées, mais seulement par leur dépassement en Dieu.
47’. Ô mon Seigneur secret, tout mon progrès en toi c’est toi-même qui l’accomplis en moi, et ma nudité demeure mon seul ornement devant ta splendeur.
48. L’ignorant juge tout inconsidérément parce qu’il ne perçoit que l’écorce des choses qui le maintient dans le chaos apparent de l’absurde. L’homme éveillé ne condamne rien ni personne mais il recherche le bien qui est en chaque créature et l’exalte jusqu’au repos du Seigneur.
48’. Nous étions comme des bêtes aveugles et enragées enfermées dans une cage étroite et sordide, et nous voilà libres et en repos, baignant dans la lumière de l’Unique Père et Mère. « Ô merveille du Parfait ! Ô bénédiction du Généreux ! Ô amour du Gratuit ! »
49. Tous sont utiles à quelque chose ou à quelqu’un ici-bas, mais nous semblons inutiles aux autres et à nous-mêmes. C’est donc pour nous consoler que Dieu consent quelquefois à nous dire un petit mot.
49’. Si nous ne vidons pas le corps par le jeûne, l’esprit par la prière et l’âme par la contemplation, comment le Seigneur pourra-t-il nous combler de sa présence, triple et unique ?
50. Le plus avancé parmi les passants de ce monde est celui qui supporte sans murmurer les vicissitudes de la vie incarnée et qui ne se pose plus jamais cette question : comment ? et pourquoi ? car la foi qui repose dans la Providence de Dieu, n’interroge pas.
50’. Celui qui connaît le dessous de la création ne se scandalise d’aucune injustice, ne se heurte à aucune apparence et ne s’émeut d’aucun bouleversement dans le monde, car il sait que tout se conforme en nous et autour de nous à la vision intérieure.
51. Les poètes et les artistes sont des amoureux qui ne consentent pas à s’entretenir avec Dieu sans signes et sans témoins, comme font les sages et les saints. « Ô pudeur extrême des amours saintes ! Ô douce lumière de l’union divine ! »
51’. Le retour de l’âme à sa source est comme la préfiguration de la fin des temps, car tout s’accomplit selon une progression géométrique ; c’est- à-dire avec l’accélération des corps purs rejoignant leur centre primordial.
52. La récompense et la joie des saints et des sages, c’est offrir à Dieu les remerciements, les louanges et l’amour de ceux qu’ils ont retirés de la mort par leur enseignement, par leur exemple et par leur sacrifice.
52’. Les fous travaillent contre la création et la desservent, mais ils ne le savent pas. Les sages délivrent la création et l’accouchent, mais ils connaissent le but de leurs efforts.
53. Que notre vertu cachée soit la fréquentation journalière de l’Unique dans l’oubli de nous-mêmes.
53’. Le saint qui sert fidèlement son Seigneur ne sera pas étonné d’être servi par son Seigneur.
54. Nous sommes ici-bas constamment en péril d’aveuglement et de mort définitifs, comme nous serons là-haut en perpétuelle menace de vie éternelle esseulée, si nous ne nous fixons pas dans le cœur de l’Unique.
54’. Celui qui se complaît dans la prison de ce monde, comment fera-t-il pour découvrir la liberté de l’autre ? Et celui qui s’installe dans cette plénitude, comment fera-t-il pour entrer dans le repos de l’union très secrète ?
55. La poésie ultime de l’amour et de la connaissance paraît dans le silence de Dieu. « Aujourd’hui je vais à tous, mais qui m’accueille et qui m’écoute ? Demain tous viendront à moi, mais qui recevrai-je ? et qui entendrai-je ? » dit le Seigneur de la grâce et de l’amour.
55’. Il nous délivre de la mort et ensuite il nous retire de la vie, afin que nous demeurions avec lui dans le secret de son secret pour toujours. « Ô repos très saint dans le centre du centre ! »
56. Quand nous aurons compris avec notre tête, nous serons comme des morts dans la vie. Quand nous aurons senti avec notre cœur, nous serons comme des vivants dans la mort. Mais quand nous aurons palpé avec nos mains et goûté avec notre bouche, nous serons comme des dieux dans l’Unique.
56’. Être possédé par la multitude de l’Universel, c’est être fou. Être possédé par l’Unicité de l’Un, c’est être saint. Posséder l’Unité de l’Unique, c’est être sage. Mais pénétrer la plénitude de la vacuité, c’est être Dieu avec Dieu.
57. Celui qui adore Dieu dans son cœur, qui aime l’humanité dans le monde et qui respecte les êtres vivants, justifie toute la création présente parce qu’il est déjà seul justifié devant Dieu.
57’. Si nous libérions ce qui est caché dans l’homme, nous deviendrions comme le Seigneur de lumière et nous bénirions l’humanité et la création tout entière au milieu même des ténèbres de la mort.
58. Il se chante en chacun de ses poètes. Il s’annonce en chacun de ses prophètes. Il se joue en chacun de ses enfants. Il se loue en chacun de ses croyants. Il s’aime en chacun de ses saints. Il se connaît en chacun de ses sages. Il brille en chacun de ses fils.
58’. Pénétrons la folie apparente de l’enseignement des saints et des sages et considérons leur intention profonde, qui est le rassemblement de tous les êtres en Dieu. Ainsi, nous pourrons rire de tout ce qui arrive comme d’une farce continue autant qu’illusoire, jusqu’à ce que tout cesse de nous rassurer ou de nous épouvanter ici-bas et ailleurs.
59. En nous fuyant toujours plus, nous n’obtiendrons qu’un surcroît d’esclavage, tandis qu’en nous oubliant patiemment, nous atteindrons la liberté de l’Unique.
59’. Il passe en nous, nous passons en lui, et nous voilà fécondés et renouvelés par le seul mérite de notre mort en lui, et de sa naissance en nous.
60. La connaissance intellectuelle qui n’aboutit pas à l’amour unifiant et à la possession transformante du Seigneur, est aussi illusoire que le reflet de la lune dans un verre d’eau agitée.
60’. À quoi bon tous nos travaux merveilleux, si nous ne découvrons pas et si nous n’incorporons pas l’Unique Splendeur de la vie sanctifiée ? À quoi bon les magnifiques discours sur la lumière de Dieu, si nous ne la voyons pas et si nous ne la mangeons pas saintement ?
61. La puissance de Dieu ne peut être accordée qu’à celui qui a renoncé à toute démonstration, à toute compétition, à toute approbation, à toute possession et à toute vengeance, c’est- à-dire qui a renoncé à lui-même.
61’. Quand nous le contemplerons émerveillés, que pourrons-nous lui demander d’autre que lui ? rien que lui ? toujours lui ? Car quel est le connaisseur qui ne désirerait pas contempler la splendeur et habiter en elle ?
62. Ceux qui lisent le Livre et qui ne choisissent pas dans leur cœur l’amour et la quête du Parfait, sont plus retranchés que ceux qui s’agitent aveuglément dans le monde sans rien soupçonner de la vérité de l’Unique.
62’. Dieu seul nous offre un amour sans déception parce que toujours plus grand que notre propre don. « Le vivant témoignera devant tous de la vérité du Livre, mais peu d’hommes possèdent les yeux de l’esprit qui permettent d’approcher l’évidence de la vie dénudée. »
63. Les sages et les saints véritables aimantent tous les hommes de bonne volonté jusqu’à Dieu, et c’est en cela qu’ils sont les fils uniques et les serviteurs fidèles de leur Seigneur.
63’. Celui qui ne sait pas tirer sa vie du ciel et de la terre, ne connaît rien de Dieu, ne possède rien de Dieu, n’est rien en Dieu.
64. Celui qui ne s’émeut plus des grimaces de la mort, voit briller partout le sourire de l’unique clarté.
64’. Préparons la terre, soyons simples, soyons confiants, soyons patients, demeurons en paix, et Dieu nous fera voir son salut.
65. NON. NON.
OUI. NON.
OUI. OUI.
OUI. OUI. OUI.
Le commencement
Le milieu
La fin
65’. OUI. OUI. OUI.
OUI. NON. OUI.
NON. OUI. NON.
NON. NON.
66. Si tu m’aimes et si tu me cherches de tout ton esprit, de toute ton âme et de tout ton corps, je mettrai un esprit de discorde entre toi et le monde afin qu’aucune consolation étrangère ne te détourne de ma voie droite ; tes proches te haïront et te repousseront, tu leur seras odieux et ils te seront insupportables et opposés en tout, dit le Seigneur caché ; ta compagne même se dressera contre toi, et tes enfants te moqueront à cause de moi. Paroles cruelles pour le monde ignorant ; amour saint et parfait pour celui qui sait, car lorsque nous l’aurons trouvé, tout nous sera rendu selon notre désir et bien plus encore.
66’. Qu’ils soient humbles et timides ceux qui enseignent les mystères de Dieu qu’ils ne connaissent que par ouï-dire, et qu’ils demeurent cachés ceux qui les ont expérimentés dans leurs cœurs et qui les ont tenus dans leurs mains de vivants. Ô — TOI — MOI NOUS — UN QUI EST — PAR SOI — EN SOI — POUR SOI — TOUJOURS — AMANT — AIMÉ — AMOUR — AMEN.
Tous les livres qui ne reposent pas sur la sainte Écriture, sont sortis de la main des hommes et périront.
Toute parole vraie, quel qu’en soit l’auteur, est dite par le Saint-Esprit.
⟴LIVRE XV
Les verrous de la terre étaient tirés sur moi pour toujours, et vous avez fait remonter ma vie de la fosse, IEVE mon Dieu.
Lorsque les hommes ressusciteront, la terre deviendra blanche, unie et pure.
NUÉE REVIT
LA SORTIE
1. Un travailleur, un inutile, un paysan, un vagabond, un commerçant, un pauvre, un penseur, un simple, un croyant, un impie ont les premiers lu et aimé le Livre. Ô dérision sur les savants, sur les lettrés et sur les religieux officiels qui ne l’ont pas reçu !
1’. Combien la voie de Dieu est originale et simple, combien elle est secrète et exposée aux yeux de tous, combien elle est noble et commune cependant ! Qui saisira à présent le sens premier et dernier de la parole inspirée ?
2. Celui-ci s’intitule fondateur de religion et il n’entend même pas celle de ses pères. Celui-là se nomme sage et ne sait ni semer ni moissonner. Cet autre prend le titre de savant et il ignore comment il subsiste et pourquoi il meurt.
2’. C’est parce que nous sommes trop occupés de nous-mêmes et pas assez de Dieu que le Seigneur ne se fait plus entendre et qu’il ne se manifeste plus en nous.
3. Quelqu’un se dit religieux et saint parce qu’il porte une robe ; comme un autre se proclame intelligent et courageux parce qu’il arbore un diplôme ou une médaille.
3’. Le règne du Seigneur viendra quand la semence de Dieu jonchera toute la terre, et nul n’arrivera à Dieu s’il ne passe par la créature de Dieu qui est la création excellente du Seigneur.
4. Quand nous commentons une Écriture sainte, un rite ou un symbole, ajoutons pour les auditeurs et pour nous-mêmes : « Voici une des nombreuses interprétations de la vérité Une. Dieu est seul maître du vêtement et de la nudité. »
4’. Celui qui entend, qui voit, qui hume, qui goûte et qui palpe la vérité sans voiles, ne peut que se taire et adorer dans l’Unique Splendeur. Celui-là peut bien paraître insensé devant tous puisqu’il est seul à être instruit devant Dieu.
5. L’Amen est le verbe de Dieu manifesté, la droite du Tout-Puissant, l’exécuteur des jugements du Juste. Il ne discute pas, il agit. Malheur à ceux qui ne l’auront pas reconnu et reçu au temps marqué, car ils seront balayés au jour du jugement général comme la poussière est charriée par la tempête d’équinoxe.
5’. Les religions peuvent bien arriver à se confondre avec les morales mortes, et les initiations saintes peuvent bien ressembler à des mascarades ; la science de Dieu renaîtra toujours de leurs cendres refroidies, et les gardiens de nécropoles feront place à nouveau aux bâtisseurs de vie. C’est la loi du renouvellement de toutes choses.
6. Dieu est le créateur éminent et l’ordonnateur excellent. Il ébauche son œuvre par une touche lumineuse et il l’achève par une architecture impérissable. Il est unique certainement.
6’. Il a commencé son ouvrage comme en se jouant et il le termine en montrant son excellence et sa perfection sur toutes les œuvres du monde. Au jour du jugement, la splendeur sera sur ses saints, mais les railleurs seront plongés dans la consternation et rejetés dans l’anarchie de la mort.
7. Aussi les prophètes et les sages qui se glorifient en Dieu se considèrent personnellement comme incapables et comme inintelligents devant le Seigneur, car ils croient, ils entendent, ils voient, ils palpent et ils goûtent véritablement l’unique lumière. Eux seuls !
7’. Ô moment cruel où une parcelle de nous-même va croupir dans le néant ! Mais le Seigneur est miséricordieux, il remet son jugement et il pardonne à nos âmes égarées quand nos cœurs de pierre s’ouvrent à sa grâce agissante et à son amour transformant.
7’’. Les sages et les saints, qui possèdent Dieu en eux-mêmes, ressortiront indemnes de la nuée ardente, car le Seigneur Dieu, qui est l’essence du feu, est incombustible. Les méchants seront réduits en cendres et ils serviront d’engrais pour la nouvelle plantation de Dieu.
8. Ne nous faisons pas justice, car nous perdrions le bénéfice de nos épreuves et nous effacerions l’iniquité du méchant. Remettons-nous au jugement du Seigneur, qui sait discerner les intentions profondes et les buts éloignés.
8’. C’est la bonne volonté en Dieu qui nous sauve de la mort, et c’est la bonne volonté en nous-mêmes qui nous y précipite. En effet, si toutes les deux sont aveugles, la première cependant est guidée et elle devient réceptrice et organisatrice, tandis que la seconde est errante et devient anarchique et destructrice.
9. Bénissons l’égaré et le révolté afin de bénéficier de sa conversion toujours possible. « Si nous tuons les méchants, comment ferons-nous ensuite pour les convertir ? Et si les méchants nous tuent, comment feront-ils pour être sauvés ? »
9’. On pense s’arranger avec le mal, mais c’est toujours le mal qui nous arrange. On croit pactiser avec la mort, mais c’est toujours la mort qui nous surprend.
10. Exerçons-nous à lâcher les petites choses afin que lorsque les grandes nous lâcheront, nous demeurions sereins parce que riches en Dieu.
10’. Dieu exauce de préférence l’énormité de la demande de ses fils, parce que celle-ci est plus en rapport avec sa magnanimité et avec sa toute-puissance.
11. Celle-là a été une compagne courageuse et dévouée, ensuite elle est devenue rebelle et aveugle, car elle a jugé le Livre comme une inutilité sans jamais l’avoir ouvert. Enfin elle a accepté la voie de Dieu par amour pour nous. « Sommes-nous pas tous stupides devant la vérité de Dieu qui nous aveugle ? »
11’. Ne nous prévalons ni de notre santé, ni de notre intelligence, ni de notre savoir, ni de notre beauté, ni de notre fortune, ni de notre travail, ni de notre famille, car ce sont des prêts consentis par Dieu que le malheur et la mort ont rapidement transformés en fumée et vite résorbés en cendres.
12. En effet, nous ne connaissons ni les anges qu’il suscite pour garder nos voies, ni les démons qu’il autorise pour éprouver nos cœurs. Dieu délivre ceux qui suivent sa voie sans révolte et pardonne à ceux qui se repentent sincèrement. À lui le jugement et la gloire.
12’. Prévalons-nous plutôt de notre foi en Dieu et en sa toute-puissance, qui nous rendra la vie éternelle et pure si nous sommes trouvés tels que nous devons être, c’est-à-dire fidèles, purs, simples et aimants.
13. Un jeune ignorant est naturellement porté à mépriser tout ce qui paraît faible, vieux, abandonné et mort dans le monde ; et sa cécité est excusable.
13’. Quand nous prendrons conscience du passage difficile qui nous attend, nous réformerons nos pensées, nos jugements et nos actes, et nous ne jouerons plus à contrefaire l’histrion parmi les insensés.
14. Mais un vieillard instruit qui ne reconnaît pas la Providence et la science de Dieu en action dans l’Univers et dans son cœur, est aussi stupide qu’une souche pétrifiée.
14’. Faites, Seigneur, que nos yeux et nos oreilles s’ouvrent avant le commencement de la fin ou, tout au moins, avant la fin de la fin.
15. Dieu ne nous oblige pas à rejeter nos parents, nos femmes, nos enfants, nos amis et nos biens pour lui plaire. Il demande que nous ne nous attachions pas aveuglément aux choses passagères de ce monde afin que nous ne soyons pas trompés et déchirés cruellement au jour de la séparation ; car la vraie pauvreté est en esprit, et la vraie richesse est en Dieu seulement.
15’. Dieu n’exige pas que nous violentions notre nature ni celle des autres êtres pour lui être agréables. Il demande au contraire que nous l’épurions, que nous la décantions et que nous la mûrissions doucement, afin qu’il soit manifesté en nous pleinement. Ce ne sont ni la répression violente ni le travail forcé qui comptent pour le salut, mais plutôt l’attention éveillée et la quête persévérante.
16. Cependant nul ne peut être jugé coupable d’abandonner le monde pour aller à son Seigneur, car c’est ce qu’il nous faudra bien tous faire à la fin.
16’. Tout comme les gens du monde, les saints oublient ce qu’ils possèdent et déplorent ce qu’ils n’ont pas, mais il ne s’agit pas des mêmes choses.
17. Le sage et le saint rassemblent toute leur attention pour la quête de Dieu et sont comme absents aux occupations ordinaires des hommes.
17’. Ce qui vous semble vide nous apparaît plein, et ce qui vous semble plein nous apparaît vide. Car le monde est comme retourné pour ceux qui voient le dedans des êtres et des choses.
18. Si nous pouvions lire le Livre à découvert, nous serions frappés d’épouvante et nous demeurerions cloués par la stupeur, puis nous courrions le cacher dans la tombe dans la crainte que les impies n’abusent du divin mystère et ne profanent la lumière de Dieu à jamais. Mais le Seigneur a justement prévu cela, car il est sage parmi les sages.
18’. Beaucoup de livres géniaux contiennent la sagesse des hommes, mais combien renferment la sagesse de Dieu ? Beaucoup d’hommes ânonnent les Écritures saintes ou en font des commentaires aveugles, mais combien entendent directement la parole de Dieu ? Combien la transcrivent clairement ? Et combien l’expérimentent dans leur cœur ici-bas ?
19. Ainsi les savants et les intelligents, les rusés et les cupides demeurent-ils stupides devant la serrure et la clef sans pouvoir rien ouvrir. Remarquons comme ils affectent ensuite de dénigrer ou de ridiculiser ce qu’ils n’ont pu dérober ou violenter.
19’. « Dieu cherche des fous pour en faire des sages. Il se moque des gens raisonnables. Voilà qui ne plaît pas à tous. » — Ce ne sont pas des conférenciers savants qu’il nous faut, mais des prophètes remplis du Saint-Esprit.
20. La morale est une barrière et l’ascèse est un garde-fou. La loi est une digue et les rites sont un guide. Les sacrements sont un mémento, les symboles sont des images parlantes et les livres saints montrent la voie, mais la science de Dieu annule tout parce qu’elle surpasse tout.
20’. Chaque fois que nous avons lu le Livre, nous avons appris à nous conduire en Dieu et nous nous sommes souvenus de la voie du Seigneur. Alors nous avons béni son sacré Nom et nous avons adoré sa Personne sainte, cachée dans la lumière du commencement et de la fin.
21. Qui serait assez ignorant cependant pour mépriser les marches qui nous font accéder au tabernacle du Seigneur de vie ?
21’. Combien davantage apprendront ceux qui lisent le Livre et qui ne l’ont pas écrit ?
22. Si Dieu abandonnait ses enfants, ce serait tant pis pour Dieu et pour nous, mais le Seigneur n’est ni oublieux envers lui-même ni ingrat envers les siens.
22’. Ah ! combien les poètes, les pauvres et les simples sont proches de Dieu, et combien ils ignorent leur proximité !
23. C’est pour cela que nous devons espérer en lui contre toute apparence dans ce monde mélangé, jusqu’au jour de la balance des comptes et de l’élimination de la mort.
23’. Les pieds de l’humanité sont encore sains, mais la tête est pourrie et aveugle. Il faut donc ensemencer ce qui est en bas afin que ce qui est en haut soit guéri et renouvelé, comme autrefois ce qui était en bas a été sauvé et blanchi par ce qui brillait en haut dans la pureté.
24. Tout ce que le Christ a dit sur les pharisiens est encore vrai pour la plupart des croyants actuels. Ô dérision ! Ô cruauté ! Ô pénitence ! « Ô dérision ! » Nous avons rejeté le secret de la science de Dieu et à présent nous voilà adorant la science de Satan dans la crainte de paraître arriérés. Nous nous sommes réservé le sacrement de la connaissance et depuis ce temps-là nous sommes devenus aveugles et sourds à la volonté de Dieu. Nous sommes conciliants avec la mort et arrangeants avec le mal pour de l’argent, et nous haïssons ceux qui le dénoncent et qui ne s’en accommodent pas.
24’. « Ô pénitence ! » À présent, nous allons rentrer dans la poussière et nous finirons comme nous avons commencé, en nous cachant sous terre, dans les tombes, dans les caves et dans les carrières abandonnées ; et nous redeviendrons un petit nombre devant Dieu, car les médiocres et les lâches nous auront quittés, comme les branches mortes que la tempête arrache. Quand le chef aura passé l’eau, nous saurons que le temps de la pénitence va commencer pour nous. Quatre chiffres suffiront pour nombrer les rescapés de la fin, mais nous serons comme une semence sainte qui produira un fruit magnifique devant le Seigneur.
25. « Ô cruauté ! » Nous nous sommes retirés des simples et des pauvres, et ceux-ci ont même oublié le Nom de Dieu. Nous avons rejeté les sages et les saints, et notre science et notre foi se sont volatilisées en discours raisonnables. Nous avons hissé les drapeaux des nations sur la maison de Dieu pendant que les peuples s’égorgeaient, et nous portons fièrement les décorations du meurtre. Considérons d’où vient l’avertissement : d’un homme inconnu mais aimé, d’un pauvre mais comblé, d’un laïc mais relié.
25’. C’est le Livre de la hauteur et de la profondeur qui nous unira en un seul corps devant le Parfait, car un reste de chaque foi et de chaque croyance se reconnaîtra en Dieu et fusionnera dans l’amour par l’approchement de l’unique racine, et l’homme de l’eau et du feu sera notre guide et notre sauveur, car la voie de Dieu qui est la sienne sera aussi la nôtre en ce jour-là. Alors la souche antique refleurira secrètement et manifestera son fruit saint dans un monde réconcilié.
26. Reconnaissons l’amour et l’humour du Seigneur qui nous rappelle ainsi à l’ordre saint qu’il a institué pour ses amis et pour ses disciples. Car l’or ne nous sauvera pas, ni la diplomatie, ni les alliés, ni les gémissements, mais plutôt notre foi, notre espérance et notre charité en action, et par-dessus tout la connaissance de la toute-puissance de Dieu qui retire de la mort. Comprendrons-nous enfin ?
26’. Les méchants verront la béatitude des saints, et cela constituera leur plus grand tourment, car l’amour sera alors derrière eux sans espoir, au lieu d’être devant comme il est encore à présent avec l’espérance. « L’innocence retrouvée peut tout contempler, car elle seule ne s’étonne de rien, ne juge rien et ne profane rien. »
27. La révolte du rebelle, c’est son échec qui l’a endurci au lieu de l’instruire.
27’. La sauvegarde du sage, c’est fuir les assemblées des hommes et se complaire dans la solitude de Dieu.
28. La cruauté du méchant, c’est sa souffrance qui l’a fermé au lieu de l’ouvrir.
28’. La sanctification du saint, c’est donner dans l’indigence et c’est bénir dans la souffrance.
29. L’enfer de tous, c’est le refus d’accomplir bénévolement le pacte que nous avons signé avec la mort.
29’. La foi du croyant, c’est effacer la désolation de la mort à force d’espérer la résurrection et la joie de la vie nouvelle.
30. Si nous considérions d’abord le mal apparent ou caché qui ronge chaque être ici-bas, nous deviendrions plus attentifs à ses plaintes, plus patients à ses cris, plus pitoyables à ses faiblesses et plus secourables à ses douleurs.
30’. Si nous pensions d’abord à la lumière du Seigneur enfouie au fond de chaque être, nous supporterions plus aisément les contradictions et l’aveuglement de ses ténèbres extérieures, et nous serions confondus de notre propre obscurcissement intérieur.
31. Nous sommes sans mérites comme des petits enfants qui ne peuvent compter que sur l’amour de leurs parents pour l’entretien de leur vie. Envoie-t-on les petits enfants au travail ou à la guerre ? Les traîne-t-on en justice ou en prison ? Les condamne-t-on à la torture ou à la mort ? Ne les garde-t-on pas plutôt précieusement dans le sein familial pour les jeux, pour la joie, pour l’amour et pour la vie future ?
31’. À quel sommet et à quelle profondeur ne peut-il espérer atteindre, le révolté qui se soumet à Dieu ? — À quelle récompense et à quel don ne peut-il prétendre, l’indigent qui se donne au Seigneur ? — À quelle consolation et à quelle douceur n’est-il pas promis, le violent qui recherche la paix de l’Unique ? — À quelle bénédiction et à quelle union n’est-il pas destiné, l’abandonné qui espère en l’amour du Parfait ?
32. Imaginons nos contradicteurs et nos ennemis comme ils seront bientôt, c’est-à-dire comme des morts : ainsi nous n’éprouverons plus à leur endroit ni ressentiment ni haine, car on ne peut que prier pour les morts en espérant le temps de leur résurrection et de leur illumination.
32’. Ils sont aussi ignorants que ceux qui demandent de l’argent pour expliquer la parole qu’ils n’entendent pas. Au moins ces derniers transmettent-ils sans le savoir la science aux enfants de Dieu, qui savent bien la reconnaître toujours identique à elle-même parmi toutes les Écritures saintes.
33. Nos dons conviennent plutôt à la quête de Dieu qu’à la conquête du monde, car ce qui vient de l’Unique doit aller à l’Unique, comme ce qui vient du monde doit retourner au monde.
33’. Ne nous tuons ni au travail ni au plaisir, tuons-nous plutôt à rechercher Dieu et son salut, qui sont dans la vie éternelle, évidente et cachée.
34. Les échecs dans le monde sont la sauvegarde des bénis de Dieu, afin qu’ils ne soient pas distraits de la quête du Parfait et qu’ils ne soient redevables de rien à quiconque ici-bas, mais qu’au contraire les hommes leur soient débiteurs pour la révélation de l’amour et de la connaissance de Dieu.
34’. Les saints qui sont actuellement ignorés ou repoussés seront connus et recherchés par la suite, car si le monde les traite comme des nullités et comme un néant, ils seront établis maîtres par Dieu sur ceux qui les ont méconnus et sur leur descendance. « C’est la justice du Seigneur que nul ne peut fausser. »
35. Tous s’épuisent, et nul ne repose. Tous se précipitent, et nul n’arrive. Tous entassent, et nul ne profite. Tous s’efforcent, et nul n’obtient. Tous s’inquiètent, et nul ne voit. Tous expliquent, et nul n’entend. Tous prêchent, et nul ne pratique. Tous luttent pour la vie, et nul ne sauve la sienne.
35’. Si nous nous trouvons faibles : secourons. Si nous nous sentons repoussés : accueillons. Si nous nous estimons pauvres : donnons. Si nous souffrons : soulageons. Si nous sommes désolés : réconfortons. Si nous sommes haïs : bénissons. Si nous sommes tentés : prions. Si nous sommes esseulés : louons Dieu.
36. Où est l’intelligent qui attend tout de Dieu et rien du monde ? Où est le laboureur ? Où est le moissonneur ? Où est le comblé de Dieu ? — Là où germe la lumière du Parfait !
36’. Où est l’Amant ? Où est l’Aimé ? Où est l’Amen ? — Dans notre cœur de pierre d’où il nous faut l’extraire et le manifester clairement !
37. N’attendons pas d’être terrassés par le malheur, la souffrance ou la mort pour nous souvenir du Dieu de notre enfance et pour lui parler sans témoins et sans retenue.
37’. Chacun accomplit ici-bas un travail utile ou agréable aux hommes et à lui-même, mais quel est celui qui met la main en secret à l’œuvre de Dieu ?
38. Nos travaux les plus utiles et les plus admirables seront comptés pour rien au jour du jugement. Seuls l’amour de Dieu, l’observance de sa loi et la pratique de sa voie nous ouvriront les portes de la vie sans mélange.
38’. L’intelligence et la raison humaine sont d’humbles servantes qui ne doivent jamais usurper la place de l’inspiration et de l’amour qui sont les maîtres de la maison de Dieu.
39. Si nous pouvions nous contempler après avoir médité le Livre, nous serions surpris devant notre propre spectacle. Combien, dans ce cas-là, les autres ne doivent-ils pas être troublés par ces mêmes apparences ? Ainsi c’est uniquement l’Esprit de Dieu qui démêle, en nous et dans le monde, la vérité du mensonge, et c’est pour cette raison que nous devons demander avec insistance la lumière qui nous éclairait au commencement et qui nous illuminera à la fin.
39’. Les apparences de ce monde sont étrangement trompeuses et troublent les plus avertis, comme elles égarent les mieux préparés. C’est pour cela qu’il est préférable de réserver notre jugement jusqu’au temps où toutes les choses et tous les êtres nous seront manifestés sans voiles et sans déguisements. « Beaucoup critiquent tout et propagent le découragement et la haine. Bien peu consolent et offrent leur aide et leur amour. »
40. « Qui pourrait croire, sans l’avoir vu, qu’un ver méprisable et obscur se transforme en un papillon resplendissant de lumière ? »
40’. Fuyons les méchants qui enfantent le mal, qui le nourrissent en eux-mêmes et qui le répandent dans les autres ; et recherchons le conseil de ceux qui n’ont pas d’intérêts dans le monde et pas de passions dans le cœur.
41. La lumière qui recèle le Seigneur est comme le vêtement et comme l’ombre lumineuse du Parfait dont nous devons être couverts si nous sommes trouvés simples, fidèles, aimants et purs, comme au dernier jour de la création et comme au premier temps de notre nouvelle vie.
41’. Une fois, dix fois, cent fois, le Livre ne nous dira rien, mais croyons bien qu’à la millième il nous parlera un peu, et qu’à la fin il nous apparaîtra trop clair et trop évident, c’est-à-dire imprudent à l’excès.
42. Celui qui mesure sa faiblesse dans le monde et sa force en Dieu, ne se compte plus pour grand-chose ici-bas.
42’. Que peut offrir le monde à celui que Dieu a déjà pourvu de son amour ? à celui qui suit sa voie ? à celui qui accomplit son œuvre ?
43. Dieu ne se réjouit ni de notre agonie ni de notre mort dans ce monde. C’est pourquoi il nous propose la vie délivrée de la souffrance et de la mort pour toujours.
43’. Si les livres saints sont si beaux et si profonds, c’est parce qu’ils reflètent directement la splendeur de la lumière divine et qu’ils nous entretiennent du mystère insondable de l’œuvre de Dieu.
44. C’est la secrète révélation de Dieu qui nous fait rentrer dans la poussière et qui nous illumine tout à la fois. Ainsi celui qui reconnaît son Seigneur devient humble parmi les humbles, cependant il resplendit comme la lune qui reflète la lumière du soleil.
44’. Celui qui a la pleine conscience de sa faute devant Dieu, est précisément celui qui s’efforce le plus à l’effacer. — Que sera donc le remords de celui qui s’est oublié dans le monde quand l’heure solennelle et imprévue sonnera pour lui ?
45. Un travail long et solitaire, l’indifférence ou la méfiance de tous, les refus, l’hostilité, la pauvreté, le silence et la solitude pour compagnons. — Telle l’œuvre sainte offerte aux morts, tel le salaire des morts qui ne la reçoivent pas.
45’. Ce n’est pas l’amphitryon qui sera privé, mais bel et bien les convives qui s’abstiennent volontairement. — Quant à celui qui est chargé d’annoncer le festin de l’union sainte, il bénéficiera avec ses amis de la part des absents.
46. Mais quelle importance cela a-t-il pour celui qui a la vision de la promesse étonnante du Parfait ? Car sa progéniture sera comme les étoiles dans le ciel, et ses fils peupleront la terre sainte.
46’. Leur lot sera formidable et comme absurde, car au-dehors ce sera alors la famine, la souffrance, le désespoir et la mort, et nul ne pourra fermer la porte de l’enfer, et nul ne pourra ouvrir la porte du ciel.
47. Il est apparemment logique, pour ceux qui ne perçoivent pas plus loin que leurs sens extérieurs, de nier le salut de Dieu et de préconiser le salut de l’homme par le travail de l’homme. « Pauvre travail, pauvre salut, avant-goût de l’enfer ! »
47’. Comment condamner ceux qui n’entendent pas la vérité du Seigneur, quand il nous a fallu tant de peines pour pénétrer dans le temple de Dieu et tant de temps pour découvrir son cœur vivant ?
48. Ne disons pas à présent : « Si nous avions connu le Livre, nous l’aurions honoré et fait connaître autour de nous », car beaucoup ont lu et presque tous se sont abstenus.
48’. Semons le Livre comme nous semons nos cœurs, afin que la semence de Dieu soit multipliée dans le monde et que le règne du Parfait soit ainsi avancé pour tous.
49. Remercions plutôt Dieu de ne pas être tentés par une apparence commune, car celui qui écrit n’est rien, mais celui qui dicte est tout.
49’. Il suffit que le laboureur laboure, car c’est Dieu qui sème, qui arrose, qui fait germer, qui fait fleurir, qui fait fructifier et qui multiplie la semence.
50. Aucune parole d’Écriture sainte ne contredit en fait la parole d’une autre Écriture sainte. Ainsi Dieu apparaît multiple en personnes, mais il est cependant unique en acte et en repos, comme étant l’Être par excellence, c’est-à-dire le premier et le dernier en tout.
50’. Il nous faut donc connaître toutes les Écritures saintes et les étudier jusqu’à ce que nous ayons découvert l’identité première et dernière de la parole inspirée. « Penser à Dieu et méditer sur sa création, c’est prier et louer Dieu. »
51. C’est tout de suite qu’il faut cesser de nous faire de nouveaux ennemis, et c’est à présent qu’il faut nous réconcilier avec nos anciens ennemis. C’est tout de suite que nous devons ménager et aider tous les êtres de la création. C’est à présent qu’il nous faut combler le déficit énorme de nos actes d’amour envers le créateur et envers les créatures. « Remarquons que ce qui nous arrive est précisément ce que nous souhaitons aux autres ou ce que nous leur faisons subir. »
51’. Les impies ont pris à leur compte la doctrine de fraternité que les croyants ont rejetée, et à présent tous se combattent au lieu de se convertir, soit à la patience et à la douceur pour les uns, soit à l’humilité et à la générosité pour les autres ; c’est-à-dire, à l’amour de Dieu pour tout le monde. Quand beaucoup seront meurtris, dépouillés et réduits à rien, les survivants reconnaîtront peut-être la sagesse de la loi de Dieu et la sauvegarde de sa voie sainte ? Ayant tout perdu, peut-être seront-ils alors sans cupidité et sans haine ?
52. Les pauvres, les simples, les poètes, les artistes et les saints véritables ont-ils jamais maudit et exterminé leurs semblables au nom des Écritures saintes, ou de la charité, ou de l’amour, ou de la beauté, ou au nom de Dieu et de sa justice ?
52’. Ceux qui aident secrètement leur prochain en pensée et en action, reçoivent sans retard l’inspiration de Dieu et le secours des humains, mais souvent ils ne les perçoivent pas.
53. « Les sectaires, les tortionnaires et les criminels ne sont pas de Dieu certainement. »
53’. Comment disputer avec le monde et entendre la voix du Seigneur en soi-même ou remarquer l’occasion qui s’offre ?
54. Célébrant les mystères de Dieu dans un langage mort, pouvons-nous nous étonner de ne pas être entendus par les croyants et de ne plus être écoutés par les simples ? Peut-être cela indiffère-t-il les pasteurs et les troupeaux à présent ?
54’. Il faut toute une équipe pour écrire un livre sur Satan, et les curieux se précipitent et admirent. Il faut un seul croyant pour écrire un Livre sur Dieu, et nul ne bouge et personne ne dit mot. « Ô comme les intelligents sont devenus idiots à force d’intelligence ! »
55. Pourquoi ceux qui font profession d’enseigner la loi de Dieu, de transmettre sa parole, voire de parler en son nom ou de le représenter ici-bas, pourquoi ignorent-ils les collaborateurs qui ne sont pas de leur bord ? Pourquoi repoussent-ils les croyants pauvres ou indépendants ? Pourquoi traitent-ils leurs confrères qui prêchent l’Unique Dieu comme des concurrents, et leurs fidèles comme des indésirables ? Dieu lui-même cependant, juge nos cœurs et non pas nos situations ni nos appartenances. « Qu’ils soient bénis les saints prêtres qui prêchent le salut de Dieu de la fin des temps ; mais qu’ils soient comblés les sages prêtres qui enseignent la délivrance de Dieu dès ce temps d’exil ! »
55’. Qui parmi nous peut juger de l’œuvre de Dieu, et combien connaissent sa voie cachée ? Qui parmi nous peut préjuger du choix et de la décision du Seigneur ? Nous sommes devenus comme des aveugles qui se battent pour de la fausse monnaie et comme des sourds qui s’injurient pour des guenilles. Hélas ! ceux que nous avons stupidement abandonnés et oubliés vont nous mettre d’accord. Les incroyants vont nous ramener à l’humilité de notre condition d’exilés, car nous allons être couchés dans la mort, sans distinction et sans pardon, empilés comme du gibier abattu, dispersés comme la balle du grain, jetés à la fosse comme la viande avariée.
56. Qui donc parmi ceux-là conseille le Seigneur sur le choix de ses envoyés, de ses inspirés, de ses élus, de ses saints et de ses sages ? « Nous devons nous convertir, c’est-à-dire nous retourner et, au lieu de regarder le dehors où se disperse le passé, contempler le dedans où repose l’éternel Présent de la vie. »
56’. Il n’y aura plus alors de disputes subtiles, plus de préséances dérisoires, plus de salaires d’hommes, plus de savants et plus de sermonneurs. Seulement des tas d’ossements humbles et anonymes, et le silence éloquent des mâchoires béantes de la mort. Comprendrons-nous alors ?
57. Ô Seigneur, combien entendent ta voix ? Combien reçoivent ton ondée vivifiante ? Combien entrouvrent leur cœur de pierre ? Combien fructifient devant toi ? Combien rejoignent ta terre promise ? Combien multiplient en toi ? Combien moissonnent ta récolte ? Combien revêtent ta vie, ô Seigneur ? « Ne réponds pas à présent, afin que la stupeur et le désespoir ne nous renversent pas à terre irrémédiablement. »
57’. Allons à ceux qui pleurent et non à ceux qui se réjouissent. Allons aux humbles et non aux puissants. Allons à ceux qui souffrent et non à ceux qui dominent. Allons à ceux qui se perdent et non à ceux qui se sauvent. Allons à ceux qui manquent et non à ceux qui regorgent. Allons à la semence et non au fruit sec. Allons à la terre sainte et non à l’or faux. Allons à la mort afin de sauver notre vie.
58. Tout cela est difficile et presque au-dessus de nos forces, mais faisons au moins quelque chose pour la communion sainte de l’amour ; et si misérable et si pitoyable que cette chose soit, qu’elle demeure néanmoins secrète et gratuite.
58’. Celui qui cherche Dieu peut paraître tourmenté et être difficile à fréquenter, mais celui qui a trouvé Dieu est serein et demeure patient avec tous les hommes et avec lui-même, car il ne quitte plus la compagnie de l’Unique.
59. Prenons un métier d’homme libre et abandonnons nos déguisements. Officions et prêchons dans la langue du pays où nous nous trouvons. Faisons en sorte que rien ne nous distingue ni ne nous sépare des croyants, si ce n’est la vertu et l’exemple de la sainteté.
59’. Officions et prêchons dans la maison commune à Dieu et aux hommes, et prêchons et officions chez les croyants qui nous reçoivent. Acceptons du pauvre et méfions-nous du riche pour nous-mêmes, car ce sont les pauvres que nous devons enrichir et non pas les riches qui doivent nous corrompre.
60. Ne tendons la main que pour nous-mêmes et pas pour les autres. Il suffit que nous signalions en secret la détresse d’un fidèle pour que tous aillent à son secours si nous sommes tels que nous devons être, c’est-à-dire sanctifiés par l’amour. — Il vaut mieux obéir à Dieu seul plutôt qu’aux hommes et au monde, comme font beaucoup à présent.
60’. Il suffit pour eux qu’ils portent directement secours à ceux que nous leur désignons en secret ou qu’ils découvrent eux-mêmes. — Ainsi ne nous éloignons pas des simples et des pauvres et ne négligeons pas la racine des peuples où se cache la gloire de Dieu. — Ce sera pour nous la joie du cœur qui paraît dans la fraternité des humbles, les véritables enfants de Dieu.
61. Soyons donc imprudents et gratuits comme de vrais poètes. — Soyons libres et insouciants pour nos vies comme de véritables artistes. — Soyons simples et confiants comme des enfants de Dieu. — Soyons bons et secourables comme l’ancien samaritain. — Soyons détachés et clairvoyants comme les sages antiques. — Soyons attentifs et humbles comme des ignorants qui se connaissent. — Soyons assurés et consolants comme des sauvés de Dieu. — Soyons inspirés et convaincants comme des prophètes remplis du Saint-Esprit.
61’. Semons donc et nous vivrons dans l’abondance du Seigneur. « Il y a parmi nous plus d’endormis que de morts, plus de prudents que de lâches, plus de timides que d’hypocrites. » Réveillons-nous donc avant que la mort nous endorme tout à fait. Relisons les livres sacrés et pratiquons la voie sainte comme des imprudents et comme des fous de Dieu, car nous sommes là pour avertir, pour secourir, pour excuser, pour consoler, pour pardonner, et certainement pas pour injurier, pour dénoncer, pour juger, pour condamner ni, surtout, pour exécuter notre prochain.
62. Ne nous inquiétons pas trop de comment nous vivrons, car Dieu y pourvoira par l’inspiration et par le secours, si nous le lui demandons avec confiance, car il surveille, il inspire et il soutient ses enfants en toutes occasions.
62’. Notre Dieu est un Dieu qui se mange, qui se boit, qui communique la vie, qui l’entretient, qui la délivre et qui la restitue dans sa primauté admirable. C’est un Dieu qui se donne pour sauver en nous ce qui subsiste de vie égarée dans la mort.
63. Il permet aussi qu’ils soient tentés très souvent afin qu’ils s’affermissent dans sa voie. Ainsi le mieux est de demeurer dans la confiance du Parfait sans nous poser d’inutiles questions sur le monde.
63’. Ainsi possédant en nous-mêmes les arrhes de Dieu, nous devons nous ouvrir à sa bénédiction et à son amour, afin d’être délivrés de l’exil de la mort et afin d’être faits un avec l’Unique.
64. Il est donc recommandé de prier, de louer et de se taire en attendant que la révélation nous soit devenue claire et perceptible, car c’est dans notre cœur que réside le mystère de Dieu, et c’est lui-même qui accomplit en nous notre délivrance.
64’. Nous devons tout espérer de l’ensemencement, de la germination et de la maturation naturelles ; et nous devons tout redouter de la contrainte, de l’impatience et de la violence des ignorants bien intentionnés.
65. Éveillons-nous avec le Livre afin de commencer notre journée par une pensée salutaire. — Déplaçons-nous avec le noble outil afin d’œuvrer utilement entre nos occupations futiles. — Endormons-nous avec le message afin de l’avoir sous les yeux au jour du jugement.
65’. Tous verront le jugement de Dieu. — Beaucoup vivront de la vérité de l’Unique. — Un petit nombre habitera le cœur du Seigneur. — Quelques-uns contempleront l’œuvre secrète du Parfait. — Mais combien connaîtront le mystère des origines et des fins qui font l’éternité des éternités ?
66. Ainsi nous pourrons vérifier point par point l’œuvre prodigieuse du Très-Haut, la vérité de sa loi et l’excellence de sa voie.
66’. Ô épouvante mortelle du secret dévoilé ! Qui résistera au vertige de la connaissance et de l’amour unis en Un ?
67. Nous sommes dépassés par la beauté de l’ouvrage du Seigneur, nous demeurons stupides devant sa profondeur et nous sommes muets devant sa grandeur. — Certains ricanent pour se donner une contenance, la plupart feignent de l’ignorer afin de ne pas découvrir leur aveuglement. Le trou qui va les recevoir est déjà entrouvert, mais cela ne les instruit même pas.
67’. Comme sa prudence est admirable, et comme son audace est folle ! — Comme sa science est impénétrable, et comme son amour resplendit ! — Comme sa grâce est subtile, et comme son cœur est fidèle ! — Comme sa voie est obscure, et comme son salut est lumineux ! — Comme ses coups sont miséricordieux, et comme sa paix est parfaite !
68. Refais la boue.
68’. Et cuis-la.
69. Nous rechercherons l’œuvre du Très-Haut comme une chose curieuse et comme un jeu sans importance. Ensuite, nous étudierons le travail de l’Unique avec une savante assurance et avec une conscience aiguisée. Enfin, nous serons pris au piège du Parfait sans savoir comment la chose s’est produite, et nous serons, tantôt appelant au secours dans ses ténèbres mystérieuses et tantôt aussi, goûtant le repos de son amour divin.
69’. Nous ne pleurerons plus de désespoir et de souffrance, nous pleurerons de joie et de reconnaissance, et ce sera cependant la même eau et le même sel ; mais le cœur se sera ouvert sous l’ondée du Seigneur, et l’esprit se sera illuminé par le miracle de Dieu.
70. Mais le Seigneur est miséricordieux avec ses enfants terribles, il leur fera voir à la fin son salut et sa gloire pour qu’ils vivent à jamais devant lui.
70’. Ô combien la voie du grand Guérisseur est mystérieuse, combien elle est assurée, combien elle est puissante, combien elle est transformante et combien elle est salvatrice !
70’’. C’est par un sage jugement de Dieu que les brutes et les impies foulent aux pieds les perles de sa couronne, et que les malins et les cupides ne peuvent les voir dans la boue où elles sont cachées ici-bas.
Toutes choses se résolvent en feu et le feu se condense en toutes choses, de même que les marchandises se convertissent en or et l’or en marchandises.
Tout sera jugé et dévoré par le feu qui surviendra.
⟴LIVRE XVI
Et l’eau leur fut donnée d’un rocher et d’une pierre, l’apaisement de leur soif.
Qui est une pierre si ce n’est notre Dieu ?
RÉUNIT ÈVE
LE ROCHER
1. Examinons bien ce qui nous est dit ou demandé par chacun et voyons si la chose est conforme à la loi de Dieu et non pas aux lois des hommes, et Dieu nous répondra dans notre cœur. Mais peu d’entre nous écoutent la voix du Seigneur, car elle bouleverse nos habitudes, contredit nos passions et détruit notre fausse tranquillité d’agonisants aveugles et sourds. « Qui bouchera ses oreilles pour mieux entendre et qui fermera ses yeux pour mieux voir ? »
1’. Celui qui ne possède pas l’Esprit de Dieu jugera le Livre comme une chose ennuyeuse, obscure et inutile, car trop de médiocres ont discrédité la parole inspirée en émasculant le verbe de Dieu, en propageant des écrits imbéciles, en fabriquant des images mortes et en faisant des commentaires erronés. En un mot, en faisant servir les Écritures saintes à leurs petitesses d’hommes au lieu de servir la grandeur des révélations divines.
2. Ne savons-nous plus reconnaître le ton de la vérité de Dieu ni le langage de la poésie sainte ? Ne serait-ce pas parce que notre misérable raison, notre petite intelligence et notre médiocrité assurée ont étouffé en nous les voix de l’humilité, de l’inspiration et de l’amour, qui ne trompent pas les vrais enfants de Dieu ?
2’. En mutilant nos antennes réceptrices, nous nous coupons de l’inspiration et nous devenons sourds. En supprimant nos antennes émettrices, nous nous privons de notre virilité et nous devenons aveugles. C’est alors que nos compagnes se rebellent, et qu’elles nous méprisent quand il leur faut assumer nos rôles défaillants.
3. Rends-nous humbles, patients, aimants, innocents et purs, afin que nous soyons pleinement fécondés par ton amour et menés jusqu’à ta gloire impérissable, Seigneur magnanime et parfait.
3’. Ce sont enfin nos enfants qui nous traitent comme des nullités dans nos propres foyers, puis l’anarchie qui gagne les nations et enfin l’esclavage qui s’établit dans le monde.
4. Quand nous rencontrerons un croyant, nous lui dirons : « Parle-nous de Dieu ». Ainsi nos conversations seront toujours intéressantes, belles et utiles. Cependant, le silence en Dieu l’emporte encore sur le bruit dans le monde.
4’. Celui qui dévoilerait à quiconque le mystère de Dieu, et celui qui le recevrait indûment, seraient retranchés sans pardon pour l’éternité.
5. « Nous n’avons à être patients et courtois ni avec les méchants, ni avec les hypocrites, ni avec les médiocres qui sollicitent notre approbation pour leurs méchancetés et pour leurs platitudes. Qu’ils se retirent devant nous, comme nous nous retirons devant eux ! »
5’. En effet, Dieu seul dénude sa vérité devant celui qu’il a choisi, car il est seul juge de nos cœurs et seul maître de son secret. Les sages, les prophètes et les saints de Dieu ne peuvent que le révéler en images aux croyants avec crainte et avec tremblement.
6. Ceux qui sont instruits par Dieu reconnaissent les religions et les initiations des hommes, car ce sont eux qui les instituent quand elles manquent et qui les redressent quand elles dévient.
6’. Si nous n’attirons pas en nous l’Esprit de Dieu, nous demeurerons ici-bas comme des bêtes misérables bornées à leurs sens extérieurs et stupides devant la création vivante de l’Unique.
7. L’agriculture est certainement la connaissance la plus utile à l’humanité, cependant beaucoup l’ignorent, et presque tous la méprisent. « Étrange aveuglement ! »
7’. On nous nommera « planteur d’hommes, et jardinier de Dieu ». Ce sont des titres prestigieux et glorieux pour ceux qui comprennent.
8. Ensemencement, mortification, germination, ablution, floraison, fructification, multiplication : tels sont les états successifs de notre perfectionnement en Dieu.
8’. La vérité de Dieu repose dans nos cœurs obscurcis. Seuls la grâce et l’amour du Seigneur peuvent la manifester clairement au-dedans de nous-mêmes et au-dehors dans le monde ténébreux.
9. La communion s’accomplit en nous par le mariage du pain et du vin, qui s’unissent au moyen de l’eau qui est contenue en tout. Ainsi ils entretiennent et ils développent la vie qui nous habite depuis le commencement, et ils la délivrent mystérieusement des griffes de la mort.
9’. Celui qui a reçu la vie directement de Dieu peut aussi la donner à qui lui plaît. Cependant, il préfère laisser au Seigneur le soin de ce choix redoutable, car seul Dieu est le connaisseur parfait. Il sait ce que recèlent nos cœurs. Il connaît ce que produit le temps. Il possède ce qui fait l’éternité.
10. Tant que nous serons ignorants de la voie de Dieu et privés de sa lumière sainte, nous pourrons nous imaginer être seuls à posséder la vérité et à pratiquer la vraie religion. Mais quand nous pénétrerons le mystère de l’unité des saints en Dieu, nous serons stupéfaits de reconnaître en même temps l’unité des enseignements de Dieu dans le monde.
10’. Ainsi nous devons confronter les paroles et la pensée des livres saints de l’humanité afin d’accéder à l’unité transcendante qui accorde entre eux tous les sages illuminés de Dieu depuis le commencement jusqu’à la fin. Souvenons-nous bien cependant que la plate raison des hommes exilés s’oppose formellement à l’inspiration et à la révélation du Seigneur de lumière.
11. Les rationalistes ressemblent à des fourmis qui ne voient que leur fourmilière, ignorant le ciel qui les abrite, la terre qui les contient et l’homme qui les observe. Car ils croient vaniteusement être les maîtres de leurs travaux et de leur destin, sans prévoir l’inondation, l’incendie ou le coup de pied du promeneur distrait qui les dispersera.
11’. Les temples sont devenus des lieux publics que les profanes foulent aux pieds et traversent comme des places désertes, et les fidèles s’y rendent comme ils vont à une gare, à un marché ou à une corvée ; et les desservants y sont installés derrière des comptoirs de vente et de mendicité.
12. Un dieu attentif les regarde eux aussi, et ils ne le savent pas. « Tombés dans l’ordure, ils s’y organisent au lieu d’en sortir. Intelligence malheureuse, courage inutile en vérité. »
12’. Il n’y a plus de candidats à la science de Dieu parce qu’il n’y a plus de croyants en la toute-puissance de Dieu. Ainsi les initiés de Dieu sont devenus imperceptibles dans le monde, et ses adeptes ont disparu tout à fait.
13. Il y a l’essence qui féconde, il y a la substance qui est fécondée, il y a le milieu qui est né, il y a la matière qui est créée. Il y a inversement la matière qui est solide, il y a le milieu qui est aqueux, il y a la substance qui est gazeuse, il y a l’essence qui est fluidique. Car ce qui descend est comme ce qui monte dans le sein de l’Unique.
13’. Il nous faut premièrement patienter dans la terre de la foi. — Il nous faut secondement être purifiés par l’eau de la grâce. — Il nous faut troisièmement être fécondés par l’air de l’Esprit Saint. — Il nous faut quatrièmement être mûris par le feu de l’amour. — Il nous faut cinquièmement être multipliés par la mort et par la résurrection dans l’Unique, car tout finit comme tout a commencé.
14. Nous pleurons à présent notre agonie dans le monde, mais un jour nous pleurerons en voyant le sort de ceux qui nous renient et qui nous accablent ici-bas.
14’. Prenons garde que la mort ne nous tombe pas dessus comme la foudre et qu’elle ne nous trouve pas nus et vides comme des calices déjà bus.
15. Hélas ! la pitié et l’amour même des sauvés ne pourront rien pour ceux qui auront choisi les excréments de la mort.
15’. Celui qui veut faire sa paix avec Dieu doit premièrement faire sa paix avec les hommes et avec lui-même.
16. L’aide nous vient de Dieu par l’inspiration des anges et par le ministère des hommes. Qui sera assez stupide pour repousser le conseil des saints et pour refuser l’aide des hommes après avoir sollicité le secours du Très-Haut ? Qui sera assez ignorant pour louer l’instrument en négligeant l’artiste ? Qui sera assez intelligent pour remonter jusqu’à l’ouvrier en passant par l’outil et par l’œuvre ?
16’. Celui qui est invité au banquet du Seigneur reçoit la promesse de la vie. — Celui qui mange à la table du Seigneur bénéficie du don de la vie. — Celui qui boit à la coupe du Seigneur obtient la connaissance de la vie. Mais celui qui baise le Seigneur aux lèvres repose dans le sein de la vie et commande avec le Parfait. « Qui peut donner sans se sentir important ? Et qui peut recevoir sans se sentir diminué ? Celui qui vit en Dieu seulement ! »
17. Les méchants seront contraints pendant tout le temps de leur méchanceté, d’avaler leur vie mélangée à l’ordure. Car l’éternité de l’enfer est faite de l’obstination de la révolte dans l’ignorance, dans l’orgueil et dans la méchanceté.
17’. Ô croyants de Dieu, réjouissez-vous dans vos larmes et riez dans les souffrances de l’exil, car vous vivrez un jour dans la lumière de Dieu et vous deviendrez transparents et purs.
18. C’est l’absurdité du travail forcé et inutile, c’est le péché de la vie mêlée à la mort, c’est l’infection et l’horreur de la pourriture toujours agonisante et toujours renaissante.
18’. Tout vous sera donné sans mélange infâme et sans travail mercenaire, vous boirez à la source sacrée et vous sucerez la pierre sainte, vous habiterez la splendeur, vous louerez et vous bénirez le Seigneur magnifique pendant l’éternité de l’union.
19. Efforçons-nous chaque jour d’affermir notre foi dans la promesse étonnante du Tout-Puissant. Efforçons-nous d’augmenter notre amour pour le généreux qui nous alimente. Efforçons-nous de supporter sans faiblir les épreuves de nos vies obscurcies. Ne nous lassons pas de solliciter le secours de la Providence du Très-Haut. Ne nous rebutons jamais dans notre quête du trésor saint.
19’. À présent, mon Dieu, si nous avons parlé selon ta vérité sainte et si nous avons agi selon ta voie droite, laisse couler ta bénédiction et fais pleuvoir ton amour sur tes enfants bien-aimés. Accorde ton repos à tes serviteurs obéissants. Procure ta paix à tes héros dévoués. Communique ta sagesse à tes amis fidèles. Multiplie ton amour dans tes fils aimants. Fais éclore ta vie pure dans tes images assombries. Envoie ton salut à tes os endormis.
20. Le seul travail qui compte véritablement est le travail sur nous-mêmes. Le reste est un pis-aller provisoire consenti aux nécessités de nos vies prisonnières.
20’. À présent, Seigneur, que nous avons labouré et que nous avons préparé ta moisson, accorde-nous les prémices de ton abondance et donne-nous les gages de ta gloire sans pareille.
21. N’y a-t-il plus parmi nous que des chasseurs de nuages et que des collectionneurs de fumées ? N’y a-t-il plus que des conquérants de poussières et que des conservateurs de mort ?
21’. Honorons les saints et souvenons-nous des croyants fidèles qui ont illustré la parole de foi et d’amour et qui nous ont montré la voie de l’acceptation et de la patience en toutes choses.
22. N’y a-t-il plus que des coques vides que le vent agite en passant ? N’y a-t-il plus que des vaniteux stériles et que des bêtes abruties ? N’y a-t-il plus que des délirants égarés dans les ténèbres du dehors, et que des porcs vautrés dans leurs excréments ?
22’. Louons et bénissons dans nos cœurs les fils de Dieu, les sages et les prophètes qui nous ont transmis la promesse ancienne du Seigneur de vie et qui nous ont révélé la voie sainte qui sauve de la mort.
23. Quand le vent souffle, le désert semble animé, mais lorsqu’il cesse, tout retombe en poussière. Quand les passions s’élèvent, le monde paraît en mouvement, mais quand elles s’apaisent, on ne voit plus que la platitude du doute et on n’entend plus que les borborygmes de l’agonie des bêtes.
23’. Adorons dans nos cœurs le Dieu tout-puissant qui nous arrose de sa grâce, qui nous réchauffe de son amour et qui nous fait germer jusqu’au ciel de résurrection. « Les faillites renouvelées des chercheurs d’arts, de systèmes, de sciences et de lois devraient nous ouvrir les yeux et nous ramener dans la voie de la quête intime du Parfait. »
24. Le malin paraît doucereux et flatteur, aimable et prudent, prometteur et facile, séduisant et sucré, déguisé et habile, éludant et vague, complaisant et charmant, empressé et servile. Le monde le recherche et tombe aisément dans ses filets ; son salaire, c’est la tromperie, la désolation, le tourment et la mort.
24’. Le saint semble dur et grossier, décevant et sévère, rugueux et brutal, maladroit et blessant, exigeant et intraitable, scandaleux et outré, rebutant et amer. Tous le fuient comme la peste. Son cadeau, c’est la vérité, la consolation, la paix et la vie en Dieu.
25. Ô tentation, ô piège ! les impies accaparent tous les biens apparents du monde et délaissent le trésor de la vie.
25’. Ô tentation, ô sauvegarde ! les chercheurs de Dieu doivent mendier leur subsistance, alors qu’ils possèdent l’or qui ne s’épuise pas.
26. Ne prenons pas des airs de sauvés et n’affectons pas la sainteté, car la boue qui nous couvre des pieds à la tête nous rendrait encore plus grotesques et plus risibles aux yeux de tous. — Ne nous arrêtons pas non plus à nos chutes et ne nous endormons pas sur nos petites victoires. Marchons vers le centre, car c’est cela qui compte seulement, et non pas les quolibets ou les acclamations des foules ignorantes. « Faisons premièrement notre soumission à Dieu dans le secret de nos cœurs, ensuite il ne nous en coûtera plus de le publier devant tous. »
26’. N’entendons-nous pas la parole qui sonne vraie ? — Ne reconnaissons-nous pas le ton qui vibre juste ? — Ne sommes-nous pas frappés par le verbe inspiré de Dieu ? — Ne sommes-nous pas remués par la voix intérieure de celui qui nous parle ? — Ne sommes-nous pas réveillés par les clameurs des envoyés de Dieu ? — Ne sommes-nous pas chavirés par les plaintes des crucifiés innocents ? — Ne sommes-nous pas épouvantés par les appels du Très-Haut qui nous prie d’amour ?
27. Rions des railleurs en pensant à notre récompense, et pleurons sur eux en songeant à leur salaire. Ô tristesse, ô douleur du refus des morts et des agonisants !
27’. Il vaut mieux secourir un croyant que d’être enrichi par un impie. Combien il est préférable alors d’aider un seul croyant plutôt que d’enrichir mille impies !
28. Celui qui regarde humblement son Seigneur laisse au temps le soin de décanter la boue du péché dans laquelle il languit misérablement, car ceux qui veulent orgueilleusement l’analyser, ne font que la rendre encore plus opaque et plus malodorante.
28’. La connaissance de l’œuvre sainte, c’est l’obtention de la grâce, c’est la possession de l’amour, c’est l’entrée dans la gloire et dans le règne de Dieu.
29. Les saints de Dieu ressemblent plus à des mendiants errant sur la terre qu’à des puissants établis dans leurs palais, mais les sages de Dieu peuvent se rencontrer partout, car les tentations du monde ne sauraient plus jamais leur faire oublier leur Seigneur magnifique.
29’. En mettant la main à la semence, nous aurons de la pâte, en mettant la main à la pâte, nous aurons du levain, en mettant un peu de levain dans beaucoup de pâte, nous aurons l’abondance du pain qui guérit et qui nourrit les enfants de Dieu.
30. À l’exemple des germes qui se développent longuement dans l’obscurité et qui jaillissent d’un seul coup à la lumière pour mûrir et pour fructifier dans le don d’eux-mêmes…
30’. nous ressortirons de la terre, nous marcherons sur l’eau, nous voyagerons dans l’air et nous reposerons dans le feu, à l’étonnement de tous et de nous-mêmes.
31. Ainsi notre amour en Dieu couve longtemps dans les ténèbres de la foi, pour paraître au jour de l’espérance et se réaliser pleinement dans la vertu multiplicative de l’amour. « Telle est la mort, et telle est la vie en Dieu. »
31’. Car le Seigneur est un compagnon merveilleux qui sauve de la détresse, de l’abandon, de la chute et de la dispersion dans la mort. « Libère ton Dieu, nourris ton amour et tu ne seras jamais triste ni abandonné. »
32. Tout peut nous faillir et nous abandonner, car nous pouvons nous-mêmes tout renier et tout délaisser, mais le Sauveur ne saurait égarer une parcelle de sa chair ni oublier une goutte de son sang dans le monde. Telle est la promesse et tel est l’amour de Dieu. « Bénéficier du sacrement de vie n’est pas nécessairement en disposer, et en disposer n’est pas obligatoirement le connaître. »
32’. Ô sauvegarde de l’amour crucifié ! Ô mémoire du sang dispersé ! Ô puissance du centre éclaté ! Ô vertige du moyeu aimanté ! Ô miracle de la vie retrouvée ! Ô splendeur de l’or épuré ! Ô stupeur de l’unité gardée ! Ô ferveur du cœur extasié ! Ô terreur de l’union exaltée ! Ô mort dans la vie du Bien-Aimé ! Ô paix dans le sein de celui qui EST !
33. À quoi bon prier hypocritement Dieu dans ses temples, si nous violons sa loi dans nos maisons, si nous nous écartons de sa voie dans nos vies, si nous entravons son œuvre dans nos cœurs ?
33’. Pourquoi ne pas dire la vérité ? Seuls les hypocrites et les méchants la redoutent, parce qu’elle dérange leurs machinations, qu’elle dénude leurs mensonges et qu’elle met leurs malhonnêtetés en relief.
34. Un croyant sincère qui prie, qui loue et qui adore Dieu dans son cœur, vaut mieux devant le Seigneur que tous les bien-pensants qui s’exhibent complaisamment sur ses parvis.
34’. L’illusion du mensonge sera tôt ou tard cruellement dissipée par le malheur et par la mort qui seront le partage des trompeurs et des trompés.
35. Allons-nous encore longtemps refuser ou feindre d’ignorer le Livre quand nous nous intitulons croyants de Dieu ? Qui parmi nous peut le prendre en défaut et qui peut le réfuter devant Dieu et devant les hommes ? Ô ingratitude, ô hypocrisie ! nous nous taisons et nous tentons d’ensevelir à nouveau le talent de Dieu. Ô ignorance malheureuse ! nous ne savons pas encore que la vérité de Dieu brise toutes les serrures de la mort et qu’elle brille finalement au grand jour devant tous les hommes de la création, afin qu’ils puissent choisir librement et que le jugement de Dieu soit ainsi rendu irrévocable et sans appel.
35’. Nous sommes tous doués pour les jouissances matérielles parce qu’elles flattent la bête et ne demandent aucun effort. Un grand nombre d’hommes sont doués pour le travail parce qu’il permet de ne pas penser et de s’oublier dans le monde. Une égale quantité d’individus sont doués pour les affaires parce qu’elles s’arrangent du mensonge et qu’elles encouragent la cupidité. Beaucoup sont doués pour les sciences parce qu’elles excitent la curiosité et la dispersion. Un petit nombre est doué pour les lois parce qu’elles demandent de la subtilité et de la réflexion. Une minorité est douée pour les arts parce qu’ils exigent de l’intuition et du renoncement.
36. Quel sort malheureux que celui des timorés, mais quel sort lamentable attend les opposants à la lumière du Seigneur ! « Notre crime est impardonnable, car nous avons raison contre les impies et contre les hypocrites, contre les savants et contre les ignorants, contre les intelligents et contre les médiocres. »
36’. Quelques-uns sont doués pour la recherche de la sainteté parce qu’elle nécessite l’amour du prochain et l’oubli de soi-même. Il n’y a presque personne qui soit doué pour le mystère de Dieu, parce qu’il faut y méditer longtemps et acquérir l’entière connaissance de la nature et de l’homme. Cependant l’amour de Dieu suffit à chacun, et tous peuvent l’acquérir facilement.
37. L’artiste est un perpétuel nouveau-né qui s’étonne de la création apparente. Le savant est un perpétuel curieux qui cherche le ressort de la création présente. Le saint est un perpétuel agonisant qui espère le repos dans la création cachée. Le sage est un perpétuel vivant qui s’active et qui repose avec le Parfait dans le sein de la création épurée. « Dans la semence de l’homme est caché un germe qui consolide la substance de la femme. Ainsi la conscience de Dieu est comme un point qui coagule l’Univers et qui lui donne la forme. »
37’. Il y a les promis par la révélation du Seigneur de charité. Il y a les engagés par la foi dans le vivant d’éternité. Il y a les liés par la grâce du Tout-Puissant. Il y a les enchaînés par l’amour du Bien-Aimé. Il y a les cloués par l’union avec le Très-Parfait. Il y a les agonisants par l’intégration à l’Unique Splendeur. Il y a les morts par la connaissance du Très-Caché. Ceux-là ne parlent plus et n’agissent plus personnellement, car ils demeurent en repos et en acte avec l’Inconnaissable qui EST.
38. C’est la lecture assidue des livres saints qui engendre et qui entretient notre foi et notre courage en Dieu. C’est la fréquentation journalière des Écritures sacrées qui fait naître et qui maintient notre ferveur et notre espérance en l’Unique. C’est l’étude répétée des paroles révélées qui éclaire et qui augmente notre science et notre amour de Dieu et des hommes.
38’. Si nous abandonnons, ou même, si nous négligeons les livres saints, nous retomberons rapidement dans le chaos de l’enfer et de la mort. Si nous les étudions patiemment et si nous les pratiquons dans nos cœurs, Dieu nous fera accéder à sa vie magnifique et il nous mènera à sa paix sans mélange.
39. C’est la pratique patiente et attentive des enseignements sacrés qui délivre et qui perfectionne notre vie en Dieu.
39’. Prions le Seigneur pour qu’il nous permette d’atteindre le fond des choses et de nous-mêmes, afin de pouvoir accéder à sa grandeur divine et à son repos très saint.
40. Les commentateurs bien-intentionnés sont souvent sinistres, mais la fréquentation directe du Seigneur n’est jamais ennuyeuse.
40’. La lumière nous habite et nous environne, mais nous demeurons dans les ténèbres du doute, du désespoir ou de la foi, tant que le Seigneur ne lève pas le voile ténébreux qui nous enserre étroitement de toutes parts.
41. Ce sont les saints et les anges de Dieu qui accoucheront les vrais croyants quand ceux-ci renaîtront dans le monde glorieux du Parfait, et ce sont les méchants et les démons qui accoucheront les impies et les hypocrites dans le monde des bêtes brutes.
41’. Non, la promesse fantastique du Seigneur n’est pas un conte de vieille femme ni une histoire pour amuser les enfants. C’est une réalité que tous verront de leurs yeux, que bien peu toucheront de leurs mains et que quelques-uns seulement connaîtront dans le secret de leur cœur.
42. Tous les livres sages et saints sont du verbe, ils rentrent dans le verbe, ils demeurent dans le verbe et ils ressortent du verbe pour l’instruction et pour la sauvegarde de certains et pour la condamnation des autres. C’est l’épreuve imposée par Dieu, qui prépare ainsi le jugement de la fin des temps et la hiérarchie de sa nouvelle création.
42’. Il y a un certain nombre de fidèles parmi les nations. Il n’y a qu’un petit nombre de croyants parmi les fidèles. Il n’y a qu’un petit nombre de saints parmi les croyants. Il n’y a qu’un petit nombre de sages parmi les saints. Il n’y a qu’un petit nombre de fils de Dieu parmi les sages. Et il n’y a qu’un seul verbe de Dieu parmi les fils divins.
43. Ainsi parmi les croyants qui servent actuellement beaucoup seront servis, et beaucoup parmi ceux qui commandent devront obéir. « Remarquons que les envoyés de Dieu se sont toujours proclamés serviteurs de Dieu et des hommes. »
43’. C’est lui qui fait tout, car tout vient de lui et tout retourne à lui. C’est lui qui inspire les Écritures saintes, c’est lui qui les anime, c’est lui qui les propage, c’est lui qui les garde et c’est lui qui les renouvelle à son gré.
44. Ne méprisons rien ni personne, car tout ce que nous méprisons ne nous apporte plus rien de bon et finit même par se retourner contre nous. Alors la haine et le malheur succèdent au mépris et à la privation. En effet, celui qui se retranche de la vie et de l’amour est finalement retranché par les hommes et par Dieu. Ainsi nous devons prendre garde à ne jamais mépriser les êtres et les choses qui nous font vivre, mais au contraire nous devons les estimer et les aimer toujours plus, afin qu’eux aussi deviennent de plus en plus bénéfiques et aimants.
44’. Ne nous disputons au sujet d’aucune religion ni d’aucune doctrine. Étudions assidûment toutes les Écritures saintes. — Observons la loi de l’Unique, qui est l’amour de Dieu et de sa création tout entière. — Pratiquons sa voie, qui est le retour à la vie pure et sainte des temps anciens. — Accomplissons son œuvre, qui est la fixation de nos vies dans le centre très parfait. Ainsi toutes choses seront accomplies dans la splendeur dernière et première.
45. Combien donc ne devons-nous pas aimer d’amour celui qui nous a donné la vie, qui l’entretient, qui la délivre et qui la restitue dans sa splendeur primitive, quand nous l’en prions saintement !
45’. Les élus de Dieu le perçoivent en essence, ils le contemplent en substance, ils le palpent en naissance et ils le goûtent en corps ressuscité. Ô mystère saint et parfait de la totalité de l’Être !
46. Les grands sages, les grands saints et les grands artistes sont des exemples merveilleux qui ne doivent pas nous décourager de jouer notre petite partie personnelle, car ils sont là comme exemples et comme guides vers la perfection à laquelle nous pouvons tous atteindre, par la simplicité et par la pureté des opérations de nos cœurs.
46’. Ne désespérons jamais de Dieu dans cette vie et ne nous abandonnons jamais dans le monde. Demandons plutôt le secours du Seigneur et remettons-nous entre ses mains habiles, car il délivre notre vie de l’immonde, il la purifie merveilleusement et il la mène jusqu’à la perfection de son Être admirable.
47. Allons visiter les morts, les malades, les prisonniers, les malheureux, les abandonnés et après les avoir secourus, considérons en nous-mêmes le répit dont nous jouissons encore et mettons-nous aussitôt en quête de Dieu avant qu’il ne soit trop tard.
47’. Le Livre peut paraître facile ou difficile, mais il n’est jamais obscur ni éloigné pour celui qui choisit de secourir et d’aimer sans juger. « Dans la tentation, prions pour notre conversion et pour celle de l’ennemi. »
48. Nous désirons collaborer à la réhabilitation et à la réintégration en Dieu de toutes les créatures égarées dans la mort. Tel est notre vœu, car c’est le plus noble travail devant Dieu que séparer avec lui la lumière des ténèbres et cuire sa vérité jusqu’à la splendeur fixe et parfaite.
48’. Il nous faut une grande audace pour bénir nos ennemis, mais c’est le seul moyen assuré de nous en délivrer en les libérant du mal qui obscurcit leurs cœurs et qui les maintient dans la mort aveugle. Dieu ne fait-il pas aussi refleurir toutes choses par sa bénédiction sainte ?
49. Il y a beaucoup plus de fidèles bien-intentionnés que de croyants éclairés. — Il y a beaucoup plus de gens de bonne volonté que d’hommes instruits. Et il y a beaucoup plus d’égarés que de méchants dans le monde.
49’. Si nous ne comprenons rien après avoir étudié et médité le Livre, c’est parce que nous sommes encore enténébrés par la crasse du péché qui nous empêche de voir le miracle de Dieu en action dans le monde et en nous-mêmes.
50. Chacun dénonce le voisin au nom de la morale des hommes, au lieu de rechercher l’amour de l’Unique pour soi-même et pour les siens. « C’est la nature qui nous fait connaître l’homme, et c’est l’homme qui nous fait connaître Dieu. »
50’. Il n’y a qu’une réponse à la méchanceté : prier dans nos cœurs afin que le méchant se convertisse et qu’il cesse de nous tourmenter et de se tourmenter. « Dieu écrase les rebelles et pardonne aux repentants. »
51. Comment se fait-il que ceux qui se recommandent le plus de Dieu, se dénoncent et se déchirent, au lieu de s’aimer et de s’entraider comme des frères issus du même Père et de la même Mère ?
51’. Certains par leur attitude vaniteuse et hypocrite rendent le culte de Dieu suspect ou même odieux à beaucoup. D’autres par l’effet d’un zèle aveugle en sortent avec fracas et le fractionnent à l’infini.
52. C’est qu’ils ont plus confiance en eux-mêmes qu’ils n’en ont en Dieu et en sa sainte loi d’amour. « Ils se battent comme des chiens et ils aboient stupidement après les hommes sages et saints. Mais le fouet divin va les calmer bientôt. »
52’. Tous ces gens-là ne vivent que de l’écorce des Écritures et ils ne soupçonnent pas l’amande précieuse qu’elles renferment. « Celui qui étudie les livres saints et qui parle au Seigneur dans son cœur, pratique la vraie religion. »
53. Ils ignorent le sens caché de la parole inspirée, leurs explications morales en sont la preuve attristante. S’ils comprenaient, ils remonteraient à la source au lieu de se perdre dans des justifications oiseuses et dans des disputes imbéciles. « Dieu effacera les patries, les idéologies, les confessions et les sectes, car les croyants sont tous frères dans l’unité de l’Unique. »
53’. Dieu nous propose l’aventure inouïe et il nous offre le lot incroyable. Il nous présente les clefs de la mort et de la vie et il nous indique la voie qui sauve du chaos de l’absurde. Mais nous nous acharnons stupidement dans la poursuite de la pourriture agonisante et nous crions à l’injustice. Serons-nous toujours aussi imbéciles et aussi incurables ?
54. Ne craignons pas d’être comme des solliciteurs acharnés et comme des mendiants importuns devant le Seigneur, car il n’accorde ses trésors qu’à ceux qui l’en prient avec humilité, avec persévérance et avec amour.
54’. Nous sommes cousus de dettes devant le Très-Haut, mais nous lui demandons toujours plus, afin d’éprouver sa générosité sans borne et afin d’approfondir son amour sans fond.
55. Dans toutes les occasions où nous sommes tentés, prions avec amour pour la conversion du malin, c’est-à-dire pour sa soumission et pour son retour à Dieu. Ainsi ou bien il se convertira, ou bien il s’éloignera et de toute façon nous serons délivrés.
55’. Ce n’est pas en maudissant le maudit que nous le ramènerons au bercail et ce n’est pas en luttant avec lui que nous nous en délivrerons ; c’est en demandant pardon à Dieu pour lui et pour nous.
56. La fréquentation intime du Seigneur nous enlève toute timidité et rend notre foi agissante et notre amour miraculeux ; c’est elle qui nous donne le nécessaire et qui nous comble du superflu, afin que nous soyons les vivants témoins de la bénédiction du Tout-Puissant.
56’. Quand nous sommes tourmentés, prions pour le tourmenteur. Quand nous sommes comblés, louons le Généreux, mais quand nous sommes abandonnés, faisons humblement l’inventaire de notre nudité et de notre nullité et efforçons-nous de rétablir le contact par la méditation des livres saints.
57. Beaucoup d’hommes et de choses passeront, et le Livre sera toujours neuf et scellé comme au jour de sa naissance, dans la pauvreté, dans l’anonymat et dans l’abandon.
57’. Non, nous n’avons pas écrit le Livre en vain, car des multitudes de croyants en seront confirmés dans leur foi, fortifiés dans leur amour et éclairés dans leur quête. Et notre récompense brille déjà dans les mains et vit dans le cœur du Seigneur magnifique.
58. Dieu ne regarde pas beaucoup à nos situations dans ce monde. Il considère plutôt l’état de nos cœurs, car c’est de lui que provient notre sauvetage ou notre perdition, et la couleur de nos peaux n’ajoute ni ne retranche rien à cela.
58’. Tous gagnent leur vie en travaillant, en trafiquant, en jouant ou en volant. Seul celui qui cherche Dieu est contraint de mendier son pain comme un inutile. « Ô merveilleux humour du Très-Haut pour celui qui sait ! »
59. Imbéciles et incurables, ces savants confondent Dieu avec un idéal et la réalité vivante avec la cendre morte.
59’. Imitons fidèlement les procédés de la nature, mais ne copions pas stupidement ses apparences trompeuses.
60. Laissons le monde à ses affaires qui lui apparaissent si sérieuses et si importantes, et occupons-nous des affaires de Dieu qui semblent si irréelles et si lointaines au monde, et souvenons-nous du proverbe qui dit : « Rira bien qui rira le dernier », car l’écho de ce rire envahira le monde et couvrira les hurlements des réprouvés.
60’. La raillerie des intelligents, la grossièreté des brutes, la malice des méchants, l’avarice des cupides, l’orgueil des puissants, la vanité des savants, l’aveuglement des sectaires, l’hypocrisie des habiles, l’indifférence des ignorants, la satisfaction des médiocres éloignent du divin trésor qui recèle la vie sans mélange.
61. Pourquoi toujours mendier auprès des hommes qui ne donnent qu’en rechignant et ne jamais rien demander à Dieu qui nous comble si généreusement ?
61’. Quelques-uns ont trouvé en reposant ce que des multitudes n’ont pas approché en travaillant durement. « Ô mystère insondable du don divin ! »
62. La violence du désir empêche finalement sa réalisation. Aussi, après avoir bien prié, est-il sage de nous en remettre à Dieu du soin de nous exaucer, en demeurant simplement très attentif à ce qui se passe en nous et autour de nous.
62’. Il faut toujours laver pour séparer l’amande de la crasse qui l’entoure, et c’est un grand secret que la nature met journellement en évidence devant tous. Seulement, il faut l’inspiration de Dieu pour comprendre l’évidence de la science divine.
63. Qui pourrait éteindre le mouvement de la vie ? La mort elle-même le masque, mais ne le supprime pas.
63’. Tout demeure dans l’unité de l’Un, rien ne persiste indéfiniment dans les nombres.
64. Donnons tout au nom de Dieu afin que les remerciements, les louanges et les bénédictions aillent à lui et reviennent ensuite sur nous par l’effet de sa grâce débordante. « Les saints aiment ceux qui aiment Dieu avant d’aimer ceux qui les honorent. »
64’. Nous sommes unis à tous les croyants, à tous les hommes et à toutes les femmes de bien comme à des sœurs et à des frères jumeaux qui partagent le même corps et le même esprit dans l’unité transcendante de l’Unique.
65. Labourons patiemment le Livre, et sa moisson nous enrichira et nous nourrira dans la paix de l’Unique. « Le propre des savants du monde, c’est la profanation. Le propre des sages de Dieu, c’est la révélation. »
65’. Le faussaire peut contrefaire l’apparence de la parole sainte, il ne saurait imiter son contenu mystérieux et vivant. Oh ! qu’ils se taisent tous ceux qui nous décrivent la lumière sainte qu’ils n’ont pas vue et qu’ils n’ont pas touchée.
66. Nous n’avons pas un génie poétique ou littéraire pour attirer les hommes à Dieu, nous ne connaissons et nous ne prêchons que la vérité sainte. « Faible appât : terrible hameçon ! »
66’. Notre but doit coïncider avec le but de Dieu qui est notre conversion et notre restitution intégrale, c’est-à-dire le rachat de la bête et de toute la création dans l’unité reconquise du corps, de l’âme et de l’esprit divins.
67. En exigeant beaucoup de soi-même et très peu des autres, on remporte toutes les victoires désirées.
67’. En s’examinant naturellement jusqu’au cœur et en reposant dans le monde, on arrive vite jusqu’à Dieu.
68. Les philosophes rationalistes et les faux prophètes délirants ne sont-ils pas comme les épines qui couronnent le Seigneur et comme celles qui entourent la rose mystique ?
68’. La vérité luit bien dans le puits, mais l’entrée est couverte de ronces enchevêtrées inextricablement.
69. CHOISIRA QUI VOUDRA. COMPRENDRA QUI POURRA.
69’. PRENDRA QUI OSERA. REVOILERA QUI DIRA.
La division n’est pas la mort, c’est la séparation du mélange. Les corps sont divisés non pour être abolis, mais pour être renouvelés.
Et Dieu, qui a ressuscité le Seigneur, nous ressuscitera aussi par sa puissance.
⟴LIVRE XVII
Mais une vapeur montait de la terre et arrosait toute la surface du sol.
À lui le précieux don du ciel, la rosée.
ÈVE NUE RIT
LA JOIE
1. Comme les impies raillent cruellement les hypocrites, et comme les hypocrites condamnent férocement les impies ! Car n’étant ni les uns ni les autres enfants de Dieu, leur sort est de se détruire mutuellement.
1’. Les vrais croyants ne s’exhibent pas, ils ne jugent pas et ne se troublent pas ; car ayant l’esprit constamment fixé sur Dieu, ils n’ont pas le loisir de s’occuper beaucoup du monde ni de ses affaires.
2. Les prédicateurs vantent à présent dans le lieu saint les savants et leurs poisons pour flatter l’ignorance du monde et pour ne pas paraître arriérés ; car la foi, l’amour et la science de Dieu leur semblent trop puérils et trop démodés et ils ont honte de la simplicité de nos premiers pères.
2’. Satan a pris une telle avance que les sanctuaires de Dieu lui servent à présent de banques et d’agences de propagande sans le savoir. « Ô Seigneur compatissant, qui nous sauvera de l’enfer si tu ne viens pas à notre secours rapidement ? »
3. Qui inspire ces pasteurs qui nous vantent le siècle, l’usine, la machine, le poison, la politique, le patriotisme, le social, l’intelligence, le travail et la vanité des hommes, au-dessus de la connaissance et de l’amour de Dieu ? Qui inspire ces panégyristes de l’orgueil et de l’aveuglement humains ?
3’. Ô prêtres, ô moines, ô laïcs qui croyez encore à Dieu dans vos cœurs, rejetez le levain de la science orgueilleuse de Satan. Comprenez qu’il est vain de vouloir organiser ici-bas la pourriture du péché de mort. Souvenez-vous de la parole du maître qui a dit : « Les œuvres du monde sont mauvaises » et ne craignez pas plus que lui la haine du monde en portant ce témoignage devant tous.
4. Les intelligents sont vexés car ils ne peuvent retourner le Livre comme on fait d’un doigt de gant, et leur intelligence est humiliée. Satan leur soufflera-t-il pas une misérable explication et ne voilera-t-il pas leur nullité avec quelque défroque sordide ?
4’. Les méchants nous couvriront d’ordure comme nous les avons couverts de pardon, mais le Seigneur nous délivrera pour toujours de la puanteur de la mort et de la compagnie des mauvais.
5. Et puis les méchants et les hypocrites ne viendront-ils pas à leur secours comme des alliés naturels ?
5’. Eux demeureront à tout jamais avec la compagne infâme et pourrissante, et son feu dévorant les consumera sans répit.
5’’. Quand l’eau virginale nous baignera à nouveau, nous nous redresserons dans nos tombes, lavés de la crasse de la mort, et nous louerons le Seigneur Dieu d’une seule voix et d’un seul cœur.
6. Prions Dieu saintement, et il nous fera connaître d’une façon ou d’une autre la vérité du Livre et l’authenticité de son inspiration, si nous avons encore un doute.
6’. Celui qui fréquente l’ordure finit par sentir mauvais, et celui qui hante les Écritures saintes finit par transpirer le parfum de Dieu.
7. Beaucoup ont cru bien faire en recherchant la mort de Jésus, mais aucun ne l’a suivi dans la résurrection qui justifie seule la passion du beau Seigneur et qui confirme notre délivrance à venir.
7’. Ne souhaitons pas devenir des martyrs, afin que nos successeurs ne soient pas tentés d’être des bourreaux. « La méchanceté, c’est l’absence de Dieu ; la sainteté, c’est sa présence assurée. »
8. Les grands sages et les grands saints sont leur propre moule et ils n’ont que faire de celui des autres, car ils entendent Dieu directement. Mais il est bon et même excellent pour les plus faibles de suivre les voies tracées par les plus forts.
8’. Découvre-toi prudemment, Seigneur, afin que nous ne soyons pas pulvérisés par ta gloire, mais pour que nous vivions de plus en plus devant ta splendeur, pour que tes saints habitent ta lumière et pour que tes sages atteignent ton centre très secret.
9. Nous n’avons rien à expliquer, rien à démontrer et surtout, personne à convaincre ; car l’amour et la paix de l’Unique suffisent à notre contentement.
9’. Tout a été dit, tout est redit et tout sera répété jusqu’à ce que les élus du Seigneur soient entrés dans le secret lumineux de la parole de vie.
10. La preuve de l’origine divine de la création, c’est sa révolte devant la mort et son accoutumance innée à la vie qui ne périt pas.
10’. Le mal est ce qui nous détruit et ce qui détruit les autres. Le bien est ce qui nous anime et ce qui conserve autrui dans la liberté de Dieu.
11. Prions Dieu follement afin de connaître le moyen de notre délivrance immédiate, ou tout au moins afin de bénéficier de cette délivrance au jour du grand jugement seigneurial.
11’. Celui qui est suffisamment détaché du monde peut tout voir et tout entendre sans trouble et sans dommage, mais celui qui n’est pas parfaitement dénudé peut mourir même de la vérité de Dieu.
12. Un riche peut devenir pauvre et humble et un criminel peut se convertir à l’amour, mais comment un malin pourra-t-il jamais devenir simple ? Et comment un pourceau pourra-t-il devenir pur ?
12’. Les trop simples prennent le doré pour l’or et les trop intelligents rejettent l’or à cause du doré, mais tous mangent la crasse du péché sans le savoir.
13. Ceux-ci accumulent les livres rares et poursuivent les connaissances cachées, mais ils renient Dieu et les saintes Écritures, qui pourraient seuls leur donner l’intelligence des textes voilés et la clef des trésors ensevelis.
13’. Ils croient orgueilleusement dérober le secret de la création sans le demander au créateur, et leur subtile intelligence et leur grand savoir sont devenus comme la plus grande stupidité qui soit, car toutes leurs œuvres sont mortes et engendrent la mort.
14. Nous prenons trop souvent pour nous ce qui ne nous est pas destiné et nous adressons aussi trop fréquemment aux autres ce qui ne leur est pas dû, car nous considérons trop le dehors du monde et nous négligeons le dedans de l’homme.
14’. Répondons aux accusations, aux insultes et aux persécutions du monde en nous rapprochant toujours plus du Seigneur de vie qui nous épure dans la fournaise de la solitude et de l’amour saints.
15. Les religieux et les impies nous ignorent, les savants et les ignorants nous méprisent, les intelligents et les stupides nous moquent, les travailleurs et les débauchés nous repoussent. Si un ami nous reconnaît, c’est encore superflu, car notre consolation est en Dieu seulement.
15’. On ne peut convertir un hypocrite, un impie, un méchant ou un égaré en mettant son mal en évidence et en le lui reprochant véhémentement, mais on peut l’améliorer en cultivant le bien qui est demeuré en lui, en l’encourageant et en l’aimant tel qu’il est, si défiguré soit-il.
15’’. Faut-il pas laver une grande quantité de terre pour découvrir une petite émeraude ?
16. Les plaisirs du monde vont disparaissant pour celui qui vieillit, car le corps diminué ne peut plus les supporter ; mais la douceur de l’amour de l’Unique augmente pour le croyant, car l’âme se dégage des liens du corps brut et communique de plus en plus avec son Seigneur. Ainsi, pour certains, la vieillesse est une triste déchéance et pour d’autres, c’est une douce illumination.
16’. La sagesse et la sainteté en Dieu ne dépendent ni des opinions mondaines, ni des obédiences générales ou particulières, ni des rites figuratifs, ni des situations sociales, ni des patriotismes, ni du nombre de femmes ou d’enfants, ni de la quantité des biens, mais plutôt de la connaissance de la cause première et de l’effet dernier.
17. Celui qui approche la vérité de Dieu ne dispute plus de rien avec personne, car il est trop occupé à se remémorer la parole délaissée.
17’. Si nous ne sommes pas assez forts pour convertir la mauvaise compagnie, fuyons-la avant qu’elle nous ait pervertis et gâtés entièrement.
18. Se convertir, c’est se retourner dans la grande eau et contempler la lumière du ciel face à face.
18’. La relation d’un aveugle semblera toujours plus sensée aux autres aveugles que la description d’un clairvoyant.
19. Les prophètes nous auraient-ils trompés en annonçant la résurrection, et le Christ lui-même nous aurait-il abusés en ressuscitant le premier ? Comment les croyants peuvent-ils alors se désoler devant la mort des leurs ?
19’. Défendons le joyau, mais ne défendons pas la crasse qui le recouvre ; rejetons-la plutôt hardiment en prenant bien garde toutefois de ne pas rejeter le joyau en même temps.
20. Devraient-ils pas plutôt se réjouir dans l’espérance de la vie nouvelle et de leur réunion prochaine en Dieu, si leur foi n’est pas vaine et si leur amour n’est pas mort ?
20’. Nous nommerons notre espérance avec foi contre toute apparence contraire et contre toute raison opposante, éliminant ainsi le doute et la peur qui tuent l’âme.
21. Seuls les ignorants se plaignent et revendiquent ici-bas, car les saints bénissent dans la pauvreté et les sages reposent au milieu même du chaos de l’absurde.
21’. Exerçons-nous journellement aux actes de foi en nommant saintement la chose désirée jusqu’à ce qu’elle se réalise devant nos yeux.
22. Une petite charité vaut mieux qu’un grand savoir. Un petit amour vaut mieux qu’une grande richesse. Une petite paix vaut mieux qu’une grande puissance. Mais alors, que valent la grâce, l’amour et la connaissance du Parfait ?
22’. Quand nous bénirons nos ennemis de bon cœur, nous serons proches du Seigneur qui est la source de l’amour jaillissant. En attendant, efforçons-nous de bénir et d’aimer nos amis comme il convient à des croyants de Dieu.
23. Quand la mauvaise parole et quand le mauvais coup sont partis, qui pourra les retenir et qui pourra les effacer ensuite ?
23’. Le saint Nom du Seigneur est une magie toute-puissante dans la bouche de celui qui croit et qui aime véritablement.
24. Quand nous serons dégoûtés des vanités du monde, nous reviendrons au Livre qui nous redonnera le goût de la foi et de la paix si nécessaires à la manifestation de l’amour divin.
24’. Chaque imagination paraît absurde jusqu’à ce qu’elle soit réalisée dans le monde, chacun s’étonne alors, puis tout le monde s’accoutume au prodige et finalement nul n’y fait plus attention.
25. La sobriété, la simplicité et la charité sont les trois grands médecins du corps, de l’esprit et de l’âme, mais l’amour divin est le seul remède à la maladie de nos vies exilées.
25’. En éliminant le doute de la raison par l’exercice constant de la foi en action, nous arriverons non seulement à ne plus tenir compte des apparences contraires, mais encore à les modifier miraculeusement.
26. Nous agirons avec une foi absurde dans la veille jusqu’à ce que nous agissions de la même façon dans le rêve, alors l’unité sera réalisée en nous.
26’. Comment celui qui est faux devant les hommes pourrait-il être vrai devant Dieu ? Et comment celui qui s’est livré aux passions du monde pourrait-il encore entendre son Seigneur ?
27. Comme les hommes violentent leurs corps ! Comme ils torturent leurs esprits et comme ils briment leurs âmes ! « Remercions Dieu pour la bonne créature et louons-le pour le fruit excellent. »
27’. En délaissant les mirages du monde et en se consacrant à la quête de l’unité divine, le sage évite bien des complications, bien des excès et bien des douleurs inutiles.
28. Ils ont astucieusement et criminellement substitué leurs paroles profanes aux paroles saintes, et à présent, les médiocres suivent aveuglément leurs mots d’ordre, sans même connaître l’enseignement du maître divin dont ils se recommandent avec impudence.
28’. Les chargés d’âmes ont délaissé la moisson de vie pour la moisson de mort. Trompeurs et trompés seront rejetés, et il y aura de la stupéfaction, des pleurs et un désespoir affreux comme la fange du bourbier où ils seront relégués avec les méchants.
29. Comment croire quand l’injustice et la mort nous sapent ? — Comment bénir quand la misère et le désespoir nous écrasent ? — Comment être vertueux quand tout nous manque et comment être détaché quand le monde nous opprime ?
29’. La sainteté est vraiment une épreuve d’endurance et de force que bien peu d’hommes peuvent subir sans succomber. « Paraître ceci ou paraître cela, se trouver ici ou se trouver ailleurs, quelle importance pour celui qui s’est oublié en Dieu ? »
30. Il vaut mieux avoir à faire à mille incroyants qu’à un seul sectaire aveugle et ignorant.
30’. La pire ignorance n’est-elle pas de se prendre au sérieux et de croire à sa propre intelligence ici-bas ?
31. Beaucoup prétendent avoir le monopole exclusif de Dieu, et en conséquence, chacun excommunie le voisin au nom de la grâce, de l’amour et de la connaissance qu’il ne possède manifestement pas.
31’. Ne nous laissons ni marquer, ni dénombrer, ni mener, ni exploiter comme du bétail. Répondons aux oppresseurs par la sobriété, par la simplicité, par la charité de nos vies et proposons-leur la liberté des croyants dans le sein de l’Unique.
32. Ne nous affublons ni de diplômes, ni de décorations, ni de titres, ni de grades, ni d’aucun déguisement pour faire illusion au monde et à nous-mêmes. Demeurons plutôt dans la vérité de Dieu qui suffit à tout.
32’. Ne préparons ni discours ni sermons d’hommes. Parlons de Dieu uniquement quand l’Esprit Saint nous inspire, ou taisons-nous humblement afin de n’être trouvés ni ennuyeux ni menteurs.
33. Les méchants qui se disent religieux ont seulement troqué leur impiété naturelle contre l’hypocrisie sociale, et leur méchanceté s’est multipliée au-dedans d’eux-mêmes, les empoisonnant irrémédiablement.
33’. La prétention de certains faux croyants n’a d’égale que leur aveuglement lamentable. Quelle cruelle désillusion sera la leur quand paraîtra la vérité du Très-Haut ! Combien ils regretteront leurs vains jugements et combien ils pleureront sur leur amour absent !
34. Ceux qui observent extérieurement la loi font bien. Ceux qui vivent dans leur cœur l’amour du Parfait font mieux.
34’. Qui oserait s’exposer comme un chien devant tous ? Et qui pourrait s’entretenir d’amour en public avec le Bien-Aimé ?
35. Ceux qui éprouvent une défaite ou une peur en conservent un grand ressentiment et exercent une grande vengeance, et ceux qui se livrent aux passions du monde sont perdus pour Dieu.
35’. Celui qui menace disparaît soudainement avant d’avoir pu frapper, et celui qui promet se dérobe avant d’avoir rien donné. « Seules les promesses du Seigneur s’accomplissent certainement. »
36. Comme ils se croient en sûreté, les médiocres qui ne vivent que pour eux ! — Comme ils se croient habiles, ceux qui frustrent leurs frères ! — Comme ils se croient intelligents, ceux qui dominent les malheureux ! — Comme ils se croient forts, ceux qui écrasent les faibles ! Ô croyants, considérez la fin de ceux qui disent « MOI » et jamais « DIEU ».
36’. Ô comme ils ont bien réussi, les puissants et les malins ! — Ô comme ils sont fiers, les intelligents et les pourvus ! — Ô comme ils sont assurés, les troupeaux de médiocres et d’hypocrites ! La terre est déjà entrouverte pour les recevoir et ils ne comprennent pas, car le contentement d’eux-mêmes les aveugle, et tous vont à la fosse dont on ne revient pas.
37. Comment se débrouilleront-ils dans le bourbier de la mort ? — Comment fausseront-ils la justice dans les ténèbres éternelles ? — Comment s’approprieront-ils la bonne part dans la fosse d’immondices ? — Comment seront-ils astucieux et menteurs parmi les démons déchaînés ? — Comment seront-ils féroces et impitoyables au milieu des bêtes fauves ? — Comment digéreront-ils en paix dans les abattoirs de l’enfer ?
37’. Ô croyants de Dieu, changez votre façon de vivre alors qu’il en est temps encore et recherchez avec acharnement les clefs qui ouvrent les portes du séjour de vie, de joie, d’amour et de paix. Abandonnez vos encombrants bagages aux avides et demandez au Seigneur d’amour et de connaissance la route ainsi que le viatique, comme des enfants égarés et repentants, car c’est l’inouï, l’incroyable, l’énorme que nous devons demander à Dieu qui est tout-puissant pour nous satisfaire.
38. Nous ne plions pas la vie à nos lois ; c’est la vie qui s’accommode de nos lois et qui persiste malgré elles.
38’. Heureux celui qui reconnaît son incapacité et sa nullité ici-bas, car celui-là ne craint pas de mendier journellement sa vie à Dieu !
39. Ô Seigneur, pardonne aux ignorants, aux égarés et à tous les pécheurs repentants, mais frappe les hypocrites qui affectent publiquement la piété et la vertu et qui sont remplis de haine, de dissimulation et d’orgueil.
39’. Il n’est pas question d’être gracieux et aimable avec les méchants et avec les hypocrites. Il est plutôt question de les fuir quand on les rencontre et de les éviter ensuite par tous les moyens.
40. Ceux qui comptent uniquement sur leur savoir, sur leur intelligence, sur leur courage ou sur leur habileté ici-bas, se condamnent sans le savoir aux travaux forcés à perpétuité, et toute leur peine demeure vaine et stérile devant Dieu. « Nos pères qui ont reçu l’Esprit Saint n’étaient pas fous, et ce qu’ils enseignent est la vérité. »
40’. Remarquons bien comment les ignorants et les impies repoussent systématiquement tout ce qui pourrait les aider, les soigner, les consoler et les sauver, car leur ignorance et leur refus de Dieu font obstacle à l’aide des hommes saints et à celle de la Providence du Seigneur.
41. Prouvez-nous ceci, faites-nous voir cela, disent les incroyants avec la prétention vaniteuse de fainéants qui veulent tout connaître sans rien rechercher.
41’. Comme les vaniteux sont susceptibles, comme ils se vexent de ne pas comprendre l’évidence, comme ils se punissent d’être cuistres et ignorants !
42. Un miracle même ne saurait les satisfaire, alors que le spectacle du grain qui germe illumine l’esprit du croyant.
42’. Comment pourrait-on délivrer ceux qui s’enferment volontairement dans la grossièreté spirituelle et dans le culte d’eux-mêmes ?
43. Ce n’est pas la robe qui fait le sage ni la barbe qui fait le prophète, mais seulement l’inspiration du Seigneur qui visite ses vivants en secret comme il veut et quand il lui plaît.
43’. Celui qui n’essaie pas de se faire passer pour ce qu’il n’est pas et qui accepte même de passer pour autre que ce qu’il est, possède déjà une grande paix.
44. Une poignée de scribes incroyants ou hypocrites pourront-ils enterrer le talent de Dieu pour toujours ? Les croyants ne publieront-ils pas un jour le témoignage de leurs yeux, de leurs oreilles et de leurs cœurs ?
44’. Nous reconnaîtrons les hypocrites et les impies à ce que les uns et les autres demeurent cois quand on les invite à parler spontanément du Seigneur de vie. « Toujours attristants et toujours sinistres comme des morts. »
45. L’argent des méchants brûle comme l’enfer, car leur méchanceté y est attachée comme la mauvaise odeur est attachée à l’ordure.
45’. Mais le champ transforme le fumier en moisson, et la grâce de Dieu transfigure le péché en lumière de vie.
46. Tous ont un métier, un emploi ou une pension qui les font vivre et prospérer. Seul celui qui s’est consacré à la quête et à la louange du TrèsHaut ne reçoit aucun salaire ici-bas. Mais sa récompense n’est-elle pas déjà visible dans le ciel et n’est-elle pas inscrite sur la terre des saints ?
46’. Celui qui aura supporté sans faiblir la pauvreté et l’abandon pour la gloire de son Seigneur, sera un jour comblé des richesses de l’Univers et il sera chargé de distribuer la manne de vie aux croyants charitables et fidèles.
47. Beaucoup de riches disent : « Nous nous moquons de l’argent », et leur vie est remplie de bassesses et de rapines pour l’acquérir.
47’. Comment celui qui possède la liberté et l’amour divins, pourrait-il encore oublier son Seigneur pour courir après le vent et après la mort dans le monde ?
48. D’autres se vantent de leurs bonnes œuvres et font, sous le couvert de la charité, travailler les misérables pour la moitié du salaire qui leur est dû. Comme ils se saluent gravement sur les parvis des temples de Dieu, et comme ils festoient joyeusement dans les lieux infâmes !
48’. Ô comme les pourvus trouvent le monde présent agréable, juste et bien ordonné, comme ils sont satisfaits de leurs superstitions, de leurs vanités, de leurs hypocrisies et comme ils se sentent bien installés dans leur cloaque pourrissant !
49. Ô comme ceux qui mendient leur vie aux riches sont humbles devant l’argent, comme leur dos est souple et comme leurs mains sont bénisseuses devant l’hydre triomphante !
49’. Si le salaire des hypocrites et des méchants est l’enfer, quelle sera la punition de ceux qui les encouragent et qui les bénissent au nom du Seigneur d’amour et de justice ?
50. Comme ils sont accommodants avec les crimes des gagnants, comme ils sont résignés devant l’injustice qui écrase les malheureux, et comme ils patientent avec le désespoir des abandonnés !
50’. Nul croyant ne peut y penser sans avoir le poil qui se lève de terreur. « L’homme pur est seul à ne pas courber l’échine devant l’argent, et c’est le signe rare et précieux entre tous. »
51. Les sages ne guident plus les nations, parce qu’ils semblent trop ignorants dans ce monde. Et les saints n’inspirent plus les églises, parce qu’ils ne paraissent pas assez « bien-pensants ».
51’. Si les doués occupaient ici-bas les places qui leur reviennent, que deviendrait la multitude des médiocres et des ratés qui s’agitent dans leurs entreprises vaines ?
52. Certains jouent aux sages et ne répondent qu’en hochant gravement la tête ou en se dérobant subtilement, mais c’est le plus souvent pour cacher leur ignorance, leur impuissance et leur platitude de médiocres incurables.
52’. D’autres vantent la vie bestiale dont ils jouissent présentement, et moquent la vie spirituelle qu’ils ignorent. Au lieu de dire humblement : « Nous ne voyons rien », ils affirment orgueilleusement : « Il n’y a rien ».
53. Chacun refait sa petite expérience d’aveugle et chacun propose son petit système d’agonisant, sans s’apercevoir de l’immensité de la création de Dieu et sans soupçonner la présence de la doctrine unitive des maîtres.
53’. Ne nous cassons pas la tête sur le Livre, cassons-nous y plutôt le cœur, afin que notre âme précieuse germe et fructifie devant Dieu dans le secret du commencement et de la fin de toute chose.
54. C’est une sûreté pour tous de refuser d’introduire et d’entretenir la mort dans soi-même et dans les autres, quel que soit le motif invoqué par les marchands de mort.
54’. Aucune foi, aucun secours, aucun médicament, aucun aliment, aucune assurance ne doivent être imposés de force à quiconque sous le fallacieux prétexte de le sauver.
55. Il n’y a pas de hasard pour les croyants, le hasard est pour ceux qui demeurent volontairement égarés dans le bourbier de la mort ténébreuse et puante.
55’. Les méchants sont les instruments de la destruction des impies, comme les saints sont les instruments de la délivrance des croyants.
56. Le monde n’accorde ses suffrages qu’aux destructeurs et aux empoisonneurs professionnels, aux criminels et aux brutes de métier, aux oppresseurs et aux voleurs patentés ; et les noms des saints et des justes sont partout remplacés par ceux des méchants.
56’. Ceux qui sèment préparent la résurrection, et ceux qui prient font descendre la bénédiction de Dieu. Ainsi les plus utiles et les plus estimables parmi tous les hommes paraissent les plus inutiles et les plus méprisables dans le monde aveugle et sourd.
57. La quantité des croyants importe peu devant Dieu, c’est leur qualité qui compte seulement. Ainsi ceux qui ne brillent pas dans la nuit ne rejoindront pas la lumière de la splendeur première.
57’. Comme les saints de Dieu sont joyeux et vivifiants, et comme les méchants sont sinistres et mortels ! « Celui qui a remplacé son intelligence par l’amour de Dieu et des hommes, est un maître. »
58. La liberté parfaite serait de ne pas avoir de besoins et pas de désirs. « Ce qui scandalise les hypocrites n’étonne même pas le saint de Dieu ; quant au sage, il lui suffit de considérer attentivement ce qu’il possède pour se trouver comblé. »
58’. L’Esprit Saint s’unira premièrement au corps pour le réanimer ; ensuite l’âme divine unira ces deux dans la splendeur pour les glorifier dans le sein du Seigneur magnifique.
59. Le malin ne saurait être opposé à Dieu comme un égal, car c’est encore une partie du tout qui travaille sans le savoir à la purification hiérarchique de la création dispersée.
59’. L’abondance et la paix descendent sur les saints de Dieu, comme la désolation et le malheur s’abattent sur les méchants. Ainsi tous sont diversement enseignés ici-bas, mais les apparences sont trompeuses.
60. Les saintes Écritures ne sont pas imbéciles, et les églises ne sont pas idiotes, car ce qu’elles enseignent est préférable pour l’homme et ce qu’elles défendent lui est dangereux. L’expérience le prouve bien, car l’intelligence ne suffit pas ici pour se protéger des effets du péché primordial. L’obéissance aux lois de Dieu, voilà l’intelligence qui éclaire et qui sauve !
60’. Ceux qui, habillés, voyagent en bateau ne doivent pas mépriser ceux qui nagent nus dans la grande eau ; et ces derniers ne doivent pas moquer ceux qu’on mène en barque. Car beaucoup des premiers font naufrage et plusieurs des derniers sont dévorés par les bêtes de la mer, avant de pouvoir parvenir au but.
61. La sobriété, la simplicité et l’étude attentive des Écritures saintes sont la sauvegarde du sage enquêteur de Dieu. « Comme les climats chaleureux et comme les lieux paisibles facilitent la quête du Seigneur de vérité ! »
61’. Quant à ceux qui demeurent sur la terre étrangère, ils se détruisent mutuellement et sont séparés de la vie essentielle aussi longtemps que dure leur exil volontaire. « Les méchants sont quelquefois les outils de Dieu sans que nul ne s’en doute. »
62. Ce sont nos mauvaises pensées, nos mauvaises paroles et nos mauvaises actions qui donnent entrée en nous aux démons du malheur, du désespoir et de la mort et par-dessus tout, la curiosité imprudente de nos premiers parents.
62’. Ce sont nos bonnes pensées, nos bonnes paroles et nos bonnes actions qui nous sauvent du mélange infâme et de la mort pourrissante. Mais par-dessus tout, c’est l’amour de Dieu qui nous illumine et qui nous purifie du poison antique.
63. Si Satan plaçait une fois l’amour de Dieu au-dessus de sa propre intelligence et de sa propre estime, il serait sauvé et réintégré dans l’unité vivante de l’Unique.
63’. Il ne s’agit pas pour nous de convaincre le monde, il s’agit plutôt d’aider les hommes de bonne volonté, comme a fait notre beau Seigneur en montrant la sortie de l’enfer mitigé.
64. Comme les méchants sont habiles pour déchirer et pour détruire, et comme ils sont pauvres pour encourager et pour secourir !
64’. Plutôt des racines crues, du pain grossier et de l’eau claire avec la paix du Seigneur que toutes les richesses de la terre avec la rage venimeuse des méchants !
65. Ceux qui auront soutenu les œuvres destructrices de Satan, soit par goût du lucre, soit par penchant naturel, ne devront pas récriminer à l’heure du règlement des comptes, car nul ne les aura obligés à augmenter le désordre de la mort.
65’. Beaucoup aboient après les juifs par entraînement ou par jalousie, sans savoir que ce sont eux qui nous ont transmis la lumière de Dieu héritée de la terre d’Égypte et qu’ils en ont été privés à cause de leur mauvaise conduite comme il nous arrive aussi présentement.
66. La justice du Seigneur sera minutieuse et implacable pour les méchants et pour les hypocrites, soyons-en assurés et tremblons d’être à notre grand étonnement comptés parmi eux.
66’. Le malheur frappe durement les rebelles et les impies, mais le pardon et la bénédiction du Seigneur descendent en abondance sur les généreux et sur les croyants.
67. Les sages ont pénétré et révélé le mystère de la chute et de la réintégration de l’homme et de toute la création en Dieu. Cependant, pour les croyants, il s’agit de se sauver plutôt que comprendre et qu’expliquer le secret divin.
67’. La vraie philosophie ne repose pas sur les subtilités délirantes de l’esprit, ni sur les principes rigides d’une morale, ni sur l’observance minutieuse de rites, mais plutôt sur la connaissance du contenu du noyau de toute chose.
67’’. Tout ici-bas est comme l’ombre mouvante de l’unique réalité divine.
Il y a diversité de dons, mais c’est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous.
Ton jugement, c’est la lumière qui se lèvera.
⟴LIVRE XVIII
Ah ! les pasteurs sont stupides. Ils n’ont pas cherché IEVE, aussi n’ont-ils pas prospéré et tout leur troupeau a été dispersé.
Et moi à mon tour, je vous ai rendus méprisables et vils pour tout le peuple parce que vous ne gardez pas mes voies et que vous avez égard aux personnes en appliquant la loi.
VIE NEUTRE
L’ATTENTE
1. Ce jour-là, nous serons plusieurs en un même corps et en un même esprit, et le mystère de la communion dans le sein de l’Unique sera révélé aux croyants, sans qu’ils sachent le pourquoi ni le comment de l’union sainte.
1’. La sagesse, c’est reposer en paix et observer attentivement le renouvellement de la création du Seigneur. La sainteté, c’est se taire et écouter en soi la voix de l’Unique.
2. C’est une grande délivrance que d’être prêt à quitter cette vie à n’importe quel moment, dans l’espérance du jour du Seigneur.
2’. Il est dur de croire sans avoir vu, et cependant qui peut voir sans avoir cru follement l’incroyable ?
3. Certains travaillent comme des forcenés dans des endroits sinistres pour fabriquer la mort qui les estropiera, qui les empoisonnera ou qui les volatilisera, et ils ricanent quand on leur parle de l’enfer, car leur petite intelligence et leur orgueil dérisoire les ont aveuglés totalement.
3’. Satan est comme nous-mêmes une lumière occultée et tarée, mais qui essaie par tous les moyens d’attirer dans sa malheureuse compagnie les âmes égarées ici-bas, au lieu de faire sa soumission et de retourner dans le sein très pur de la splendeur divine, comme l’espèrent les sages, les saints et les croyants de Dieu.
4. Vivant d’artifices dans un monde truqué, ils collectionnent les maladies physiques et mentales les plus horribles et ils parlent de leur science qui sauvera l’humanité, car leur vieux fond de révolte les a rendus sourds à la voix de la sagesse divine.
4’. Qui pourrait juger le rebelle si ce n’est le Seigneur juste et clairvoyant ? Pour nous, il suffit de faire le bien et de mettre notre confiance en Dieu seul. « L’enfer est rempli de feu, de machines, de puanteur et de cris. Le paradis est plein de lumière, de fleurs, de parfums et de chants. »
4’’. Rien pour l’homme révolté contre Dieu. Rien pour la femme révoltée contre l’homme. Rien pour l’enfant révolté contre la femme. Rien pour le monde révolté contre l’enfant.
5. Le malin ne dit jamais son nom franchement, il préfère se cacher sous une fausse identité ou bien il dit « MOI ».
« L’écorce. »
5’. Je suis l’essence, je suis la substance et je suis le nœud, dit le Seigneur du centre.
« L’amande. »
6. Les croyants postulent l’âme divine, les saints et les sages l’incubent et la manifestent ici-bas ; mais les méchants et les brutes stagnent dans les limbes de l’oubli et s’amenuisent dans la périphérie ténébreuse.
6’. Les âmes divines tendent par leur nature à se séparer de la croûte du péché et à rejoindre leur centre éternel pur et vivant. « Les prophètes sont venus collecter la poussière d’or dispersée dans la boue de ce monde. »
7. Il nous faut devenir indifférents aux biens matériels et comme absents aux dons spirituels, afin de pouvoir goûter pleinement la béatitude de l’union divine. « Voilà la pauvreté au monde, et voilà la richesse en Dieu. »
7’. Les écorces innombrables de la création attirent les hommes bien mieux que l’amande substantielle qui y est enfermée. Ainsi beaucoup préfèrent les explications subtiles et superficielles qui les égarent dans le nombre, plutôt que la pensée concise et profonde qui les centrerait dans la lumière de l’Unique.
8. Si nous voulions développer systématiquement l’enseignement des Écritures saintes, nous nous apercevrions finalement que toute la création est comme la prodigieuse bibliothèque du verbe incarné.
8’. L’intelligence nous a été donnée afin que nous la chevauchions et qu’elle serve à notre délivrance, et non pas pour qu’elle nous écrase et nous enchaîne dans ce monde mélangé.
9. Celui qui commence à voir clair en soi n’est vraiment pas fier de sa vie dans ce monde, ensuite il n’en est même plus honteux, quand il connaît la faiblesse de sa condition de créature incarnée dans la boue ténébreuse et malodorante.
9’. Le péché est ce qui engendre en nous la puanteur de la misère, du crime, de la maladie, de la décrépitude et de la mort. « Qui peut se glorifier d’habiter le fumier ici-bas ? Et qui peut se vanter de s’être purifié de sa mauvaise odeur ? »
10. Qui est le plus grand parmi les prisonniers de la geôle ténébreuse et puante ? — Qui est le plus estimable parmi ceux qui pourrissent dans le cul-de-sac de la mort ? — Quel est le plus connu, mais quel est le meilleur ? — Quel est le plus honoré, mais quel est le plus utile ? — Quel est l’intelligent, mais quel est le saint et quel est le sage ? — Quel est le sauvé, et quel est le sauveur ? — Qui sert, et qui est servi véritablement ?
10’. Celui qui partage son pain, ou celui qui le fait pour tous ? — Celui qui nettoie la geôle, ou celui qui l’organise ? — Celui qui console, ou celui qui soigne ? — Celui qui prie pour la délivrance de tous, ou celui qui souffre avec les damnés ? — Celui qui se révolte dans l’esclavage, ou celui qui s’y installe ? — Celui qui prêche la bonne conduite, ou celui qui montre l’issue cachée ? — Celui qui veut forcer les serrures de la mort, ou celui qui recherche la clef qui les ouvre toutes ?
11. Les poètes et les artistes chantent la beauté perdue, mais bien peu savent qu’ils pleurent leur Seigneur renié. « Le mal n’EST pas, mais il demeure comme l’enveloppe de ce qui EST. »
11’. Même quand Dieu inspire l’homme sage et saint, le mystère de la création, celui de la chute et celui de la régénération demeurent encore à sa taille et le résultat de sa quête n’est pas assuré !
12. Tous se demandent ce qu’en penseront les autres, mais nul ne songe jamais à ce qu’en dira Dieu.
12’. La pire tentation, c’est vouloir réformer et sauver le monde au lieu de faire son propre bonheur et son propre salut.
13. Il n’y a qu’une réponse aux tentations attirantes ou repoussantes et à l’absurde du monde présent. C’est la prière du saint, le repos du sage, ou bien le rire de l’absent !
13’. Ô piège subtil, ô fantasmagorie du monde des images ! Il suffit que nous ayons raison en Dieu une fois seulement, et les contradictions et les approbations du monde ne nous toucheront plus.
14. Les sages et les saints de Dieu sont aussi intelligents que quiconque, mais ils ont plus de confiance dans la connaissance et dans l’amour de leur Seigneur que dans leurs capacités particulières.
14’. Celui qui croit en Dieu est comme celui qui ne croit plus à rien dans ce monde, mais avec cette différence que le premier est joyeux, alors que le second est désespéré.
15. Si nous repoussons l’œuvre d’un homme, tant pis pour lui ; mais si nous rejetons l’œuvre de Dieu, tant pis pour nous. Ainsi il vaut mieux ne pas avoir connaissance de la parole du Seigneur plutôt que la refuser quand elle se présente à nous.
15’. Comme les hypocrites se cabrent devant la vérité et devant la simplicité de la parole de Dieu quand ils ne peuvent pas la faire servir à leur platitude de lâches et à leur sécurité de moribonds aveugles ! Les vers sont plus intelligents certainement !
16. Nous pourrons indifféremment agir ou reposer quand nous rirons également de nos savants travaux et de nos déguisements ridicules.
16’. C’est notre absence qui permet sa présence, et c’est notre dépouillement qui fait notre royauté.
17. Aux inspirés, la révélation. Aux intelligents, l’instruction. Aux habiles, le travail. À tous, l’éducation. Aux brutes endurcies et aux voyous, le fouet. Aux dénonciateurs, la mort.
17’. Le Seigneur connaît seul le rang et la qualité de chacun de ses envoyés et il les fait luire différemment pour l’enseignement des ignorants, pour la sauvegarde des croyants, pour l’illumination des saints et pour la résurrection des sages.
18. Qui peut mordre dans un fruit juteux sans remercier le divin jardinier ? — Qui peut contempler la courbure parfaite d’un sein de femme sans louer le magnifique artiste ? — Qui peut reposer nu sur le sable chaud sans sourire à son Seigneur ?
18’. Hélas ! à présent le ver est dans le fruit, le parasite est dans le sable, la malice est dans la femme et la mort nous habite. — Qui nous délivrera de l’infection de la pourrissante étrangère ? — Qui nous rendra l’entière jouissance de la vie sans mélange ?
19. Qui peut se sentir vivant et sain sans chanter un hymne d’amour à son créateur ? Et que faisait d’autre notre père ADAM dans le jardin d’Éden ?
19’. Ô beau Seigneur de compassion, viens à nous qui te prions désespérément et follement dans nos cœurs exilés. — Délivre tes petits enfants bien-aimés avant que l’horreur les engloutisse entièrement.
20. Aucun méchant n’entrera dans la paix du Seigneur et aucun malin ne découvrira l’arbre de vie, car les méchants seront écrasés par leurs méchancetés et les malins seront enlacés par leurs ruses. C’est la justice de Dieu qui ne brime personne, mais qui rend à chacun son propre salaire.
20’. Celui qui est violenté par autrui peut trouver un défenseur bénévole ou même, fuir ou apitoyer son bourreau ; mais celui qui se violente lui-même, par qui sera-t-il défendu et par qui sera-t-il délivré ? « Celui qui est éveillé et fort en Dieu paraît endormi et faible dans le monde. »
21. La création est comme l’imagination de Dieu coagulée par le verbe. Le repos est comme l’imagination divine liquéfiée par l’Esprit Saint.
21’. La vie mange la vie et la vie s’unit à la vie ; quoi d’irrémédiable, et quoi de triste à cela ?
22. La vraie sagesse ne consiste pas à vivre, en aveugle prudent, une vie transitoire dans ce monde mélangé ; c’est plutôt chercher, découvrir et manger la vie purgée de la mort afin de devenir comme elle, immortel et pur.
22’. La sagesse des hommes n’est qu’un accommodement forcé avec la pourriture de la mort. — La sagesse divine est la possession de la vie éternelle et la délivrance de la mort.
23. Les livres saints et sages sont bien nécessaires pour connaître le Seigneur, mais une bêche et un arrosoir ne sont pas inutiles pour approcher la sainte Mère.
23’. Il y a une grande différence entre l’intelligence des hommes et celle de Dieu, mais peu comprennent cela.
24. Ceux qui sèment l’amour seront délivrés par l’amour. Ceux qui sèment la haine seront écrasés par la haine. Avec un peu de patience la chose est facile à vérifier dans le monde.
24’. La réalité est ce que l’homme incarne assez nettement pour le rendre sensible dans le monde. — L’idéal est ce que l’homme n’incarne pas assez puissamment pour lui donner vie et corps ici-bas.
25. Celui qui s’occupe de son propre bonheur et de son propre salut, n’est pas tenté de troubler le monde sous le fallacieux prétexte de sauver les hommes et de leur donner son bonheur et sa paix, qui se nomment en réalité pour les autres « violence, contrainte, esclavage, misère, désespoir et mort ».
25’. Les seules occupations sérieuses ici-bas ne sont pas le travail, le plaisir, le gain, la puissance ou la gloire, mais bien certainement, la contemplation, la prière, l’amour et la vie qui germe en nous et autour de nous constamment.
26. Celui qui ne se violente pas est un homme sage, heureux et aimé, car il n’est pas tenté non plus de forcer la nature ambiante ni les autres créatures.
26’. La vraie chance, c’est être assez reposé, assez gratuit et assez vide pour entendre la voix intérieure de Dieu et pour recevoir sa bénédiction sans entrave.
27. Ô croyants de Dieu, reconnaissez l’authenticité de la voix qui vous appelle à la régénération terrestre et à l’union céleste. « Approcherons-nous toujours Dieu et ses saints pour mendier sordidement et jamais pour louer gratuitement ? »
27’. Les ignorants et les hypocrites se présentent en pions tristes, sévères et ennuyeux, alors que les saints de Dieu sont passionnants, joyeux et libres. Autant les uns sont compliqués et sinistres, autant les autres sont simples et droits.
28. La plus grande erreur pour l’homme est comme le plus grand doute et comme la plus grande timidité envers Dieu ; et la plus grande vérité inversement est comme la plus grande foi et comme la plus grande familiarité avec lui.
28’. Celui qui a usé le Livre commence à vivre avec Dieu. — Celui qui l’a compris commence à vivre en Dieu. — Celui qui l’a expérimenté commence à vivre Dieu.
29. La création est un secret de Dieu que bien peu ont connu ou connaîtront clairement, et cela humilie les intelligents du monde qui ne peuvent parvenir à le percer avec leur petite intelligence.
29’. Il y a aussi beaucoup d’incroyants, mais il y a bien peu de fils de Dieu disposés à manifester l’incroyable ; car où serait alors le mérite de notre quête ? Et comment s’établirait la hiérarchie du monde futur ?
30. Le sage véritable est comme un petit enfant qui suit la nature divine et qui se fait obéir des éléments sans en être autrement étonné.
30’. Dieu s’est reposé dans l’homme pur pour jouir de sa propre création si merveilleuse et si variée.
31. Si nous tombons ou si nous croyons tomber, conservons les yeux fixés sur notre beau Seigneur d’éternité au lieu d’analyser la boue où nous nous débattons lamentablement depuis la première chute, car ce n’est ni l’intelligence ni la main de l’homme qui séparent le vrai du faux et qui sauvent de la mort, mais plutôt la grâce et l’amour du Seigneur très savant et tout-puissant qui pardonne et qui délivre ses enfants bien-aimés.
31’. Ayant renoncé à la boue du dehors, mon Seigneur me donna une perle ; ayant renoncé à la perle, il m’offrit un diamant ; ayant renoncé au diamant, il me présenta un rubis ; mais comme je n’avançais pas la main cupidement, il se donna lui-même, et je mangeai mon Bien-Aimé avec prudence afin de ne pas mourir de sa grande perfection. « Ô saveur unique du vivant d’éternité ! »
32. La générosité envers les autres et envers soi-même est le meilleur placement qu’on puisse faire dans ce monde et dans l’autre ; donnons donc un peu de notre bien avant qu’on ne nous prenne tout et ne refusons pas notre secours aux humbles chercheurs de Dieu.
32’. Chacun n’aura finalement à faire qu’aux images bonnes ou mauvaises de sa foi particulière. Seul celui qui aura espéré Dieu sans rien imaginer, jouira pleinement du repos et de la liberté de l’Unique.
33. Rien à espérer au milieu des impies et des médiocres. Rien à espérer non plus parmi les intelligents et les savants du monde. Rien à faire, surtout, dans la compagnie des hypocrites et des méchants.
33’. Notre prochain est celui qui s’éveille à la réalité de Dieu et non pas celui qui s’endort dans le rêve de la bête. « Qui peut se vanter d’entretenir son Seigneur parmi la mauvaise compagnie ? »
34. N’importunons pas constamment les sages enfants de Dieu par des questions indiscrètes et vaines ; efforçons-nous plutôt de percevoir silencieusement la pensée de leur cœur qui nous mènera à la vie et au repos de la splendeur de l’Unique.
34’. Qui nous mènera à la demeure du sage de Dieu et qui nous introduira auprès de lui ? Qui nous montrera le lieu saint et qui nous découvrira la lumière qui l’habite en secret ? Ô crèche cachée, ô secret premier et dernier !
35. Recherchons imprudemment le vivant qui peut nous sauver de la fosse d’immondices et fuyons les agonisants et les morts qui nous entraînent dans leurs ténèbres imbéciles et satisfaites. « Combien de sages mondains sur lesquels on a oublié de placer l’étiquette “factice” ! »
35’. Beaucoup sont endormis au point de s’oublier dans des occupations vaines ou sinistres, et bien peu sont assez éveillés pour se chercher dans les livres saints et pour se trouver sous le voile de la création mélangée.
36. Ce ne sont pas des savants et des penseurs qu’il nous faut, mais plutôt un seul sage connaisseur et un seul saint possesseur du secret de Dieu.
36’. Ô sainte lumière de vie qui luis dans les ténèbres de la fin, combien ont vu ton salut ? Et combien le verront avant le jugement définitif ?
37. Il ne nous appartient pas de dévoiler devant tous la secrète beauté de la création de Dieu, il nous appartient seulement d’affirmer son existence dans le cœur de l’homme et de l’Univers.
37’. Ô vie fugitive, le Seigneur du ciel te fécondera et te fixera dans la paix de l’or saint, et ta gloire illuminera les mondes et ta vertu désaltérera les croyants de l’Univers grandiose !
38. Comme tout nous devient égal et léger quand nous goûtons l’amour et la liberté de l’Unique, et comme tout nous déchire et nous écrase quand nous nous attachons passionnément aux êtres et aux choses du monde transitoire.
38’. Ne craignons pas tellement de pécher en détail, craignons plutôt de ne pas aimer Dieu et ses créatures comme il faut et redoutons de nous conduire comme des hypocrites satisfaits dans ce monde divisé et obscurci.
39. Procure-nous l’absence de nous-mêmes, Seigneur, afin que nous jouissions de ta présence sainte et afin que nous trouvions ta vérité cachée qui sauve de la mort.
39’. Fais que nous n’entendions que ta voix véridique, fais que nous ne voyions que ta face rayonnante, fais que nous ne recevions que ton souffle vivifiant, ô beauté sainte et voilée !
40. Il ne suffit pas d’étudier, il faut aussi comprendre ce que nous étudions ; et à quoi bon comprendre si nous n’expérimentons pas en nous-mêmes la vérité de Dieu ?
40’. La prière et la louange ne sont pas des fins en elles-mêmes, mais plutôt l’apprentissage du silence en Dieu, qui seul nous instruit pleinement.
41. Beaucoup sont devenus sinistres à force de se prendre au sérieux ; prions donc le Seigneur afin qu’il nous apprenne à rire de nous-mêmes avant que le piège du monde se soit refermé sur nous pour toujours.
41’. Dieu est libre et vivant, c’est pourquoi il entend aussi, comme il faut, l’humour absurde de la mort et la liberté stupéfiante de la vie. « Vive notre Seigneur le feu qui s’incarne dans notre maîtresse l’eau ! »
42. Les religions des larmes et du repentir sont pour les êtres égarés dans la mort. La religion de la joie et de la liberté est pour les fils de Dieu retrouvés dans la vie.
42’. Nous n’obtiendrons ici-bas et ailleurs que ce que nous pourrons entendre, voir et goûter sans danger de périr, car le Seigneur ne violente personne, fût-ce par le don inestimable de la vie éternelle.
43. Qui aurait l’intelligence d’écouter en soi la voix du Très-Haut, et qui aurait la sagesse de s’y conformer ? Celui-là verrait que la plus grande soumission à Dieu engendre la liberté parfaite dans ce monde et dans l’autre.
43’. La bonne volonté en Dieu ne violente rien, pas même soi. La bonne volonté en soi violente tout, même Dieu. « Qui dénude l’amande et qui fait germer la semence ? N’est-ce pas l’esprit du Seigneur tout-puissant ? »
44. Les prudents qui repoussent à présent l’Écriture deviendront les gardiens des paroles précieuses. Ô humour très subtil du Parfait, qui fait garder par les aveugles la lumière des enfants du ciel !
44’. La vraie liberté est comme une sainte folie qui se connaît et qui se garde en Dieu. « Qui pourrait empêcher les fils de Dieu d’entrer en possession de leur héritage saint ? »
45. Il a fallu dix ans pour écrire le Livre ; qui donc refuserait de le lire pendant le même temps avant de poser des questions inutiles ? « Plus nous agiterons la boue, plus elle se troublera et plus nous la laisserons reposer, plus elle se décantera naturellement. »
45’. En voulant aller directement à la lumière de vie, nous risquons de nous épuiser contre la vitre de la raison humaine et de ne pas sentir le courant d’air de l’inspiration divine qui vient de la porte étroite, cachée dans l’ombre de notre prison terrestre.
46. L’utilité de la souffrance est de nous dégoûter de notre exil dans ce monde mélangé de mort.
46’. Celui qui sait tout est comme celui qui ne sait rien, avec cette différence que le premier est libre, alors que le second est esclave.
46’’. Les interdictions, les séparations, les limitations et les jugements aveugles sont dans nos têtes et dans nos cœurs avant d’être dans nos maisons et dans le monde.
47. Quand on demandera à celui qui a vécu saintement sur cette terre en union avec Dieu : « Qu’as-tu fait de bien ? », il répondra : « Rien », car seuls les méchants s’excuseront dans le vain espoir de cacher leurs crimes innombrables.
47’. C’est notre silence qui permet à Dieu d’énoncer en nous sa vérité sainte et c’est notre repos qui lui permet d’accomplir en nous sa perfection ultime. « Sobriété, Simplicité, Solitude, Salut, Sainteté. » « Solution, Sel, Santé, Secours, Sagesse. »
48. Grimpons à l’échelle de l’amour et de la connaissance sans vaines discussions sur la façon d’empoigner les barreaux et sans vains regrets sur ce que nous laissons en bas.
48’. Nous voilà submergés par les savants et par les intelligents du monde, qui nous expliquent toutes choses, mais qui ne nous donnent rien de la vie impérissable.
49. Le grand homme est celui qui attire Dieu dans son cœur, qui le fixe en corps et qui le manifeste en soi et dans le monde.
49’. Il ne s’agit pas ici de disputer sur des mots ; il s’agit plutôt de trouver le Dieu qui nous délivre de la mort.
50. Soyons des pécheurs qui font quelquefois le bien plutôt que des dévots qui font souvent le mal.
50’. Tout ce qui est noble, généreux et grand effraie les êtres médiocres et suscite leur haine. « L’amour seul pourrait encore les sauver. »
51. Nul ne saurait haïr ceux pour lesquels il prie devant Dieu, car ils sont comme les arrhes de sa victoire sur la mort qui nous a dispersés ici-bas.
51’. Remarquons bien que l’action de Dieu tend à unir doucement, alors que l’action du démon tend à séparer brutalement.
52. Quand nous aurons atteint la pérennité de la vie cachée, nous supporterons tout en silence et nous assisterons aux catastrophes de l’absurde en souriant.
52’. Nous serons illuminés par ce que nous n’aurons pas inventé, et nous serons sauvés par ce que nous n’aurons pas fait. (Parole étrange pour les intelligents et pour les savants de ce monde.)
53. Nous devons aimer Dieu et ses créatures pour eux-mêmes et pour ce qu’ils sont réellement, et non pas pour nous-mêmes et pour ce qu’ils semblent être. Tel est le véritable amour.
53’. La vérité scandalise les ignorants, c’est pour cela qu’elle demeure voilée dans le monde et qu’elle n’est montrée qu’à celui qui a renoncé à toute passion et à tout jugement humains.
54. Le Livre n’est pas pour les savants du monde, ni pour les satisfaits, ni pour les agités, ni pour les vendus, ni pour les impies, ni pour les sectaires. Il n’est surtout pas pour les hypocrites.
54’. N’y a-t-il plus sur la terre que des hommes satisfaits de leur petite intelligence et rassurés par leur misérable raison ? N’y a-t-il plus ici-bas que des ruminants d’ignorance et que des repus de vanité ?
55. Enfoncés dans la boue, nous devons nous laver journellement. Tournant en rond, nous devons persévérer dans notre marche vers Dieu. Aveugles et sourds, nous devons rechercher la lumière du Parfait et écouter sa parole sainte.
55’. Le repos, le silence, la prière, la méditation, l’oubli de soi sont les moyens d’arriver à la présence divine et à la communion avec Dieu, qui nous procurera tout ce que nous lui demanderons.
56. Beaucoup croient ruser avec Dieu sans voir que c’est Dieu qui se joue d’eux. « Lamentable aveuglement, triomphe dérisoire ! »
56’. Ajoutons toujours ceci après avoir prié le Seigneur généreux : « Exauce mon désir, Père tout-puissant, si cela ne doit pas me nuire ou nuire à tes enfants. »
57. Celui qui retient sa langue évite la plus fréquente occasion de pécher qui soit.
57’. L’homme de poids et la femme élevée engendrent le monde parfait.
58. La liberté et la puissance premières sont comme la sortie de la conscience individuelle et comme l’immersion dans la conscience divine où Dieu agit et repose éternellement.
58’. Toutes les disputes de mots sont piètres choses eu égard à la réalité tangible du Seigneur incarné que nos yeux voient, que nos mains touchent, que notre bouche goûte et que notre cœur abrite secrètement.
59. La foi véritable en Dieu et en son salut ne peut naître et grandir que dans l’absolue liberté du choix particulier.
59’. Le Père est caché dans le Fils comme le Fils est caché dans la Mère et comme la Mère est cachée dans les ténèbres de nos cœurs.
60. Devenons assez pauvres et assez simples afin que nul ne puisse nous dérober ni nous humilier, ou bien devenons assez riches et assez instruits pour que personne ne soit capable de nous appauvrir ni de nous décevoir.
60’. Si Dieu habite en nous et nous submerge, nous ferons aussi les œuvres de Dieu comme des fils bien-aimés comblés par l’amour. « Qu’il fait bon écouter notre Dieu, et comme son verbe nous féconde merveilleusement quand nous sommes trouvés purs, simples et croyants ! »
61. Il faut une générosité folle et un amour insensé pour pardonner et pour bénir nos ennemis, mais il faut une sainte humilité pour leur demander pardon d’avoir raison contre leur haine et contre leur aveuglement.
61’. Si Dieu ne passe pas en nous et si nous ne passons pas dans notre prochain, nous ne pourrons pas recevoir et transmettre la bénédiction qui sauve de la mort. « Les méchants se punissent de leur méchanceté en repoussant le secours du Seigneur et celui des hommes saints et sages. »
62. Que chacun honore Dieu dans le tabernacle secret de son cœur et que chacun écoute le prophète intérieur qui le mènera au Très-Unique, au Très-Parfait, au Très-Vivant, au Très-Pur.
62’. Tout nous est possible, Seigneur, quand tu parais en nous, mais lorsque tu te retires, nous voilà plus impuissants et plus stupides que les pierres du chemin.
63. L’amour, la beauté et le don répugnent aux médiocres et aux hypocrites, car eux-mêmes sont haineux, laids et plats, et c’est pour cela qu’ils tentent de souiller et d’étouffer tout ce qui les dépasse.
63’. C’est le Seigneur qui nous rend saints et vivants à jamais, mais c’est nous qui accordons ou qui refusons l’entrée secrète de nos cœurs.
64. C’est Dieu qui nous marque pour la quête de la vie et c’est lui qui nous mène au but quand nous sommes humbles, aimants et obéissants à sa loi d’amour. « L’union du ciel et de la terre fait paraître la lumière du Parfait. »
64’. Les sages et les saints transpirent Dieu malgré eux, et c’est en cela seulement qu’ils ont de la vertu. « Ainsi ce que nous faisons n’est rien, c’est ce que Dieu fait en nous qui est tout. »
65. Nos mains sont impuissantes à trier la vie de la mort, et l’humble connaissance de cette vérité permet seule à Dieu et à la nature d’accomplir notre délivrance ici-bas.
65’. Le saint Nom de Dieu est une réalité vivante et palpable qui peut tout. C’est un mystère que bien peu ont connu ou connaîtront.
65’’. Soyons pieux et croyants, soyons simples et patients, soyons sobres et paisibles, et cultivons la terre du jardin d’Éden avec l’aide du Seigneur tout-puissant.
66. L’amour pénètre, l’amour anime, l’amour exalte, l’amour multiplie, l’amour unifie dans la splendeur.
66’. C’est par la pureté de la grâce que nous aimantons l’amour divin et que nous incarnons Dieu en nous.
67. Les savants et les intelligents du monde seront bien déçus en lisant le Livre et ils diront : « Ça n’a ni queue ni tête », car, justement, le Livre est un cercle qui garde l’âme et qui lui parle au-dedans.
67’. La parole de Dieu humilie d’abord notre raison, ensuite elle communique secrètement sa lumière à l’âme avant d’illuminer l’esprit, si nous sommes attentifs et persévérants dans notre quête sainte.
68. Qui présentera au Très-Haut un miroir d’amour et de pureté, afin qu’il habite à nouveau parmi nous dans la splendeur première et dernière ?
68’. Notre vierge a conçu sous les regards du Très-Haut et elle nous a donné un fils qui a vaincu la mort et qui perfectionnera tous ses frères estropiés.
69. Il n’y a plus de hasard et il n’y a plus de doute pour celui qui fixe Dieu en esprit et qui l’héberge dans son cœur. Il n’y a plus ni tribulations ni mort pour celui qui est un avec le Parfait dans sa lumière sainte.
69’. Celui qui a vu le Seigneur, qui l’a touché et qui l’a goûté, n’a plus ni foi, ni crainte, ni espérance, car la possession de la vie l’illumine et l’anime pleinement dans la certitude expérimentale de l’Unique.
70. Si nous désirons demeurer vivants, nous devons aimanter en nous la vie céleste afin qu’à son tour elle nous attire jusqu’à elle, où il n’y a plus de place pour la mort.
70’. Qui a vu la lumière de Dieu briller sur la terre des morts ? — Qui a vu l’or du Seigneur féconder la terre des hommes ? — Qui a vu le Sauveur très parfait se multiplier dans la terre des vivants ?
71. Beaucoup ont la nostalgie et l’envie secrète de Dieu et ils en sont profondément troublés et désolés, car ils ne savent pas à qui leur amour s’adresse.
71’. C’est l’amour sincère de Dieu et le désir ardent de sa connaissance qui provoquent les conditions de notre rencontre et de notre union avec le glorieux vivant.
Et que servirait-il à un homme de gagner le monde s’il perdait son âme ?
En tout et par-dessus tout, repose-toi en Dieu, ô mon âme, parce qu’il est le repos éternel des Saints.
⟴LIVRE XIX
Oui, dans ces jours-là, je répandrai de mon Esprit sur mes serviteurs et sur mes servantes, et ils prophétiseront.
Celui qui est de Dieu entend la parole de Dieu, c’est parce que vous n’êtes pas de Dieu que vous ne l’entendez pas.
NUE VITRÉE
LE MIROIR
1. Les prophètes nous ont parlé de la substance et de l’essence de Dieu, et nous épluchons leurs textes pour y découvrir l’histoire, la morale, la poésie ou la divination ! Ô stupide aveuglement des intelligents et des savants ! Ô médiocrité satisfaite des croyants !
1’. N’adaptons pas les Écritures saintes à nos petites pensées, car tout ira mal à la fin pour nous. Plions plutôt nos désirs à la parole de Dieu afin de jouir de la protection et de l’aide du Tout-Puissant. « Si nous nous accrochons aveuglément à nos opinions, comment Dieu pourra-t-il nous instruire dans la vie ? »
2. Qui saura piéger la vie du TrèsHaut ? Qui saura la mûrir et qui saura la manger afin de devenir comme elle pur, libre et éternel ?
2’. Ce sont de belles pensées, disent les gens superficiels en feuilletant le Livre, mais ceux qui sont instruits pensent : « Ce sont les serrures et ce sont les clefs de la porte de la vie ».
3. Si nous fréquentons les brutes, les méchants, les malins ou les impies, nous deviendrons comme eux. À plus forte raison, si nous fréquentons Dieu et ses amis véritables, nous serons aussi faits à leur image et nous goûterons au breuvage de vie pure.
3’. Le Livre parle à l’intuition, à l’amour et à la mémoire profonde, et non pas à l’intelligence, à la volonté et à la raison superficielle des hommes. « Ce que dit le Livre est grand, mais ce qu’il induit en chacun de nous est incommensurable. »
4. Les sages et les saints authentiques attribuent à Dieu seul le mérite et la louange de tout ce qu’ils font en son NOM. « Ô parfaite humilité de la connaissance vraie ! »
4’. La science de la nature mène à la connaissance substantielle, et la science de Dieu mène à la connaissance essentielle. Celui qui possède ces deux trésors est héritier du Seigneur éternel et vivant.
5. La religion et l’initiation transmettent un enseignement précieux ; il nous appartient de le ressusciter par notre foi, de l’animer par notre amour et de le manifester par notre connaissance. « Les faux croyants sont mille fois plus repoussants que les brutes impies. »
5’. Que diront les hypocrites de celui qui nomme Jésus-Christ son frère aîné ? « Le silence, ensuite la calomnie, puis la persécution s’il leur est permis ; car Dieu les ayant quittés, c’est le démon qui les inspire à présent. »
6. Le Livre peut bien recéler la vérité, si nos cœurs n’y participent pas c’est comme un trésor inutile devant lequel tous meurent de faim et de soif.
6’. Ne pensons pas : « Nous deviendrons riches, ensuite nous chercherons Dieu ». Mais disons plutôt : « Nous chercherons Dieu, ensuite nous serons riches ».
6’’. Ne nous attablons pas devant une multitude de mets et de boissons compliqués ; disposons plutôt un plateau avec un mets et un breuvage simples comme le pain et le vin qui contentèrent nos sages pères.
7. Puisque nous ne supportons pas la vérité simple, nue et parfaite, il faut bien que le Seigneur la pare de feuillages et de fleurs pour nous contenter. Seulement il y a aussi mis des épines afin d’éloigner les superficiels et les inconstants. « La couronne du Seigneur peut bien éborgner les imprudents et les présomptueux qui se jettent inconsidérément à sa tête au lieu d’adorer à ses pieds saints et parfaits. »
7’. Si nous sommes pusillanimes dans notre quête et si nous craignons d’examiner le fondement de toutes les choses créées, nous ne trouverons et nous ne goûterons jamais Dieu ici-bas. « Comme nous sommes faibles, tristes et pauvres quand le Seigneur est absent de nous-mêmes, et comme nous voilà animés, réjouis et comblés quand il habite à nouveau dans nos cœurs ! »
8. Le Livre confirme les Écritures saintes comme un enfant dévoué répond pour ses parents bien-aimés.
8’. Dieu s’est fait homme dans la chair d’Adam afin que nous soyons fait Dieu dans l’or de Christ.
9. « Plus nous donnerons et plus nous recevrons. » Ainsi l’enrichissement vient de la libre circulation des biens, et l’appauvrissement vient de leur immobilisation.
9’. Celui qui aime Dieu et sa création sera aussi aimé par tous les êtres, car en aimant nous sauverons et nous serons sauvés.
10. Celui qui espère s’asseoir au banquet divin ne doit pas s’étonner de ne pas recevoir ici-bas les miettes qui comblent les passants étrangers à l’amour. « Ô fidélité de la première et de la dernière heure ! »
10’. Celui qui maudit les riches et les puissants s’interdit de jamais devenir comme eux sous peine d’être maudit par lui-même, mais celui qui méprise les pauvres s’est déjà condamné à la solitude de la mort. « Ô comme le don secret lave la souillure du péché ! »
11. Qui que nous soyons et quoi que nous fassions, gardons l’esprit et le cœur fixés en Dieu afin de ne pas nous perdre dans les ténèbres de ce monde.
11’. Faisons en sorte que notre pensée ultime soit toujours en Dieu afin de purifier nos visions pendant le recueillement de la veille, pendant celui du sommeil et pendant celui de la mort.
12. Celui qui adore Dieu en esprit et en acte est assuré de ne pas se tromper ici-bas et ailleurs.
12’. Celui qui cherche Dieu va à la solitude de la nature. Celui qui a trouvé Dieu revient à la société des hommes.
13. Il n’y a pas d’obstacle infranchissable pour celui qui cultive la bonne volonté en Dieu, car les terreurs de la nuit s’évanouissent devant la lumière du Parfait.
13’. Notre Seigneur qui habite la vie ne nous abandonnera pas à l’heure difficile de la séparation et du dépouillement, pourvu que nous brillions au moins comme des vers luisants dans la nuit du monde.
14. Si les médiocres peuvent encore germer, ce ne peut être que par la chaleur de l’amour fraternel. Qui ne voudrait tenter de sauver les plus déshérités des humains ?
14’. Que les sages et que les saints qui nous ont mis sur la voie de Dieu soient bénis à jamais dans le sein très pur et très vivant de l’Unique Splendeur !
15. Celui qui reconnaît ses torts désarme ses ennemis et les transforme en alliés.
15’. Tout ce que nous aimons nous sert et nous libère. Tout ce que nous haïssons nous échappe et nous opprime à la fin.
16. Dieu nous recherche bien malgré nous quand nous nous cachons de lui. Pourquoi ne le rechercherions-nous pas malgré lui quand il se dérobe à nous ?
16’. Le baptême de l’eau nous délivre et nous purifie, mais le baptême du Saint-Esprit nous féconde et nous anime pleinement.
17. Des légions d’ignorants nous expliquent la sagesse profane. Des nuées de savants nous imposent la science étrangère. Des foules d’intelligents nous dévoilent les secrets de la création. Une multitude de courageux nous promet le bonheur pour demain. Des millions de délirants multiplient la folie de tous. Des milliers de faux prophètes nous décrivent leurs ténèbres.
17’. Et vous, pauvres révoltés qui vous agitez, qui hurlez et qui maudissez dans l’exil de la mort, on vous prête du génie et vous n’avez pas même l’intelligence de rechercher en silence et avec patience la sortie de votre prison ténébreuse et glacée. Vous vous heurtez à la surface des mots et des choses et vous lancez inutilement des mots et des choses à la surface du monde.
18. Et nous continuons tout abasourdis de leurs cris et de leurs gesticulations, à périr dans l’ignorance et dans la peur, dans le doute et dans la haine, dans la solitude et dans le désespoir, dans l’esclavage et dans la misère, dans la vieillesse et dans la maladie, car nous avons perdu comme eux la connaissance divine et répudié la conscience de Dieu, croyant stupidement ordonner le chaos avec notre intelligence, avec notre raison et avec notre volonté dérisoires.
18’. Vous êtes aussi peu perspicaces que votre conseiller le démon, qui jugea stupidement sur l’apparence le premier homme que Dieu lui présenta. Vous qui glorifiez journellement la haine, Dieu vous a déjà retranchés de la terre des vivants et vous vous haïrez toujours plus jusqu’à l’éparpillement final. « Comme la chute des méchants est brutale et inattendue ! Et comme Dieu pardonne à ceux qui reviennent à lui librement ! »
19. C’est la puanteur du péché qui nous a menés à la fosse. Mais c’est la bénédiction de Dieu qui nous sauvera de la mort, et c’est l’amour réchauffant du Seigneur qui nous confirmera dans la splendeur de la vie.
19’. Notre semblable et nous-même formons le même être et renfermons la même lumière. C’est un secret de Dieu que bien peu approchent et que quelques élus seulement possèdent en entier, car les âmes demeurent distinctes même dans le sein de l’Unique.
20. Il appartient à chacun de chercher Christ, de le trouver et de l’héberger pour être sauvé, transformé et perfectionné en lui.
20’. C’est l’or céleste que nous devons incarner (après nous être débarrassés de la pourriture du péché), afin d’être affermis dans la vie éternelle.
21. Les stupides et les ignorants veulent toujours avoir raison en tout parce qu’ils se fient à eux-mêmes ou aux autres. Les sages et les saints acceptent aisément d’avoir tort, car ils s’en remettent à Dieu qui connaît exactement le fondement de toutes choses.
21’. Consultons le Seigneur et obéissons-lui en tout si nous voulons conserver la vie, la santé, la paix, l’honneur et les biens qu’il nous a consentis ici-bas. « Les saints de Dieu rayonnent l’amour pour toutes ses créatures. »
22. Beaucoup sont remplis de bonnes intentions envers les saintes Écritures, mais ils sont également pleins d’ignorance en ce qui concerne leur signification essentielle.
22’. Si nous possédions une simplicité et une foi capables d’expérimenter l’invraisemblable, nous pénétrerions dans le secret des paroles divines et nous retrouverions l’immortalité du jardin de Dieu.
23. Les étoiles, la lune et le soleil brillent sur le monde pendant que les intelligents et que les savants disputent et délirent sur le Dieu invisible qui envoie la vie et qui la tire à soi.
23’. Celui qui est pur, lumineux et vivant ne s’en soucie pas, cependant il éclaire dans l’épaisseur de la nuit. « Être et l’oublier. »
23’’. L’Esprit de Dieu, en revenant sur lui-même, produit la lumière.
24. Quand nous aurons saisi le Seigneur par sa chevelure dorée, quand il aura transfiguré en palais notre misérable chaumière, quand il sera devenu notre compagnon victorieux et indéfectible, alors nous bénirons en connaissance de cause les Écritures saintes de toutes les nations et nous louerons Dieu et son œuvre sans livres et sans instructeurs.
24’. Il est aisé de reprendre les pécheurs, de fustiger les hypocrites et d’assommer les impies, mais il est difficile de les convertir par l’exemple et de les sauver par l’amour, quand on ne connaît pas visiblement l’unité dont ils sont issus et où ils retourneront. « Celui qui connaît le mystère de Dieu aime naturellement son prochain sans hésitation et sans effort. »
25. Toute la création nous est offerte par Dieu ; il suffit que nous choisissions et que nous semions pour récolter en abondance, soit les œuvres de vie, soit les œuvres de mort.
25’. Partout des savants qui épluchent les saintes Écritures, partout des intelligents qui profanent les mystères de Dieu, et pas un saint qui purifie le corps terrestre, et pas un sage qui accomplisse l’incarnation divine.
26. La terre est noire et va devenir encore plus noire, ensuite elle blanchira peu à peu et les astres reparaîtront, les étoiles innombrables, la lune pure et blanche et le soleil vivant et doré, qui seront les signes de l’incarnation triomphant sur la mort.
26’. C’est la main de l’homme qui dispose la terre, mais c’est la nature qui opère et c’est Dieu qui anime. « Si nous aimons et si nous bénissons constamment Dieu et sa création, celui-ci nous aimera et nous bénira aussi toujours à travers elle. »
27. Devenons bienveillants et courtois avec nos prochains et envoyons de bonnes pensées même à nos ennemis, afin qu’ils se convertissent à Dieu dans leur cœur. Car les malédictions ne peuvent que les enfoncer dans leurs opinions et dans leurs haines obscures. Gardons-nous d’eux cependant tant que leur méchanceté n’est pas éteinte.
27’. Les méchants viennent de notre manque de bonté, les pauvres viennent de notre manque de charité, les incroyants viennent de notre manque de foi, les révoltés viennent de notre manque d’obéissance, et ainsi pour tout le reste. Voilà pourquoi c’est toujours notre faute et jamais celle des autres, contrairement à ce que nous croyons communément.
28. Ô dérision ! le Seigneur nous a donné le Livre en premier, et les étrangers le reçoivent avant nous, car nous croyant intelligents dans le monde, nous sommes devenus stupides devant Dieu.
28’. Mieux nous connaîtrons notre indignité et plus nous serons épouvantés par l’immensité de la miséricorde du Seigneur et par la grandeur du don qu’il nous accorde.
28’’. Qui se lavera dans le feu et dans l’eau afin de redevenir pur et blanc comme le sel de la vie ?
29. Si Dieu est mal servi, éloignons-nous des mauvais serviteurs, mais ne rejetons pas le Seigneur comme font les ignorants qui jugent grossièrement du dedans sur les apparences du dehors.
29’. Celui qui se sent libre et riche en Dieu ne se désole plus de sa pauvreté ni de l’esclavage de ce monde, car il goûte déjà les arrhes de la vie éternelle. « Enivrante promesse ! Incroyable donation ! »
30. Nous devons nous efforcer d’imiter Dieu qui ne contraint rien ni personne au nom de sa vérité et de sa justice, mais qui mûrit tout patiemment par la douceur de sa grâce et de son amour.
30’. La bonne volonté en Dieu nous délivre des contraintes du monde, car elle nous permet d’entendre l’enseignement du Seigneur et elle suscite l’action de sa Providence cachée.
31. La sagesse des hommes n’est pas la sagesse de Dieu, car l’une regarde le dehors tandis que l’autre considère le dedans.
31’. L’eau vient du corps et le corps semblablement vient de l’eau et ces deux s’unissent dans la gloire du Sauveur très parfait.
32. Ne condamnons et ne repoussons pas les égarés, car il n’y a pas longtemps encore que nous étions parmi eux. Prions plutôt afin qu’ils viennent avec nous par la grâce délivrante et par l’amour unissant du Très-Haut.
32’. Quand le Seigneur nous visite, nous voilà comme des dieux illuminés, mais quand il nous quitte, nous voilà comme des bêtes stupides. Qui peut prévoir le moment de sa venue, et qui peut prédire le temps de son départ ?
33. La grâce, l’amour et la foi engendrent les œuvres vivantes ; quand ils disparaissent, le devoir, la loi et la contrainte font les œuvres mortes.
33’. Nos désirs sont dix mille choses éparpillées et mortes ; la volonté de Dieu est une seule chose concentrée et vivante.
34. Si nous bénissons Dieu et sa création, la vie s’ouvrira à nous et nous recevra dans son sein. Si nous maudissons tout, la vie se fermera à nous et nous demeurerons abandonnés dans la mort.
34’. Nos saints maîtres spirituels sont les instruments de la bénédiction de Dieu. Honorons-les et prions-les dans le Seigneur afin qu’ils nous mènent jusqu’à la sainte lumière de Dieu qui nous fait tant défaut ici-bas.
35. Qui ira jusqu’au bout de la parole du Seigneur ? Qui pénétrera la vérité lumineuse des écrits saints ? Qui pratiquera la science divine sur la terre ? Qui entrera vivant dans le royaume de l’éternité ?
35’. Seigneur, nous baisons ta terre sanctifiée, nous semons ton cœur caché et nous recueillons précieusement ta gloire incomparable qui nous fait vivre éternellement.
36. Si nous possédons la grâce et l’amour et si nous les pratiquons envers tous, nous pouvons ignorer la loi et le devoir, mais si nous ne vivons pas encore en Dieu, la loi et le devoir doivent nous guider comme la canne dure et sèche guide les pas de l’aveugle.
36’. La prière et la louange qui montent vers Dieu retombent sur nous en bénédictions multipliées, comme les bonnes pensées que nous envoyons aux vivants et aux disparus, nous reviennent en dons inattendus.
37. Un seul verset éclairera celui-ci alors qu’un autre ne verra rien dans tout le Livre. « Il n’y a pas de pourquoi ni de comment pour cela qui EST. »
37’. Comme la parole du Seigneur fait germer le croyant et comme elle endurcit l’impie ! « Ô profondeur, ô mystère, ô jugement secret du Parfait ! »
38. Soyons ceux qui ne se débrouillent pas, mais qui ont foi dans le Dieu qui ordonne le chaos. — Soyons ceux qui n’exigent rien, mais qui cherchent la vie éternelle. — Soyons ceux qui ne s’emparent pas, mais qui prient celui qui comble de bénédictions. — Soyons ceux qui n’envient pas, mais qui se réjouissent des dons du Dieu d’amour. — Soyons ceux qui ne s’agitent pas, mais qui œuvrent avec le Dieu de résurrection. — Soyons ceux qui ne condamnent pas, mais qui demandent pardon à Dieu pour tous. — Soyons ceux qui n’entassent pas, mais qui imitent le Dieu de charité. — Soyons ceux qui ne se battent pas, mais qui patientent avec le Dieu qui sépare et qui unit. — Soyons ceux qui ne tuent pas, mais qui manifestent la vie de Dieu en unissant le ciel et la terre.
38’. Les ingrats et les impies ne sont pas auprès de Dieu, mais les flatteurs et les hypocrites non plus. — Les débauchés et les paresseux ne sont pas auprès de Dieu, mais les moralistes et les travailleurs non plus. — Les ignorants et les stupides ne sont pas auprès de Dieu, mais les savants et les intelligents non plus. — Les révoltés et les blasphémateurs ne sont pas auprès de Dieu, mais les résignés et les récitants non plus. — Les jouisseurs et les prodigues ne sont pas auprès de Dieu, mais les refoulés et les économes non plus. — Les méchants et les furieux ne sont pas auprès de Dieu, mais les bien intentionnés et les pleurnicheurs non plus. — Les justes et les connaisseurs sont auprès de Dieu, mais les charitables et les simples le sont aussi, et par-dessus tout, ceux qui ont la bonne volonté en Dieu.
39. Examinons en quoi les autres ont raison et en quoi nous avons tort. Ainsi l’accord se fera aisément par l’approchement des semblables et par l’éloignement des contraires.
39’. Tout ce que nous pensons, nommons et faisons prend corps et se précipite vers nous. Faisons donc bien attention à nos pensées, à nos paroles et à nos actions, afin de ne pas créer notre propre malheur sans le savoir.
40. Les hypocrites, les orgueilleux et les méchants se détruisent mutuellement et blasphèment le verbe de Dieu, soit en bénissant le crime, soit en maudissant l’amour, car ceux qui se sont enflés vont être vidés par la tempête, et ceux qui se sont endurcis vont être écrasés sous la meule. Faux frères contre frères ennemis. Faux dévots contre dévots de science morte.
40’. Le Seigneur n’abandonne pas les siens, ceux qui l’aiment dans leur cœur et sont soumis à la sagesse cachée. Le filet du malheur et de l’extermination ne se refermera pas sur eux, car l’humilité de leur amour et de leur connaissance passera même à travers les mailles resserrées de la mort. « Comme notre amour pour le Seigneur est misérable, et combien notre foi en sa Providence est nulle ! »
41. Beaucoup veulent faire croire qu’ils en savent plus que quiconque sur les mystères de Dieu en citant à tort et à travers les magnifiques paroles des prophètes et des sages, et en les interprétant selon leurs misérables pensées du moment.
41’. Ô dérision : ils se battent avec la lumière des paroles saintes et sages, et cependant ils croupissent dans les ténèbres. Ô cruauté : ils s’assomment à coups de sentences de vie, et ils pourrissent toujours plus dans le fumier ; car les sourds nous font à présent la leçon, et les aveugles nous montrent la voie sainte !
42. Ainsi l’un moralise, et l’autre émascule. Celui-ci dissèque, et celui-là empaille ; et tous ressemblent à des pingouins qui expliqueraient l’Écriture sainte à d’autres pingouins.
42’. C’est la pratique de la parole et de la science de Dieu qui nous sauvera de la mort, et non pas nos bonnes intentions, nos belles paroles ou nos grands travaux.
43. Tout ce que nous demanderons avec foi et persévérance se réalisera un jour devant nos yeux ici-bas.
43’. Surveillons donc attentivement tout ce qui entre et tout ce qui sort afin de ne pas être pris au piège des apparences trompeuses de ce monde.
44. Faisons tout pour plaire à Dieu et supportons patiemment les jugements aveugles du monde, sans défi et sans justification profane.
44’. Le Livre sera encore neuf et présent quand toutes les orgueilleuses productions du monde seront retournées au néant.
45. Ô comme la bonne pensée, la bonne parole et la bonne action effacent le péché du monde ! Ô comme la louange, la prière et la charité en Dieu délivrent l’âme du croyant !
45’. Celui qui nous a donné l’être peut aussi tout nous reprendre et tout nous redonner. Qui peut croire cela dans son cœur avant de l’avoir vu avec ses yeux ?
46. Quel sera le ridicule de tous ceux qui nous auront expliqué la parole de Dieu sans l’avoir comprise eux-mêmes ? Et quelle sera leur assurance devant l’évidence manifestée au dernier jour ?
46’. Celui qui a semé le bon grain attend avec confiance le temps de la moisson. (Ne croyons pas pénétrer aisément la parole inspirée de Dieu si elle-même ne nous a pas premièrement pénétrés.)
47. Les incroyants nous ont nommé « homme heureux », car l’amour du Seigneur nous a fait luire même devant les aveugles !
47’. Le temple du Seigneur, c’est sa grâce dans notre cœur ; et le sacrifice, c’est son amour pour nous et c’est notre amour pour lui.
48. On voudra nous affilier à des églises, à des sectes ou à des sociétés secrètes pour expliquer l’inexplicable ; car même les croyants ne croient plus que Dieu soit encore capable de parler directement à ses enfants.
48’. Nous ne cherchons ni esclaves, ni sectateurs, ni ouailles, nous cherchons des hommes et des femmes capables de vivre saintement et librement en Dieu. Car le temps des troupeaux est passé et celui de la liberté arrive.
49. La sagesse de Dieu, c’est la liberté et l’abondance de la vie offerte gratuitement aux hommes simples et droits. La sagesse du monde, c’est le bruit et la vanité des mots creux avec lesquels les aveugles se rassurent dans leur nuit.
49’. L’athée pense survivre par son travail et par son intelligence. Le religieux croit se sauver par son espérance et par sa résignation. Un sage ou deux à peine par siècle opèrent le miracle de Dieu ici-bas et entrent vivants dans l’éternité. (Nous exagérons leur nombre à dessein.)
50. Il vaudrait mieux ne jamais être né plutôt que mépriser la vie qui nous a été donnée par Dieu et que nous avons stupidement obscurcie.
50’. La raison de Dieu est au-delà de l’absurde, la raison des hommes demeure toujours en deçà.
51. Pas un sou et la réprobation de tous pour la vérité nue. L’argent et l’aide du monde entier pour le mensonge déguisé.
51’. Être comblé par Dieu et vivre ignoré du monde, et non pas, être comblé par le monde et vivre ignoré de Dieu.
52. Les brutes procurent au moins le repos de l’esprit, tandis que les hypocrites détruisent la foi, et les délirants communiquent la folie du démon. Heureux celui qui trouve un croyant de Dieu et qui s’entretient de l’Unique avec lui ; et bienheureux celui qui arrive jusqu’à un saint de Dieu et qui l’écoute parler du Seigneur d’amour. Très heureux surtout celui qui découvre un sage de Dieu et qui demeure dans son silence divin.
52’. Seigneur, apprends-nous l’humilité de ta sainte quête, mets-nous un poids pesant sur le dos et de la terre dans la bouche jusqu’à ce que nous considérions la souche d’où nous avons été pris, et jusqu’à ce que ta bénédiction nous délivre de la puanteur du péché et de l’obscurité de la mort. Seigneur, par compassion, fais que nous nous taisions et que nous n’expliquions rien profanement et vainement à personne.
53. Satan est là pour perdre les méchants, mais il est là également pour renvoyer à Dieu les âmes éclairées par l’amour et par la connaissance.
53’. Il n’y a rien d’obscur ni de caché dans l’amour de Dieu, mais dans sa science, tout est profondeur et mystère.
54. Savons-nous qui est ce petit enfant qui meurt présentement devant nous de la peste ? N’est-ce pas l’affameur ancien qui fit périr de misère un quart de la ville ? Qui juge ici la justice de Dieu avec la vue perçante d’une taupe ? Qui condamne la sagesse du TrèsHaut avec l’assurance inébranlable d’une bûche ?
54’. Ô malheur ! les aveugles se sont érigés en juges sévères, et les sourds sont devenus des exécuteurs impitoyables. Aussi la foi et la charité se sont éloignées de tous, et le malheur et la confusion culminent à présent dans un monde défiguré par le péché, par la haine et par la peur. « Qui peut croire fermement dans la protection de l’Unique ? Et qui peut espérer follement son don très saint ? »
55. Ô comme le malin est subtil, comme il est raisonneur et comme il est bien renseigné sur le monde ! Ô comme le trompeur se déguise, comme il s’insinue et comme il est habile pour piéger les créatures de Dieu !
55’. Soyons des aimants de vie et non des aimants de mort et sachons que tout ce que nous pensons prend corps en nous et autour de nous et s’alimente de nos paroles et de nos actes.
56. Tentateur bien nommé, comme tu nous éprouves dans la fournaise de l’envie et de l’orgueil ! Tu dis « MOI », mais nous répondons « DIEU ». Ô ennemi, qui nous sauvera du vertige de ta face enténébrée, si ce n’est l’amour de notre Seigneur resplendissant et très pur ?
56’. Faisons donc bien attention à ce que nous pensons et à ce que nous disons, car si c’est le bien, le bien paraîtra, et si c’est le mal, le mal viendra semblablement. « Il n’y a que l’amour de Dieu qui nous comble et nous satisfasse vraiment. Tout le reste nous déçoit et nous ennuie rapidement. Mais c’est bien aussi sa sainte science qui nous sauve de la mort ici-bas. »
57. Celui qui poursuit les choses du monde est bien déçu à la fin de sa course, mais celui qui ne cherche rien dessèche dans sa triste médiocrité.
57’. Celui qui cherche inlassablement Dieu et sa vérité, a une chance de les trouver ici-bas et la sainte assurance de les approcher dans le ciel.
58. Confions-nous au Seigneur qui effacera notre peine et qui multipliera notre joie, et ne nous confions pas au monde qui enviera notre joie et qui repoussera notre peine.
58’. Si nous aimons Dieu dans l’humanité et dans la nature, Dieu nous aimera aussi dans les hommes et à travers toute sa création.
59. Après que tout sera consumé, la grâce, la justice, la simplicité, l’obéissance, le pardon et l’amour germeront à nouveau et notre Dieu reposera visiblement dans ses saints, et tous les sauvés se donneront le baiser de paix sur une terre blanchie et réconciliée par la résurrection.
59’. Le Livre pourrait s’étendre à l’infini ; il suffit qu’il nous ait fait toucher la racine sacrée du commencement et entrevoir la sainte lumière du Parfait, car le Seigneur en personne sera le vivant mot de la fin pour ses sages et pour ses saints.
60. Le monde essentiel et substantiel sera séparé du monde excrémentiel et le premier sera glorifié avec les saints de Dieu, alors que le second sera rejeté avec les rebelles et les méchants.
60’. Dans le commencement crépusculaire de la fin, les étoiles seront rassemblées pour former avec le soleil, la lune et les saints, la terre des vivants fécondée de Dieu ; et ce sera ensuite le milieu ténébreux de la fin.
61. Nous ne trouverons Dieu ni par les spéculations de l’intelligence ni par le travail de nos mains. Nous trouverons Dieu uniquement en imitant Dieu, car l’ensemencement de notre mort prépare la moisson de notre vie.
61’. Puis la lumière reviendra peu à peu et la reine et le roi du ciel paraîtront dans la splendeur divine, et ce sera la fin éclatante de la fin, annoncée et bénie par les prophètes du Seigneur Dieu.
62. Notre raison, notre courage et notre travail sont impuissants à nous ouvrir les portes de la vie si la bénédiction et l’inspiration divines ne les accompagnent pas.
62’. Le Seigneur ouvre l’entendement de celui qui est docile à sa voix et tout lui réussit sans effort, mais il aveugle l’insensé qui n’écoute que son propre conseil et il le mène à sa perte.
63. Pourquoi travailler durement et pourquoi combattre férocement pour obtenir l’ombre de la vie, alors que le Seigneur nous offre généreusement la réalité divine qui ne s’épuise jamais ?
63’. Ne force pas la Désirée, mon ami, car si elle doit venir à toi elle se manifestera par elle-même. Le Seigneur sait ce qu’il fait et toi, tu l’ignores encore.
64. Il est bon d’offrir un présent au maître spirituel, mais quel est le disciple intelligent qui enverra une bonne pensée d’amour ?
64’. Celui qui bénit dans son cœur Dieu et ses saints, fait briller visiblement une parcelle du vêtement de l’Unique.
65. Soyons comme des orphelins qui cherchent fiévreusement leur Seigneur le jour et la nuit, et puis devenons comme des outres vides qui attendent d’être emplies du nectar des cieux.
65’. On pardonne tout à un vivant, excepté d’être présent parmi les agonisants de ce monde. « Ô sacrifice très saint des fils de l’Unique ! »
66. Nous sommes tombés dans la fosse d’immondices et nous avons avalé l’ordure ténébreuse. Qui nous délivrera à présent de la puanteur du péché qui nous submerge de toutes parts ? Qui nous guérira du poison virulent qui ronge nos cœurs et qui éteint notre esprit ? Qui séparera la sanie de la chair du Dieu vivant ?
66’. Ô Seigneur miraculeux, ouvre nos cœurs à ta sainte rosée et viens nous habiter à nouveau dans la splendeur première, sinon nous sommes perdus à jamais et nul ne compatira à notre plainte désolée ici-bas. « Lave-nous, pluie des cieux, et ensemence-nous, soleil glorieux. »
67. C’est bien notre présomption imbécile qui nous empêche de reconnaître l’œuvre grandiose du Seigneur de vie et de lumière, et c’est bien notre attentive et sainte humilité qui nous permet de la découvrir dans le monde.
67’. Nous admirerons premièrement les œuvres des hommes pendant notre sommeil ; ensuite, nous admirerons les œuvres de la nature quand nous commencerons à voir clair. Enfin, nous admirerons celles de Dieu quand nous serons tout à fait éveillés.
68. Le péché et la chute, c’est avoir mangé le fruit empoisonné de l’arbre double, c’est avoir absorbé la substance vivante avec la crasse morte et c’est continuer à le faire.
68’. La régénération et la rédemption, c’est découvrir et c’est manger le fruit pur de l’arbre unique qui chassera hors de nous la puanteur, l’obscurité et l’inertie fatale de la mort.
Il y aura une réunion de sauvés comme l’a dit IEVE.
Cherchez Dieu, vous tous humbles du pays qui avez pratiqué sa loi. Recherchez la justice, recherchez l’humilité. Peut-être serez-vous à l’abri au jour de la colère de Dieu
⟴LIVRE XX
On te jeta par dégoût de toi sur la face des champs le jour de ta naissance.
Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil.
VÊTE RUINE
LE SEL
1. Celui qui ne perçoit que l’enveloppe des êtres et des choses, est séparé de l’unité essentielle et substantielle de Dieu jusqu’à ce que sa cécité cesse dans la naissance de la lumière du Sauveur.
1’. C’est la pureté de la substance de la Mère qui nous permettra d’incarner la splendeur de l’essence du Père et de devenir ainsi vrais fils de Dieu pour l’éternité.
2. Les saintes Écritures sont au complet depuis leur commencement, et chaque nouveau livre révélé ne fait que les confirmer sans rien ajouter et sans rien retrancher au mystère de l’esprit incarné qui fait leur fondement sacré.
2’. Apprends-nous à t’entendre et à t’obéir. Apprends-nous à t’aimer et à t’imiter. Apprends-nous à te recevoir et à te mûrir. Apprends-nous à te conserver et à te multiplier, ô Seigneur de la vie impérissable !
3. Qui peut dire ceci sans blasphémer et qui peut l’entendre sans être scandalisé ? Nos sacrifices et nos crimes sont également illusoires devant Dieu. Nos bénédictions et nos malédictions sont pareillement vaines devant sa grandeur.
3’. Pourquoi tenter d’avancer et pourquoi craindre de reculer ? Pourquoi s’efforcer à monter et pourquoi redouter de tomber ? Puisqu’il suffit que la grâce de l’Unique nous dénude du péché vénéneux et que son amour nous vête de la splendeur dorée.
4. Nos pensées d’amour ou de haine sont tout à fait dérisoires devant sa splendeur ; seuls notre repos et notre bonne volonté en lui sont agréés par l’Unique.
4’. Suffit-il pas de notre bonne volonté du cœur envers le Seigneur et envers sa création pour être pardonné de la faute imbécile et pour être sauvé de la mort de l’immonde à la fin des temps ?
5. Car même notre amour pour le Seigneur n’est que le reflet de sa gloire et il ne nous appartient pas en propre, tandis que l’obéissance et l’acceptation sont les offrandes acceptables d’un cœur enseveli dans la mort et brisé par l’exil.
5’. Apprends-nous, ô Très-Pur, à nous conduire selon ta volonté sainte et donne-nous l’intelligence de ton enseignement sublime ainsi que la compréhension de ton œuvre sacrée.
6. Nous sommes tous indignes de recevoir la parole de Dieu. Aussi n’omet-il pas de nous le rappeler miséricordieusement afin que nous n’oubliions jamais l’humilité de la créature et la gloire du créateur.
6’. Si le monde repousse nos travaux et nos dons, tournons-nous vers Dieu et offrons-lui notre silence attentif et notre nullité reposée qui seront certainement mieux accueillis et mieux appréciés par l’Unique Connaisseur.
7. Comme je demandais un jour à mon Seigneur : « Que dois-je faire pour te plaire ? », il me répondit : « Rien, surtout rien, afin que je puisse t’arroser en toute tranquillité et afin que je puisse te mûrir en toute sécurité ».
7’. Nous cesserons nos ablutions quand nous reluirons de pureté et c’est alors que le soleil de Dieu nous fécondera pleinement, car c’est un cœur virginal et léger que nous offrirons au Seigneur, et c’est un cœur ensemencé et dense qu’il nous donnera en échange.
8. Il y a deux façons de sortir de toute chose, soit par le haut, soit par le bas. Celui qui sort du monde par le haut est saint et sauvé. Celui qui en sort par le bas est fou et damné.
8’. Nous l’espérerons afin d’être espérés. Nous le chercherons afin d’être cherchés. Nous le trouverons afin d’être trouvés. Nous reposerons dans sa paix afin d’être unifiés en lui.
9. Comme le singe qui demeure prisonnier de la calebasse, la main obstinément refermée sur l’appât, il suffit aussi pour nous de lâcher la poignée de boue que nous étreignons stupidement dans ce monde pour être rendus à notre liberté première. Cependant, tous se moquent des singes, et nul n’entrevoit sa propre cupidité.
9’. Mon Seigneur me demanda une fois : « Que m’apporteras-tu au jour du jugement ? » et je répondis : « Toi dans ton secret en moi ». Alors il dit : « C’est bien. Va donc, germe, mûris et porte du fruit pour ma moisson » et je pleurai amèrement d’être encore recouvert par la boue de la terre étrangère.
10. Qui voudrait encore disputer avec des créatures ignorantes quand Dieu nous entretient si merveilleusement dans nos cœurs ?
10’. Ordonner la boue du monde est un pis-aller ; en sortir, voilà l’intelligence !
11. Ô musique des musiques ! Ô parfum des parfums ! Ô saveur des saveurs !
11’. La science des hommes organise la fosse de la mort, mais la science de Dieu nous en délivre pour toujours.
12. Comment se détendra-t-il le ressort qui n’a pas été bandé ? Et comment rencontrera-t-il en lui-même son Seigneur celui qui ne l’a pas cherché follement dans le monde ?
12’. Le jugement de Dieu n’est pas le jugement de l’homme, et ce que l’un exalte l’autre le méprise.
13. Nous prierons afin d’apprendre à louer, et nous louerons afin d’apprendre à nous taire devant lui.
13’. « Quand vous vous aimerez comme je vous aime, vous serez un avec moi », dit le Seigneur de l’unité de l’amour.
14. Celui-ci nous explique l’incarnation de Dieu en détail, sans même connaître la nature virginale de la sainte Mère ; celui-là nous démontre le mystère du Christ, sans même connaître la vertu du soleil qui l’éclaire.
14’. À la fin, les huissiers sont venus et ils ont chassé tous ceux qui faisaient antichambre dans la maison du TrèsHaut, mais j’ai continué d’attendre sur les marches de son perron jusqu’à ce que le sommeil soit venu calmer mon désespoir et voiler ma solitude.
15. Ainsi trop de savants nous assomment de leur science, alors qu’ils n’entendent rien, qu’ils ne voient rien et qu’ils ne goûtent rien de l’unique vérité, car leur connaissance de Dieu est intellectuelle et livresque, au lieu d’être expérimentale et vécue.
15’. Et c’est là qu’il m’a trouvé et qu’il m’a pris dans ses bras pour me consoler, et quand je me suis éveillé j’étais dans son propre lit. Lui me souriait comme une mère attentive et heureuse qui a retrouvé son enfant perdu.
16. Un jour rentrant dans le monde après un entretien avec mon Seigneur, j’eus une nausée subite et j’éprouvai une tristesse affreuse. Ainsi je connus que ma grande douleur commençait ici-bas, alors que je la croyais finie.
16’. Quand nous aurons trouvé le Seigneur au-dedans de notre cœur, peut-être se fera-t-il voir aussi au-dehors dans le monde ? Ô rareté insigne ! Ô confiance suprême ! Ô épreuve terrifiante du don total ! Combien ont pu supporter sans mourir ta présence visible et ta splendeur incarnée ?
17. Nous croirons faire un sacrifice en renonçant au monde pour nous tourner vers Dieu. Ensuite, nous comprendrons que c’est le Seigneur qui se sacrifie en se tournant vers nous.
17’. « Nous ne choisissons pas Dieu, c’est lui qui nous choisit. » En nous tenant en repos et en demeurant attentifs, peut-être l’entendrons-nous et peut-être le verrons-nous un jour ici-bas ?
18. Comment croire en Dieu dans ce monde absurde quand on n’a pas vu luire la lumière du Parfait ?
18’. Ô miséricorde infinie de la foi aveugle ! Ô sécurité étonnante de l’amour divin !
19. Il n’y a ni compétitions, ni jurys, ni examens, ni prix, ni médailles, ni diplômes qui comptent dans la quête du Très-Haut.
19’. Ce sont les fainéants et les bénis de Dieu qui gagneront le céleste enjeu, et non les travailleurs et les intelligents de ce monde.
20. Seulement un cœur brisé dont le Seigneur sépare doucement la vérité du mensonge, afin de venir l’habiter dans toute sa gloire retrouvée.
20’. Celui qui tient les yeux fixés sur son Seigneur avance d’un pas égal à travers l’or et à travers la boue de la création mélangée.
21. La meilleure voie vers Dieu, c’est la plus grande attention dans le plus grand abandon, après la quête longue et ardue dans les ténèbres de la foi.
21’. Comme il est difficile de retrouver la joie de son Seigneur quand on a sollicité le monde et quand on a reçu en paiement ses fleurs ou ses crachats !
22. Nous nous passerons aisément du monde extérieur le jour où nous ne pourrons plus nous passer du Seigneur intérieur.
22’. Deux choses nous désolent : notre éloignement du Seigneur et notre stupidité devant sa création, mais une troisième nous épouvante : la crasse qui nous masque la lumière du Parfait.
23. Si le monde se révèle à nous comme une planche pourrie, appuyons-nous sur le Seigneur qui ne se dérobe jamais quand un bien-aimé vient reposer sur son sein.
23’. Nous pourrons d’autant plus aimer les hommes que nous ne leur demanderons rien, et nous pourrons d’autant mieux aimer notre Seigneur que nous lui demanderons tout.
24. La meilleure façon de servir Dieu, c’est être pour les autres hommes comme un poteau indicateur qui montre le chemin de l’Unique Splendeur.
24’. Comme la présence du Seigneur est merveilleuse, et comme son absence est terrible ! Compagnon très secret. Compagnie très sainte. Accompagné très aimé.
25. Contempler son Seigneur et organiser le monde, c’est impossible. Il faut choisir au commencement afin de ne pas hésiter à la fin.
25’. Ni les joies ni les douleurs de ce monde ne doivent nous faire oublier le refuge de l’unique candeur.
26. Celui qui aura approché son Seigneur ici-bas dira : « Ma vie a été une fête perpétuelle » et les autres ajouteront : « C’était un saint », après avoir craché sur lui. Quant au sage possesseur de l’unité de l’Unique, bien peu le reconnaîtront sous son enveloppe mortelle.
26’. Les fainéants de Dieu reçoivent tout des mains de leur Seigneur, alors que les travailleurs du monde peinent durement pour manquer de tout ici-bas. « Ces fainéants peuvent travailler comme les travailleurs, mais quel travailleur pourrait fainéanter comme ces fainéants ? »
27. Ayant repoussé leur Seigneur, ils se sont plongés dans l’horreur pour oublier leur chagrin, mais ils n’ont fait que le décupler. Qui leur rendra à présent la paix du Parfait ?
27’. Comment l’amour de Dieu et des saints pourrait-il se détourner d’un être, si défiguré soit-il par la chute ? Satan lui-même n’est-il pas susceptible de rejoindre son Seigneur s’il le désire une fois ?
28. Le Seigneur ne nous a pas donné des recettes pour nous débrouiller dans la boue du monde, mais il nous a fait voir comment nous pouvons en sortir tout entiers.
28’. Celui qui contemple son Seigneur peut rire franchement de soi-même après en avoir longtemps pleuré. Celui-là n’a plus rien à redouter de la misère ni rien à espérer de la richesse du monde.
29. Le saint n’est ni distant, ni important, ni supérieur avec personne, mais il est véridique avec tous, et c’est pour cela qu’il fait enrager les hypocrites et les médiocres.
29’. Quelques-uns ont persévéré dans l’amour de leur Seigneur au milieu des chagrins et des douleurs, mais combien se sont souvenus de lui parmi les joies et les biens de ce monde ?
30. Combien, parmi les meilleurs, ont été éloignés de Dieu par la médiocrité de ceux qui enseignent son salut ! Quelle sera la confusion des égarés qui auront rejeté le Seigneur à cause des mauvais serviteurs ! Mais quel sera le sort des serviteurs médiocres qui auront fait obstacle aux hommes de bonne volonté !
30’. N’importe quel fils de Dieu, s’il en recevait l’ordre, révélerait le secret de l’Unique, et toute la création revivrait dans la splendeur première. L’insuffisance des médiocres et la malice des méchants s’y opposent seules, mais le Seigneur du centre connaît l’heure du jugement.
31. La mort nous fauche inopinément et elle nous ratisse en un clin d’œil, et voilà tous nos petits soucis et toutes nos petites pensées volatilisées dans l’instant. Oh ! qui aura l’intelligence de chercher assidûment son Seigneur ici-bas afin d’obtenir la victoire de la vie ?
31’. Ne nous endormons pas sur le Livre, mettons aussi la main à la résurrection et à la transfiguration du monde enténébré ; ainsi nous aurons la vie immortelle et pure du commencement qui comble les enfants de Dieu.
32. Ô croyants épars sur la terre, vous ressusciterez et vous vous embrasserez un jour au nom de Dieu en pleurant de joie, comme des frères et comme des sœurs qui se retrouvent dans le lieu de leur naissance, et vous habiterez la pureté où il n’y a pas de mort.
32’. Aie de l’intelligence, et la lumière illuminera ta voie. Aie de la pureté, et le Très-Haut ensemencera ton champ. Aie de la patience, et ta terre produira le salut. Aie de la simplicité, et le ciel multipliera ta vertu.
33. Entrons dans le repos et éloignons-nous des affaires du monde, car c’est le seul moyen pour obtenir le loisir et la paix indispensables à la quête de Dieu qui nous fera beaux, riches, glorieux, puissants et immortels, quand nous aurons trouvé l’unique trésor.
33’. Aie du cœur, et tu posséderas le trésor des enfants de Dieu. Aie de la sobriété, et tu nageras dans la richesse qui ne tarit jamais. Aie la foi, et le Seigneur lui-même travaillera pour toi.
34. Ce que nous paraissons aux yeux du monde importe peu, c’est ce que nous sommes devant le Seigneur de vérité qui compte uniquement. « Les insultes et les crachats des méchants n’ajouteront rien au vêtement de boue qui nous couvre, comme ils ne retrancheront rien au noyau de lumière qui nous habite. »
34’. Les intelligents du monde nous railleront et ils nous couvriront d’injures à cause de la parole du Seigneur de vie, mais il suffit pour notre joie qu’un cœur simple et avisé entende et pratique ici-bas la voie de Dieu avant le temps du grand jugement qui consumera toute crasse et qui séparera toute fèce du corps glorieux.
34’’. MARANATHA. Il vient certainement.
35. Pas une pensée, pas un regard, pas un mot, pas un geste pour le mal ; ainsi il ne prendra corps et vie ni en nous ni autour de nous, et s’il paraît par l’effet de la faute antique, nous penserons le bien, nous verrons le bien, nous nommerons le bien et nous accomplirons le bien, afin que la lumière de vie nous envahisse et subsiste seule en nous et autour de nous.
35’. Attachons les bonnes paroles autour de notre cou et vivons avec elles jusqu’à ce qu’elles soient entrées en nous. Comptons premièrement sur la Providence du Seigneur, ensuite, œuvrons saintement afin de donner corps à sa bénédiction transformante. « Qui mangera le verbe issu du ciel et de la terre afin d’avoir la vie qui ne périt pas ? »
36. Les travaux nécessaires à l’entretien de nos vies sont peu de chose pour ceux qui pensent à Dieu plus qu’au travail de leurs mains. « La délivrance de la malédiction de la mort vole vers celui qui prie son Seigneur avec amour et avec dépassement. »
36’. Associons Dieu à nos travaux et à nos peines, mais associons-le également à nos loisirs et à nos plaisirs, afin que le mal ne puisse s’introduire en nous pendant l’absence du Parfait.
37. Que les intelligents et que les savants du monde ne se vexent pas s’ils demeurent à la porte du Livre avec toute leur intelligence et avec tout leur savoir, et qu’ils nous pardonnent ce qui leur paraît obscur, car nous ne désirons ni les convaincre ni les instruire malgré eux.
37’. Nous devons apprendre à nos frères à prier Dieu afin qu’ils obtiennent sa grâce et son secours, plutôt que les porter sur notre dos, ce qui ne saurait leur apprendre à marcher dans la foi, et ce qui ne saurait nous avancer dans le chemin de la liberté des enfants de Dieu.
38. Si nous sommes forts dans notre faiblesse, c’est parce qu’alors la force de Dieu nous habite entièrement et agit à notre place.
38’. La prière et la louange à Dieu font la joie des saints et des sages, mais c’est l’absence et le silence qui font la présence du verbe de Dieu et l’union des parfaits.
39. Ne nous livrons à aucune compétition dans ce monde, car nos performances sont ridicules devant Dieu.
39’. Si nous ne pouvons nous pousser jusqu’à Dieu, tirons-le hardiment jusqu’à nous. Cela ira peut-être mieux ainsi.
40. Celui qui sait que Dieu seul opère tout en tout, n’est pas tenté de se glorifier de ses œuvres ici-bas. Espérons donc en la Providence du Seigneur plus qu’en les œuvres de nos mains. Parole dure pour les intelligents, pour les courageux et pour les raisonnables de ce monde.
40’. Nos travaux sont inutiles sans la bénédiction du Seigneur rayonnant, car ils ne peuvent rien sans elle alors qu’elle peut tout sans eux ; cependant, en les unissant par un moyen naturel, nous obtiendrons le repos et la gloire de Dieu.
41. Celui qui a appris à tomber sait aussi se relever sans dommage, mais celui qui n’a pas appris risque de se briser un membre ou même tout le corps à cause de sa trop grande rigidité.
41’. Nul ne connaît l’épaisseur du manteau de crasse qui nous recouvre, excepté le saint qui le consume, et nul ne connaît le poids de la lumière qui nous habite, sauf le sage qui la mûrit en secret.
42. Ne faisons rien que nous n’osions aussi accomplir en la présence de Dieu.
42’. Celui qui associe Dieu à toutes ses pensées et à tous ses actes, devient un avec le Parfait.
43. Ceux qui auront été nettoyés par le feu de la géhenne, devront être purifiés par l’eau moyenne et réanimés par l’esprit céleste afin d’acquérir l’incorruptibilité du royaume de Dieu.
43’. L’huile s’unit au sel par le moyen de l’eau et l’eau se fixe dans le sel par le moyen de l’huile et tout demeure en Un.
43’’. Ô humbles cendres de la mortification ! Ô vive eau de la bénédiction ! Ô pur sel du baptême ! Ô sainte huile de la résurrection !
44. Qui étudiera le Livre et qui parcourra la voie de l’Unique ? « Dans le doute, remettons-nous-en à Dieu qui nous parle par la voix intérieure et faisons sa volonté, car il connaît parfaitement la droite, la gauche et le milieu de l’homme. »
44’. Dégageons notre reine virginale, et elle nous donnera un fils qui sauvera le genre humain et qui le restituera dans sa splendeur première. I. N. R. I.
45. Manifestons le dedans au-dehors comme a fait notre beau Seigneur descendu du ciel. « Bénédiction et malédiction procèdent de la vision intérieure de l’esprit et de la foi en action par le verbe. »
45’. Le désir donne la substance. L’imagination donne la forme. Le verbe donne le poids. La foi donne la vie, mais c’est la pureté du cœur qui permet seule l’union avec le Dieu créateur et rénovateur de toutes choses.
46. La Providence de Dieu se manifeste de préférence par l’intermédiaire des croyants de bonne volonté ; mais elle peut exceptionnellement agir par le moyen des esprits, ou même directement en combinant les éléments primordiaux.
46’. N’imaginons pas les moyens de réalisation de notre prière, car les voies de la Providence du Seigneur sont imprévisibles, déroutantes et impénétrables à notre petite raison.
47. Dieu forme et dissout des images, mais il en sauve quelques-unes par le Fils, qui est semblable au Père.
47’. Ce qui est nettement établi au-dedans est déjà en voie de réalisation au-dehors dans le monde.
48. Tout est en puissance dans la substance cachée, et ce sont nos pensées qui manifestent le désirable ou l’indésirable.
48’. C’est le monde du dedans qui changera premièrement, ensuite le monde du dehors sera aussi fait clair et beau.
49. C’est notre vision intérieure qu’il faut exercer et animer jusqu’à ce qu’elle paraisse dans le monde vivante et pure.
49’. La foi vivante est folle et absurde, car elle ne tient même pas compte des apparences raisonnables de la mort.
50. N’imaginons pas et ne nommons pas l’indésirable afin de ne pas lui donner corps et vie en nous et autour de nous.
50’. Il est plus assuré d’être avec Dieu que d’être contre quiconque, car de cette façon, nous sommes certains de ne jamais nous tromper et d’aller au plus court.
51. Allons là où la Providence de Dieu nous sourit et quittons les voies où elle nous contrecarre.
51’. Allons là où la vie céleste s’incarne dans la terre pure et sainte.
52. Tout ce qui ressemble à un travail d’homme n’est pas de Dieu et disparaîtra dans le monde nouveau.
52’. Il engendre sa Mère, et sa Mère l’engendre dans le monde pour la sauvegarde des saints et des sages.
53. L’enfer, c’est la mort entretenue en nous perpétuellement ; c’est la vie toujours agonisante et toujours renaissante ; c’est la puanteur et l’horreur de la crasse pourrissante mélangée à la lumière de vie.
53’. Travaillons tous les jours de nos vies à séparer et à rejeter la crasse de la mort qui nous envahit depuis la chute première, car c’est un travail agréable et saint aux yeux du Seigneur, qui nous viendra en aide en nous délivrant complètement de la pourrissante étrangère.
54. Si nous nous sentons abandonnés et tristes, si nous sommes tentés et agités, plongeons-nous dans la lecture et dans la méditation des sages Écritures qui nous nimberont de la joyeuse lumière du Très-Pur.
54’. Que le désir et la volonté de notre créateur et donateur, Père très saint et très sage, s’accomplisse en nous parfaitement, et que la pure unité retrouvée des trois mondes nous introduise dans la présence éternelle du vivant qui EST.
55. Celui qui a trouvé la lumière du Seigneur peut abandonner le Livre ; Dieu l’établira dans la paix par son amour, de la même façon qu’il l’a introduit dans la grâce par sa bénédiction.
55’. La pureté du Seigneur envahira toute la terre et consumera la crasse de la mort, effaçant notre péché par le miracle inouï de la séparation et de l’union sainte.
55’’. Car le comble de la mortification manifeste la vie céleste, qui engendre à son tour l’éternité de la paix de Dieu.
56. L’obstination orgueilleuse de l’homme est telle que la faiblesse de sa chair et la fragilité de sa condition ne parviennent pas à le ramener à l’humilité libératrice et rénovatrice où repose le secret de Dieu.
56’. Celui qui cultive son jardin et qui fouille sa propre terre accomplit un travail agréable à Dieu. Certainement, la neige du Seigneur consumera son péché et il resplendira devant toutes les nations et sa parole aura la densité de l’or fermenté.
57. Certains reçoivent directement et entièrement la parole de résurrection et de vie, mais d’autres ne peuvent l’absorber que peu à peu et avec beaucoup de difficulté. Ceux qui la rejettent sont déjà retranchés sans le savoir.
57’. Ne nous égarons pas dans la dispersion de nos cœurs, ni dans l’agitation de nos esprits, ni dans les travaux de nos mains. Demeurons plutôt dans la persévérance de la quête de l’Unique, qui nous comblera bien au-delà de nos désirs.
58. Aussi s’il nous est permis de pleurer de joie au sujet des premiers, il nous est recommandé de patienter avec les seconds, et surtout de ne pas les rebuter par une intransigeance aveugle et sourde. « Les prêtres ont condamné Jésus au supplice et les soldats l’ont cloué sur la croix. »
58’. Qui rejoindra le Seigneur du centre dès ce monde ? Qui retournera au Père inépuisable et pur avant le jugement universel ? Qui retraversera les ténèbres de l’exil terrestre ? Qui surmontera l’épreuve de la chute mortelle ? Qui suivra le Seigneur de résurrection ici-bas ?
59. Louons le Béni pour tout ce que nous avons et remercions-le pour tout ce qui nous vient. Ainsi nous serons toujours comblés et riches dans le Seigneur.
59’. Une bonne rencontre vaut mieux que mille bonnes idées, et la fréquentation du Seigneur vaut mieux que toutes les richesses de la terre.
60. Quand les ignorants de ce monde nous traiteront d’inutiles, de fainéants et de lâches à cause de notre quête du divin trésor, nous pourrons nous estimer bien heureux parce que assurés d’être dans la voie de l’Unique Splendeur.
60’. Le rebelle et ceux qui le servent se démènent dans la dispersion aveugle et dans le travail forcené. Le Seigneur et les siens se complaisent dans l’unité du cœur et dans le saint repos de l’accomplissement de toutes choses.
61. Les âmes des croyants et le sang des impies ne s’élèveront pas contre nous au jour du règlement des comptes, car le Livre sera notre témoin devant le Très-Haut et tous demeureront cois devant la révélation prodigieuse de l’Unique, mais les uns se réjouiront pendant que les autres pleureront amèrement.
61’. Ô intelligents, où seront vos astuces ? Ô savants, où seront vos lumières ? Ô travailleurs, où seront vos ouvrages ? Ô médiocres, où seront vos jugements ? Ô importants, où seront vos assurances ? Ô hypocrites, où seront vos déguisements ? Ô railleurs, où seront vos bons mots ?
62. Remettons nos causes entre les mains du Seigneur de justice, et notre sommeil sera paisible et aucune tache n’assombrira la lumière de nos cœurs.
62’. Ô Tout-Béni, enlève le sac et la cendre morte qui nous aveuglent afin que nous voyions ta lumière de sagesse et afin que nous louions à jamais ton saint NOM dans ta gloire retrouvée.
63. Soyons exigeants envers nous-mêmes, mais ne violentons rien au-dedans ni au-dehors, demandons plutôt le secours du Tout-Puissant, qui nous tend constamment une main secourable.
63’. Ce que nous avons fait avec nos mains chancelle et s’écroule déjà derrière nous, mais ce que nous avons à faire avec notre cœur peut devenir impérissable comme la pierre céleste. « Les ignorants séparent brutalement ce que le sage dénoue avec patience. »
64. Les ignorants du monde moqueront la science de Dieu ainsi que ceux qui la recherchent et diront : « Si la chose était véritable tout le monde le saurait ». Ainsi ils se retranchent du secret seigneurial pour toujours, et leur lumière demeure enfouie dans les ténèbres de la mort.
64’. Quand tout sera devenu évident et clair, mais là où nulle main ne pourra s’avancer pour saisir la vie resplendissante des enfants de Dieu, qui pleurera et qui se réjouira véritablement ?
65. Si nous ne savons pas prier, disons seulement : « Mon Seigneur et mon Dieu » et le vide ténébreux de nos cœurs se changera en la plénitude de la sainte lumière des élus, et nous entendrons la voix du Très-Secret et nous ferons sa volonté sans discuter vainement.
65’. Le dehors est peu de chose pour celui dont la lumière brille au-dedans, car il voit à travers les écorces et pénètre au-delà de la mort. « Plus nous consumerons nos écorces, plus notre lumière resplendira sous les regards du Très-Haut. Voilà ce que les méchants ne comprendront pas. »
66. Nous nous nommerons incapables, inutiles et stupides quand nous reposerons dans la contemplation de l’Unique ; ou bien nous nous nommerons charlatans, bateleurs et pitres quand nous enseignerons sa sainte loi dans le monde.
66’. Il ne nous appartient pas de nous prendre au sérieux ni d’exiger que les autres nous y prennent. Cela revient à Dieu, qui seul voit clairement le dedans des créatures.
67. Ainsi nul ne pourra nous injurier ni nous salir, et la porte demeurera fermée aux orgueilleux, aux hypocrites et aux médiocres.
67’. Pour nous, il suffit que nos cœurs germent dans les ténèbres du monde, qu’ils fleurissent dans la lumière de l’Unique et qu’ils se fixent dans son soleil glorieux.
68. La multitude des biens engendre la multitude des soucis, et trop de choses dérangent de la quête de l’Unique ; mais la pauvreté n’est possible que là où le ciel et la terre sont généreux et doux.
68’. Liquidons le superflu afin de ne pas être dispersé dans le nombre, et vérifions constamment par l’inspiration de l’Unique la nécessité de notre action et la droiture de notre quête dans le monde.
69. Nous nous croyons intelligents, honorables et importants, et cela nous empêche de vivre agréablement dans la simplicité et dans la joie des enfants de Dieu.
69’. Il vaut mieux passer pour un fou en parlant des choses de Dieu, que passer pour un sage en parlant des choses du monde.
70. Il n’y a pas de réussite dans le monde pour celui qui cherche Dieu, mais seulement des échecs et des coups renouvelés, des ténèbres très opaques et la solitude qui fait pleurer sur soi-même ; mais quelle récompense à la fin quand la lumière de l’Unique illumine la voie des enfants de Dieu.
70’. Il faut être fou de Dieu pour croire au-delà des apparences sinistres qui nous aveuglent, qui nous écrasent et qui nous désespèrent ici-bas. Qu’il nous rende donc fous afin que nous devenions sages et que nous trouvions la lumière de vie qui ne manque jamais à ceux qui l’ont connue une fois !
71. L’état le plus évident de l’Unique Splendeur, c’est la vie libre et pure. Ainsi ne brimons rien ni personne soit en pensée, soit en parole, soit en acte, si nous désirons que le TrèsSubtil établisse sa demeure dans nos cœurs purifiés.
71’. Ô Seigneur compatissant, éloigne de nos os l’affreuse puanteur qui tue ; ôte de nos cœurs la crasse ténébreuse qui nous aveugle et fais briller ta lumière de vie sur tes enfants réconciliés. Ô Rénovateur très sage et très saint ! Ô Sauveteur tout-puissant et caché !
72. La compagne rebelle à la sainte quête de son compagnon serait rejetée à la fin et son remords serait très cruel, car sa chance aurait été la plus grande dans ce monde. « Le sort de chacun repose dans son cœur, et le Seigneur d’équité est seul juge. »
72’. Ô femmes, votre malice dans le monde est grande, mais votre intelligence en Dieu est petite. Retenez donc vos pensées et vos jugements en ce qui concerne votre prochain et ne méprisez pas les chercheurs de Dieu, afin de ne pas brûler un jour dans le feu dévorant des regrets tardifs.
73. Qui se souvient de Dieu aime Dieu. Qui aime Dieu entend Dieu. Qui entend Dieu obéit à Dieu. Qui obéit à Dieu imite Dieu. Qui imite Dieu connaît Dieu. Qui connaît Dieu embrasse Dieu. Qui embrasse Dieu devient un avec Dieu.
73’. Gloire éternelle au Seigneur vivant et splendide qui inspire ses sages et ses saints et qui les sauve de la mort. M. O. I. O. M. « La foi parfaite est simple et absurde ; c’est pourquoi elle est toute-puissante. »
73’’. Il y a une prière importante et urgente que nous devons répéter tous les jours de notre vie exilée : « Délivre-nous, Père tout-puissant, de la crasse immonde qui nous submerge de toutes parts, afin que nous resplendissions à nouveau dans ta pureté, et féconde-nous de ton saint amour afin que nous soyons fixés en toi pour l’éternité. AMEN ».
La pierre cachée dans les ténèbres et l’ombre de la mort.
Il y aura là une voie qu’on appellera la voie sainte. Nul impur n’y passera… Ceux qui la suivront, les simples mêmes, ne s’égareront pas.
⟴LIVRE XXI
Il y en a beaucoup qui seront purifiés, blanchis et éprouvés, et les méchants feront le mal, et aucun méchant ne comprendra, mais les intelligents comprendront.
Ils ont péri parce qu’ils n’avaient pas la vraie science. Ils ont péri à cause de leur folie.
VUE NITRÉE
LE GIVRE
1. Un seul verset déclenchera des vocations, et un seul mot ramènera des âmes à Dieu. Que ne fera donc pas le Livre tout entier dans l’esprit et dans le cœur des croyants ?
1’. Le plus pauvre est comme le plus riche dans ce monde devant le secret de Dieu. Cependant, le pauvre n’est pas tenté de se disperser dans les complications onéreuses qui égarent le riche chercheur.
2. Dieu nous a engendrés de sa substance et de son essence pures, et nous nous sommes jetés stupidement dans le bourbier de la mort.
2’. Si nous le lui demandons avec ténacité et avec amour, le Seigneur peut nous retirer de la fosse de perdition où nous agonisons ici-bas.
3. Satan a été trompé par l’apparence d’Adam, c’est pourquoi le Seigneur a permis qu’Adam soit trompé par Satan au moyen des apparences du monde et que les fils d’Adam subissent la même épreuve troublante.
3’. Ceux qui sont tombés dans les ténèbres et qui se relèveront dans la lumière, seront établis pour toujours dans la gloire de Dieu.
4. Les incroyants disent : « Ce Livre n’est rien », mais nous disons ceci : « C’est un monument que les croyants du ciel et de la terre visiteront avec vénération, alors que le nom des négateurs aura disparu pour toujours dans la mémoire de Dieu et des hommes ». Ne nous lions pas avec des impies, car ils ne deviendront pas croyants, mais ils nous rendront impies.
4’. Confessons-nous ainsi au TrèsHaut : « Je m’accuse d’être tombé ici-bas par ma faute et de me trouver dans l’état lamentable où tu me vois, mais veuille me délivrer de l’horrible boue du péché de mort et veuille me revêtir de ta sainte lumière de vie, ô Miséricordieux, dont le cœur est une fournaise de pardon et d’amour, toi éternel Amant des âmes aimées ».
5. Un balayeur est plus considéré qu’un prophète dans ce monde aveugle, car il semble moins inutile que celui qui annonce aux hommes la vérité de Dieu. Celui-là est méprisé par les siens et passe pour un fainéant incurable aux yeux de tous.
5’. J’ai douté des soins et de l’aide de mon Seigneur, et lui m’a généreusement exaucé au lieu de me reprendre et de me punir pour ma foi vacillante. Ô comme tu soignes ma faiblesse, ô comme tu patientes avec ma stupidité, ô comme tu illumines mon bourbier, Seigneur attentif et caché !
6. Le Christ veut nous délivrer de la fosse d’immondices où nous sommes tombés, alors que l’antéchrist veut nous y installer pour toujours. Voilà l’action de Dieu et voilà celle de Satan, il y a là une différence fondamentale qui doit départager une fois pour toutes les vrais croyants qui espèrent en l’action de la nature divine, d’avec les impies endurcis qui ne comptent que sur le travail de leurs mains pour se sauver.
6’. Ô Seigneur tout-puissant et miséricordieux, ôte le sac qui nous aveugle et qui nous assourdit, brise la cangue qui enserre nos cous et nos mains, et dénoue les liens qui entravent nos pieds afin que nous marchions dans ta lumière de vie en publiant tes bontés et en élevant nos mains en offrande vers ta très sainte face. Louanges à toi qui nous délivres du dehors par le dedans, ô Vivant, car tu ridiculises toute mort à jamais !
7. Comment le Seigneur nous entretiendra-t-il si nous ne soignons pas les êtres dont nous nous sommes chargés ici-bas ? Comment la main de notre ange nous déchargera-t-elle des fardeaux trop pesants si nous chargeons les autres sans mesure ?
7’. Celui qui maltraite ou qui néglige un enfant, une bête ou une plante, se retranche de la bénédiction de Dieu et tombe au hasard de la pierre et de la fosse. Cependant l’enfant qui nous frappe sera fouetté, la bête qui nous attaque sera abattue, la plante qui nous déchire sera coupée et brûlée.
8. Les machines sont stupides et leur stupidité nous entraînera toujours trop vite et trop loin de la contemplation de l’Unique et de sa quête sainte.
8’. Ne récriminons pas continuellement contre ce qui nous déplaît : abandonnons-le plutôt et contentons-nous du pain de la terre et de l’eau du ciel avec le repos et la joie du Parfait.
9. Tous mes amis se souviennent de moi et me réjouissent par leurs dons et par leurs bonnes pensées sans que je fasse rien pour eux. Ainsi le Seigneur, qui me comble de sa joie et de son amour, me rappelle-t-il aimablement que je suis également indigne de ses grâces et de ses ris.
9’. Longtemps j’ai séché sur le sable mort, mais lorsque la rosée du Seigneur m’a béni, j’ai refleuri dans le secret aérien de la neige et j’ai mûri dans le poids de l’or épuré. « Si l’Esprit de Dieu est avec nous, qui pourra s’opposer à notre prédication dans le monde ? »
10. Gardons-nous bien de nous identifier aux choses défectueuses que nous faisons journellement afin de ne pas être amenés à défendre l’indéfendable ni à justifier l’injustifiable.
10’. Les prophètes du Seigneur ont été honnis par leurs proches et ils ont été persécutés par leur peuple uniquement parce qu’ils n’ont jamais transigé en ce qui concerne la vérité révélée de Dieu.
11. Ne discutons jamais vainement pour avoir raison ; interrogeons plutôt humblement et ensuite éprouvons la vérité de la réponse dans notre esprit et dans notre cœur.
11’. Ô Très-Précieux, donne-nous l’intelligence des sentences mystérieuses énoncées par les sages de ta maison et fais fleurir notre vie cachée.
12. Quand les clercs laissent tomber le flambeau de Dieu, il appartient aux croyants de le ramasser et de le replacer sur l’autel afin qu’il éclaire à nouveau le monde enténébré.
12’. Il est plus intelligent et plus avantageux pour ceux qui sont au pouvoir, d’éprouver et d’adopter ceux qui ont l’inspiration et qui les reprennent, plutôt que d’étouffer leur voix par le silence ou de les faire disparaître par la violence.
13. Et les clercs qui sont demeurés éveillés et fidèles à leur Seigneur, doivent aider ces croyants à restaurer le vrai culte de Dieu qui s’accomplit dans le cœur des hommes, au lieu de faire corps avec la frigidité envahissante des pierres mortes.
13’. Car la vérité de Dieu ressort toujours triomphalement de la prison ténébreuse où les pusillanimes la relèguent, et elle germe toujours irrésistiblement des cendres dont les méchants la recouvrent.
14. Par leur médiocrité satisfaite et par leur hypocrisie repoussante, certains « bien-pensants » dégoûtent même les impies. Comment ne répugneraient-ils pas aussi aux chercheurs de l’Unique ? Et comment pourraient-ils être connus de Dieu ?
14’. Si nous « aimons » véritablement, nul mal ne nous atteindra et la liberté, la joie et la paix de l’Unique habiteront en nous pour toujours. « Les enfants de Dieu fleuriront dans la paix du Seigneur, tandis que les rebelles y dépériront et y sécheront sans retour. » Voilà la marque et voilà le jugement.
15. Quels que soient nos égarements et nos fautes, revenons sans cesse à la quête de l’Unique sans nous décourager et sans douter de la fin.
15’. Ô mon Seigneur, tu parles à mon âme et tout le reste s’efface, car ta plénitude s’établit en moi et envahit le ciel et la terre.
16. Cessons de combattre dans le monde pour entasser des richesses, car l’heure vient, et elle est déjà venue, où nous devrons tout abandonner et où nous n’aurons pour paraître en justice que nos bonnes pensées, nos bonnes actions et notre repos dans l’Unique.
16’. Dans la quête de Dieu, nous ne rencontrerons que des frères qui nous aideront aimablement, tandis que dans la poursuite du monde, nous n’aurons affaire qu’à des concurrents qui nous combattront durement. Remarquons bien ceci et tenons-nous éloignés des polémiques vaines.
17. Examinées du dehors, les rosaces des cathédrales ne laissent voir que leur ossature, mais vues du dedans, leur éclat illumine le croyant. Ainsi la parole de vie entendue du dehors ne laisse apercevoir que l’os de la vérité, tandis que cette même parole perçue du dedans, fait goûter la moelle nourrissante du créateur de toute chose.
17’. Ô importants, ô puissants, ô riches, ô savants, ô intelligents, qu’apportez-vous au Seigneur que vous discutez avec tant de jactance ? Ou bien, qu’offrez-vous à l’humanité dont vous vous recommandez avec tant d’impudence ? Des paroles vaines qui rejoignent le silence de la mort, et des œuvres vides qui pourrissent à la surface de la terre.
18. Le Livre a germé dans un homme réputé par certains comme : inutile, paresseux, révolté, orgueilleux, voire impie, car l’humour du Parfait se plaît à accomplir de grandes choses avec des instruments dérisoires.
18’. Le Livre brillera sur le monde comme un soleil, et quand il sera retourné à l’Unique, sa lumière et sa chaleur seront encore longtemps perceptibles dans le cœur des hommes. « Prions pour que celui qui nous l’a donné repose dans la paix adorable du centre de l’Unique. »
19. Nous cherchons les deux colonnes du Temple et nous les avons sous nos yeux et sous nos mains, mais nos cœurs sont obscurcis par le péché de la chute et la vérité de Dieu s’est retirée dans le puits de l’abîme.
19’. Sépare ce qui est uni, et les ténèbres te feront voir le commencement de l’œuvre. Conjoins ce qui est séparé, et la lumière te mènera à la fin de l’ouvrage divin qui est le soleil glorieux.
20. La reconnaissance envers le créateur est la chose la plus rarement rencontrée dans l’humanité déchue ; les bêtes sont unanimes à saluer son image, mais nous ne rougissons pas de honte d’être les seuls à la mépriser ici-bas.
20’. Si nous n’allons pas audacieusement au Seigneur les yeux fermés, le Seigneur ne viendra pas à nous, et il n’enlèvera pas le bandeau qui nous aveugle et qui protège notre approche de la lumière stupéfiante de l’Unique.
21. Les symboles des mystères de Dieu peuvent être proposés à tous les croyants, mais les mystères de Dieu doivent être réservés uniquement aux hommes saints et sages. Les femmes y sont opposées par nature.
21’. L’inconstance d’Ève a tiré Adam hors de l’Éden. La constance d’Adam ramènera et convertira Ève dans le sein de Dieu.
22. Les incroyants n’entendent pas le Seigneur parce qu’ils ne parlent pas les premiers à Dieu. Comment leur ouvrirons-nous le cœur et la bouche si le Seigneur ne nous aide en personne ? Car l’orgueil est une cuirasse impénétrable sous laquelle la vie agonise, et nul autre que Dieu ne peut la briser du dehors ou la fondre du dedans.
22’. Ô tentation incompréhensible, ô mystère vertigineux, nous nous refusons à juger et nous nous couchons à terre, pleurant nos frères perdus jusqu’à ce que le Seigneur nous retire par la seule puissance de son amour, car nous ne pouvons qu’espérer en gémissant la conversion des égarés et le pardon de Dieu.
23. Prions afin que l’ange de la mort nous trouve louant et bénissant Dieu à l’heure de la séparation et de la réunion.
23’. Louons Dieu et confessons-nous dans nos cœurs devant le Seigneur afin qu’il nous lave de la boue envahissante du péché de mort.
24. Quand nous flotterons sans effort dans la lumière de vie, nous nous réjouirons en Dieu, mais nous pleurerons en nous souvenant de nos compagnons et de nos compagnes incrédules qui croupiront dans l’agonie des bêtes. Seul le sort des hypocrites nous laissera indifférents.
24’. Ô frères aimés qui lisez ceci, convertissez-vous dans vos cœurs pendant que le temps vous est encore mesuré. Cessez de vous agiter dans le vent de la nuit et considérez attentivement la fin de toute chose afin de ne pas vous laisser séduire par les apparences de ce monde.
25. Nos cœurs sont impatients devant la réussite des impies, mais nous avons choisi la récompense de vie du Seigneur et notre espoir ne sera pas trompé. « Les insensés servent le monde qui leur débite la mort, les croyants servent Dieu qui leur prodigue la vie. »
25’. L’ange du Seigneur était en moi et me pressait de toutes parts afin que je proclame la vérité de l’Unique, « car, me disait-il, beaucoup d’oreilles sont à présent attentives dans l’Église et hors de l’Église ».
26. Nous n’avons proposé que la vérité de Dieu, mais les médiocres et les pusillanimes ont pris peur devant la crudité de la chose et ils se sont retranchés derrière leur jugement aveugle.
26’. Il ne nous appartient pas d’habiller la vérité de Dieu pour séduire les incapables. Il nous appartient seulement de la présenter dans sa nudité, afin qu’ils se jugent eux-mêmes en se scandalisant et en la repoussant loin d’eux.
27. Ceux qui sont capables de scruter la vérité de Dieu, fût-ce à travers l’horreur de la mort, méritent seuls de voir briller la lampe du Parfait.
27’. Qui liera l’esprit ? Qui incarnera l’âme ? Qui purifiera le corps ?
27’’. Ô divin soleil de Dieu, tu nous ensemences dans la mort, tu nous fais croître dans la vie, et tu nous établis pour toujours dans ta gloire sans pareille !
28. Ne craignons pas de développer longuement nos racines dans les ténèbres de la foi nourricière, car lorsque nous germerons dans la lumière de Dieu, aucune tempête ne pourra nous abattre et le poids de notre croissance dans le ciel ne pourra pas nous faire basculer dans l’abîme.
28’. Le serviteur fugitif et méprisé qui nourrit mystérieusement le monde, est devenu le maître fidèle et très précieux qui nourrit en secret les élus de Dieu. Qui verra luire le verbe ? Qui palpera la lumière ? Qui goûtera le parfum ? Qui ? Qui ? Ô qui incarnera son Seigneur dans un cœur épuré ?
29. Fuyons les gens pressés et agités, car leur cœur est fermé à la voix du Très-Haut et leur folie est inguérissable.
29’. Si notre vie intérieure ne croît pas dans la mesure où notre vie extérieure décroît, nous n’aurons comme héritage que la crasse de la mort au jour du jugement.
30. Il suffit d’un charbon ardent pour enflammer une montagne de combustible, comme il suffit d’un saint pour faire germer une multitude de croyants et comme il suffit d’un seul fils de Dieu pour rénover et pour sauver la création exilée.
30’. Le petit caillou de Dieu vaut infiniment plus que toutes les montagnes de la terre et que tous les nuages du ciel. Qui le découvrira avant que le voile ne se déchire sur la création cachée ?
31. L’orgueil, c’est être comblé de dons et de richesses et ne pas louer Dieu, ou bien c’est crever de misère et de désespoir et ne rien demander à Dieu. Le premier orgueil peut encore recevoir la leçon du malheur, mais le second ne saurait céder, même devant l’abondance des dons du Seigneur.
31’. Les impies déclarés et les religieux déguisés traitent le Livre de « sottises » et de « blasphèmes », mais que diront-ils quand ils seront irrémédiablement écrasés sous le poids de la pierre manifestée ? Hélas ! la bouillie d’hommes ne parle pas.
32. Tous les prudents éditeurs ont repoussé le Livre, car la parole de Dieu ne paie pas, paraît-il. Hélas ! ils ont raison, car le nombre des amants de Dieu est devenu imperceptible dans le monde. Hélas ! ils ont tort, car la parole du Seigneur paie plus que tout puisqu’elle donne la vie aux intelligents de Dieu.
32’. Nous ressortirons de la terre comme des champignons sous l’ondée céleste et le Seigneur cueillera les uns pour les établir dans son jardin, et il abandonnera les autres à la pourriture de la terre étrangère, comme fait un jardinier judicieux qui sait distinguer ce qui est bon de ce qui est mauvais.
33. Le Seigneur est cruel, car il se joue même de ses saints. Il les plonge dans les ténèbres, il les ridiculise, il les humilie jusqu’à ce qu’ils soient comme des cadavres entre ses mains miraculeuses qui donnent la vie aux morts.
33’. Prenons garde aux méprisés, aux faibles et aux simples, car souvent le Seigneur se meut en eux et il y germe mystérieusement. « Ô sainte humilité, ô sainte boue de l’abîme, ô saint chaos du commencement ! »
34. Quelle malchance pour ceux qui méprisent le Livre et qui jugent sordidement celui qui l’a écrit sous le souffle du Seigneur. Que penser de ceux qui déchirent l’âme et de ceux qui perdent patience et qui frappent ?
34’. Les croyants libres sauveront l’Église de Dieu que les religieux laissent sombrer misérablement dans les affaires et dans les passions du monde. Ils la rétabliront dans sa pureté fraternelle avant le jugement de Dieu.
35. Le Seigneur réglera leur différend, et son jugement sera un exemple pour ceux qui croient.
35’. Si la richesse du Seigneur nous habite, notre pauvreté dans le monde nous sera légère et salutaire.
36. Satan ne pardonne pas et il ne nous lâche pas d’une semelle, et la femme rebelle demeure le principal instrument dont il se sert pour nous désespérer et pour nous damner ici-bas. Malheureux bourreau, malheureux supplicié, malheureux instrument de supplice ! Ô Seigneur, aie pitié de nous et délivre-nous de la malice et des coups du démon irréductible. Sauve-nous par la grâce de la Mère céleste soumise à ton amour fécondant.
36’. Satan nous ramène vers Dieu sans le savoir à coups de pied dans le derrière, et c’est pour cela que, même déchirés et culbutés dans la boue, nous devons nous tourner avec confiance vers le Seigneur de pardon, qui nous sauvera et qui nous rétablira dans son royaume de paix par la grâce de son amour, qui est incommensurable et fou.
37. Ne nous associons jamais avec des créatures sans générosité et sans grandeur d’âme, car à la fin nous serons méprisés et opprimés à mort sans profit pour personne, et forcés de fuir leur méchanceté aveugle et sourde sous peine de tomber dans l’esclavage de la Bête.
37’. Ô Seigneur tout-puissant, éloigne de nous les cœurs misérables qui sécrètent la haine et qui suintent la bassesse de l’enfer. Délivre-nous de l’infâme petitesse des médiocres et de l’envie corrosive des méchants.
38. Pas de gros lot de la fortune ici-bas pour les rescapés du Seigneur, mais seulement le mépris, les injures, les coups et la pauvreté dans l’exil.
38’. Ce qui est assuré, c’est peu de désirs, peu de soucis et peu de soins dans le monde, avec en soi la présence consolante du Seigneur de vérité et de vie.
39. La souffrance est un aiguillon qui actionne les intelligents de Dieu vers la paisible demeure de l’Unique, mais où souffler sur cette route escarpée ?
39’. Ô mon Seigneur, nos défaites sont trop persistantes ici-bas et si tu ne viens à notre secours, nous nous coucherons dans la poussière et nous mourrons devant ta face.
39’’. Veux-tu voir les méchants jubiler en brisant nos os ? Veux-tu les voir triompher en insultant ton saint Nom ?
40. Les saints du Seigneur sont seuls à voir luire sa justice dans le ciel ; pour nous, il nous faut marcher selon la boussole de la foi dans les ténèbres du monde et nous sommes souvent tentés de nous demander si les impies qui nous moquent et qui vivent la vie présente, ne sont pas plus avisés que nous qui espérons l’impossible et qui croyons l’incroyable.
40’. Satan nous aveugle par toutes sortes de ruses et de mirages et il nous décourage par toutes sortes de coups et de chutes. Demeurons donc dans la sainte communauté des enfants de Dieu et tenons-nous à la chaîne de l’amour afin que le tueur d’âmes ne nous trouve pas isolés et exposés comme des brebis errantes.
41. Nous accepterons tout ce qui s’offre et qui se donne, et nous laisserons tout ce qui se refuse et qui résiste. Ainsi nous accomplirons la volonté de Dieu qui ne violente jamais rien ni personne. « Celui qui s’empare est un criminel, celui qui ramasse n’est qu’un parasite de Dieu. »
41’. Brisé de coups, fou de douleur, enivré de désespoir, me voici comme un homme stupide qui adore son Seigneur en pleurant dans la poussière. Scandaleuse stupidité, désarmante stupidité, troublante stupidité, bienheureuse stupidité, triomphante stupidité qui fait jaillir la lumière des ténèbres.
42. Nous vous disons clairement ceci : vous êtes tombés dans la fange et vous avez été revêtus d’une peau de bête. Si vous agissez comme les anges qui sont demeurés dans la patrie céleste, Dieu vous ramènera à lui et vous jouirez de son saint repos dans sa lumière de vie ; mais si vous vous conduisez comme des rebelles, Satan vous enfoncera pour toujours dans la bestialité aveugle et sourde, et vos hurlements de damnés ne traverseront pas la couche de mort qui vous entourera de toutes parts.
42’. L’Unique se divise et l’Unique se rassemble, et chacun émet son petit jugement sur le pourquoi et sur le comment qu’il ne connaît pas, au lieu de rejoindre l’unité de l’Un et de demeurer en elle jusqu’au jour du choix de l’Unique.
42’. Quelle joie d’avoir écrit le Livre et quelle assurance d’entendre la voix du Seigneur qui nous approuve ! Oh ! quelle récompense débordante sera nôtre quand la multitude des âmes bénies viendra vers nous afin que nous les remettions en hommage dans les mains du Parfait. Lui choisira et mangera celles qui l’auront mangé afin que l’unité du cœur unique s’accomplisse en Un. Quant aux autres, il les établira dans son jardin de délices comme des étoiles dans le ciel.
43. Quand les impies et les méchants du monde nous découragent, relisons le Livre de l’Unique, et la voie triomphale brillera dans nos cœurs. Alors le rire de notre joie étonnera et scandalisera les aveugles remplis de l’assurance de leurs ténèbres, et les prestiges de la mort même nous sembleront vains.
43’. Quand nous aurons placé un saint livre chez un cœur généreux, nous aurons semé le grain d’or qui germera et qui embrasera le ciel et la terre, mais si le cœur est sec, nous ne devons pas nous décourager, car dans ceux qui l’avoisinent la lumière du Seigneur repose peut-être, attendant la libre rosée de l’Unique pour fleurir et pour paraître au monde de l’amour.
44. Le cœur stérile est jaloux de toute amitié, même de l’amour de Dieu, car il embrasse comme la pieuvre qui suce la vie jusqu’à la dernière goutte et qui rejette la dépouille vidée. Fuyons donc les méchants qui aiment pour eux seuls et jamais pour Dieu, car ceux-là prennent tout et ils ne donnent rien.
44’. Ton père, ta mère, tes frères, tes sœurs, ta compagne, tes enfants, tes amis peuvent se tourner contre Dieu et t’accabler de leurs mauvaises pensées et de leurs sarcasmes. Il ne t’appartient pas de les juger, mais tu peux les fuir aussi vite et aussi loin que te porteront tes deux jambes, car le Seigneur t’accompagnera et il remplacera avantageusement ta famille de vanité.
44’. Après les larmes corrosives de l’amertume, voici les douces larmes de la joie débordante, car l’abondance du don de notre Seigneur fait couler l’eau prisonnière de nos cœurs, et son amour la condense en une pierre sainte et précieuse.
45. Quand j’eus frappé la compagne rebelle à la voie du Très-Haut, je pensais être privé de mon Seigneur pour longtemps, mais lui déborda aussitôt dans mon cœur en révélations magnifiques et en amoureuses consolations ; et mon étonnement fut grand qu’ayant ainsi frappé, mon cœur fut encore plus ouvert au-dedans. « Le Seigneur peut même convertir les pierres si cela lui plaît. »
45’. J’entends la voix de mon Seigneur et je transcris la parole de mon Seigneur. Quelle plus merveilleuse récompense ? — Je vois la lumière de mon Seigneur et je mange la vie de mon Seigneur. Quel plus adorable don ? — Je nage dans l’amour de mon Seigneur et je repose sur le cœur de mon Seigneur. Quel plus divin état ?
46. Quand j’eus renoncé à mes petits biens dans le monde, mon Seigneur m’inonda de richesses dans mon cœur, et je connus qu’ayant tout perdu sur la terre, j’avais tout gagné dans le ciel. « Faut-il pas jeter le lest mort pour que le ballon s’envole dans la liberté des cieux et rejoigne l’île du bonheur ? »
46’. Les noms des héros du monde et les noms des croyants s’effaceront des pierres, des monuments et de la mémoire des hommes, mais les noms des saints prophètes et des sages amis de Dieu demeureront gravés à jamais dans la pierre céleste et vivront l’éternité dans le cœur de l’Unique.
47. Prions pour que les méchants qui nous entourent se convertissent dans leur cœur et s’ils persistent dans leurs jugements misérables, fuyons-les et prions pour ceux qui cherchent à tâtons le Seigneur dans leurs cœurs douloureux et inquiets, afin que la lumière du Très-Saint germe en eux et pour qu’elle illumine leur route jusqu’au bout de leur quête.
47’. S’il nous arrive de suspendre notre travail dans le monde pour prier et pour louer notre Seigneur magnifique, aucun mal n’en résultera pour nous malgré les menaces des impies et malgré les coups des méchants, car la plus petite louange au Très-Haut vaut plus que tous les travaux des hommes réunis ici-bas. « Le Livre a bien été jugé comme une fainéantise par les aveugles et par les sourds de ce monde ! »
48. Qui a trouvé le saint calice ? Qui a ouvert le vase scellé ? Qui a regardé dans le secret ? Qui a bu à la source ? Qui est tombé dans le ciel ? Qui est mort dans la vie ? Qui est ressuscité dans l’amour ? Qui est établi dans la connaissance ? Qui repose dans la paix du Parfait ? Qui est devenu UN avec celui qui EST ?
48’. Montre-nous celui-là, Seigneur miséricordieux, afin que nous baisions ses pieds et ses mains et que nous le suivions aveuglément jusqu’à ton jardin secret, jusqu’à ta maison cachée et jusqu’à ton cœur virginal et très saint, où la joie de vie danse éternellement autour de ton amour immuable.
49. Ô mon Seigneur, tu es mon père et ma mère, tu es mes frères et mes sœurs, tu es ma compagne et mes enfants, tu es le bien et l’ami indéfectible qui se souvient de ses bien-aimés dans ce monde.
49’. Nous voilà aux yeux du Seigneur comme une cendre qu’il ne dédaigne pas de féconder et d’amener à l’éternité de sa paix. « Qui comprendra l’amour du Tout-Puissant pour sa créature naissante ? »
50. Combien de femmes auraient pleuré de joie en découvrant un compagnon qui cherchait assidûment son Seigneur, et l’auraient aidé et servi avec amour et reconnaissance ?
50’. Ce que nous aurons nié et combattu ne pourra jamais nous appartenir. Prenons bien garde à ce que nous penserons et à ce que nous dirons de la résurrection et du jugement annoncés par les prophètes.
51. Celle que Dieu nous a donnée a douté de notre quête et elle s’est révoltée dans son cœur. « Le Seigneur est jaloux de ses bien-aimés et il ne permet pas que leur amour s’égare dans le monde, mais quiconque peut se convertir à lui s’il le désire dans son cœur. »
51’. Car l’accomplissement de la chose fermera irrémédiablement les portes de la sortie et celles de l’entrée. Pensons-y bien avant le fracas des verrous et des barres qui marquera le temps du choix irrévocable !
52. Nous reconnaîtrons les impies endurcis à ce qu’ils sont durs avec eux-mêmes et avec les autres, à ce qu’ils sont remplis de courage pour les choses du monde et à ce qu’ils ne comptent que sur eux et sur le travail de leurs mains pour s’installer et pour s’organiser ici-bas.
52’. Ô puissent-ils un jour tendre la main humblement et méditer leur faiblesse ainsi que la puissance de la Providence de Dieu, qui fait tout croître et mûrir sans le travail des hommes ! Mais comprendraient-ils ?
53. Méfions-nous des impies qui, ayant nié Dieu toute leur vie, méprisé ses enseignements et craché sur les siens, prennent peur dans leur vieillesse et tentent de souscrire une assurance en dotant des œuvres religieuses ou en construisant et décorant des chapelles, car c’est encore leurs noms qu’ils tentent d’imposer orgueilleusement à Dieu et aux hommes, et non pas leurs cœurs qu’ils offrent avec repentance au Seigneur clairvoyant.
53’. Si nous n’avons pas l’intelligence de faire autrement, accomplissons nos sottises dans le monde, mais au moins remercions quelquefois Dieu dans nos cœurs pour la vie qu’il nous consent ici-bas dans sa patience et dans sa générosité, et quand nous voyons quelque chose de beau, de grand et de noble dans le monde, abandonnons nos chétives pensées et louons le Seigneur pour ce petit reflet de l’œuvre admirable et secrète qui s’accomplit devant nos yeux d’aveugles.
54. Leur ruse et leur hypocrisie ne les sauveront pas s’ils n’entrent humblement et sincèrement dans le chemin de la pénitence qui leur est offert par le Miséricordieux.
54’. Qu’importe que nos mains soient vides des œuvres du monde, pourvu que nos cœurs soient remplis de l’amour de Dieu !
55. Certains poursuivent en secret la quête de Dieu au-delà des symboles et des figures, car ils ont soif de la réalité qui se voit, qui se touche et qui se mange. Qui pourrait les reprendre et qui oserait les exclure de l’Église universelle du Seigneur très savant ?
55’. Si nous n’incarnons pas le Très-Haut dans la pureté de nos cœurs, nous ne palperons pas le corps du Seigneur ici-bas et nous n’entrerons pas vivants dans son éternité et dans sa paix magnifiques.
56. « Ils sont disciples de Jésus, mais en secret, par crainte des prêtres », dit Emmanuel. Mais cela n’existait-il pas déjà du temps de Jésus ? Et ces disciples-là n’étaient-ils pas en Dieu avant d’être dans l’histoire ?
56’. Peut-être n’ont-ils rien dit parce qu’ils savaient trop de choses sur Dieu et pas assez sur le monde ? Ou bien leur Seigneur ne leur a pas commandé de parler et de se faire connaître ? Mais certainement ils n’ont jamais disparu tout à fait.
57. Tout s’écroulait en moi et autour de moi, mais dans mon cœur le Seigneur me faisait signe de rire avec lui et de ne pas croire au malheur, et mon étonnement et ma joie étaient sans limite comme le désespoir envolé.
57’. Les intelligents et les savants du monde ne voudront-ils pas aussi nous expliquer le Livre que nous avons écrit sous l’inspiration du Seigneur de haute science et de grand amour ? Histoire de faire rire les anges et les saints dans le ciel.
58. Les travailleurs et les débrouillards réussissent quelquefois dans le monde, mais peu de personnes semblent remarquer que c’est pour aboutir au même point d’ignorance et de pauvreté que les fainéants et que les incapables devant la mort et la vie future, car l’impiété les aveugle tous également et elle les cloue à l’écorce des choses.
58’. Même brisés et désespérés, où irons-nous si ce n’est à notre Seigneur de compassion ? Car quel est celui qui nous acceptera dans cet état lamentable, si ce n’est le Généreux et le Miséricordieux qui console, qui comble et qui guérit de la mort ? « Si nous nous effaçons sincèrement, Dieu nous mettra en lumière, mais si nous prétendons briller, il nous plongera dans les ténèbres de l’oubli. »
59. Au jour de la révélation du jugement, nous verrons avec étonnement que toutes les Écritures saintes différaient par les mots, mais qu’elles enseignaient le même mystère de résurrection et de vie éternelle en Dieu.
59’. Seigneur, nous pleurons de joie en écoutant ta musique qui parle à nos âmes et qui les console de l’exil de la mort, mais c’est ta sainte rosée qui nous délivre de l’abîme de perdition et qui nous fait refleurir dans ta lumière merveilleuse où la joie céleste habite pour l’éternité.
60. Il a fallu des siècles et des légions de chercheurs pour faire paraître la science des hommes dans le monde, mais il ne faut qu’un moment et qu’un seul inspiré pour rappeler la science et l’amour de Dieu dans le cœur des croyants. Ne remarquerons-nous pas la chose et ne serons-nous pas étonnés et touchés par le rappel du Seigneur ?
60’. Celui qui plonge dans la sainte lumière du Seigneur de vie, oublie sa raison et son jugement dans ce monde, tout comme celui qui tombe dans les ténèbres de la folie. Mais le premier avance avec assurance vers l’unité de l’Unique, alors que le second se disperse dans la mort très opaque de l’écorce.
61. Nous ne sommes pas « amusant », disent les impies du monde. Mais comment pourrions-nous l’être quand nous voyons l’enfer béant ouvert sous leurs pas d’aveugles rassurés ?
61’. Nous ne sommes pas « facile », disent les croyants de ce monde. Mais comment pourrions-nous l’être quand nous annonçons les mystères de la triple résurrection et ceux du jugement équitable ?
62. Le temps approche et il est déjà là, où les croyants s’occuperont à nouveau des choses de Dieu et où ils laisseront les choses du monde aux impies.
62’. L’action de Satan ne se borne pas à éloigner les croyants de la foi et de l’amour de Dieu, elle consiste aussi à les éloigner de la recherche des mystères et de la science de Dieu.
63. Nous rechercherons les hommes les plus doués et les plus capables selon leurs œuvres et selon leurs réussites dans le monde pour gouverner et pour organiser le peuple et la nation ; et nous éliminerons impitoyablement les incapables et les médiocres qui prétendent accomplir pour tous ce qu’ils n’ont pu réussir pour eux-mêmes.
63’. Nous rechercherons les hommes les plus sages et les plus saints selon leurs prédictions et selon leurs vies dans le monde pour diriger et pour maintenir le peuple et la nation ; et nous éliminerons impitoyablement les aveugles et les sourds qui prétendent imposer à tous ce qu’ils n’ont ni vu ni entendu pour eux-mêmes.
64. Nous n’avons pas choisi d’écrire le Livre ni de prêcher la vérité de Dieu ; c’est le Seigneur qui nous a choisi et qui a fondu sur nous sans prévenir comme l’aigle qui enlève sa proie et qui l’élève dans le ciel. Si le Seigneur lâchait prise à présent, nous retomberions lourdement à terre et il n’y aurait plus qu’un sac d’os entremêlés, muets et stupides. Réellement, nous sommes tous dans la main de Dieu ; quelques-uns le croient, mais bien peu l’expérimentent ici-bas.
64’. Aujourd’hui même s’il le veut, Dieu peut nous déjuger et nous humilier jusqu’à la poussière en nous ridiculisant devant tous, croyants et impies, savants et ignorants, intelligents et brutes ; mais nous demeurerions tourné vers sa sainte face, et même recouvert de boue, nous louerions son saint NOM sans douter de sa sagesse et de sa miséricorde, car l’amour qu’il a implanté en nous n’est pas de ceux dont on se défait aisément.
65. Comment aurions-nous songé de nous-même à écrire un Livre qui nous a pris les douze meilleures années de notre jeunesse selon le monde, qui a exigé mille soins et le retrait de la vie ambiante, qui a provoqué le jugement et la rébellion des nôtres, qui nous a coûté la pauvreté, que nul ne veut accepter, qui indiffère le monde, qui ennuie nos proches, qui froisse les religieux, qui nous fait passer pour déséquilibré, et qui n’engendre jusqu’à présent que le silence et l’abandon ? Comment aurions-nous songé de nous-même à perdre notre vie dans ce monde afin de la gagner en Dieu ?
65’. Ô Seigneur de miséricorde et de paix, permets qu’à présent nous nous cachions et que nous disparaissions derrière toi ; permets que nous achevions ton œuvre dans le secret et dans le repos avant que les imbéciles qui laissent mourir de misère tes enfants inspirés, ne viennent nous féliciter et nous serrer la main ; avant qu’ils ne se ruent avaricieusement sur ce qu’ils ont toujours refusé d’acheter pour un morceau de pain ; avant qu’ils se saisissent de notre ombre et qu’ils l’affichent dans leurs spectacles de cirque ; avant qu’ils dépècent notre vie stupidement et férocement comme ils font des bêtes pour y surprendre l’âme.
66. Comment pourrions-nous encore maintenant persévérer de nous-même dans l’achèvement d’un tel ouvrage au milieu du désert de ce temps d’impiété et de mort ? Cela ne fera-t-il pas réfléchir les croyants ? Cela ne les amènera-t-il pas à examiner avec les yeux du cœur les paroles inscrites dans le Livre ? Cela ne les incitera-t-il pas à augmenter la part de leur Seigneur généreux et compatissant ?
66’. Avant qu’ils nous pourchassent pour obtenir ce qu’ils n’ont jamais voulu donner eux-mêmes à quiconque ; avant qu’ils nous couvrent d’ordures pour rassurer leur bassesse et leur lâcheté. Enfonce-les dans leur méchanceté et dans leur stupidité, Seigneur, et souviens-toi de ceux qui nous ont aidé et qui ont cru en ta parole sainte afin qu’ils reçoivent ta vie magnifique et sans mélange promise aux cœurs fidèles et généreux.
67. Les juifs croyants sont les plus soumis à Dieu et ils seront rétablis les premiers avec consolation et avec honneur par le Seigneur.
67’. Le comble de l’intelligence, c’est être idiot devant Dieu, comme le comble de l’idiotie, c’est se croire intelligent devant lui.
68. Les juifs incroyants sont les plus révoltés contre Dieu et ils seront chassés et exterminés les premiers de dessus la terre des vivants. Il y a là une distinction que doivent bien noter les croyants afin de ne pas repousser ni brimer leurs frères dans la foi en Dieu.
68’. Remarquons combien la vie des impies est agitée, inquiète et malheureuse, et comment leur rébellion les précipite dans la dispersion aveugle et dans la folie destructrice.
69. Qui peut ne pas se sentir apaisé et consolé après avoir lu le Livre ? Et qui peut ne pas se sentir illuminé et conduit après l’avoir médité tant soit peu ?
69’. Vite, vite, encore un peu de temps pour le lire. Encore un peu de temps pour le comprendre. Encore un peu de temps pour l’entreprendre. Encore un peu de temps pour l’achever. Mais alors, toute l’éternité pour en jouir.
70. Nous ne sommes ni légiste ni juge pour vous mâcher des lois et pour vous les faire respecter, et nous ne sommes ni politique ni technicien pour vous gouverner et pour vous organiser dans ce monde.
70’. Remarquez que nous ne récoltons que des ennuis pour ce Livre et que notre volonté n’y est pour rien. Il nous serait sans doute plus agréable de pouvoir souffler un peu et de nous reposer dans le monde.
71. Nous sommes seulement chargé de vous rappeler la résurrection annoncée par les prophètes ainsi que le jugement de Dieu où vous serez triés, soit pour la joie, soit pour la douleur.
71’. Mais le jugement de Dieu presse à présent et sa proclamation n’attend pas, car le tribunal du juste s’impatiente. Ne le comprenons-nous pas aux signes de la décomposition générale des nations ?
72. Qu’ont-ils gagné les médiocres qui ont condamné l’œuvre qu’ils ne comprenaient pas ? Une platitude encore plus irrémédiable et leur propre condamnation par celui qui a inspiré cette œuvre.
72’. Comme la rosée change la terre morte en prairies pleines de fleurs odorantes, ainsi la grâce céleste fait refleurir nos cœurs desséchés et brûlés.
73. Imbéciles et rebelles, allez à la poussière, au malheur et à la solitude de la mort réservés aux stupides adorateurs du monde enténébré, ou bien soumettez-vous au Seigneur alors qu’il en est encore temps et ne jugez pas ce qui vous dépasse et ne vous opposez pas au souffle de l’Esprit que vous ne connaissez pas.
73’. Dieu peut transformer les pierres mortes en moisson de vie, mais il les choisit selon un jugement secret qui nous demeure incompréhensible. Peut-être comprendrons-nous quand le voile sera ôté. Hélas ! il sera trop tard pour se convertir. Il vaut mieux interroger le Seigneur et puis écouter sa réponse dans nos cœurs et nous plier à sa loi sans juger.
74. Peut-être est-il vrai que le Livre soit inutile pour ce peuple dégénéré de la voie de Dieu : ses intelligents et ses bien-pensants le repoussent, car leur abrutissement dans le monde ressemble à la mort. Nous le remettrons donc dans les mains de Dieu d’où il est venu afin que les anges s’en réjouissent premièrement.
74’. Aie pitié des rescapés de ton peuple et groupe-les dans ta sainte lumière de vie afin qu’ils embrasent la montagne des morts qui les entourent et qui les oppriment misérablement. Permets que tes saints attirent ta bénédiction sur ces ossements inertes afin qu’ils vivent à nouveau devant toi dans la repentance, dans l’obéissance et dans la joie de l’amour retrouvé.
75. Ô Seigneur de prévoyance, nous aurais-tu donné la semence trop tard, alors que le cœur de ces hommes était déjà endurci comme la pierre morte ? Il suffit cependant de ta bénédiction pour que la mort même refleurisse magnifiquement.
75’. Ô Seigneur, si tu le veux, ton talent sera enterré ou bien il illuminera le monde à nouveau, et nos chants de reconnaissance renverront ton NOM jusqu’aux étoiles.
75’’. Sinon la dispersion, le malheur et la mort vont s’abattre sur ce peuple impie et tiède. Et un petit reste sera sauvé et germera à nouveau dans la simplicité et dans l’amour de l’Unique.
En vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu.
Malheur à vous, docteurs de la loi, parce qu’ayant pris la clef de la Science, vous n’êtes point entrés vous-mêmes et ceux qui voulaient entrer vous les en avez empêchés.
⟴LIVRE XXII
Dieu vous a tirés de la terre. Il vous y fera rentrer et sortir de nouveau… Le jour où les tombes s’ouvriront et où les secrets des cœurs seront divulgués.
Garde ton cœur avant toute chose, car de lui jaillissent les sources de la vie.
ÉVITE EN UR
LE SAGE
1. Nous étouffons sous les vaines explications des intelligents du monde, et leurs ouvrages augmentent la confusion des esprits et l’impiété des cœurs.
1’. Les déjections des mouches innombrables ne sauraient ni entamer ni recouvrir la grande pyramide de Dieu.
2. Leurs livres et leurs noms retourneront à la poussière, mais l’œuvre du Seigneur demeurera à jamais, et sa parole traversera les siècles et affrontera victorieusement les assauts des cuistres diplômés de toutes les nations.
2’. « Perdons » notre temps à chercher Dieu et n’écoutons pas ce qu’en diront les impies, car leurs cœurs sont obscurcis, leurs yeux sont aveugles et leurs mains sont impuissantes à violenter la sainte lumière du Seigneur de vie.
3. L’artiste nous fait passer un moment, et l’artisan nous fait durer un temps, mais qui nous délivrera de la mort ? Et qui nous donnera l’éternité de la vie si ce n’est la science de l’Unique ?
3’. Celui qui loue le Seigneur dans son cœur, fût-ce pour une petite fleur, n’est ni médiocre ni impie. Et celui qui le cherche, fût-ce à travers une pierre morte, n’est ni fainéant ni incapable.
4. Affichons la loi du Seigneur dans nos maisons afin qu’elle pénètre dans nos têtes et afin qu’elle germe dans nos cœurs. Ainsi sa voie nous apparaîtra lumineuse et facile, ô combien !
4’. Étudie le Livre et mendie ton pain si c’est le plus court pour toi, car seule la précieuse trouvaille du Seigneur compte, et seule la science de l’Unique donne le poids de la vie qui ne périt pas.
5. Vous jugez avec votre malice croyant surprendre la vigilance du Seigneur, mais votre malice vous aveugle et elle vous mène à la fosse de perdition, et vous ricanez stupidement quand on vous parle de la simplicité toute droite qui engendre la lumière de vie. Votre raison est devenue comme un poison mortel, et votre intelligence est comme un scorpion qui s’inocule son propre venin.
5’. À présent, nous parlons clairement et nul n’écoute, mais quand tous interrogeront, nous demeurerons muet comme une souche, et ceux qui dédaignent maintenant seront furieux de ne pas obtenir de réponse, car le danger sera là qui les pressera de toutes parts, et l’angoisse de la peur les portera à s’intéresser aux choses qu’ils méprisaient dans le temps de leur assurance impie.
6. Saints et sages prophètes de Dieu, venez à notre aide, entourez-nous de votre cohorte étincelante et soutenez-nous afin que nous ne faiblissions pas dans la voie du Seigneur. Priez le Très-Saint pour qu’il nous console dans son cœur à la fin de notre peine. Suppliez le Seigneur qu’il retienne son bras armé du glaive de la séparation ; le temps que les ignorants puissent lire et entendre la parole inspirée ; le temps que les hésitants puissent choisir dans leurs cœurs et se repentir devant Dieu ; le temps que les rebelles puissent se livrer encore plus à la folie du monde.
6’. Le temps que les impies puissent s’organiser orgueilleusement dans la boue du mélange ; le temps que les savants et que les travailleurs puissent triompher dans leurs œuvres vaines ; le temps que les croyants puissent revenir à la simplicité de la foi et de l’amour de Dieu. Alors, que son bras tombe et que son glaive sépare sans pitié et sans pardon les brebis des boucs ! Que ses enfants voient briller sa lumière et qu’ils habitent dans son soleil ! Que ses ennemis soient frappés dans la confusion des ténèbres et qu’ils se déchirent comme des bêtes au milieu des ruines fumantes de leur science fausse !
7. Nous ne sommes pas venu pour détourner quiconque de sa foi, de son culte ou de sa secte. Nous sommes venu pour rassembler les croyants qui cherchent le Seigneur vivant, dans la grâce, dans l’amour et dans la connaissance de l’Unique Splendeur.
7’. Nous ne sommes pas venu pour abattre ce qui chancelle, ni pour tuer ce qui se meurt, ni pour dissoudre ce qui se défait seul. Nous sommes venu pour donner forme à ce qui se cherche, pour donner corps à ce qui s’incarne, pour accoucher ce qui naît.
8. Nous sommes venu pour refaire l’Église sans monuments, sans barrières, sans grades, sans vanités et sans finances. Pour refaire l’Église fondée sur la pierre sainte du commencement et de la fin. Pour refaire l’Église des saints qui parlent à Dieu dans leurs cœurs.
8’. Nous sommes venu pour refaire l’Église des sages qui font briller Dieu dans leurs cœurs. Le Seigneur connaît les siens et il soutient ceux qui observent sa loi, ceux qui aiment sa foi, ceux qui suivent sa voie et ceux qui accomplissent son œuvre.
9. Cinq minutes avec des hypocrites et nous voilà tristes, découragés, inutiles, jugés, condamnés et chassés, à moins que la colère de Dieu ne s’empare de nous et ne maudisse les méchants après avoir dénoncé leurs turpitudes.
9’. Sans la grâce et sans l’amour de Dieu, nous serions aussi stupides que les impies. Ainsi nous devons être reconnaissants au Seigneur qui nous a faits croyants, mais nous ne pouvons certainement pas en être fiers !
10. Les hypocrites se maudissent eux-mêmes, ce qui est le comble de la punition pour leur hypocrisie. Pas de pardon pour ceux-là qui pensent se jouer de Dieu et qui trompent les hommes sciemment. « Toutes leurs ruses s’en iront en fumée quand la nuée incandescente les approchera. »
10’. Ô Seigneur, qui vois dans les cœurs, délivre-nous des rebelles et de leur malignité qui tue la grâce, la foi et l’amour qui nous font vivre en toi ; et fais-nous connaître les croyants qui t’aiment et qui te louent dans leurs cœurs, mais par-dessus tout, fais-nous rencontrer ceux à qui tu parles en secret.
11. Ô Seigneur très bon et très sage, délivre-nous des brutes, des criminels, des fous et des rusés, et fouette les médiocres satisfaits d’eux-mêmes ; culbute dans la poussière l’ignorante vanité des raisonnables du monde ; frappe sur la bouche les imbéciles triomphants qui nous expliquent tout ce qu’ils n’entendent pas.
11’. Quand le Seigneur souffle dans l’homme et quand il empoigne l’instrument de sa colère, plus de sérénité et plus de sentences, car tout vole en éclats dans le ciel et tout tombe en poussière sur la terre, et voilà le serviteur brisé par l’action terrible, plongé dans les ténèbres de la solitude et repoussé de tous.
12. Ô ingratitude mortelle, nous lisons les livres saints et sages et nous ne louons pas dans nos cœurs le Seigneur de grâce et d’amour qui nous offre la vie sans mélange.
12’. Ô voile épais qui nous enlace, nous voilà comme des momies qui ne peuvent atteindre l’eau de la résurrection, qui ne savent pas tendre la main vers celui qui l’offre gratuitement et qui ne voient même pas sa lumière sainte !
13. Si quelqu’un ne vous dit pas qu’une œuvre est belle, et si plusieurs ne vous affirment pas qu’elle a de la valeur, vous demeurez stupides et aveugles devant elle, et vous vous détournez du joyau et vous vilipendez l’artiste, comme ces porcs qui foulent aux pieds les perles et qui déchirent les imprudents qui les leur offrent.
13’. Vous êtes doublement maudits quand vous payez très cher au temps du succès, ce que vous avez repoussé et méprisé au temps de l’abandon, car vous n’agissez que mus par la plus stupide et par la plus avaricieuse spéculation qui vous laissera le cœur et les mains vides au jour du jugement.
14. Contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, les vrais réalistes sont les croyants qui recherchent la vie substantielle et essentielle qui ne périt pas ; alors que les délirants abstraits sont ceux qui s’attachent à la matière périssable. Peut-être cela fera-t-il réfléchir un intelligent qui aime Dieu et qui le recherche dans son cœur ?
14’. Dieu en soit béni : les Écritures saintes sont toujours là, et il nous appartient de les lire et de les méditer sans nous laisser berner par les hypocrites qui les font servir à leurs intérêts, sans nous laisser circonvenir par les imbéciles qui les adaptent à leur médiocrité aveugle et sourde, et sans nous laisser induire par les bien-intentionnés qui les limitent à leur compréhension historique et morale.
15. Certains se sont chargés des saintes Écritures comme des ânes qui portent un trésor qu’ils sont incapables d’utiliser, ou comme des chiens qui gardent un os dont ils ne peuvent avoir la moelle, mais qui empêchent jalousement quiconque d’approcher.
15’. Ceux-là se reconnaissent tout de suite en feuilletant le Livre et leur rage déborde aussitôt, car ils ont monopolisé les mystères de Dieu pour les exploiter profanement, et au lieu de devenir instruits comme leur Seigneur, ils sont devenus stupides et vaniteux comme le démon qu’ils servent en secret.
16. Arrière, médiocres satisfaits et pontifiants ! Nous prions le Seigneur miséricordieux qu’il veuille bien vous réveiller si c’est encore possible, à coups de fouet plombé car il vaut mieux pour vous être déchiquetés et sauvés que de périr dans la fausse assurance de vos ténèbres insensibles.
16’. Ils s’accommodent de la boue qui les recouvre entièrement et ils répandent la laideur sur le monde. Ils nivellent tout en eux et autour d’eux, et les voilà comme des bêtes qui ruminent tranquillement dans l’abattoir où ils sont entassés pour la mort !
17. La simplicité n’est pas l’ignorance.
17’. La sagesse n’est pas l’insensibilité.
18. Si le Livre est une chose quelconque qui n’intéresse personne ou presque, comment pourra-t-il devenir une chose passionnante et recherchée de beaucoup, sans condamner cruellement ceux qui l’enterrent à présent ?
18’. Devenons les frères cadets de Christ en Dieu, et nous entendrons la parole de Dieu et nous ferons ses œuvres et nous vivrons dans l’Unique.
19. Il n’est pas à la mode du temps, et ce n’est pas une littérature pour anesthésier les agonisants de ce monde, voilà le défaut !
19’. « Tous les aimés ne sont-ils pas de Dieu ? Et tous les amants ne sont-ils pas en Dieu ? »
20. Nous avons dissous et purgé nos humeurs dans la boue humide, et nous les avons confortées et perfectionnées dans la lumière du ciel.
20’. Nous verrons le sperme paraître et croître comme la rosée du matin, et nous verrons le germe s’incarner dans sa pureté et la changer en sa propre nature fixe et parfaite.
21. Ta quête est trop ardue, Seigneur, et si tu ne viens pas à notre secours, nous échouerons certainement, car nos oreilles sont sourdes, nos yeux sont aveugles, nos mains sont impuissantes et ton salut est proprement incroyable !
21’. C’est le dedans du dedans qu’il nous faut découvrir et faire paraître dans la pureté ; et c’est le dedans de ce dedans-là qu’il nous faut enfin manifester dans la fixité.
22. C’est quand nous renonçons à comprendre que nous commençons à comprendre réellement. — C’est quand nous renonçons à rien expliquer que nous commençons à nous faire entendre et à être compris réellement.
22’. Celui qui baigne dans la clarté du feu intérieur, est comme idiot dans le monde, cependant il est seul vraiment éclairé. « Pour approcher la vérité, il faut être nu comme elle. »
23. Ne sois que toi-même, n’interroge que toi-même, ne pénètre que toi-même, ne te perds qu’en toi-même, ne te trouve qu’en toi-même, ne repose qu’en toi-même et tu approcheras le Seigneur du dedans, qui accomplit toutes choses en toi sans toi.
23’. La création, l’homme, l’art ne sont pas perfectibles, en ce sens qu’ils sont seulement dévoyés et que leur plus parfait accomplissement n’est que le retour à leur perfection initiale. « Il y a mieux que saisir l’évidence de la vie, c’est participer à sa pureté primitive. »
23’’. Supporte-toi, Aide-toi, Cherche-toi, Découvre-toi, Connais-toi, Accomplis-toi, avec l’aide du Seigneur du ciel.
24. La semence des astres est cachée dans la terre.
24’. Le limon de la terre est la première créature.
25. La vision juste, c’est voir les choses telles qu’elles furent et telles qu’elles seront, c’est-à-dire telles qu’elles sont en réalité dans l’unité première.
25’. Le plus grand travail dans la plus grande aisance, voilà l’ART. Le plus grand amour dans la plus grande pureté, voilà la sainteté. La plus grande liberté dans le plus grand repos, voilà la sagesse.
26. Il faut une grande générosité de l’âme pour reconnaître le premier qu’une œuvre inconnue est belle.
26’. Celui qui explore son ignorance, son impuissance et sa mort, connaît seul la folie et la sagesse de l’ART.
27. Que l’esprit de l’artiste soit aussi haut que les étoiles, et que sa vie soit aussi humble que la poussière !
27’. Celui qui fait peu de différence entre les choses du monde, perçoit bientôt l’unité qui les anime.
28. Tout ce qui s’oppose à la vie manifeste celle-ci d’autant plus clairement, et tout ce qui la reçoit y participe magnifiquement.
28’. Le propre de la vie, c’est le mouvement, le changement, la diversité, la liberté, la pureté, la joie, la fécondité, la gratuité et la louange.
29. Nous ne pouvons pas plaire à tous, car nous sommes rempli de défauts et de faiblesses et encore recouvert par la crasse étrangère, mais le Livre est déjà un jugement qui départage secrètement les cœurs éclairés et purs, des agonisants satisfaits et aveugles de ce monde.
29’. Puisse-t-il redonner à beaucoup le désir et le goût d’étudier les Écritures saintes et sages de toutes les nations ! Puisse-t-il être pour beaucoup l’étendard de la victoire et de la liberté en Celui qui EST ! Puisse-t-il illuminer les cœurs de ceux qui espèrent la lumière de vie !
30. Tout ce qui prétend diriger ou forcer l’ART, le stérilise et le tue.
30’. La modération est le propre du sage, la tyrannie est le fait du fou, l’insensibilité est le lot des brutes.
31. L’artiste, le croyant, le saint, le sage est celui qui se hausse jusqu’à la beauté illuminante de la création dégagée de sa gangue de mort.
31’. Il n’y a qu’un ART véritable, c’est celui qui manifeste l’esprit libre, qui est la lumière de l’Univers. Il n’y a qu’une science vraie, c’est celle qui fixe cette lumière divine dans le repos de Dieu.
32. Pourquoi discourir quand tout est si magnifiquement diversifié par la lumière de Dieu ?
32’. Celui qui ne porte pas sa joie en soi ne la verra pas se refléter dans le monde et il ne la verra pas fleurir en Dieu.
33. L’artiste véritable ne connaît que la terre et le ciel ; la science, la morale et la politique des hommes l’ennuient et le tuent.
33’. Seuls les astres morts ne tournent pas de joie sous le souffle de l’Unique.
34. Le prochain, c’est celui qui souffre et qui s’ouvre, et non pas celui qui se ferme et qui fait souffrir.
34’. On apprend à aimer en cherchant à pénétrer et à vivre l’état des autres.
35. On n’est pas croyant parce qu’on assiste aux cérémonies religieuses, et on n’est pas incroyant parce qu’on n’y va pas ; car le vrai culte de Dieu se pratique dans le cœur, et sa sainte quête s’opère par l’étude des sages Écritures et par les opérations de la foi en action dans le monde.
35’. Nous devons nous interroger sincèrement au sujet du Livre et choisir de nous-mêmes dans nos cœurs sans tenir compte des avis de ceux qui ont une place à défendre et à exploiter ici-bas. « Le Seigneur ne respire-t-il pas et ne se promène-t-il pas ici même ? »
36. Beaucoup sont ignorants des choses de Dieu, mais le comble est que ces ignorants jugent et condamnent à présent ceux qui sont instruits des mystères de l’Unique. Prions afin que le fouet divin les ramène au silence, à l’obéissance et à l’humilité qui conviennent à leur condition de sourds et d’aveugles incurables. « L’agitation du monde est si grande, Seigneur, et notre voix est si faible que nous mesurons tristement la folie de notre prédication. »
36’. Condamnés ici-bas à subir les hypocrites dans le monde, dans nos maisons et dans nos cœurs, nous aspirons de plus en plus à la communion des saints où les enfants de Dieu nous accueilleront aimablement, et où nul ne s’élèvera contre nous à cause de notre amour de l’Unique, mais au contraire, là où tous s’associeront spontanément à nos louanges, à nos bénédictions et à notre joie dans le Seigneur du centre.
37. Il vaut mieux une église tiède, branlante et profanée, que pas d’église du tout, car un paralytique aveugle peut encore parler, tandis qu’un mort ne peut plus rien faire pour quiconque.
37’. Les communautés devraient bien produire des saints capables d’enthousiasmer les derniers croyants. Peut-être leur faudrait-il commencer par ne pas exiler l’Esprit Saint de leurs murs ?
37’’. Le Seigneur ne peut-il plus compter que sur les croyants cachés dans le monde ? C’est bien possible après tout, car lui seul juge les consciences et les cœurs sans erreur possible.
38. Nous n’avons pas de visions, nous n’entendons pas de voix, nous ne faisons pas de miracles et le ciel demeure fermé devant nos yeux ; mais la grâce du Très-Haut a ouvert notre entendement, et son amour a confirmé notre mission ici-bas. Notre lot est entre ses mains. Il fera comme il lui plaira. Car depuis que nous nous sommes offert et qu’il nous a choisi, nous ne nous appartenons plus réellement.
38’. Nous acceptons d’être repoussé, vilipendé et abandonné par les gens en place, mais au moins que les plus intelligents en Dieu prennent la peine d’examiner et de peser attentivement les paroles du Livre ; et que les plus simples en Dieu aient le souci de s’interroger dans leurs cœurs au sujet de l’authenticité de l’ouvrage qui leur est présenté.
39. Certains qui croient servir le Seigneur le desservent, et d’autres qui pensent le desservir le servent sans le savoir.
39’. Consacrons nos loisirs au Seigneur, et le Seigneur multipliera nos loisirs.
40. Nous pouvons nous soutenir en chantant ou en récitant en commun des prières, des cantiques ou des versets et en communiant dans la grâce et dans l’amour du Seigneur de vie. Mais nul ne doit juger ni condamner ceux qui préfèrent la solitude et la prière silencieuse du cœur dans le secret de l’Unique.
40’. Quand nous serons vraiment pris par la quête de notre Seigneur mystérieux, les affaires du monde et les gens qui s’en occupent nous paraîtront fastidieux, vides et insupportables ; et ceux-là nous considéreront comme incapables, inutiles et fous.
41. Prenons-y bien garde, car ce n’est pas ce qui reluit le plus au-dehors dans le monde qui est le plus pur et le plus précieux au-dedans en Dieu.
41’. Nous sommes comme des insensés qui ont joué tout leur avoir dans le jeu de Dieu, et cela semble scandaleux à ceux qui comptent seulement sur le travail de leurs mains pour vivre et pour prospérer dans le monde.
42. L’opposition et la réprobation du monde sont désolantes et décourageantes, mais le jugement et la condamnation de nos proches sont cruels, même quand le Seigneur nous soutient dans notre sainte entreprise.
42’. Ô Seigneur miséricordieux, rachète au moins les instruments de notre supplice quand tu nous laisseras enfin souffler avant de nous recevoir dans ton sein bienheureux et très glorieux si tu le veux.
43. Il y a des aiguillons qui ne permettent pas aux plus paresseux de s’endormir, fût-ce le temps d’un soupir, quand le service de Dieu et le service des hommes pressent également. C’est une chose difficile à comprendre et bien dure à accepter ; cependant nous nous estimons privilégiés parmi les agonisants de ce monde.
43’. « La foi en Dieu et en sa résurrection paie tout de suite, car elle nous aide à supporter ce qui désespère et ce qui écrase les impies. Nourris-la et fortifie-la en nous jusqu’au jour lumineux de la fin et du commencement, Seigneur de bonté. »
44. Hep ! Hep ! Hep ! Quoi ? Quoi ? Quoi ? Ton sang coule, et ta vie s’envole !
44’. En arrosant notre mort, nous vivrons. En dissipant notre vie, nous mourrons certainement.
45. Venez, hommes de toutes les nations, mangez, buvez, réjouissez-vous et vivez, car le Livre vous est donné de préférence à ce peuple malin, finaud et impie, dont l’intelligence est devenue la plus grande stupidité qui soit.
45’. Ô patrie bénie de Dieu et nourrie par la Vierge sainte, te voilà devenue comme une prostituée qui déshonore la famille des vivants et qui préfère le ruisseau plein d’ordures étrangères à la table de son Seigneur et maître !
46. Race imbécile qui héritez le Livre du renouvellement de toutes choses, vous l’échangez contre un plat de lentilles, et même, vous vous en débarrassez en offrant le plat de lentilles en dédommagement à ceux qui veulent bien se charger de l’ouvrage.
46’. Tu as tourné en dérision les remontrances de tes saints, et ta rébellion a engendré les coups et les blessures empoisonnées. À présent, un temps de répit t’est accordé dans le ciel et sur la terre afin que tu réfléchisses et que tu reviennes à la sainte famille.
47. Que vos yeux demeurent bouchés, que vos oreilles demeurent fermées, ô super-intelligents, et que les étrangers mangent votre pain et qu’ils boivent votre vin en se moquant de vous ; qu’ils vous dépouillent de votre héritage et qu’ils se partagent vos richesses ; qu’ils vous réduisent en esclavage et qu’ils vous fassent travailler pour rien sur votre propre terre, afin que nous écoutions vos bons mots et afin que nous goûtions vos fines plaisanteries sur Dieu et sur son salut, sur Dieu et sur sa colère, si vous l’osez encore.
47’. Si tu refuses, ce sera ta fin. Sapée, émiettée, calcinée et dispersée par le vent, sans retour et sans pardon. Sans nom, sans souvenir et sans prière pour toujours. Mais si tu te relèves de la boue, si tu vides tes abcès, si tu te laves dans l’eau de la grâce, si tu revêts la robe nuptiale et si tu te soumets à ton Seigneur magnifique, tu refleuriras la première parmi les nations, comme tu étais tombée la première ; et ta lumière éclairera le monde et ta paix charmera tous les cœurs. On te nommera bienheureuse, née de l’esprit et du cœur, et tu régneras sans violence sur les peuples assagis.
48. Ô ville de la naissance, te voilà comme un tas de cadavres qui se refroidissent, et ta prétention ancienne agonise avec toi. On n’entend plus dans tes murs que le bruit des bestiaux qui ruminent pesamment, et on ne respire plus que l’odeur du fumier qui pourrit en toi. Le saint Cordon ne t’a pas sauvée de la peste des médiocres, et les coups ne t’ont pas ouvert l’entendement.
48’. Ô capitale très spirituelle, on te dit la plus avancée, mais il faut l’entendre comme d’une viande corrompue qui transpire déjà la pourriture du charnier de la mort. Toujours miraculeusement sauvée, la patience du Seigneur se lassera un jour et tu nageras dans les larmes et dans le sang et tu dessécheras dans les cendres avant d’être renouvelée par la grâce céleste.
49. Ce qui EST est bien plus fantastique et bien plus formidable que tout ce que nous pouvons imaginer, mais quand ce qui EST est fixé en soi-même, les yeux sont éblouis, et la bouche reste muette.
49’. Plus de questions et plus d’énigmes pour celui qui approche la lumière vivante qui contient le Seigneur d’éternité.
50. Inutile de courir en rond et de nous agiter à droite et à gauche afin d’éviter d’avoir à résoudre l’énigme de la vie et de la mort qui nous est proposée ici-bas, car l’énigme subsiste et elle dévore finalement ceux qui n’ont pu la résoudre.
50’. Plus de lettres, plus de chiffres, plus de serrures, plus de portes, plus de murs, plus de prisons, plus de tombeaux et plus de morts pour celui qui trouve, qui mûrit et qui mange l’unité de l’Unique.
51. Les gains, les récompenses, les honneurs et les nominations des hommes sont une dérision pour celui qui a trouvé l’Unique. C’est aussi une dérision pour ceux qui ne l’ont pas trouvé, mais comme ils ne le savent pas, ils se consolent en jouant avec le vent de la vanité. Dans ce cas-là, il vaudrait mieux simplement jouer de la flûte, car il n’en résulterait rien de trompeur pour eux ni pour les autres.
51’. Fais-nous connaître la joie parfaite dans notre découverte en toi. Fais-nous connaître la liberté parfaite dans notre obéissance à ta sainte volonté. Fais-nous connaître la sécurité parfaite dans notre observance de ta sainte loi. Fais-nous connaître la paix parfaite dans notre abandon en toi. Fais-nous connaître la vie parfaite dans notre amour en toi. Fais-nous connaître le contentement parfait dans notre repos en toi.
52. Ouvre-nous le cœur et purifie-le, Seigneur, afin que nous puissions te recevoir en entier, et renforce notre amour afin qu’il puisse s’unir au tien sans être aboli dans ta gloire.
52’. Là où ayant tout abandonné et renoncé à tout, nous nous trouvons comblés au-delà de toute expression. Là où la prière et la louange font place à la jubilation muette de l’union sainte.
53. Les contradictions apparentes des livres saints n’existent que pour ceux qui ne connaissent pas l’unité de l’Unique Seigneur. Il vaut mieux pour eux ne pas juger et surtout ne pas condamner ce qu’ils n’entendent qu’en images et non en vérité nue.
53’. Nous devons commencer par demander le secours du Seigneur qui accomplit son œuvre en nous, car de nous-mêmes, nous sommes impuissants à rien changer dans notre nature corrompue. Et nous devons aussi finir en laissant toute liberté au Seigneur pour perfectionner ce qu’il a lui-même dégagé de la boue du péché de mort.
54. Quand nous sommes tristes à mourir sans savoir pourquoi, c’est parce que nous nous vidons des choses du monde et que nous ne nous remplissons pas de celles de Dieu. En effet, le plein du monde résiste à Dieu par son poids mort, et le plein de Dieu résiste au monde par son poids vivant, tandis que le vide du monde et de Dieu se trouve écrasé insupportablement entre le ciel et la terre, qui se rejoignent alors sans bénédiction et sans fécondation.
54’. Quand nous aurons rejoint la lumière de l’Unique, tous ceux qui ont des désirs les verront s’accomplir et ils nageront dans la plénitude de Dieu. Mais ceux qui n’auront pas de désirs verront Dieu, ils entreront en Dieu et Dieu pénétrera en eux, et ils reposeront dans le vide de Dieu qui est le moyeu de la plénitude de Dieu. Mais cela est réservé à un petit nombre d’élus, qui possèdent l’huile de l’amour et de la connaissance.
55. Les hypocrites se délectent en secret de ce qu’ils dénoncent publiquement, mais les noms qu’ils se sont donnés les dénoncent publiquement sans qu’ils s’en doutent.
55’. Ainsi dans hypocrisie « bien-pensante », on trouve « panse bénite » et dans hypocrisie « puritaine », il y a « putainerie », car chaque pièce qui brille dans le monde a un revers caché où est gravé son vrai nom.
56. Il vaut mieux une prostituée qui aime pour l’amour, plutôt qu’une femme irréprochable qui aime pour elle-même, car la première connaît la charité de l’amour et elle ne juge ni ne violente rien au nom de son amour honteux ; tandis que la seconde ne connaît que la jalousie de la cupidité et elle condamne et brime tout sans pitié au nom de son amour dévorant.
56’. S’il existe des femmes irréprochables qui aiment selon l’amour qui se donne et non pas selon celui qui prend tout, fais-nous-les connaître, Seigneur clairvoyant, et donne-les-nous en héritage, afin que nos enfants soient faits à ta sainte ressemblance. « Donne-nous, Seigneur, celle qui est os de nos os et chair de notre chair selon ta science sainte. »
57. Quel croyant véritable oserait se prévaloir devant son Seigneur et devant ses frères en Dieu de décorations, de titres, de grades ou de diplômes, toutes choses dérisoires au regard de l’Unique et aux yeux des chercheurs de Dieu ?
57’. Ferait-il pas mieux de se couvrir entièrement de la robe noire des pénitents, afin de se souvenir de la crasse immonde du péché qui l’enlace de toutes parts et afin de rester dans l’humilité qui convient aux fidèles de Dieu ?
58. C’est l’eau de la grâce qui fait fondre le cœur mortifié et qui sépare en nous la vie pure de la crasse de la mort. C’est le feu de l’amour qui féconde le cœur épuré et qui le multiplie dans la gloire de Dieu.
58’. Plus nous serons pauvres en tout, plus le Seigneur nous comblera de sa foi, de sa joie, de son amour, de sa paix et de sa connaissance qui ne périssent pas.
59. Celui-là nous connaît à peine et il nous alimente en secret depuis des années sans rien demander en remerciement que la parole du Livre. Dieu a donné à un boucher plus d’intelligence et plus d’inspiration heureuse qu’à toute la multitude des importants qui plastronnent dans la ville immense.
59’. Celui qui sert le serviteur du Seigneur sera servi par le Seigneur en personne. Ce sera une dure leçon pour les intelligents, pour les savants et pour les puissants de ce monde. Un jour, ils la comprendront pleinement mais il sera alors trop tard pour qu’ils l’utilisent et pour qu’ils se sauvent de la mort qui les mine.
60. N’est-ce pas là une double bénédiction de Dieu manifestée d’une manière plaisante ? Qui goûtera l’humour étonnant du Très-Haut ? Et qui reconnaîtra sa propre imbécillité devant l’Unique ? Ô qui pleurera sur soi et qui en rira aussi ?
60’. Ici c’est le noble ascète qui préface le Livre de son nom prestigieux après avoir pressenti la vérité du message. Là c’est le simple instituteur qui donne de son nécessaire pour transcrire les derniers versets du Livre. Enfin ce sont les croyants de Pallandt qui présentent l’ouvrage en entier.
61. Les ouvrages vulgaires nous parlent de la sagesse extérieure entendue du dehors. — Les livres de philosophie nous parlent de la sagesse extérieure vue du dedans. — Les livres saints nous parlent de la sagesse du dedans connue au-dedans. — Les livres sages nous parlent de la sagesse du dedans éprouvée au-dehors.
61’. Qui connaît le mieux le divin Seigneur de vie ? Les simples bergers ? Les savants mages ? Les fidèles adorateurs ? Les disciples bénis ? Les croyants dévoués ? Ou bien celui qui garde la Vierge sainte, qui l’accouche en secret et qui élève le petit enfant venu du ciel ? Ô très intelligents, ô très savants, ô très importants, répondez, si vous êtes capables de comprendre la question.
62. L’enthousiasme pour le monde et le scepticisme pour Dieu mènent quelquefois les plus intelligents au scepticisme pour le monde et à l’enthousiasme pour Dieu, mais ils mènent plus souvent les gens ordinaires au dégoût et au ressentiment d’eux-mêmes et des autres et à la mort pour tous.
62’. La parfaite soumission à la volonté de Dieu n’est pas une résignation abrutie ou béate qui subit tous les désordres sans réagir. C’est plutôt une acceptation attentive et joyeuse qui utilise au mieux tout ce qui se présente sans rien désirer en particulier.
63. Nous dénonçons les malins et les médiocres qui forment des comités sous le couvert de l’entraide et de la bienfaisance, alors qu’ils ne servent hypocritement que leur vanité et que leur cupidité au détriment des faibles et des pauvres qui sont isolés dans le monde.
63’. Celui qui a trouvé la chose du Livre peut brûler le Livre pour cuire la chose, car ce qu’il obtiendra à la fin vaut plus que le Livre et que la chose. « Aucun malin ne pénétrera la simplicité ni n’approchera la pureté de la chose, car la malice les colle à l’écorce et elle les empêche de voir le dedans qui vit. »
64. Demain il fera sombre, demain il fera froid, demain nous serons morts, demain la résurrection et le jugement. Ne voyez-vous pas que demain se nomme aujourd’hui ? Ne voyez-vous pas qu’aujourd’hui vous empoigne et vous tue sans que vous fassiez rien d’autre que courir devant lui dans l’espoir stupide de le distancer ?
64’. Qui demeurera en repos et qui fera le mort afin qu’aujourd’hui passe sur lui sans se baisser pour le ramasser et pour l’épingler dans le temps ? Qui mettra à profit le répit d’aujourd’hui pour fondre les hiers dans la seule réalité vivante de l’unique aujourd’hui de Dieu ?
65. Celui qui commence en se violentant s’endurcit dans l’orgueil et dans l’hypocrisie au lieu de s’ouvrir à la grâce qui délie dans l’abandon de l’humilité première.
65’. Il faut imbiber et dissoudre avant de sécher et de cuire, car celui qui commence par cuire fixe la crasse du péché au lieu de l’éliminer.
66. Ceux qui pensent pouvoir observer par leurs propres forces les commandements de Dieu ainsi que la multitude des interdictions des hommes, croulent sous la charge fantastique et rampent misérablement dans la boue du péché en affectant des airs supérieurs devant ceux qui ne dissimulent pas leurs faiblesses. Ainsi prennent naissance et se fortifient l’hypocrisie, l’orgueil et la dureté, par trop de confiance en soi-même et pas assez de foi en Dieu.
66’. Nous devons commencer par demander le secours de Dieu sans trop nous occuper de l’état dans lequel nous sommes, car il mettra lui-même de l’ordre dans sa maison si nous le laissons faire à sa guise sans l’entraver par nos efforts aveugles. L’observance de ses lois nous deviendra alors une œuvre légère au lieu de nous être un fardeau insupportable, et nous nagerons naturellement dans sa sainteté sans effort et sans fatigue comme celui qui flotte dans la grande eau.
67. Les parents qui font tout l’ouvrage dans la maison laissent croire aux petits enfants que leur aide est indispensable alors que ceux-ci ne font que les entraver et que les retarder dans leur besogne. Et les parents laissent même croire à leurs enfants qu’ils ont fait tout l’ouvrage à eux seuls ; et la fierté des petits enfants fait sourire les grandes personnes qui savent bien dans quel chaos tomberait la maison s’ils n’étaient pas là pour la maintenir en ordre.
67’. Ainsi Dieu fait tout le travail en nous et quand par nos efforts nous croyons l’aider, nous ne faisons que le contrarier et que le retarder mais lui aussi sourit paternellement et il nous laisse croire que nous sommes utiles afin de ne pas décourager notre bonne volonté naissante ; car lorsque nous aurons grandi dans la foi et dans l’amour de Dieu, nous pourrons l’aider en écoutant sa parole dans nos cœurs et en la manifestant dans le monde.
68. Nous ne vous disons pas de ne pas prier, de ne pas louanger, de ne pas reposer et de ne pas agir. Nous vous disons de vous effacer de plus en plus et de laisser Dieu prier, louanger, reposer et agir en vous, afin que vous flottiez dans sa joie constructive au lieu de sombrer dans votre tristesse impuissante.
68’. Tirons et poussons dans le sens de Dieu et jamais dans notre sens personnel, et tout ira exactement comme nous le voudrons sans entrave et même avec une aisance stupéfiante, car la main toute-puissante agit pour nous et nous n’avons qu’à la suivre humblement au lieu de nous y opposer vaniteusement.
69. Quoi de scandaleux pour les croyants instruits à apprendre que le culte du Seigneur s’accomplit en réalité dans nos cœurs sans intermédiaires, et non pas en image sur les autels de pierre par le truchement de fonctionnaires ? Ceux-ci sont pourtant nécessaires pour garder et pour transmettre la révélation des saintes Écritures.
69’. Ceux qui éprouvent le vertige se trouvent mieux d’avoir un bandeau sur les yeux, et ceux qui sont infirmes ont avantage à se servir de béquilles, mais à la condition que ceux qui les guident n’aient ni bandeau ni béquilles et qu’ils n’en imposent pas à ceux qui voient le fond des choses et qui marchent seuls vers le salut de Dieu.
70. Certains croient tout entendre et se vexent, car ils ne saisissent que l’écorce de la parole, qui ainsi les accable au lieu de les libérer s’ils la percevaient dans son intérieur.
70’. Soyons simples et libres dans nos cœurs et nous ne serons plus compliqués ni esclaves dans le monde.
71. Les agités, les cupides et les violents ont envahi le monde, et la place de ceux qui cherchent véritablement Dieu est devenue minuscule et bientôt elle aura tout à fait disparu.
71’. C’est alors que le Seigneur rassemblera les siens dans le royaume impérissable et paisible et qu’il abandonnera les réprouvés à la ronde forcenée de l’enfer dans la poussière morte.
72. Nous n’avons déjà plus de place dans ce monde où les cœurs se durcissent comme le fer et comme le ciment des temples morts.
72’. Plus ils deviendront durs et féroces, plus ils seront frappés et plus ils seront émiettés dans la mort.
73. Les révolutionnaires sont brûlés par Dieu, mais ils ne le savent pas. Qui leur révélera la proximité étonnante de l’Unique ? Qui les mettra face à face avec le feu divin afin qu’ils reconnaissent leur Seigneur ? Qui les ramènera vers la justice divine qui peut seule les contenter pleinement ?
73’. Il est plus difficile de convertir ceux-là dans leurs cœurs que d’entretenir les troupeaux de médiocres et d’hypocrites dans la tiédeur de leur foi agonisante. Mais quelle récolte magnifique et dense à offrir au TrèsHaut, plutôt que cette paille sans grain que le vent éparpille dans la poussière du monde !
74. Les religieux et les croyants ont fini par confondre la réalité vivante de Dieu avec les symboles et avec les figures historiques qui la voilent, ce qui les plonge dans l’idolâtrie sans qu’ils s’en rendent compte. « Qui est coupable ? Celui qui fait briller la vérité de Dieu, ou ceux qui ne la reçoivent pas ? »
74’. Comprenons-nous pourquoi tous courbent l’échine devant la malice du rebelle et pourquoi tous adhèrent à présent au dogme impie du progrès scientifique et du bonheur matériel dans ce monde déchu ? Pourquoi tous mettent aujourd’hui la main à l’installation de l’humanité dans l’enfer sans issue ?
75. Les uns et les autres sont devenus des spéculatifs, et il n’y a plus d’opératifs parmi eux pour s’opposer à la marée envahissante de la science du dehors qui submerge le monde.
75’. Le Seigneur enseigne la science en secret, et ils la profanent publiquement. Le Seigneur guérit les malades, et ils empoisonnent les bien-portants. Le Seigneur ressuscite les morts, et ils tuent les vivants.
76. Enfin les incroyants, ne voyant que l’idolâtrie des images et des individus, ont repoussé tout pêle-mêle, mais ils sont tombés dans une idolâtrie encore pire qui est celle de la matière, qui les scelle dans la mort sans retour. Car l’essence, la substance et la crasse y sont confondues inextricablement, et s’ils parviennent à utiliser la matière brute, ils ne peuvent néanmoins arriver à la séparer élémentairement, et s’ils parviennent à la séparer, c’est avec une telle violence et un tel éparpillement, qu’ils ne peuvent la réunir à nouveau dans la pureté, car elle a disparu devant leurs yeux remplis de malice et de science profane.
76’. Le Seigneur simplifie la loi, et ils la compliquent inextricablement. Le Seigneur marche sur l’eau, et ils s’enfoncent dans la terre. Le Seigneur donne gratuitement, et ils vendent même la mort. Le Seigneur ressuscite glorieusement, et ils pourrissent ignominieusement. Les intelligents sont devenus une calamité pour le monde, car leur intelligence s’applique à la surface des choses ou bien elle tourne vertigineusement en rond sans avancer, et quand elle cherche le dedans des choses, c’est pour le volatiliser. Mais elle ne détruit rien en réalité, et c’est ainsi qu’ils s’enfoncent de plus en plus dans l’enfer qu’ils se sont créé.
L’esprit du sage est dominé par une idée unique et fixe : ne pas intervenir, laisser agir la nature et le temps.
Toutes choses sous le ciel naissent de ce qui se meut, et ce qui se meut de ce qui repose.
⟴LIVRE XXIII
Il en viendra de l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Midi qui se mettront à table dans le royaume de Dieu.
Les ténèbres se changeront en aurore, tu seras plein de confiance et ton attente ne sera pas vaine.
UNE ÈRE VIT
L’UNITÉ
1. Les besoins naturels doivent demeurer séparés du culte de Dieu jusqu’à ce qu’ils soient absorbés en lui sans effort. Ainsi nous éviterons la division du péché principal et sa multiplication en péchés particuliers, qui finissent par décourager de la foi et de l’amour de Dieu.
1’. Nous devons consentir une certaine tolérance envers nous-mêmes et envers les autres comme fait le Seigneur avec tous, mais nous devons demeurer très éveillés dans la quête et dans la fréquentation du Parfait, car c’est lui uniquement qui nous délivrera des pièges et des tentations du monde si nous le lui demandons sans jamais nous lasser.
2. Mieux vaut un croyant véritable qui crie au secours vers son Seigneur en nageant dans la boue, que cent mille hypocrites qui affectent la piété et qui se sont installés à demeure dans leur fumier caché.
2’. Prions notre beau Seigneur sans nous décourager et demandons-lui aide et assistance, car il nous éloignera du péché et, à la fin, il empêchera même le mal de nous approcher. C’est une merveille qui lui est facile.
3. Nous ne devons, en aucun cas, imiter artificiellement les vertus engendrées par l’amour de Dieu, car nous empêcherions l’amour de naître et de croître et nous demeurerions prisonniers de l’hypocrisie, qui est pire que l’impiété la plus grande.
3’. Ainsi il vaut mieux prier le Seigneur dans nos cœurs avec toutes nos faiblesses, car de cette façon elles s’effaceront peu à peu, tandis qu’en essayant de les supprimer de nous-mêmes, nous ne ferons que les refouler et que les nourrir dans la boue du péché malodorant.
4. Si quelqu’un est tenté par le monde au point d’abandonner son état religieux, ou même, les pratiques de sa foi, qu’il aille hardiment dans le monde pourvu qu’il demeure secrètement en contact dans son cœur avec son Seigneur ; car lorsqu’il aura reconnu, par expérience personnelle, le vide, la vanité et l’agonie du monde, il reviendra guéri à jamais dans le sein de l’Unique ; et son Seigneur l’accueillera aimablement. Celui-là n’aura plus jamais envie d’aller voir au-dehors ce qui s’y passe.
4’. Celui qui peut demeurer hors du monde fait aussi bien, à la condition qu’il ne se violente pas, car, dans ce cas, c’est un démon enragé qui prospère sous la peau d’une brebis, et la dernière chute sera pire que la première au jour du jugement, quand les écorces voleront en éclats et que sera manifesté le dedans de tout être et de toute chose. « Seigneur, délivre-nous de la stupidité triomphante des imbéciles ; délivre-nous de la compagnie des rebelles irréductibles ; délivre-nous du contentement aveugle et béat des médiocres. »
5. Si, par accident, un impie ou un hypocrite jette les yeux sur le Livre, il le lâche comme s’il s’était brûlé et il le repousse loin de lui.
5’. N’importe quelle troupe d’hypocrites ou de truqueurs peut s’établir et prospérer sous le couvert des saintes Écritures sans que celles-ci s’en trouvent diminuées pour autant.
6. Si un croyant sincère vient à lire quelques lignes de l’ouvrage, il ne veut plus le lâcher et il l’emporte chez lui afin de le connaître en entier. Si un médiocre ouvre le Livre, il le repose en ricanant stupidement et il quête autour de lui une opinion qui le rassure dans sa mort.
6’. Seulement beaucoup de gens simples qui ne savent pas discerner le bon outil des mauvais ouvriers, condamnent tout en bloc et se retirent pour toujours de la foi et de l’amour de Dieu. Le sort des imbéciles n’est pas enviable certainement, mais celui des trompeurs est inexorablement inscrit dans la puanteur de l’enfer.
7. Chaque mot du Livre peut être tourné en dérision par les ignorants. Quelle punition pour eux ! Ils ne le savent même pas. Ils avancent vers l’abattoir avec un voile noir sur la tête et ils moquent ceux qui les appellent à la liberté de la vie.
7’. Il n’y a que des fous qui échangent leur vie contre des choses misérables et passagères, au prix d’un travail fantastique dans ce monde. Il n’y a plus de sages qui échangent leur mort contre la vie éternelle, au prix d’un repos attentif ici-bas.
8. Ô Miséricordieux, viens à notre secours malgré nous, puisque notre stupidité nous empêche même de crier vers toi. Ô Tout-Puissant, réveille en nous la foi dans l’immortalité et oriente nos cœurs vers ta sainte face afin que nous soyons réengendrés dans ta pureté et dans ton incorruptibilité.
8’. Celui qui remet sa vie terrestre à Dieu pour obtenir la vie éternelle, est un saint qui est sage. Celui qui remet sa vie éternelle à Dieu pour obtenir Dieu, est un sage qui est saint.
9. Celui qui a reconnu l’unité de la vie n’éprouve pas de honte à secourir un ver de terre, car il sait à n’en plus douter qu’il s’aide lui-même en secourant quiconque vit.
9’. Ouvre la main, ouvre l’esprit, ouvre le cœur et la vie te baignera de toutes parts. Ferme la main, ferme l’esprit, ferme le cœur et la mort t’enserrera de tous côtés.
10. Comment ne pas désirer follement les écorces des choses qui sont les biens de ce monde ? Mais il faut trop de travaux, trop de mensonges et trop de crimes pour les acquérir, et quand on les a obtenus, ils sont comme une fumée qui se dissipe dans la nuit.
10’. Celui qui exploite ses semblables en les trompant, quel mépris il a pour eux, mais quel mépris il a pour lui-même et quelle tristesse et quelle solitude aussi ! Il vaut encore mieux mourir et c’est ce qu’ils font en définitive, car il y a beaucoup de manières de se tuer par désespoir et par dégoût de soi-même.
11. Il y a de quoi devenir imbécile à chercher les secrets du monde, mais il y a de quoi devenir fou réellement à courir après le secret de Dieu. Ô Seigneur, rends-nous la pureté, l’incorruptibilité et la paix de ton jardin d’Éden.
11’. Purifie nos cœurs par le feu de purgation et féconde-nous de ton amour céleste, par le moyen de ta grâce voyageuse, ô Magnanime donneur de vie.
12. Nous voilà comme des bêtes enragées qui se déchirent dans le bourbier où nous sommes tombés, et les bons sont égorgés pêle-mêle avec les méchants dans le grand abattoir de la mort. Qui ne serait terrifié tous les jours de sa vie épargnée ?
12’. Beaucoup sont comme des bouchons flottant dans la mer de ce monde qui sont aussi, malheureusement, comme des cailloux morts dans la mer de Dieu. Mais quelques-uns sont comme des rochers inébranlables dans la mer de ce monde qui sont aussi, heureusement, comme des poissons nageant dans la mer de Dieu.
13. Qui peut persuader la stupidité et la rébellion associées ? Qui peut vaincre la petitesse de l’âme unie à la petitesse de l’esprit ? Qui peut espérer quelque chose de la malice au service de l’avarice ? Qui peut obtenir grâce devant le préjugé obtus nourri par le ressentiment morose ? Le Seigneur peut tout changer s’il le veut en un clin d’œil ! Il est tout-puissant pour faire germer la semence céleste enfouie dans la tombe.
13’. Celui-là qui aime véritablement Dieu dans son cœur, n’est ni imbécile, ni rebelle, ni vil, ni rusé, ni avare, ni buté, ni haineux. Il lui appartient de fuir les méchants et de rechercher soigneusement son prochain, afin de l’aimer comme lui-même dans l’unité de l’Unique Seigneur d’amour et de vie. « Miracle ! les rebelles viennent à Dieu dans leurs cœurs quand les hypocrites ne les condamnent plus dans le monde. »
14. Celui qui ne sait pas pleurer sur le malheur des autres comme sur le sien, celui qui ne sait pas se réjouir du bonheur des autres comme du sien, et celui qui ne sait pas rire de ses mésaventures comme il rit de celles des autres, ne peut être enseigné par Dieu, car il est encore séparé de l’unité de l’Unique.
14’. Nous ne sommes pas seuls et abandonnés dans ce monde, il suffit que nous écoutions la voix qui chuchote dans nos cœurs et que nous examinions attentivement ce qui vient à nous et ce qui s’éloigne de nous en faisant taire nos volontés et nos jugements personnels.
15. Nous ne cacherons pas à nos enfants qu’ils sont revêtus d’une peau de bête et nous ne leur cacherons pas non plus les appétits et les besoins de la bête, et nous les leur présenterons comme des fonctions naturelles indispensables au maintien de la vie incarnée, fonctions dont nul ne doit être fier et dont nul ne doit avoir honte, car elles sont passagères.
15’. Ainsi l’ange n’étant plus sujet à la bête, pourra demeurer fermement tourné vers le Seigneur, et la bête n’étant plus honnie par l’ange, n’aura plus de révolte ni de vice et le Seigneur pourra nous délivrer sans lutte insensée et sans déchirement de l’une ou de l’autre partie de notre composé déchu et provisoire.
16. Et surtout, nous ne les mêlerons pas aux mystères de Dieu, afin d’éviter les refoulements honteux, les complexes délirants, les dévoiements misérables, l’hypocrisie unanime et le gâchis épouvantable auxquels aboutit la confusion imbécile de l’ange et de la bête, que nous devons séparer nettement et non pas ridiculiser en niant l’un et en avilissant l’autre du même coup.
16’. Car la bête ira en diminuant dans les ténèbres du monde et l’ange ira se fortifiant dans la lumière de Dieu et la séparation ultime s’accomplira sans déchirement. Beaucoup reviendront à Dieu quand les hommes de Dieu ne s’occuperont plus que des choses de Dieu, c’est-à-dire quand ils laisseront les choses de la bête à la bête et celles du monde au monde.
17. Les sages accomplissent tout en Dieu, car il n’y a plus de séparation pour eux, mais cela se fait naturellement, sans violence, comme lorsque le ciel s’unit saintement à la terre pour procréer toutes choses. Celui qui aime véritablement Dieu ne se cache jamais de lui.
17’. Qui comprendra l’affranchissement que procure l’acceptation intelligente et humble de notre état déchu ? Qui comprendra qu’il nous faut regarder d’abord vers notre Seigneur avant de vouloir organiser ou même contenir artificiellement la boue du péché où nous agonisons ?
18. Ceux-là seuls peuvent conjoindre qui ont d’abord séparé, car la purification s’accomplit dans la séparation et la conjonction se fait dans la pureté.
18’. Un jour, l’ange reviendra animer la bête purifiée par le feu, et tout le composé ressuscitera dans la glorieuse et incorruptible unité de l’Unique.
19. Dieu nous dissoudra et il nous coagulera à nouveau dans la pureté. Malheur à ceux qui auront choisi de s’installer dans le bourbier de la mort, car cette fois-ci, ils n’en ressortiront plus.
19’. Il n’y aura plus jamais de repos ni de bonheur pour eux dans la puanteur perpétuellement agonisante et perpétuellement renaissante de l’enfer.
20. Non, non, non, il n’y a pas de paix, pas de stabilité et pas d’organisation possibles dans ce monde mélangé de mort. Ceux qui prétendent le contraire sont aveugles et stupides. Leur intelligence et leur courage sont impuissants à ordonner la pourriture de la mort. Ne le voient-ils pas clairement ?
20’. Ce monde déchu n’est qu’un petit échantillon de l’enfer, et cependant nul n’y peut reposer en paix pendant le temps de sa courte vie. Que doit donc être l’enfer d’où la bénédiction de Dieu est tout à fait absente ? N’avons-nous pas raison mille fois d’orienter les hommes vers le Seigneur de vie plutôt que de les encourager à bâtir dans la boue avec de la boue ?
21. Oui, certainement, la bénédiction du Seigneur nous lavera du péché de mort et son esprit nous redressera dans nos tombes, et nous louerons son saint Nom pour toujours.
21’. Faut-il pas que nous brûlions d’abord la puanteur agressive qui nous lie et qui nous empoisonne de toutes parts ? Car c’est elle qui fait obstacle à l’union de l’amour divin.
22. Nous pouvons nous installer dans ce monde passager, mais nous devons le faire comme des voyageurs qui s’abritent dans une salle d’attente.
22’. Le but final de l’humanité n’est pas son installation dans le monde, c’est sa transfiguration et sa fixation en Dieu.
23. Tout ce qui est sujet au feu n’est pas de Dieu, car Dieu est l’essence même du feu.
23’. Ô densité de l’or pur en repos ! Ô chaleur du pur métal en fusion ! Ô éclat de la splendeur volatilisée !
24. Il y a trop de littérateurs des mystères de l’Unique, et pas assez de saints illuminés et pas assez de sages opératifs.
24’. Les choses du ciel et celles de la terre s’ajoutent ou se retranchent. Seul le Seigneur peut les diviser et les mélanger sans confusion et sans dommage.
25. Certains meurent de faim dans ce monde parce qu’ils ne savent ni mentir, ni voler, ni tuer, et d’autres sont comblés de richesses jusqu’à l’absurde parce qu’ils servent le démon destructeur et homicide. De même, dans la vie future, certains seront comblés jusqu’à l’absurde des biens célestes parce qu’ils auront fidèlement servi leur Seigneur, et d’autres crèveront dans la désolation de la mort avec les démons qu’ils auront suivis imbécilement. C’est une chose qui étonnera beaucoup de malins et beaucoup de simples.
25’. Chaque parole de notre langue n’est-elle pas comme un blasphème devant le verbe du Très-Haut ? Chaque souffle de notre bouche n’est-il pas comme une exhalaison puante de l’enfer devant la pureté de l’incorruptible ? Chaque geste de nos mains n’est-il pas comme une grimace simiesque devant l’ART du Très-Savant ? Et pourtant quelle splendeur demeure en nous et patiente sous la boue de la mort ! Puisse-t-elle s’éveiller enfin, et nous faire héritiers de la gloire de Dieu.
26. Beaucoup qui servent le Seigneur avec les lèvres et non pas avec le cœur, ont placé leur amour-propre au-dessus de la vérité de Dieu. Aussi excluent-ils des églises ceux qui les reprennent au lieu de se convertir. Croyant se sauver, ils s’enfoncent dans l’hypocrisie et dans le culte de leurs propres personnes.
26’. Si vous attachez à présent un grand prix à ce que vous avez refusé jadis pour une bouchée de pain, vous êtes maudits dans votre intelligence, dans votre cœur et dans vos biens, car vous enrichissez des morts et vous laissez mourir de faim les vivants qui vous entourent.
27. Ô riches imbéciles, ne reconnaîtrez-vous pas ce qui est beau, ce qui est bon et ce qui est véritable, alors que la chose naît devant vos yeux d’aveugles ? « C’est bien l’argent que représentent les choses qui vous attire, et pas la chose elle-même. »
27’. Gens avares et stupides, vous demeurerez enfoncés pour toujours dans la boue de la mort, car le poids de votre argent pollué vous entraîne, et vous collez à lui alors qu’il ne colle pas à vous.
28. Le Seigneur s’étant mis à couler en moi, nous chantâmes ensemble une petite chanson, comme fait le vent dans les feuilles naissantes un matin de printemps.
28’. Le poète qui tient l’étoile du matin dans ses mains, chante comme un petit enfant joyeux. Ceux qui ne tiennent que la boue du monde pleurent amèrement leur vie perdue.
29. Ô mon Seigneur, réjouis-toi en moi et tout sera bien ainsi, car ta joie submerge toute anxiété et elle fait même rire de la mort.
29’. Purge, arrose, féconde, lie, brille, coule. Cuis, sépare, unis, fixe, sème, loue, repose.
30. Celui qui a compris le Livre n’explique rien à personne, mais il peut manifester quelque chose de bon et il peut communiquer quelque chose d’excellent certainement.
30’. Le sage véritable ne fait pas de discours dans le monde. Il bêche, il arrose sa terre et il goûte le fruit du ciel et de la terre, qui est la seule vraie richesse.
31. Un peuple intelligent honore les hommes doués et instruits et les emploie à de grandes choses. Un peuple imbécile les méprise et les laisse croupir dans la pauvreté et dans l’exil.
31’. La décomposition générale jette finalement le peuple à terre avec les médiocres qui le mènent, et les sages émergent à nouveau du chaos pour rétablir la loi de Dieu dans le cœur de la petite troupe gardée.
32. Si nous sommes fatigués, reposons-nous en Dieu et si nous nous ennuyons, recherchons le mystère de l’Unique. Ainsi Dieu sera notre guide et notre soutien en toute occasion.
32’. Si le Livre ne nous fait pas toucher le Seigneur d’amour et de vie, alors le Livre peut être jeté au fumier avec toute la littérature qui délire dans le vide.
33. Qui passera sa vie à être reconnaissant de sa condition afin d’être toujours secouru par Dieu, l’Unique vivant ?
33’. Qui attachera à son cou les paroles du Livre ? Qui les affichera dans sa maison ? Qui les fera germer dans son cœur ?
34. Qui fait mieux : celui qui cache sa sagesse, ou celui qui cache son ignorance ?
34’. Celui qui ne violente rien au-dedans et au-dehors, voit tout croître en lui et autour de lui sans effort.
35. Ô croyants de toutes les religions, de toutes les races et de toutes les nations, reconnaissez-vous comme les enfants du Dieu unique et soutenez-vous parmi la marée montante des impies.
35’. Acceptons de nous tromper et sachons le reconnaître. Apprenons à nous corriger et sachons nous maintenir dans la voie sans violence, et Dieu nous enseignera tout ce que nous voudrons savoir.
36. Inutile de courir après l’auteur, nous ne trouverions que le vide habitant un idiot en Dieu, qui ne nous apprendrait rien. Le Livre suffit à tous les travaux et à tous les repos.
36’. Efforçons-nous d’être les instruments de la Providence, qui nourrit les sages, les saints et les simples, car c’est une manière aisée de participer à la bénédiction croissante de l’Unique.
37. Comment ceux qui ont transformé la formidable révélation des saintes Écritures en une morale hypocrite et fangeuse, pourraient-ils reconnaître à présent, sous les figures symboliques de leur foi, la vérité incroyable de l’Unique Dieu et Principe ?
37’. Les voilà comme des illettrés qui défendent farouchement des livres que nul parmi eux ne peut lire, mais que tous connaissent par les images qui les illustrent ; et les voilà qui repoussent aveuglément celui qui a réappris à lire et qui veut leur faire connaître le moyen de leur sauvetage.
38. Ceux-là font bien de transmettre aveuglément les mystères dont ils ne connaissent plus le fondement, mais comment peuvent-ils juger de la vérité d’une Écriture dont ils n’ont pas la clef ?
38’. Certainement Dieu les punit de leur vaniteuse prétention. Quel humour étonnant de faire ainsi garder et transmettre son trésor par des fanatiques aveugles, pour l’offrir en secret à ceux qu’il aime et qui le vénèrent dans leur cœur !
39. Certains parmi eux qui se croient plus éclairés que les autres, disent du Livre : « C’est un rêve », car, vivant dans un rêve, ils prennent le rêve pour la réalité et inversement, la réalité pour le rêve. Qui peut les réveiller de leur assoupissement mortel avant le jugement sidérant de la fin ?
39’. Une bonne correction a bien ramené la compagne rebelle dans la sainte voie de Dieu. L’absurdité de la souffrance amènera peut-être un jour les raisonnables de la foi à ne plus délirer en esprit ! Un tel miracle est facile au Seigneur, nous en avons un exemple sous les yeux.
40. La souche a refleuri, la fleur a donné son parfum et le fruit a mûri pesamment sans que nul s’en doute. « Qui mangera le don de Dieu ? Et qui sera pénétré par sa splendeur ? »
40’. Dieu plaisante bien avec un pauvre idiot sans instruction et sans diplômes, comment ne voudrait-il pas s’entretenir sérieusement avec les intelligents remplis de savoir et couverts de titres ?
41. La dénomination de « bien-pensant » est devenue synonyme d’hypocrite et de médiocre dans le monde. Faisons que le nom de « croyant » devienne synonyme d’homme libre et détaché de tout dans l’amour de Dieu.
41’. Avant de faire bouillir le linge sale, il faut le faire tremper, sinon on cuit la crasse au lieu de l’enlever, et le dernier état est pire que le premier, car la saleté est fixée dans le tissu et ne peut plus être ôtée.
42. Que notre quête et que notre vie soient premièrement pour nous-mêmes, ainsi nous ne serons ni méconnus, ni déçus par les médiocres, nous ne serons ni trompés ni brimés par les puissants, et nous ne serons pas dévoyés par le monde.
42’. Il y a les saints selon le monde qui refoulent leur nature instinctive et il y a les sages selon le monde qui suivent leur nature instinctive. Il y a les saints selon Dieu qui suivent leur nature intuitive et il y a les sages selon Dieu qui incarnent leur nature céleste. Ceux-là sont les seuls survivants !
43. Petits intelligents, reposez-vous un moment, regardez la grande nature, contemplez le grand ART, avant que la mort ne vous disperse comme on mêle des cartes à jouer. Ainsi vos esprits et vos âmes s’ouvriront au mystère de la création et à l’amour du créateur et se fixeront en lui pour toujours.
43’. Pensez-vous sérieusement remplacer par des compliments la nourriture, le vêtement et le chauffage qui ont manqué à ceux qui ont cherché toute leur vie la délivrance pour tous ? Hypocrites, secourez plutôt ceux qui cherchent librement leur Seigneur ici-bas alors qu’il en est temps encore pour eux et pour vous.
44. Combien sont ressortis de leurs tombes parmi tous les sages et parmi tous les saints dans le monde ? Et même, combien parmi eux n’y sont pas entrés du tout ? La parole de ceux-là est précieuse entre toutes pour les intelligents qui cherchent au-delà des créatures particulières.
44’. Quelques sages ont deviné le principe des commencements, mais combien parmi eux l’ont conçu clairement ? Combien l’ont incarné visiblement ? Combien l’ont tenu dans leurs mains ? Combien l’ont fixé dans leur cœur ? Combien se sont unis à lui pour la vie éternelle ?
45. Seule l’innocence retrouvée peut réconcilier les hommes avec Dieu, avec la nature et avec eux-mêmes.
45’. Seule la connaissance de Dieu peut les sauver de l’alternance de la vie et de la mort s’ils le désirent.
46. Laissons le Livre et contentons-nous de la chose dont parle le Livre, car elle seule peut nous contenter définitivement si nous la possédons dans son intégrité.
46’. Avant d’être séparés, la terre et le ciel ne formaient qu’une seule chose. Ainsi en les unissant à nouveau, nous formerons la chose unique du commencement des commencements.
47. C’est la possession joyeuse et paisible de ce qui est, de ce qui se meut et de ce qui repose qui fait l’illumination et le bonheur du sage.
47’. Plus nous rechercherons l’approbation des hommes, moins nous obtiendrons celle de l’Unique.
48. Pensez-vous faire quelque chose de bon sans le soleil, sans la lune, sans les étoiles, sans l’air, sans l’eau et sans la terre ? Alors vous ignorez l’agriculture qui est la science de Dieu.
48’. Rien de bon dans tout le Livre, excepté quelques petites phrases insignifiantes que tout le monde lit, mais que personne n’entend ni ne pratique réellement.
49. Nous n’avons pas écrit un tel Livre dans un tel temps pour être ensuite submergé de questions oiseuses.
49’. Si une sagesse quelconque aboutit à un travail forcé, c’est assurément la pire des folies.
50. Qui enseigne sans profaner ? Qui tranche sans juger ? Qui vit le présent ? Qui dort dans la tempête ? Qui enrichit sans s’appauvrir ?
50’. Qui manifeste le ciel en soi ? Qui reçoit et qui donne sans mesure ? Qui agit sans troubler ? Qui repose sans éteindre ? Qui est un avec l’Unique ?
51. Si nous désirons la richesse, commençons par donner de notre pauvreté et continuons en donnant de notre superflu.
51’. Si nous désirons la sécurité, commençons par devenir humble et continuons en devenant invisible en tout.
52. Si nous désirons la puissance, commençons par soutenir quelques faibles et continuons en les protégeant tous.
52’. Si nous désirons la liberté, commençons par ne pas violenter la nature des autres êtres et continuons en laissant notre propre nature reposer en elle-même.
53. Si nous désirons acquérir une bonne réputation, commençons par dire du bien de nos amis et continuons en louant même nos ennemis.
53’. Si nous désirons le bonheur, commençons par accaparer tout ce qui est du monde et continuons en y renonçant entièrement.
54. Si nous désirons l’instruction, commençons par étudier mille choses et continuons en étudiant une seule chose.
54’. Si nous désirons la sainteté, commençons par penser aux autres et continuons en ne pensant qu’à Dieu.
55. Si nous désirons les arts, commençons par éduquer sévèrement notre esprit et nos mains et continuons en les laissant aller librement.
55’. Si nous désirons la sagesse, commençons par regarder le monde et continuons en regardant en nous-mêmes.
56. Si nous désirons la science immortelle, commençons par étudier la nature et continuons en l’imitant au plus près.
56’. Le fait d’une certaine perfection, permet seul d’atteindre la grande perfection et d’y demeurer pour l’éternité.
57. Si vous avez trouvé l’unité de l’Unique, déchirez les pages du Livre et laissez-les s’envoler dans le vent en fredonnant une joyeuse chanson.
57’. Sinon ne les quittez ni le jour ni la nuit jusqu’à ce qu’elles pénètrent votre entendement, et jusqu’à ce qu’elles vous mènent à la boue qui ne mouille et qui ne salit rien.
58. Plus nous nous débattrons, plus nous coulerons dans le monde. Plus nous nous reposerons, mieux nous flotterons dans le ciel.
58’. Ce n’est pas l’ouvrage qui compte ni l’ouvrier, mais la chose dont parlent l’ouvrage et l’ouvrier.
59. N’ayons pas la vaniteuse prétention d’accaparer Dieu pour nous seuls, car le Père est à tous ceux qui l’aiment dans leurs cœurs, et non pas à ceux qui sermonnent profanement dans le monde.
59’. Chaque homme et chaque femme est prêtre et prêtresse de Dieu dans son propre foyer, pour la conservation et pour la transmission des saintes Écritures et de leurs mystères révélés.
60. Comment les disciples dégénérés du maître peuvent-ils juger de l’amour du maître pour quiconque ? Et comment peuvent-ils admettre ou retrancher quiconque de l’amour du maître saint et sage, puisqu’ils ne connaissent ni la volonté ni l’amour secret du maître ?
60’. Leurs jugements sont devenus une dérision parce que leur amour-propre s’est profanement substitué à l’amour de Dieu. Ils ont les clefs du royaume en images mais non en réalité, et ils ne tolèrent pas qu’un autre les reçoive des mains de Dieu sans leur approbation.
61. Nous avons pris l’habit de charlatan, car le mépris désintéressé du monde est moins dur à supporter que son admiration intéressée.
61’. Le Livre est comme l’arche qui porte et qui transmet le secret de l’Unique. Beaucoup le porteront, mais peu le pénétreront.
62. Le métier qui nous fait vivre en aidant les autres à vivre, est un métier béni, quel qu’il soit.
62’. Le métier qui nous fait vivre en menaçant la vie des autres, est un métier maudit, quel qu’il soit.
63. Le charmeur d’oiseaux n’en saisit aucun, et c’est pour cela que tous viennent à lui sans crainte. De même, le sage n’appréhende personne, et c’est pour cela que tous se confient à lui sans méfiance.
63’. Le sage amorce son travail, mais il laisse la nature l’accomplir à sa place ; aussi il travaille en reposant et tout lui réussit sans effort, car il ne fait obstacle à rien.
64. Le mélange des éléments qui forme les combinaisons multiples de la création, est comme le mélange des cartes à jouer qui forme les combinaisons multiples du jeu ; et les éléments retournent à la masse et sont ensuite combinés à nouveau, comme les cartes à jouer retournent au paquet et sont redistribuées sans augmentation et sans diminution réelles, car il n’existe ni gain ni perte pour l’immuable qui EST.
64’. Seigneur magnifique qui habites la terre sainte et qui la purifies du péché de mort, envahis-moi et inspire mon esprit et mon âme afin que je sois soumis à ta grâce délivrante et à ton amour fécondant, comme toutes les créatures angéliques qui chantent tes louanges éternellement, ô TrèsPur, ô Très-Parfait, ô Très-Gracieux, ô Très-Savant, ô Très-Bon, ô TrèsDoux, ô Très-Aimant qui ES.
65. La science de Satan violente les êtres et les choses et mène à l’esclavage dans la mort abjecte.
65’. La science de Dieu perfectionne les êtres et les choses et mène à la liberté dans la vie odorante.
65’’. Chacun peut juger aisément où se trouve la complication mortelle de l’enfer, et où se trouve la simplicité vivifiante du ciel.
66. Si nous ne renonçons pas à nos œuvres et à nous-mêmes, et si nous ne devenons pas vides et libres au-dedans et au-dehors, pas de délivrance, ici-bas ou ailleurs, pour quiconque.
66’. Ne nous accrochons à rien ni à personne, ainsi nous éviterons les fardeaux pesants et la noyade finale, car nous flotterons aisément sur l’océan divin où le Seigneur nous recueillera dans son arche sainte.
67. Accepter de bon cœur un échec, c’est déjà préparer une victoire.
67’. Remettons tout et nous-mêmes dans les mains de Dieu et nous serons joyeux et libres.
68. La révélation de notre Dieu de lumière et de vie fait la base de toutes les religions et de toutes les philosophies véritables enseignées par Dieu.
68’. Comme l’ivrogne ne peut plus se passer de vin, le saint ne peut plus se passer de Dieu, et l’ivresse de l’un et de l’autre fait sourire les gens raisonnables.
69. Honte à vous, clercs aveugles, parce que vous vous êtes dressés orgueilleusement comme un mur entre Dieu et les hommes, au lieu de vous abaisser humblement comme un pont devant eux !
69’. Ils ont fait un fromage personnel du lait universel de la sainte Église, et ils se sont installés au-dedans sans souci des chercheurs, des fidèles et des abandonnés. Le Seigneur les observe à travers la croûte ténébreuse du péché.
70. Ceux qui ont la bonne volonté en Dieu et non pas la bonne volonté en eux-mêmes, travailleront à rétablir la pureté, la simplicité, l’amour et la connaissance de l’Église dans leurs cœurs et dans leurs maisons, sans s’occuper des prérogatives ni des exclusives illusoires des pasteurs enorgueillis.
70’. Ceux que Dieu choisit et à qui il envoie son Esprit Saint, sont nécessairement supérieurs à ceux que les hommes élisent dans leurs conseils, car ceux qui voient la lumière sont au-dessus de ceux qui palpent les ténèbres. Ne comprenons-nous pas que le don reçu de Dieu prime la leçon apprise des hommes, et que la lumière du ciel accomplit l’Écriture ici-bas ?
71. L’énormité de la révélation de Dieu ne peut être entendue que des fils de Dieu ; les médiocres en sont exclus irrémédiablement.
71’. Celui qui aura mangé Dieu, la mort sera impuissante contre lui, car la lumière de vie habitera en lui pour toujours.
72. Les hommes peuvent bien exclure d’autres hommes de leurs organisations humaines. Nul d’entre eux ne peut exclure quiconque de l’amour de Dieu.
72’. Ainsi nous ne devons pas craindre le jugement des hommes qui se fait dans le monde, et nous ne devons pas douter de l’amour de Dieu qui patiente, même avec les plus égarés.
73. Faisons dans nos vies une large part au Seigneur, et le Seigneur nous fera dans la sienne une part incommensurable.
73’. La plus grande prière, c’est écouter. La plus grande louange, c’est se taire. La plus grande méditation, c’est ne plus penser. La plus grande action, c’est reposer en Dieu.
74. Aimer la vie, c’est aider la vie et c’est accepter le mouvement et le changement qui sont inhérents à la vie.
74’. Le coup qui nous frappe aujourd’hui prépare peut-être la bénédiction qui nous comblera demain, qui sait ?
75. Les prophètes n’ont pas besoin de prières toutes faites, car l’Esprit de Dieu les inspire surnaturellement.
75’. La crasse puante sera détruite par le feu, et la crasse obscure sera séparée par l’eau.
76. C’est une erreur de maintenir le nez des hommes dans leurs péchés innombrables, car ils se découragent et abandonnent la religion devenue imbécile par la faute des médiocres et des ignorants bien-intentionnés en eux-mêmes et non pas en Dieu.
76’. Il vaut mieux orienter les cœurs des pécheurs vers le Seigneur dont la grâce et l’amour les délivreront de leurs ténèbres plus sûrement que tous leurs efforts réunis. La confiance en Dieu vaut mieux que la confiance en soi pour survivre.
77. Le saint lie l’âme et l’esprit en Dieu et il surmonte la seconde mort.
77’. Le sage lie l’âme, l’esprit et le corps en Dieu et il surmonte la première et la seconde mort.
78. La fin verra la lutte des pratiquants de la science de Dieu, qui est intégration de vie, contre les pratiquants de la science de Satan, qui est désintégration mortelle.
78’. Les faiseurs de vie seront établis dans la vie, et les faiseurs de mort seront refoulés dans la mort sans rémission. Que chacun considère attentivement son travail, alors qu’il est encore temps d’abandonner les œuvres mauvaises.
79. Les ennemis de Dieu combattent contre les églises temporelles, qui sont compliquées, multiples, passagères et particulières.
79’. Les amis de Dieu combattent pour l’Église spirituelle, qui est simple, unique, éternelle et universelle.
79’’. Ainsi tous travaillent à l’unité de l’Unique.
J’ai frappé tout le travail de vos mains, et vous n’êtes pas revenus à moi.
N’est-ce pas la volonté de Dieu que les peuples travaillent pour le feu, et que les nations se fatiguent pour le néant ?
⟴LIVRE XXIV
Va, observe et interroge le laboureur et apprends de lui que ce qui est semé est ce qui est récolté.
Il sait ce qui entre dans le sein de la terre et ce qui en sort. Il sait ce qui descend des cieux et ce qui y monte.
RÉTIVE NUE
LE PUITS
1. Celui qui nous nourrit ne nous critique pas, mais ceux qui nous laissent périr nous prodiguent leurs jugements et leurs condamnations sans mesure, car ils se croient supérieurs dans le monde.
1’. Hypocrites qui jugez, vous vous gardez bien d’aider à vivre ceux que vous condamnez. Vous serez jugés de même. Dieu vous ôtera toute chance de salut, et vous croupirez dans le désespoir de la mort.
2. Il n’est pas comme nous, donc il est fou, disent les impies.
2’. Ils ne sont pas comme moi, donc ils sont morts, dit le Seigneur de vie.
3. En cherchant le monde agonisant, nous deviendrons des aimants de mort et nous mourrons.
3’. En cherchant l’Unique vivant, nous deviendrons des aimants de vie et nous vivrons.
4. Ô mon Seigneur, n’entends-tu pas les pasteurs ignorants qui, pour flatter les médiocres et les hypocrites, acclament dans le lieu saint la science profane et ses savants mercenaires ? La violence, l’ignorance et la vanité ont envahi leurs mains, leurs esprits et leurs cœurs, et les voilà qui égarent et qui corrompent les troupeaux confiés à leur garde. Éclaire ces aveugles, bon Seigneur, ou rends-les muets, afin que la violence de la science impie ne détruise pas tes images saintes et précieuses. Ô viens, saint Seigneur, avec ton fouet et ta crosse, avec ta verge et ton épée, avec ton van qui trie et qui sépare le bon grain de l’ivraie. (Ceci est le verset de la réunion et de l’avertissement qui sera répété trois fois.)
4’. S’il y a encore des hommes intelligents et inspirés de Dieu parmi les églises, ceux-là examineront leurs Écritures jusqu’au fondement secret où brille la pierre inébranlable et impérissable établie par Dieu, établie de Dieu, établie en Dieu. Ceux-là liront le Livre avec attention, et la louange de leurs cœurs montera vers le Très-Haut comme la pure flamme de l’offrande sainte. Ceux-là dénonceront sans crainte la science maudite qui violente la nature, les êtres et les choses et qui vend chèrement la mort à tous. Ceux-là rappelleront la science de Dieu qui ne violente rien ni personne et qui donne la vie gratuitement à tous. Qu’ils soient bénis, les vrais serviteurs du Très-Haut !
5. Les derniers saints ne flatteront pas les médiocres et les rebelles qui font pression sur eux, car la qualité des derniers vivants leur sera plus précieuse que la multitude des morts incurables.
5’. Suffit-il pas qu’une voix de Dieu s’élève dans le monde pour dénoncer et pour démonter les entreprises prestigieuses du malin ? Ou alors, n’y a-t-il plus de vivants pour l’entendre ?
6. Les hommes peuvent bien se distraire quelquefois avec leurs œuvres, mais ils ne doivent jamais les prendre au sérieux, car elles sont vaines et mortes. Seule l’œuvre de Dieu est vivante à jamais.
6’. Quand la science de Dieu sera manifestée, tous les travaux et toutes les inventions des hommes seront abandonnés comme inutiles. Seuls les réprouvés demeureront soumis aux travaux serviles à cause de leur orgueil aveugle.
7. Recherchons les lieux bénits où le soleil, la lune et les étoiles brillent, et où les éléments et la terre secourables encouragent les humbles chercheurs de Dieu.
7’. La misère dans le froid n’est que pauvreté au soleil et elle peut devenir richesse infinie devant Dieu si nous récoltons l’or que le Seigneur verse à foison sur le monde enténébré.
8. Plus de solitude, plus de tristesse et plus d’abandon pour celui qui s’entretient dans son cœur avec le Parfait.
8’. Si nous désirons que Dieu nous choisisse, n’omettons pas de le choisir aussi, et si nous voulons qu’il nous élise dans son royaume, n’oublions pas de l’élire premièrement dans nos cœurs.
9. Dieu patiente avec l’impatience de ses prophètes, car il veut donner à tous les égarés le plus grand nombre possible de chances de revenir à lui.
9’. Il a été dit : « Mille années d’homme sont comme un jour pour Dieu, et un jour de l’Unique est comme mille ans pour les hommes ».
10. Combien se préparent à entrer dans le repos de Dieu en abandonnant l’agitation fallacieuse du monde et ses soucis renouvelés à l’infini ?
10’. Combien entrent dans la solitude de leur cœur, afin de prier, de louer et de contempler le Dieu vivant qui suffit à tout ?
11. Combien se retirent sur la montagne sainte afin de connaître le compagnon impérissable, l’ami indéfectible, l’Unique Seigneur du ciel qui donne la vie sans mélange ?
11’. Combien cuisent en secret la mystérieuse et sainte rosée qui vient du ciel, afin de manifester le Sauveur admirable qui délivre de la mort ?
12. Nous essayons d’émerger du tas des agonisants devant Dieu, non pour enfoncer nos frères dans le cloaque, mais bien pour les aider à sortir aussi des ténèbres de la mort. « Viendront-ils pas avec nous vers la splendeur qui brille dans le ciel ? »
12’. Toutes nos œuvres sont dérisoires devant l’œuvre de vie du TrèsHaut. Aurions-nous pas mieux fait de l’adorer en silence plutôt qu’écrire le Livre pour l’ignorante vanité de ce temps faussement intelligent et faussement savant ?
13. C’est la parole essentielle et substantielle transmise par le maître qui nous fait héritiers du Très-Haut, à la condition que nous la recevions saintement avec gratitude et non pas profanement avec malice.
13’. Quelques saints dévoués et un sage connaisseur pourraient montrer à nouveau aux croyants le chemin qui sauve de l’exil et de la mort de ce monde, si les cœurs des hommes n’étaient pas si profondément ensevelis sous la crasse du péché.
14. Les troupeaux sauvages sont décimés par les fauves, mais les troupeaux gardés finissent à l’abattoir. Que les croyants se soutiennent donc individuellement en Dieu, sans s’exposer inutilement dans le monde.
14’. Délivre-nous, bon Seigneur, de la sordide bataille pour une vie agonisante dans un monde pourri, et fais-nous héritiers de ta lumière incorruptible, vivante et éternelle, afin que nous t’adorions dans la folie de l’amour qui donne et qui reçoit sans mesure.
15. Les impuissants qui récitent des prières toutes faites, croient vaniteusement être les seuls à prier comme il faut, car ils ignorent la louange à Dieu qui jaillit spontanément du cœur du saint inspiré. « Dieu jugera les moribonds qui repoussent ses vivants, et il repoussera les morts qui briment ses envoyés. »
15’. L’eau jaillit quelquefois du rocher dans le désert, mais c’est plus souvent un mirage trompeur qu’une réalité palpable et vivifiante. Ne nous endormons pas dans le ronronnement des églises et des cloîtres ; luttons-y pour notre libération en nous unissant de cœur avec le Seigneur d’amour, de poésie et de science vraie.
16. Nous serons connus et vivants dans le ciel grâce à l’œuvre de Dieu qui ne périt pas, car nos œuvres personnelles disparaîtront avec le monde transitoire et notre souvenir ici-bas périra avec le temps. « Le royaume du Parfait est immuable, et son Seigneur ne ment pas. »
16’. Le Livre n’est ni pour les moutons bêlants, ni pour les loups ravissants. Il est pour les libres enfants de Dieu qui bénissent le Seigneur dans leurs cœurs, et qui recherchent fiévreusement sa grâce, son amour et son salut avant la fureur de la nuée incandescente qui consumera toutes les choses impures.
17. Ne jouons ni aux importants, ni aux méprisants, ni aux sauvés, ni aux purs, afin de ne pas être odieux devant le Seigneur, et surtout, afin de ne pas rendre le Seigneur odieux dans le monde.
17’. Plus nous serons proches du Seigneur de vie, plus nous le cacherons dans le monde, afin de ne pas profaner l’amour de l’Unique. « Les gens “bien” selon le monde ne sont pas les gens “bien” selon Dieu. »
18. Les sermonneurs ont réussi à dégoûter le monde de Dieu, et les bien-pensants ont réussi à le faire prendre en haine. Belle réussite, en vérité, dont ils se félicitent imbécilement comme des mauvais serviteurs qui ont renvoyé les invités de leur maître en pensant s’attabler à leur place. Ils seront ignominieusement chassés et remplacés par de nouveaux aides plus fidèles et plus intelligents.
18’. Les médiocres et les hypocrites submergent les églises, et les athées dominent sur le monde. Comment les croyants véridiques vont-ils subsister, si le Seigneur ne vient pas rapidement à leur secours ? Qui a jamais vu une bonne moisson germer et croître d’un champ de pierres ? Tout est cependant possible pour le Seigneur de vie et d’amour, qui ensemence sans compter, même la cendre morte.
19. Recevons avec humilité, mais aussi avec transport et amour, ceux qui viennent nous demander des renseignements sur Dieu et sur son salut, et recommandons-leur la lecture assidue des Écritures saintes et sages, au lieu de les rebuter par des sermons ennuyeux et par des avis supérieurs.
19’. Serviteur de Dieu, ami de Dieu, enfant de Dieu, amant de Dieu sont des titres enviables, véridiques, uniques et secrets. Tous les autres sont comparativement comme des titres de repris de justice, dont il n’y a pas lieu d’être fier.
20. Un bon exemple de vie dans l’amour du Seigneur vaut mieux que tous les discours préparés et que toutes les platitudes débitées sans inspiration.
20’. Ceux qui rejettent le Livre rejettent leur propre vie sans le savoir. Qui leur débouchera les oreilles s’ils ne veulent pas entendre ? Et qui leur ouvrira les yeux s’ils ne veulent pas voir ? L’évidence de l’œuvre céleste ne s’impose-t-elle pas d’elle-même aux croyants éclairés ?
21. Le Livre est pour ceux à qui il est donné de le recevoir. C’est la justice de Dieu, qui dépasse l’entendement des hommes.
21’. Avant toute chose, les prophètes nous rappellent celui qui est, celui qui vit, celui qui demeure immuable en soi-même pour l’éternité.
22. Les hypocrites, les médiocres et les athées peuvent bien repousser le Livre, les croyants libres le propageront avec l’aide de l’Esprit Saint qui l’a inspiré, et leur multitude couvrira toute la terre s’ils demeurent unis en Dieu dans leurs cœurs, et s’ils ne font violence à personne dans leur foi.
22’. La Mère lave nos scories et le Père s’allie à notre pureté, car sa gloire est flamboyante et pure comme celle du soleil. Ainsi nous devons consumer en nous tout péché et laver toute souillure afin qu’il puisse nous habiter et nous ressusciter dans sa splendeur céleste.
23. À quoi bon triompher ici-bas, si c’est pour triompher dans la boue de la mort qui nous tue finalement ? Triomphe dérisoire après lequel les malins et les imbéciles courent éperdument dans ce monde.
23’. Quelle douloureuse surprise à la fin des temps, quand ils verront ceux qu’ils méprisaient à cause de leur foi, obtenir la vie éternelle alors qu’eux-mêmes ne récolteront que l’agonie parcimonieusement entretenue !
23’’. Ô riches imbéciles qui méprisez les saints et les pauvres de Dieu en les laissant périr de misère dans le monde, vous mendierez un jour vos excréments comme nourriture, et la pourriture vous servira de couche et de vêtement.
24. La liberté des enfants de Dieu est une liberté intérieure qui dit tout et qui fait tout dans l’innocence retrouvée et gardée.
24’. Ô toi le Resplendissant, permets que nous te trouvions et que nous te mangions, afin que nous vivions dans ton éternité et dans ta gloire sans pareilles.
25. Demandons notre droit, mais ne l’exigeons pas, afin de ne pas faire obstacle au jugement de Dieu.
25’. Celui qui vit innocemment la vérité de Dieu, n’est contredit par personne.
26. Si nous cherchons le monde, travaillons le plus possible. Si nous cherchons Dieu, reposons-nous le plus que nous pouvons.
26’. Chacun admire sa petite personne et chacun est fier de ses petits travaux, sans voir que Dieu et son œuvre sont seuls immortels et admirables.
27. Nous n’avons sollicité la soumission ni l’admiration de quiconque et nous ne nous sommes imposé à personne. « Qui nous suivra librement jusqu’au Seigneur de résurrection ? »
27’. C’est le renoncement parfait qui nous ouvre les portes du royaume de Dieu. C’est le dénuement parfait qui nous comble de la bénédiction de Dieu. C’est le vide parfait qui nous emplit de l’amour de Dieu.
28. Que celui qui connaît un livre semblable à celui-ci, le publie devant Dieu et devant les hommes, s’il peut. Sinon qu’il publie ce qu’il a entendu et ce qu’il a vu dans son cœur après l’avoir lu.
28’. Ce qui est fixe vient de la terre. Ce qui est mouvant vient de l’eau. Ce qui est fumeux vient de l’air. Ce qui est gras vient du feu.
29. Quoi de plus absurde et quoi de plus tragique, que le sort des impies qui refusent de rien demander à Dieu dans leurs cœurs endurcis par l’orgueil ?
29’. Ils se proclament forts et libres dans le monde, mais ils meurent comme les bêtes dans l’abandon et dans la déchéance sans espoir.
30. Pourquoi ceux qui nous parlent de Dieu se croient-ils obligés d’adopter ces tons de cuistres ou ces trémolos de chiens battus ?
30’. Improvisons notre prédication, afin qu’elle soit vécue en Dieu, ou alors taisons-nous humblement dans le monde.
31. Le propre de l’homme est de s’étonner de la création et de chercher le créateur. Le propre de la bête est de ne pas s’en préoccuper et de ne chercher qu’elle-même.
31’. Beaucoup nient, beaucoup doutent, beaucoup croient, quelques-uns cherchent, quelques-uns comprennent, quelques-uns trouvent, un ou deux vivent et rejoignent l’unité de l’Unique dans le ciel.
32. Notre honneur est d’avoir rappelé la promesse de Dieu, garantie par son amour, et réalisée par sa science dans sa gloire transformante.
32’. Le Livre qui exalte la gloire, l’amour et la science de Dieu, sera la sauvegarde des croyants. Ceux qui le rejetteront périront dans la vaine attente de celui qui s’incarne sous leurs yeux d’aveugles.
33. Ni les croyants ni les athées ne soupçonnent la science de Dieu, cachée derrière les symboles, les écrits et les figures des religions révélées. Ceux qui y croient essaient de se l’approprier par la ruse et par la violence. Quelques-uns la demandent à Dieu dans leur cœur et un ou deux à peine l’obtiennent dans le siècle.
33’. Le maître visitant la demeure du disciple, cassa tout sauf une bouteille, puis il brûla ce qui pouvait brûler, excepté les saintes Écritures, ensuite il éteignit les cendres avec de l’eau, excepté un tison. Enfin il ouvrit toutes les fenêtres, excepté celle qui regardait vers le Nord, puis il sortit par le Sud sans dire un mot.
34. Plus de corvée, plus de désespoir et plus de défaite pour celui qui obtient l’aide du Seigneur dans les embarras de ce monde.
34’. Il vaut mieux tendre la main et jouir de la liberté et de la joie des enfants de Dieu, plutôt que posséder les biens du monde et manquer du principal aliment céleste.
35. Comment ne pas douter de Dieu dans ce monde mélangé de mort ? Et comment échapper à la désolation de cet exil dans l’esclavage, dans la misère et dans l’agonie perpétuellement renouvelés ?
35’. Les incroyants comptent sur eux-mêmes pour s’organiser ici-bas. Les croyants comptent sur Dieu pour se sauver de l’exil de ce monde. Voilà toute la différence entre la raison des sens et la folie de la foi.
36. Si Dieu ne nous donne pas de croire, nous ne pouvons croire par nous-mêmes ni surtout demeurer dans la foi en la vie sauve et impérissable qu’il nous a promise en récompense pour notre fidélité à sa loi.
36’. Nous pouvons pleurer sur les impies, nous ne pouvons pas les juger et encore moins les condamner, car c’est le Seigneur qui nous choisit et qui nous habite selon son gré et non pas selon le nôtre.
37. La marque véritable des enfants de Dieu, est qu’ils demandent tout à leur Père sans hésiter et sans douter.
37’. Ô saint Géniteur, consume en nous la pourrissante étrangère et délivre-nous des scories ténébreuses, afin que nous luisions dans la lumière de vie où tu fais ton nid.
38. Trop de soucis, trop d’ennuis et trop de tentations nous assaillent ici-bas pour que nous puissions nous consacrer en paix à l’étude de la parole de Dieu et à la recherche de son salut.
38’. Prions donc premièrement afin que Dieu aplanisse les sentiers de notre quête et afin qu’il nous décharge des soucis étrangers, en rendant notre foi plus forte que l’évidence de notre raison aveugle.
39. Quelle que soit notre assurance et quelle que soit notre détresse, remettons-nous tous les jours de notre vie, avec nos affaires, entre les mains du Seigneur de sagesse, qui peut seul nous donner la victoire et la paix qui ne périssent pas.
39’. Ne repoussons pas ce qui nous semble obscur au commencement, car c’est sans doute ce qui nous illuminera à la fin. « Ô sainte lumière, qui veut bien habiter notre mort afin de ressusciter notre vie ! »
40. Vous qui avez soif de justice et d’honnêteté, vous qui recherchez la paix et l’amitié, vous qui espérez la liberté et l’amour, venez librement au Seigneur et à son salut, sans vous préoccuper des obstacles, dressés par les morts, entre Dieu et les hommes.
40’. Nous ne sommes pas là pour attendre que les hommes viennent à nous dans des temples morts, nous sommes là pour aller aux hommes et pour y installer Dieu dans leurs cœurs vivants.
41. Échangeons pieusement nos prières afin que le Seigneur les bénisse doublement.
41’. « Résignez-vous et mourez », c’est la parole de l’ennemi. « Cherchez-moi et vivez », c’est la parole de l’ami.
42. Puisque la crasse, la pourriture, l’esclavage, la souffrance, le mensonge et la mort sont inextricablement liés à ce monde, que pouvons-nous espérer d’autre que l’absurde à vouloir nous y organiser, à vouloir y dominer, ou bien à accepter d’y croupir, ou à attendre d’y périr, fût-ce saintement ?
42’. La seule solution efficace n’est-elle pas de rechercher uniquement le salut de vie, transmis par le Seigneur descendu du ciel et incarné parmi nous pour notre réintégration dans la vie éternelle et pure ? N’est-il pas dit : « Cherchez premièrement le royaume de Dieu et son juste emploi, et tout le reste vous sera donné par surcroît » ?
43. La décadence des religions et des initiations vient de ce que les gardiens, les croyants et les chercheurs prennent les symboles, les figures et les rites pour le mystère même, alors qu’ils n’en sont que les images et que les rappels.
43’. Le royaume de Dieu n’est ni une abstraction, ni une image, ni un vague idéal. C’est la seule réalité vivante et palpable qui sauve de la mort, dès à présent, ici-bas. Comprendrons-nous enfin ?
44. Il vaut mieux croire stupidement à l’invraisemblance de la révélation divine plutôt que démontrer intelligemment son impossibilité apparente.
44’. La science profane accomplit tous les jours des prodiges incroyables, et la science de Dieu serait impuissante à nous sauver de la mort ?
45. Les impies croient vainement acquérir par la force ce qu’ils refusent de demander humblement à Dieu. Certainement, ils finiront émiettés par leur propre violence.
45’. Le moment est peut-être venu de nous préparer à traverser la fournaise du feu déchaîné ? Qui en ressortira indemne comme la semence de Dieu ?
46. Nous désirons que nul ne se serve du Livre pour juger ou pour condamner du dehors, car il est toujours inutile d’avoir raison contre quiconque et c’est souvent dangereux.
46’. Nous signalons comme incomplets tous les commentaires des paroles inscrites dans le Livre, car les reflets de la chose ne sont pas la chose elle-même.
47. Si la révélation du salut s’égarait ou cessait ici-bas, qui nous délivrerait de l’agonie du monde ?
47’. Sauvons nos saintes Écritures de la disparition, afin qu’elles nous sauvent aussi de la mort étrangère.
48. Unissons-nous un petit nombre de triés par le cœur et promettons-nous devant Dieu : secours, amour et fidélité dans ce monde exilé. Ainsi le Seigneur en personne bénira nos entreprises et guidera notre quête. « Si nous sommes frappés, revenons à Dieu et si nous sommes comblés, bondissons vers lui. »
48’. Si nous ne cherchons pas le salut de Dieu avec constance, avec persévérance, avec obstination, avec stupidité, avec délire, nous n’obtiendrons que l’écorce des choses saintes. « Ne devons-nous pas supplier le monde pour obtenir une parcelle des choses mortes qu’il vend si chèrement à tous ? »
49. Les orgueilleux du monde soupçonnent bien la vérité de Dieu, mais ils affectent de s’en moquer en public alors qu’ils s’efforcent à la violenter en secret par leurs machinations ténébreuses et criminelles.
49’. Ô super-intelligents qui vous admirez complaisamment dans la crasse du péché, votre malice et votre orgueil vous excluent pour toujours de la lumière de vie où habite le Seigneur saint !
50. Toutes les explications et toutes les expériences du monde et de nous-mêmes sont illusoires, car elles nous laissent ignorants, misérables et agonisants comme avant. Seuls l’amour et la science du TrèsHaut peuvent nous sauver des ténèbres de la mort.
50’. Tous les savants et tous les génies du monde n’examinent que le monde et ne connaissent que le monde ténébreux, aussi se contentent-ils des récompenses dérisoires du monde et vont-ils à l’oubli et à la mort du monde, comme les bêtes qu’ils méprisent et qu’ils exploitent.
51. Tout ce que les orgueilleux pensent des humbles chercheurs de Dieu et tout ce qu’ils leur font subir, est comme une pierre tombale qu’ils fixent sur leur propre dos de maudits.
51’. C’est la désobéissance et l’absorption d’un fruit mélangé qui nous ont précipités dans la mort. C’est l’obéissance et l’absorption d’un fruit pur qui nous rétabliront dans la vie.
52. Tous veulent améliorer leur sort d’agonisants, mais bien peu tentent d’échapper définitivement à cette condition lamentable.
52’. Tous se passionnent pour les affaires du monde impermanent, bien peu pensent à étudier la révélation prodigieuse des fils de Dieu.
53. Les saintes Écritures, qui enseignent à sortir de la mort, ennuient mortellement les morts. Par contre, tout ce qui les enfonce dans la mort les passionne et les enthousiasme sans mesure.
53’. Les passionnés de Dieu trouveront Dieu et sa vie. Les passionnés du monde trouveront le monde et sa mort agonisante. « C’est la fréquentation de Dieu qui nous fera trouver la paix de la maison de Dieu. »
54. Peu d’humains sont curieux de la révélation du mystère de la chute et de la rédemption, car peu d’hommes ont conservé le sou