🔍
Bouton_Accueil

Clément d’Alexandrie

Données générales

PériodeLieu
GénéralII IIIÉgypte
Naissance 150Athènes, Grèce
Décès 215 ( ans)? Alexandrie, Égypte
Cause
Inhumation
Information inconnue
? Alexandrie, Égypte

DomaineCourantOrdre
Mystique
Philosophie
Théologie
Christianisme primitif
Médioplatonisme
Didascalée 🎓

RelationsNom
Influence
MaîtrePantène d’Alexandrie
ParPlatonisme
Pythagorisme
Stoïcisme
Philon d’Alexandrie
Disciple
SurMystique chrétienne
Théologie chrétienne
Origène

Repères biographiques

I. Histoire

► De sa biographie, on ne sait guère que ce qu’il a bien voulu en dire dans les Stromates et le Pédagogue. Issu d’une famille païenne, Titus Flavius Clemens fut probablement d’abord initié aux mystères d’Éleusis. Il voyage en Grèce et en Grande-Grèce, en Syrie et en Palestine, puis en Égypte. À Alexandrie, il suit les cours du stoïcien converti Pantène alors directeur du Didascalée auquel il succède en 187. En 202, il rejoint la Cappadoce auprès de l’évêque Alexandre afin d’échapper aux persécutions de Septime Sévère. Lorsqu’il revient, son élève Origène à pris sa place, il se retire alors jusqu’à la fin de sa vie.

II. Pensée

◆ Il est le premier érudit chrétien : il maîtrisait la philosophie et la littérature grecque en plus des Écritures dont il tentait de produire une synthèse dialectique, estimant qu’un christianisme vivant dans une nation de culture grecque devait savoir se dépouiller de ses aspects sémites au profit d’une forme hellène. Pour Clément, le christianisme représente l’unité et la finalité de la vérité, la synthèse de l’essentiel des sagesses précédentes, l’incarnation du logos ayant permis à l’Homme d’accéder à la gnose, au salut et à la vie éternelle car il est initiateur tant de l’âme que de l’esprit. L’objet de ses recherches, appuyées sur un christianisme hellénistique teinté d’ésotérisme judaïque, étaient donc au travers d’un éclectisme bienveillant, de montrer que la philosophie était une introduction à l’étude biblique, que Orphée, Pythagore, Platon ou Hermès Trismégiste ont déjà énoncé des vérités vis à vis du divin et que leurs œuvres constituent le germe de la révélation chrétienne qui s’inscrit dans une tradition pérenne. Il s’applique ainsi à une exégèse philosophique, allégorique et mystique de la Bible et des mythes dans lesquelles la notion d’initiation apparaît primordiale. En outre, toujours dans une optique de continuité, il estime que Dieu est fondamentalement bon : ses agissements dans l’Ancien et le Nouveau Testament se justifient par son intention pédagogique : colère et punition d’abord, patience et pardon ensuite, afin de révéler progressivement ses mystères.

◆ Son Protreptique, guide pratique, puis son Pédagogue, apologétique, sont des ouvrages d’introduction à sa pensée. Dans son Salvation pour le riche, il développe l’idée que l’Église doit s’adresser tant aux pauvres qu’aux riches et que l’aisance matérielle est acceptable tant qu’elle est soumise à un comportement mesuré et tourné vers le spirituel. Ses Stromates qui renseignent autant sur sa doctrine que sur le christianisme hellénisé d’Alexandrie se proposent de montrer que la gnose chrétienne est supérieure aux différentes écoles gnostiques par une approche à la fois théologique, philosophique et mystique.

Il y décrit les caractéristiques du véritable gnostique, qui ajoute la connaissance à la foi et chez qui la recherche de la pureté et de l’égalité d’humeur parfaite est un effort perpétuel. Il indique que la gnose transmise oralement par voie de succession, parvenue depuis les apôtres à un petit nombre de détendeurs (VI:61) est un perfectionnement de l’Homme en tant qu’homme qui s’opère grâce à la connaissance des choses divines (VII:55). Ainsi chez Clément, gnôsis, agapè et apatheia sont des notions interdépendantes qui mènent à la connaissance des mystères divins. Suivant l’idée de Platon et l’exemple du Christ, ce gnostique est alors capable de monter jusqu’à Dieu et de réaliser une union avec lui : la rédemption est concomitante à la déification. Ainsi, la philosophie éclaire sur le contenu de la foi et permet d’obtenir l’ἐπιστήμη (épistémè) {connaissance savante} tandis que la foi balise le cheminement de la philosophie et conduit à la γνῶσις (gnôsis) {connaissance intuitive}. On trouve en outre dans cet ouvrage, la notion de disciplina arcani, c’est-à-dire à un enseignement secret et réservé, qu’il qualifie d’ἐσωτερικός (esōterikos) {ésotérique}. Il s’agit donc du premier auteur qui emploie le terme "ésotérique" avec la signification qu’on lui attribue aujourd’hui et avec Origène, il est l’auteur ayant le plus d’autorité dans l’ésotérisme chrétien.

Œuvres choisies

  • Salvation pour le riche, IIIII. Lien vers l’œuvre sur Remacle
  • Stromates, IIIII. Lien vers l’œuvre sur Remacle

Citations

Le vrai riche, s’appuyant sur la vertu, fait de sa fortune, quelle qu’elle soit, un usage saint et agréable à Dieu. Le faux riche attache sa vie et toutes ses pensées à une substance extérieure, tantôt périssant tout-entière, tantôt passant d’un homme à un autre, et dont enfin rien ne demeure. Comme il y a de vrais et de faux riches, il y a de véritables et de faux pauvres.
Salvation pour le riche
Au contraire, aspirer à la science qui est en Dieu, dans un but d’utilité quelconque, soit pour que telle chose arrive, soit pour que telle chose n’arrive pas, ce n’est pas là le propre du Gnostique. Il ne veut d’autre fin à la contemplation que la connaissance elle-même. J’oserai l’affirmer, ce n’est point en vertu du salut que l’homme, qui poursuit la connaissance pour cette science divine elle-même, embrassera la connaissance. En effet, l’intelligence devient, par un exercice continuel, l’intelligence permanente. Or, comprendre toujours forme l’essence du Gnostique, dont l’activité ne connaît ni ralentissement ni interruption ; et cette contemplation permanente produit chez lui une substance vivante. Voici une hypothèse : Si on proposait au Gnostique de choisir entre la connaissance de Dieu et le salut éternel, et que ces deux choses, absolument Inséparables, pussent se séparer, il choisirait, sans balancer un seul moment, la connaissance de Dieu, estimant qu’il faut préférer pour elle-même la faculté, inhérente à la foi, de s’élever à la connaissance par l’amour. Tel est donc le premier principe du bien chez l’homme parfait : il n’agit point dans une vue d’intérêt personnel. Mais a-t-il jugé que faire le bien est quelque chose de beau et de glorieux, l’ardente impulsion de son âme l’y portera constamment et avec énergie ? Vous ne le verrez point aujourd’hui vertueux, demain criminel ou indifférent : sa marche est régulière et affermie dans le bien. En outre, ce n’est ni pour la gloire, ni pour la bonne renommée, comme parlent les philosophes, ni en vue d’une récompense qu’il attend de Dieu ou des hommes, qu’il règle tout le cours de sa vie à l’image et à la ressemblance du Seigneur. Que si parfois, au bien que fait le gnostique, on répond par le contraire, oublieux des injures, il rejettera comme mauvaise toute pensée de rendre le mal pour le mal, au souvenir que Dieu se montre juste et bon pour les justes et pour les injustes. Le Seigneur dit à ceux qu’animent ces sentiments : « Soyez parfaits comme votre père céleste est parfait.» Le gnostique est mort dans sa chair; il n’y a plus que lui qui vive. Ce sépulcre de lui-même, il en a fait un temple saint qu’il a consacré au Seigneur, en élevant à Dieu son âme, autrefois sujette au péché. On ne peut plus dire qu’il soit continent; il est parvenu à une sorte d’impassibilité inaccessible aux passions humaines, et il attend que Dieu le revête de la forme divine.
Stromates (IV:19)
Chacun n’est pas apte à entendre la vérité : cependant, comme la tradition divine ne frappe pas seulement les oreilles de celui qui comprend la majesté de la parole, mais qu’elle s’adresse également à tous, il faut envelopper d’un voile la sagesse qui est révélée d’une manière mystérieuse, et que le fils de Dieu a enseignée.
Stromates (I:12)
De même que les études encyclopédiques sont des degrés utiles pour arriver à la philosophie qui est leur souveraine, de même aussi la philosophie est une aide pour acquérir la vraie sagesse; car la philosophie est un exercice préparatoire ; mais la sagesse est la science des choses divines et humaines, et des causes. La sagesse est donc la maîtresse de la philosophie, comme celle-ci est la maîtresse des études préparatoires ; car, si la philosophie fait profession de pratiquer la continence dans l’usage des sens, et s’il est beau de l’embrasser pour elle-même, elle paraîtra plus auguste et s’élèvera plus haut, si on l’embrasse pour honorer Dieu et arriver à sa connaissance.
Stromates (I:5)
Nous l’avons déjà déclaré dès le commencement de cet ouvrage, le sujet que nous traitons n’est pas le plan de conduite enseigné par chaque secte particulière, mais bien la philosophie réelle, la sagesse vraiment industrieuse, et d’où naît l’expérience des choses de la vie. La sagesse, telle que nous l’entendons, est la connaissance pleine et solide de ce qui concerne Dieu et l’homme, espèce de compréhension inébranlable qui embrasse le passé, le présent, et l’avenir. Elle remonte au Seigneur qui nous l’a transmise soit par sa présence au milieu des hommes, soit antérieurement par le ministère de ses prophètes, et elle est indestructible de sa nature, parce qu’elle est la fille du Verbe. Voilà pourquoi encore, révélée par le Verbe, elle se confond avec la vérité elle-même. La sagesse a deux aspects divers : ici, incréé, éternelle ; là, bornée à notre utilité pendant le temps. Ici, une et toujours la même ; là, multiple et revêtant plusieurs formes. Ici, immuable dans son impassibilité; là, susceptible d’être agitée par les passions ; ici, parfaite et consommée ; là, incomplète et indigente.
Stromates (VI:7)