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Jean de Ruisbroek
Le Docteur admirable, le divin docteur

Données générales

PériodeLieu
GénéralXIVBelgique
Naissance1293Ruisbroek, Duché de Brabant (ajd. Belgique)
Décès2 Décembre 1381 (88 ans)Groenendael, Duché de Brabant (ajd. Belgique)
Cause
Inhumation
Reliques perdues lors de la révolution française

DomaineCourantOrdre
MystiqueCatholicisme
Augustinisme
Mystique Rhénane
Béatification
Catholicisme 🎓

RelationsNom
Entourage
AmiGérard Groote
Influence
MaîtreMaître Eckhart
ParBernard de Clairvaux
Pseudo-Denys l’Aréopagite
Critique deMaître Eckhart
SurBenoît de Canfield
Gérard Groote
Harphius
Jean de Saint-Samson
Jean Tauler
Joris-Karl Huysmans
Maurice Maeterlinck
Thomas a Kempis

Repères biographiques

I. Histoire

► D’une mère très pieuse, il est dès l’âge de onze ans, placé à Bruxelles sous la tutelle de son oncle alors chanoine à la collégiale Sainte-Gudule. Peu attiré par les arts libéraux, il s’oriente vers la théologie. Il est ordonné à 24 ans en 1317. Il est ensuite vicaire puis chapelain dans la même église. Durant 36 ans il mènera une vie d’austérité durant laquelle il produit ses premiers travaux. Puis vers 50 ans, en 1343, il se retire avec deux autres prêtres dans un ermitage à Groenendael, attirant des disciples. Il y observera dès 1350 la règle augustinienne et deviendra premier prieur de cette communauté.

► Là-bas, il poursuivra son activité littéraire, l’entrecoupant de voyages auprès d’autres spirituels. C’est à partir de ce moment qu’il se met à écrire ses œuvres principales, en moyen-néerlandais. Lorsque l’inspiration lui venait, il se retirait écrire en forêt. De son vivant il jouira d’une grande renommée d’homme saint et ce jusqu’aux pays voisins : Hollande, Allemagne, France et même Angleterre où ses ouvrages se répandirent également. Sa dépouille fut portée au Monastère de Groenendael, puis à la Cathédrale Saints-Michel-et-Gudule avant que ses reliques ne soient perdues lors de la révolution française. Il fut l’ami de Gérard Groote et ce dernier admirait tant Ruisbroek qu’il peut être considéré comme l’inspirateur de la devotio moderna qui se font alors propagateurs et vulgarisateurs de sa pensée.

■ Il n’existe aucune représentation de lui, les portraits qu’on lui prête sont toutes des vues d’artiste. Il partage son surnom de "Docteur admirable" avec Roger Bacon.

II. Pensée

◆ La scolastique de Ruisbroek est largement imprégnée d’un néoplatonisme augustinien, il est proche des réalistes et contre les nominalistes et influencé par la mystique de Saint-Bernard et l’École de Saint-Victor. Il est donc un continuateur d’Érigène au sens où il associe révélation chrétienne et gnose néoplatonicienne. Si il n’est ni dominicain ni rhénan, il n’en appartient pas moins à la mystique rhénane de part ses positions doctrinales. C’est un commentateur d’Eckhart, avec qui il partage l’idée de retour à l’unité, mais il le modère par des positions plus prudentes. Sa mystique n’est emprunte d’aucune systématisation, il n’a pas rédigé de traité discourant morale ou ascétique. Les vertus qu’il aura le plus exaltées sont le détachement, l’humilité et la charité. Il aura médité sur la passion du Christ, l’amour porté à Dieu ainsi que sur l’abandon à la volonté divine.

↳ Dans ses ouvrages, Ruisbroek possède également une certaine plume, puisqu’il emploie, combiné à une imagination qui rappelle l’hermétisme, des allégories symboliques marquées. En outre, sa poétique évoque parfois les vers courtois, notamment au travers du thème de l’unio mystica des âmes avec Dieu. Il insiste sur la nécessité de méditer sur Dieu autant que d’agir dans le monde, rendant compte de la vie intérieure des contemplatifs qui pour chacun, mène à des expériences uniques. Il décrira cette expérience mystique, expérience vivante de la foi, comme une intériorisation des facultés de l’être : sensitivité et sentimentalité, intellectualité et volitivité sont unifiées et libérées dans ce reflux pour s’unir enfin à Dieu.

◆ Son mysticisme spéculatif partage avec Denys l’idée que la mystique est une science. Dans ses Ornements, il décrit les étapes du mystique menant à la désappropriation de lui-même : le repos amoureux en Dieu qui est un état de pureté, le sommeil en Dieu où le mystique est perdu en Lui et l’abandon total où libre de tout obstacle, il ne peut distinguer ce qui vient de Dieu ou de lui-même. L’âme, dont la personnalité a été dissoute est alors dépourvue de volonté et de doutes, d’acquiescement ou de désapprobation, d’absence ou de présence, elle laisse Dieu faire en elle, noyée dans son amour abyssal. La vision du mystique embrasse alors toute la création dans une unité divine, il agit de manière spontanée et indifférenciée, sa contemplation et son action, son amour et sa connaissance font un : il est pneumatiquement libre.

↪ Ruisbroek souligne aussi dans cet ouvrage, les épiphénomènes que l’on doit ignorer et y ajoute les critères permettant d’identifier l’authentique mystique. Il met ainsi en garde contre le faux renoncement et la fausse quiétude, distingue la notion de vide intérieur de l’acédie.

↪ Malgré le fait que des commentateurs ultérieurs comme Bossuet estiment avoir vu une influence panthéiste dans ses textes - ses Ornements spirituels en particulier -, il a été béatifié en 1908 par Pie X et on le fête le 2 décembre. Il s’explique de l’expression unité sans différence dans son De la plus haute Vérité.

Œuvres choisies

  • L’Ornement des noces spirituelles {Die chierheit van der gheestelijcker brulocht}, 1330. Lien vers l’œuvre
  • La Pierre brillante {Van den blinkenden steen}, 1336. Lien vers l’œuvre
  • Le Miroir de la béatitude éternelle {Die spieghel der eenwigher salicheit}, 1359. Lien vers l’œuvre
  • De la Plus haute vérité {Vander hoechster waerheit}, 1362. Lien vers l’œuvre

Citations

L’Homme a été crée de rien. C’est pourquoi il poursuit ce rien qui n’est nulle part, et, dans cette poursuite, il s’écoule si loin de lui-même, qu’il perds sa propre trace ; plongé dans la simple essence de la divinité, comme dans son propre fond, il s’en va mourir en Dieu.
Le Royaume des amants
Lorsque je dis que nous sommes un en Dieu, je dois être compris en ce sens que nous nommes uns en amour, pas en essence et en nature.
Les Noces Spirituelles
Il y a des hommes qui paraissent bons, et qui cependant mènent une vie toute contraire à toutes les vertus. Que chacun donc s’examine et s’éprouve lui-même. Car quiconque n’est pas attiré ni éclairé de Dieu ne peut ressentir, ni la touche d’amour, ni la simple inclination amoureuse vers le repos de jouissance. Aussi ne peut-il s’unir à Dieu… Croyez que le repos pris de cette manière n’est point permis, car il cause en l’homme un aveuglement complet et une ignorance de tout savoir, en même temps qu’un affaissement sur soi-même qui exclut toute action. Ce n’est autre chose qu’une oisiveté stérile… Cela est très contraire au repos surnaturel que l’on possède en Dieu, et qui consiste à se fondre d’amour et à fixer d’une façon simple l’incompréhensible clarté. […] Tous les hommes sont capables de découvrir et de posséder ce repos en eux-mêmes, par simple nature et en dehors de la grâce de Dieu… Mais ce n’est pas là que l’homme aimant peut se reposer ; car la charité et la motion intime de la grâce de Dieu ne demeurent pas oisives ; et c’est pourquoi l’homme intérieur ne peut durer longtemps en lui-même dans le repos naturel.. Le repos en Dieu doit toujours être cherché d’une manière active…
L’Ornement des noces spirituelles
La chasteté est la splendeur de l’homme intérieur. Elle est la force suprême qui ferme le cœur aux choses d’ici-bas et qui l’ouvre aux choses d’en haut.
attr. passim
La présence de Dieu n’est pas une séparation extérieure des choses extérieures, elle est la solitude de l’esprit ; si vous l’avez, vous pénétrez les personnes et les choses à une telle profondeur qu’elles perdront leur puissance et leur action contre vous.
attr. passim
Homme spirituel, si vous voulez vous élever jusqu’à la contemplation, il faut trois choses : Il faut voir et posséder l’abîme sans fond de votre substance ; il faut que votre acte interne dépasse les manières d’être ; il faut que votre demeure soit la jouissance divine. Écoutez, vous tous qui voulez vivre en esprit, c’est à vous que je parle et non pas à d’autres.
attr. passim