Personnalités collectives (XII)
Floruit (pays actuels) :
⟴Raymond de Marseille🔗 pertinents
Astrologue 🞄 Christianisme (Catholicisme) 🞄 Saint-Empire romain germanique (Royaume d’Arles) | XII
► Astrologue dont on sait peu de chose sinon qu’il fut actif à Marseille en 1141. Influencé par Albumasar et al-Zarqālī, il traduit les travaux des arabes ntm. sur les tables astronomiques (Ad honorem et laudem nominis Dei…, 1141) et l’astrolabe (De compositionibus intrumentorum astronomicorum, Bnf Lat.10266 ). On lui attribue également, d’une part, un Liber judiciorum(1) — quoique certains proposent de donner la paternité à Jean de Séville — et, d’autre part, de façon plus molle, un ouvrage d’alchimie፧ le Theorica occultorum(2), traduit par De Cues.
1.⟴ Qu’on trouve dans BNF lat.16208.
2.⟴ Ex. in Ms.El.q.18 bs. Bibliothèque universitaire et du land de Thuringe attr. à un "Ramundus civis Masiliensis".
⟴Haydar Qutb ad-Dīn
Mystique 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 n. ? Sultanat de Roume fl. Califat abbasside | XII – 1221
► Disciple de Ahmed Yasavi qui a fondé une tariqa qalandariyya dans le Khorassan. Les adeptes haydariyya pratiquent outre l’ascétisme, la consommation de cannabis.
⟴Silvestre Bernard🔗 pertinents
Philosophe, Poète 🞄 Christianisme (Catholicisme:Chartrain) 🞄 Royaume de France | ≈ 1100 – › 1159
Bernard de Tours
I. Histoire
► Fort peu de choses sont connues sur sa vie. Très probablement né à Tours et y résidant au moins un temps, il a certainement enseigné dans à l’abbaye. Il a sans doute connu Thierry de Chartres et Guillaume de Conches, avec qui il a sans doute étudié Un flou à longtemps subsisté sur son identité : au XIX on a voulu l’identifier à Bernard de Chartres ou à Bernard de Moëlan. Lié au milieu chartrain par le contenu de son œuvre, aucune preuve nous indique qu’il put cependant en faire expressément parti même si on a naturellement proposé qu’il aurait étudié et enseigné l’école cathédrale de Chartres et qu’il fut également chanoine de la cathédrale.
II. Œuvres et pensée
◆ On trouve ainsi dans la philosophie de Silvestre, une perspective antique et latine : dans son fameux poème prosimètre de cosmogonie chrétienne à la structure quasi-épique, Cosmographia ou De Mundi universitate sive megacosmus et microcosmus (≈ 1250)(1). Silvestre y décrit la formation de l’univers et de l’Homme en s’appuyant sur des sources certes bibliques mais aussi païennes(2) : motifs néo-platoniciens(3) d’abord et surtout, stoïciens et issus de l’Asclépios ensuite, mais aussi des auteurs latins(4) d’où il tire ses réflexions philosophiques. Noys (le νοῦς (noûs)), architecte, sagesse et providence de Dieu, est épaulé dans son entreprise démiurgique envers Silva (l’ὕλη (hylē))(5) par plusieurs déesses : Endelichia (l’âme du monde), Imarmene (La bonne fortune), la Nature, Uranie et Physis, personnifications de principes métaphysiques. L’œuvre, aux influences multiples, plus littéraire que théologique, subtile et sophistiquée autant que nébuleuse, veut finalement, rendre hommage à Ovide, Boèce ou Capella. Elle anticipe Alain de Lille, Jean de Meung ou Dante et devra générer des analyses contradictoires auprès des critiques contemporains(6).
↪ Toujours influencé par les sources antiques, Silvestre commente encore la première hexade de l’Énéide(7), dans laquelle, à l’instar de Fulgence le Mythographe, il décèle un involucrum(8), avec un important sens du détail. Par le truchement de l’allégorie(9), il voit une correspondance entre ces six livres et les six âges de la vie de l’homme(10) ainsi que les passions typiques qui les composent. Énée est alors l’esprit humain tandis que Didon personnifie le monde sensible. Ce commentaire, qui est aussi le plus long commentaire médiéval consacré à cette œuvre, eut un succès certain, jusque dans les milieux intellectuels des universités. Et d’une façon générale, l’utilisation de l’allégorie, de la métaphore et du symbole chez Silvestre, utilisés afin d’exprimer des vérités théologiques et philosophiques, participera à façonner la culture de la renaissance du XII. Elle influencera les auteurs ultérieurs comme sa contemporaine Hildegarde puis Vincent de Beauvais, Bonaventure ou encore Chaucer. On a encore cru bon, dès la fin du moyen-âge, de devoir également attribuer à Silvestre un commentaire sur De Nuptiis Philologiae et Mercurii de Capella où on trouve une définition de sa démarche herméneutique.
↪ De plus on trouve encore chez Silvestre des influences des sciences arabes, l’astrologie፧ stt., ce qui fait qu’on a supposé qu’il était également en lien avec les écoles de philosophie espagnoles. En effet, dans son Mathematicus (ou De Patricida) — tragédie en distique élégiaque basé sur l’une des Déclamations du pseudo-Quintilien — il aborde le problème du déterminisme astrologique autour d’un récit œdipien mettant en scène les prédictions d’un astrologue et la réaction d’un enfant devenu roi, comme il avait été annoncé. Ce dernier, cependant, pour faire échouer la seconde partie de la prédiction et ne pas commettre le parricide que le mathematici lui prédit également, pense à se suicider. Mais le peuple lui propose l’abdication et le poème se termine sur une fin ouverte, laissant soin au lecteur de penser ce dilemme. On attribue encore à Silvestre un autre poème plus court, l’Experimentarius(11), adapté d’un traité syriaque de géomancie dans la lignée de Thâbit ibn Qurra(12) ainsi que plusieurs autres textes mineurs.
☩ 𝕍 1⬝ Bernard Silvestris, Natura, and Personification in Journal of the Warburg and Courtauld Institutes (V°43 pp. 16-31), Peter Dronke, 1980. | 2⬝ La cosmogonie de Bernardus Silvestris in Archives d’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age (V°3 pp. 5-24), Étienne Gilson, 1928.
1.⟴ Œuvre qu’il dédie à Thierry de Chartres, présente à Eugène III (reg. 1145 – 1153) aux environs de 1147 — seule date certaine que nous avons à son propos — et qui sera saluée par Boccace.
2.⟴ Suivant en cela Érigène en sa Division de la nature.
3.⟴ Et plus spécialement théories pythagoriciennes de Platon, notamment via le Timée.
4.⟴ On peut notamment desceller l’influence de Pline, Cicéron, Virgile, Manilius, Macrobe ou encore du Liber sex principiorum.
5.⟴ Chaotique et duelle mais aussi fertile et primordiale.
6.⟴ Ces dernières voient en elle l’expression d’un panthéisme ou d’un monisme dans la lignée de l’hermétisme — ce qui nous paraît exagéré voir hors de propos —, ou bien un christianisme platonicien ce qui paraît plus raisonnable bien qu’il faille comprendre ce travail dans le cadre des spéculations des chartrains.
7.⟴ La paternité de ce commentaire lui est parfois contestée par la critique moderne.
8.⟴ Sous le récit fabuleux gisent des vérités philosophiques et morales.
9.⟴ Comme avait pu le faire Chalcidius en commentant le Timée.
10.⟴ Enfance, puérilité, adolescence, jeunesse, âge viril, tout étant naturellement un cheminement vers la sagesse, l’étude de la théologie et finalement vers Dieu.
11.⟴ Il s’inspire d’un ouvrage d’astrologie d’Albumasar.
12.⟴ La paternité de Silvestris sur cet ouvrage, aussi nommé ou Sortes Amalrici et basé sur les 28 mansions lunaires est contestée : l’auteur pourrait être un médecin d’Amaury Ier de Jérusalem (reg. 1162-1174).
⟴Alain (de Lille)🔗 pertinents
Théologien, Mystique, Poète 🞄 Christianisme (Catholicisme:Cistercien) 🞄 Royaume de France | ≈ 1115 – ≈ 1202
Alanus magnus, Doctor universalis
Œuvre
Nom : Alain de Lille et Pierre le Chantre débattant
Auteur : Culture bavaroise
Date : 1227-1249
Type : Enluminure
Source : Bibliothèque Britannique
I. Histoire et pensée
► Reconnu pour son savoir encyclopédique par ses contemporains mais sa biographie, comme la plupart des auteurs antérieurs au bas Moyen Âge, reste obscure. Influencé par Apulée, Boèce, Capella et, d’une façon plus générale, Silvestre et l’École de Chartres, il estime le néoplatonisme ainsi que le néopythagorisme et réagit contre la scolastique de son temps en produisant une pensée syncrétique mêlant le rationalisme et la logique aristotélicienne avec la mystique dionysienne et érigéniste. Il connaît, le Liber de causis qu’il est le premier à citer ainsi que le Liber XXIV philosophorum dont il présente la première version connue et dont il fait remonter l’invention à Cicéron puis à la Métaphysique d’Aristote. Après des études à Paris, Montpellier et Chartres où il a sans doute été sous la direction d’Abélard, Thierry de Chartres et Gilbert de La Porrée, il enseigne la théologie à Paris, participe au Quatrième concile du Latran (1179), prêche notamment contre les cathares, puis rejoint les cisterciens à Cîteaux.
II. Œuvres
◆ Connu pour ses poèmes de cosmologie allégoriques sur fond de naturalisme chrétien néoplatonicien : De Planctu naturae {La Complainte de la nature} d’abord, où il livre, en prose et vers, une allégorie de la nature, organisatrice de la matière de l’univers visible, ainsi que des vertus tandis qu’il expose les vices humains, soutenu dans son réquisitoire par la nature elle-même dont l’œuvre divine est déformée par les péchés de l’humanité. L’Anticlaudianus(1) ensuite, intégralement en vers, où la nature tient toujours le premier rôle et où il devise sur la perfection de l’âme፧ humaine dans son activité intellectuelle effectuant une anabase vers Dieu(2) avec le concours des vertus et des arts libéraux et s’incarnant ensuite dans un corps à même de vaincre le mal. Ces œuvres ont influencé Jean de Meung, Dante et Chaucer. Il produit notablement des commentaires du Cantique des Cantiques et des des Prophéties de Merlin. Notez qu’un Dicta de Lapide Philosophico (1600) lui est attribué de façon pseudo-épigraphique(3).
1.⟴ Il y pastiche le In Rufinum de Claudien dans une intention polémique.
2.⟴ Il emprunte l’allégorie juive du char.
3.⟴ ? plutôt d’Albertus Cranzius d’après Fictuld.
⟴Averroès [Rochd (Ibn)]🔗 pertinents ❙
Philosophe, Théologien 🞄 Islam (Sunnisme, malikisme), Aristotélicien 🞄 n. Califat Almoravide, fl. Califat Almohade | 1126 – 1198
Œuvre
Nom : Averroes Arabs
Auteur : D. Cunego (d’après l’École d’Athènes 🗎⮵ de Raphael 👁)
Date : 1785
Type : Gravure sur papier
Source : Bibliothèque Wellcome
I. Histoire
► Issu d’une illustre famille de cadis, il reçoit une éducation riche et pointue, élargissant son savoir aux champs de la théologie, de la médecine, des mathématiques, de la jurisprudence et de la grammaire, faisant de lui un érudit; peut-être fut-il formé par Ibn Bajja ou du moins l’influença t-il. Averroès devient lui-même cadi de Séville (1169), puis grand cadi de Cordoue (1182). Grâce à l’intermédiaire d’Ibn Tufayl il est introduit à la jeune cour des Almohades en 1153, cour qui, dominée par Abd al-Mumin premier des Almohades, est alors fixée à Marrakech (elle quitte Tinmel en 1247). Il y obtient divers charges liées à la magistrature et à la médecine, domaine dans lequel il succède à Ibn Tufayl auprès d’Abu Yaqub Yusuf, fils d’Al-Mumin. Averroès développe également sa philosophie à la cour et intervient dans la réforme de l’éducation, mais, sous Abu Yusuf Yaqub al-Mansur, il est contraint à l’exil en 1195 par les tenants du malikisme alors puissants parmi le peuple, son enseignement, accusé de préférer l’exercice de la philosophie à celui de la religion, comme d’ailleurs l’étude de la philosophie toute entière, sera prohibé. Ces décisions ne seront que de courte durée et Averroès sera cependant réadmis à la cour peu avant sa mort.
II. Pensée
◆ Particulièrement attaché à l’œuvre d’Aristote qu’il tente de relier au Coran, il est célèbre pour ses nombreux commentaires des ouvrages du Stagirite(1) qui furent commandités par son mécène Abu Yaqub Yusuf, il s’impose alors comme l’un de ses principaux commentateurs. Fort attaché à l’artistotélisme et à son naturalisme, critiquant d’ailleurs les interprétations d’Al-Fârâbî et Avicenne qui lui apparaissent trop marquées par l’idéalisme néoplatonicien, il estime Aristote supérieur à Ptolémée en astronomie et à Galien en médecine. Il commente aussi, en paraphrasant beaucoup, La République de Platon.
↳ Logicien attaché aux démonstrations liées à la causalité, il subordonne la foi à la raison, quoiqu’il reconnaisse la distinction et l’indépendance entre les deux domaines, le premier s’occupant de sujets insolubles pour le second. Il estime cependant que la philosophie, démonstrative, est une excellente méthode pour investiguer les vérités coraniques et la plus excellente dans l’interprétation de la charia; aux théologiens reste la dialectique et au peuple, la rhétorique du mythe et de la poésie, images de la vérité pure. Du point de vu spéculatif, il critique l’émanationnisme et la psychologie d’Avicenne, estimant d’une part, que la matière est co-éternelle à Dieu et contenant les formes en puissance et demeurant, d’autre part, attaché à la thèse monopsychiste. Dans son Faṣl al-Maqāl {Traité décisif}, il explique en quoi l’exercice de la philosophie et de la raison peut être utile à la compréhension de l’islam, développant ainsi une théologie rationnelle. Dans son Tahāfut al-Tahāfut {L’Incoherence de l’Incoherence}, il défend également la philosophie en réfutant violemment les vues d’al-Ghazālī exprimées de son Tahāfut al-falāsifa {Incohérence des Philosophes} (1093).
III. Influence
➽ Averroès est sans doute le faylasūf le plus influent de tous : peu connu dans le monde musulman avant le XIX, l’averroïsme aura cependant une influence importante sur l’occident médiéval et renaissant et dans lequel il se développe à partir à l’Université de Paris de 1240 par le truchement de traductions hébraïques et latines. Averroès participe également à sa façon au regain d’intérêt de l’occident pour la philosophie grecque en général et dans la transmission du corpus aristotélicien en particulier, domaines qui étaient largement mis de cotés durant le Haut Moyen Âge. On trouve trace de cette influence en théologie et en philosophie (mais aussi dans l’hermésisme); l’introduction d’Averroes en occident et son influence durable, au détriment de celle d’Avicenne, donnera un élan considérable à la pensée rationnelle puis matérialiste à l’occident. Sa pensée est notablement critiqué par Aquin et, évidemment, le néoplatonisme florentin, qui tous sont opposés à sa thèse niant l’immortalité personnelle de l’âme፧ par le biais de sa conception de l’intellect définissant au contraire l’impersonnel comme étant inengendré, incorruptible et immortel.
☩ 𝕍 Averroès chez les Latins. Vues cavalières sur la réception d’Averroès dans la scolastique latine médiévale in Horizons Maghrébins (N°40 pp. 21-32), Serge-Thomas Bonino, 1999.
1.⟴ En occident on le surnomme "le commentateur".
⟴Baqlī Rūzbehān🔗 pertinents
Mystique, Poète 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 Califat abbasside | 1128 – 1209
► Soufi chaféite important pour l’histoire de la mystique islamique iranienne, peu d’informations biographiques fiables sont cependant disponibles. Il expérimente ses premières extases dès trois ans et observe ses premières ascèses dès sept ans. Extatique, mettant l’emphase sur l’importance de l’amour, il est initié naqshbandiyya (Siddiqiyya à son époque) et est ainsi influencé par Hallaj, tout en rejetant le chiisme et le mutazilisme. Baqlī fonde une tariqa à Chiraz où, contrairement à bien des soufis, il s’investit dans la vie sociale de la ville, alors majoritairement sunnite.
↪ En effet, dans la seconde partie de sa vie, il mettra l’accent non plus sur l’amour mais sur la gnose ainsi que sur le rôle social et charismatique dont le saint doit s’investir. Son ordre se signalait par la pratique du jeûne, de la retraite et du dhikr. Il a rédigé, dans un style percutant, une cinquantaine d’ouvrages, la plupart en arabe, bien qu’il écrivit également en persan. Connu pour son Kashf al-asrâr {Le Dévoilement des secrets} (1189) qui combine autobiographie et visions. Sa tombe fut un lieu important de pèlerinage.
☩ 𝕍 En Islam iranien (T°III, pp. 9-146), 1972, Henry Corbin.
⟴ʿAṭṭār [Ibrāhīm Abū Bakr]🔗 pertinents ❙
Poète, Mystique, Hagiographe 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 Califat abbasside | ≈ 1145 – ≈ 1220
I. Histoire
► Étant discret sur sa propre personne dans ses écrits, on sait fort peu de choses certaines sur lui. Fils d’un apothicaire-parfumeur, il hérita lui-même du commerce de son père et comme beaucoup de soufis, obtînt son surnom selon son métier (ʿAṭṭār {le droguiste}). Étant jeune, il aurait beaucoup voyagé notamment en Asie centrale, au Moyen-orient, en Égypte et même en Inde mais ces faits sont probablement métaphoriques. Il aurait ℙ été le disciple de Majd al-Dîn Baghdâdî. Influencé par al-Hallaj, critique envers l’artistotélisme, ʿAṭṭār est un grand poète du soufisme, parvenant à combiner brillamment la métaphysique musulmane et de la poésie persane.
➽ Influence largement Rumi mais peu connu de son vivant.
II. Œuvres
◆ Il est l’auteur de nombreux mathnavis(1) mystiques, didactiques et parénétiques, mais est principalement connu pour sa Manṭiq al-ṭayr {Conférence des oiseaux} allégorie du voyage spirituel narrant la quête d’oiseaux cherchant le Sīmorgh (i.e. ≈ phœnix) pour en faire leur roi, quête aboutissant, pour les trente oiseaux survivants, après avoir traversé sept vallées(2), à réaliser leur unité avec lui, unité dont la porte se trouvaient en leur propre sein(3). Avec son Tadhkirat al-Awliya {Biographies des saints}, il nous présente également la vie, les dits et les faits de soixante-douze soufis, il est d’ailleurs ntm. à l’origine de l’essentiel des sources hagiographiques dont nous disposons à propos de Rabia al Adawiyya.
Œuvre
Nom : La Conférence des oiseaux
Auteur : Habiballah de Sava
Date : ≈ 1600
Type : Encre, aquarelle opaque, or et argent sur papier
Source : in Manṭiq al-ṭayr (’Ali al-Mashhadi) bs. Musée d’Art Métropolitain
1.⟴ Naturellement, on doute de l’attribution d’un bon nombre d’entre eux.
2.⟴ Ascèse, amour, connaissance, détachement, unité, stupéfaction et finalement anéantissement.
3.⟴ Sīmorgh signifie justement "trente oiseaux".
⟴Bai Yuchan🔗 pertinents
Ésotériste 🞄 Taoïsme 🞄 Dynastie Song | ? 1134 – 1222
Œuvre
Nom : 白玉蟾真人像并贊 {Véritable et excellent portait de Bai Yuchan}
Auteur : ecr. Bai Yuchan
Date : 1598
Type : Gravure sur papier
Source : in Xin ke Qiongguan Bai xian sheng ji. 14 juan {Collection nouvellement gravée de M. Qiongguan Bai. Volume 14} bs. Bibliothèque de l’université Harvard (Harvard–Yenching)
► Important patriarche de la secte 金丹派南宗 (Jindan pai nanzong) {Lignée méridionale de l’Élixir d’or}, essentiel pour le neidan en général et évidemment, l’École du Sud en particulier. Disciple de Chen Nan maître de la branche 清修派 (qingxiu pai) {cultivation pure} de cette même école. Peu de choses sont connues sur sa vie si ce n’est via des hagiographies lapidaires qui mentionnent son excentricité ainsi que son penchant artistique.
◆ Il est à l’origine d’un renouvellement de la liturgie au travers de nombreux rituels qu’il redéveloppe en puisant dans le chamanisme, l’interprétation néo-confucianiste du Yi-King et le chán. Il est également praticien des techniques magiques de la 大洞法籙 (dadong falu) {Grande caverne}, spécialement des exorcismes des 神霄雷法 (Shenxiao leifa) {Rites du céleste tonnerre divin} issus des rites tantriques(1), qu’il combinait avec la neidan. On lui attribue de nombreux poèmes et traités, son 玉樞經 (Yushu jing) {Livre du pivot de jade}, fondamental dans le taoïsme moderne, est une adaptation de la Perfection de sagesse du diamant coupeur. Il produit également des anthologies et commentaires notamment du Livre de la voie et de la vertu.
☩ 𝕍 A Daoist way of transcendence : Bai Yuchan’s inner alchemical thought and practice, Li Wang, 2004.
1.⟴ Ils sont connus du taoïsme par le truchement du Tiantai.
⟴Joachim (de Flore)🔗 pertinents ❙
Mystique, Théologien, Ecclésiastique (Moine) 🞄 Christianisme (Catholicisme:Cistercien) 🞄 Royaume de Sicile | ≈ 1135 – 1202
Bienheureux de l’Église catholique romaine
Œuvre
Nom : Vera Ioacchin præclari est qua cernnis imago
Auteur : ecr. Giacomo Greco
Date : 1612
Type : Gravure sur papier
Source : in Ioacchim Abbatis Et Florensis Ordinis Chronologia bs. Bibliothèque universitaire de Heidelberg
I. Histoire
► Les informations de Joachim précédant son activité littéraire son rares, confuses et les témoignages de première main, interpolés. ? fils d’un notaire, évoluant dans une région qui était alors un carrefour entre orient et occident, il suite d’abord les traces de son père et est fonctionnaire à la Chancellerie de Guillaume Ier (reg. 1154 – 1166), roi de Sicile. C’est ≈ 1160, suite à une crise spirituelle lors d’un voyage en Terre Sainte, qu’il se destine à la vocation monastique. Après avoir vécu quelque temps en ermite tout en soutenant une activité de prédicateur laïque, il entre dans l’Ordre cistercien, devient d’abord frère convers puis moine dans différents monastères et est finalement consacré prêtre par l’évêque de Catanzaro en 1668, poussé par les objections des clercs quant à son mode de vie. Il est ensuite moine (1172) puis finalement, sollicité par ses confrères et à son désarroi, abbé au monastère cistercien de Corazzo (1177). En 1183, Joachim écrit obtenir deux révélations — la veille de Pâques et à l’occasion de la Pentecôte — divulguant aux yeux de son esprit des lumières d’intelligence spirituelle concernant respectivement l’Apocalypse et la doctrine de la Trinité. Une troisième révélation est donnée par la tradition, celle de la concorde de fond des deux parties de la Bible qui aurait eut lieu auparavant durant son pèlerinage ou son noviciat.
↪ Encouragé dans ses travaux par Lucius III (reg. 1181-1185) et les papes se succédant rapidement au Saint-Siège à cette époque et peu assidu à ses responsabilités ecclésiastiques, il est relevé de ses fonctions d’abbé en 1187 afin qu’il puisse se consacrer librement à ses études. Il effectue une retraite en ermite sur la Sila pour vivre la vie contemplative dès 1191. Puis, soutenu financièrement par Tancrède de Sicile (reg. 1189-1194) et entouré de disciples, il entreprend de construire un monastère (ajd. Abbaye Florense) où il établit l’ordre des floriens, d’inspiration cistercienne qui est approuvé par Célestin III (reg. 1191-1198) en 1196. S’il n’est pas apprécié des cisterciens, il est soutenu par l’empereur Henri VI (reg. 1169-1197) et durant son vivant, il se consacre à la rédaction de ses propres œuvres et à la consolidation de son ordre(1). Peu avant sa mort, il assure de son orthodoxie et soumet prudemment son œuvre à examen et approbation de la papauté et de l’Église. Au Paradiso (XII, 140) Dante le placera au quatrième ciel près de Raban Maur : il calavrese abate Giovacchino / di spirito profetico dotato.
II. Œuvres et pensée
◆ S’estimant sentinelle de la chrétienté quant aux évènements à venir(2), Joachim souhaite percer les mystères cachés du sens des Écritures occulté dans la lettre. Il interprète avec subtilité et enthousiasme ces mystères, dans un style lyrique contrastant avec son domaine d’élection produisant une théologie de l’histoire complexe et innovante. Conservateur, hostile aux forces intellectuelles et au laïcat qui tentent de trouver leur place dans la société d’alors, il pense que l’antéchrist est en Occident et qu’il allait se manifester incessamment à Rome(3). Joachim est célèbre pour sa doctrine spéculative de nature messianique et apocalyptique, de nature théologico-historique(4) et ecclésiologique qui, rompant avec les schémas de la théologie et de l’eschatologie augustiniennes alors dominants, fera de lui une figure centrale de la prophétie et de l’eschatologie médiévale. Sa théologie de l’Esprit, de l’histoire et de l’Antéchrist, originale, devra en effet renouveler en profondeur le lexique eschatologique occidental. L’abbé calabrais conçoit Dieu comme une unité et une trinité, non seulement dans ses opérations internes mais également au regard de sa manifestation historique, dessein providentiel du Créateur. L’histoire chez Joachim est appréhendée chronosophiquement, elle est visualisée comme arborisée, et foncièrement optimiste, elle est considérée comme le déploiement graduel de la Trinité.
↳ Il distingue ainsi trois grandes périodes de l’Histoire universelle : (1.) le règne du Père, qui va de la Création à la venue du Christ et qui correspond à l’Ancien Testament, à la nature, à la loi et aux orties, aux personnes âgées et aux mariés, à l’obéissance servile; (2.) Le règne du Fils, qui est la période de l’Église et qui correspond au Nouveau Testament et à la grâce, au clergé, à la jeunesse et aux roses, à l’obéissance filiale; (3.) et enfin le prochain règne du Saint-Esprit qui, imminent(5), spirituel et révélant les mystères de l’Écriture et de la Trinité, correspond aux moines, aux enfants et aux lys. Utopie contemplative sur fond de démantèlement des structures ecclésiastiques, elle verra régner la liberté et la charité, unissant latin, grecs et juifs convertis sous l’égide d’un ordre religieux parfait(6) et culminera, dans une perspective postmillénariste, avec le retour du Christ.
↪ Ces trois époques, par ailleurs toutes divisées en sept périodes, si elles se succèdent du point de vu temporel, sont analogiquement reliées entre elles par une concordia : les personnages intervenant dans l’une, trouvent leur concordance dans les deux autres(7) ce qui permet à Joachim de déchiffrer les processus en cours et de prévoir leur aboutissement. Il exprime sa théorie dans plusieurs ouvrages exégétiques, principalement : Concordia Novi ac Veteris Testamenti (≈ 1196), d’abord puis Expositio in Apocalipsim ensuite, qui intègre des spéculations arithmologiques et une exégèse des signes et enfin Psalterium decem chordarum. Ces œuvres sont respectivement dédiées au Père, Fils et Saint-Esprit(8). Dans le recueil Liber Figurarum (𝕍 MS 255A ) on peut voir les figures illustrant les visions de Joachim(9) et qui auraient inspiré l’utilisation des anneaux borroméens et du bouclier de la foi pour représenter la Trinité ainsi que Dante dans la rédaction de sa Divine Comédie. Parmi ses œuvres théologiques, il produit un De Articulis fidei et un De Unitate seu essentia Trinitatis ajd. perdue(10) et qui est condamnée au Quatrième concile du Latran (1215), entravant d’ailleurs le processus de canonisation lancé par ses disciples après sa mort.
Œuvre
Nom : Arbre des trois règnes
Auteur : Joachim de Flore
Date : 901–1299
Type : Pigments sur vélin
Source : in Liber Figurarum (Corpus Christi College MS 255A ) bs. Bibliothèque de Bodley
III. Influence
➽ S’il est, de son vivant, déjà perçu comme un prophète, cette réputation s’accroît cependant au XIII au travers d’une abondante littérature prophétique pseudo-épigraphique de nature apocalyptico-eschatologique (De Oneribus Prophetarum, Expositio Sybillae et Merlini, la Prophétie des Papes…) et à l’appropriation de son message par les spirituels Ordre des Frères mineurs, les Fraticelles, conditionné par leur posture critique contre les institutions ecclésiastiques dont ils pouvaient trouver des échos chez Joachim, encouragés en outre, par sa tendance à s’exprimer en faveur des pauvres, qu’il défend à plusieurs occasions. Ce joachimisme, dépassant les idées de Joachim lui-même, fait de lui l’auteur italien le plus glosé après Dante car ses prophéties relatives à un ordre qui devra conduire le monde à une église spirituelle trouvèrent matière à nourrir les espoirs et ambitions d’ordres mendiants comme les franciscains(11) et les dominicains, mais aussi des frères ermites augustins et même jésuites ainsi que les béguines provençales. Les ramifications de son influence sont visibles chez Roger Bacon, Arnaud de Villeneuve ou encore Savonarole. Des échos de la mouvance joachimique apparaissent à plusieurs reprises comme chez les amauriciens, les dolciniens, dans le culte du Saint-Esprit des Açores et jusqu’au courant du Libre-Esprit. Il se décèlent encore au XVII depuis la réforme et jusque au travers des motifs du pape angélique et du dernier empereur du monde pour enfin influencer Huysmans, Yeats ou Berdiaev. Cette diversité cependant, mènera aussi la figure de Joachim à demeurer dans une position ambivalente : il est autant vu comme un saint que comme un hérétique.
☩ 𝕍 1⬝ Joachim de Flore, le messager des derniers temps in Bulletin de l’Association Guillaume Budé (S°4, N°3 pp. 407-424), Marcel Sendrail, 1970. | 2⬝ La Figure géométrique dans l’œuvre de Joachim de Flore in Cahiers de Civilisation Médiévale (A°31, N°124 pp. 297-321), Barbara Obrist, 1988. | 3⬝ Le Double discours de Joachim de Flore in Fin des temps et temps de la fin dans l’univers médiéval (Senefiance N°33 pp. 307-327), Jean Lacroix , 1993. | 4⬝ Études sur Joachim de Flore et ses doctrines, Paul Fournier, 1909.
1.⟴ Son ordre disparu au XVI.
2.⟴ Il rejette le titre de "prophète".
3.⟴ La conception traditionnelle préfère le voir en Orient comme chez Jérôme, le Pseudo-Méthode et Adson de Montier-en-Der. D’ailleurs, une rencontre, ? légendaire, explique que vers 1190, Joachim rencontra Richard Cœur de Lion alors en route pour la croisade. A cette occasion, il lui aurait confié son interprétation des sept têtes du dragon de l’Apocalypse et lui aurait prédit l’avènement d’un pontife antéchristique.
4.⟴ Encouragée par la reprise de Jérusalem aux croisés et la chute du Royaume de Jérusalem en 1187.
5.⟴ Joachim estimait vivre aux environs de la fin du second âge et que des tribulations impliquant l’antéchrist allaient précéder l’entrée dans cette troisième séquence de l’histoire (en 1260), ce qui le différencie d’un point de vue narratif des exégèses existant jusque alors, à l’exception notable du montanisme.
6.⟴ Cette théorie, âge d’or de l’Esprit et division tripartite de l’histoire, connaîtra une importante fortune durant la période moderne, spécialement auprès des philosophes de l’Histoire.
7.⟴ Ex. entre l’Ancien Testament et le Nouveau Testament, Joachim fait correspondre l’histoire du peuple d’Israël et l’histoire de l’Église : Abraham correspond à Zacharie, Sarah à Élisabeth, Isaac à Jean-Baptiste, les douze patriarches aux douze apôtres etc..
8.⟴ 𝕍 des extraits in L’Évangile éternel (T°2), Emmanuel Aergerter, 1928.
9.⟴ Joachim apprécie précocement orner de figures et de diagrammes ses propres écrits. Sa paternité sur le Liber figurarum reste cependant discutée.
10.⟴ Contre Pierre Lombard et la doctrine "quaternaire" qu’il pensait trouver chez lui. Le Liber contra Lombardum est de l’école joachimite.
11.⟴ Notablement Gérard de Borgo San Donnino et son Introductorium in Evangelium aeternum qui, en 1254 fit scandale en affirmant que l’œuvre joachimite supplante la Bible. Suivent Pierre de Jean Olivi et son disciple Ubertin de Casale qui influencèrent Jean de Roquetaillade.
⟴Roger de Hereford🔗 pertinents
Astrologue, Alchimiste 🞄 Christianisme (Catholicisme) 🞄 Royaume d’Angleterre | m.XII – › 1198
► Ou "Roger Infans". Sa biographie est largement lacunaire, son origine anglaise est elle-même incertaine. il est mentionné pour la première fois en 1176 et sans douté né au m.XII. Actif à l’École cathédrale de Hereford, connue pour son intérêt pour l’astrologie፧ et proche d’Alexandre Neckam. Influencé par Raymond de Marseille et les auteurs arabes(1), il est connu pour son Judicial Astrology, qui, focalisé sur l’astrologie horaire(2) est en outre, le premier texte astrologique d’Angleterre. Également auteur d’un Computus autour de la révision du calendrier et d’un Liber de quatuor partibus judiciorum astronomice manifestement prisé des pédagogues. Il a enfin notablement adapté les Tables de Tolède à la suite de Robert de Chester, en 1178 et sur le méridien de Hereford. On lui attribue également un De Rebus metallicis et une glose sur Alphidius.
1.⟴ Au travers des traductions de Jean de Seville et Herman de Carinthie.
2.⟴ L’ouvrage contient vraisemblablement un horoscope d’Aliénor d’Aquitaine.
⟴Būnī (Al) Aḥmad🔗 pertinents
Philosophe, Occultiste 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 Califat Almohade (n. Souf, fl. Jérid) | 1150 – 1225
► Al-Buni est d’abord un voyageur. Il est né en Algérie, étudie le malikisme à Tunis, voyage en andalousie puis se rend en Égypte, y résidant un certain temps, mais aussi à La Mecque, Jérusalem, Damas et enfin Bagdad, villes où il rencontre des théologiens et mystiques musulmans. Il revient ensuite en Tunisie où il se fixe et rédige des ouvrages. La tradition lui attribue la rédaction du célébrissime كتاب شمس المعارف (Shams al-Ma’arif) {Soleil de la gnose}, du fait de la proximité des thématiques abordés avec ses traités authentiques, d’ailleurs également insérés dans l’œuvre. Il s’agit en effet d’un ouvrage de compilation hermétique, de nature encyclopédique et qui concerne la magie coranique populaire structurée autour de principes qabalistiques relatifs à la puissance occulte des noms divins, des verset du Coran et des lettres arabes.
↪ Il en existe plusieurs versions, dont une du XVI, largement augmentée(1), qui eut un succès considérable dans le monde arabe. À partir de ce succès, nombre d’apocryphes magico-divinatoires furent écrits en son nom et il se constitua un Buni mythique, à qui l’on attribua la découverte de la découverte et la traduction en arabe de la Table d’Émeraude. L’ouvrage influence notablement l’hurufisme et le babisme.
☩ 𝕍 1⬝ Magie et religion dans l’œuvre de Muhiy Al-Dîn Al-Bûni in Horizons Maghrébins (A°1, N°1 pp. 4-15), Pierre Lory, 1986 puis 2⬝ La magie des lettres dans le "Šams al-maʿarif" d’Al-Būnī in Bulletin d’études orientales (T°39-40 pp. 97-111), Pierre Lory, 1987-1988.
1.⟴ Dite Shams al-maʻārif al-kubrá wa-laṭāʼif al-ʻawārif , à la BNF 𝕍 aussi l’Arabe 6681 contenant seulement le début.
⟴Arabi (Ibn) Mohammad🔗 pertinents ❙
Philosophe, Mystique, Poète 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 n. Califat Almohade, fl. Sultanat Ayyoubide | 1165 – 1240
I. Histoire et pensée
► Il passe sa jeunesse à Séville où, issu d’une ancienne famille de militaires, il reçoit une excellente éducation, il est notamment attiré par le métier des armes. Appelé à la vie spirituelle à quinze ans au travers une vision spirituelle, il rencontre Averroès à Cordoue sur instigation de son père, proche du philosophe; et il est, dit-on, impressionné par sa maturité spirituelle. En 1194 il entame une série de voyages dans le monde musulman afin de s’instruire auprès de maîtres, d’abord en Espagne, puis dans le Maghreb et enfin, dès 1198, jusqu’au moyen-orient. Il se rend d’abord à La Mecque (1201) où il vit trois ans, puis l’Égypte, l’Anatolie(1), Bagdad, Alep et se fixe finalement à Damas après vingt-cinq ans de pérégrinations, en 1223.
◆ Ibn Arabi est influencé par al-Hallaj et le néoplatonisme islamique. Dans une exposition combinant théologie, philosophie et ésotérisme፧, il livre une vision moniste, émanationniste et courtoise du rapport ontologique de l’Homme à Dieu, rapport qui se veut d’essence naturel et universel. Usant simultanément de ˓aql {intellect} et khayál {imagination} il aboutit, au travers une mystique du voyage et la découverte de son ange, à la doctrine du al-wahda al-woujoûd {monisme existentialiste} qui s’exprime, au niveau humain, dans l’al-Insān al-Kāmil {L’Homme parfait}, possesseur des noms et dont Mahomet est l’archétype.
☩ Il existe plusieurs papiers et ouvrages intéressants sur Ibn Arabi. 𝕍 déjà 1⬝ La Naissance d’un saint : de Murcie à la Mecque, l’itinéraire d’Ibn Arabî in Horizons Maghrébins (N°51 pp. 9-19), Claude Addas, 2004 | Puis 2⬝ Herméneutique et symbolique : le ta’wīl chez Ibn ‘Arabī et quelques auteurs antérieurs in Bulletin d’études orientales (T°58 pp. 351-384), Mohammed Chaouki Zine, 2008-2009 | Puis 3⬝ Ibn ’Arabī: the doctrine of waḥdat al-wujūd in Islamic Studies (V°38, N°2 pp. 149-192), Abdul Haq Ansari, 1999 | Puis enfin, 4⬝ L’Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn’ Arabî, Henry Corbin, 1993.
II. Œuvres et influence
➽ Ibn Arabi a beaucoup écrit(2), il est principalement connu pour ses imposantes et sophistiquées Al-Futūḥāt al-Makkiyyah {Révélations mecquoises}, qui influencèrent Lulle et contenant un exposé encyclopédique de l’ésotérisme musulman ainsi que pour ses plus raisonnables mais non moins synthétiques, hermétiques et matures Fuṣūṣ al-ḥikam {Gemmes de la sagesse} (1229). Il est encore l’auteur du Tarjumān al-ashwāq {Interprète des amours}, série de poèmes où il mêle l’amour humain(3) et l’amour divin qu’il éprouve envers Dieu. L’impact du muḥyīddīn {vivificateur de la religion} sur l’islam en général est important, spécialement au niveau métaphysique, quoiqu’il fut régulièrement critiqué par la pensée théologique orthodoxe qui voit dans la pensée d’Ibn Arabi, un panthéisme. L’influence que sa pensée a sur le soufisme est formidable, en particulier en Anatolie, en Iran, en Indonésie, ainsi que sur la ṭarīqa shādhilite.
1.⟴ Il y rencontre al-Qûnawî qui devient l’un de ses plus fervent disciple.
2.⟴ On lui attribue plus de 800 ouvrages, bien qu’environ la moitié soient apocryphes.
3.⟴ Qu’il éprouve pour Niẓām, une mecquoise qu’il considère comme une émanation de sophia, position que les commentateurs ont comparé à celle de Dante avec Béatrice.
⟴Scot Michael🔗 pertinents ❙
Philosophe, Astrologue, Ecclésiastique 🞄 Christianisme (Catholicisme) 🞄 n. Royaume d’Écosse, fl. Royaume de Sicile | 1165 – 1240
Œuvre
Nom : Lettrine historiée présentant un portrait de Michael Scot
Auteur : Culture italienne
Date : tq.XIII
Type : Enluminure
Source : in Liber particularis; Liber de Physiognomia (Bodleian Library MS. Canon. Misc. 555) bs. Bibliothèque de Bodley
I. Histoire
► Sa biographie demeure obscure : la plupart des informations sont sujettes à caution et vis à vis de ses œuvres même, à savoir si elles doivent bien lui être attribuées et à quelle date, de même, posent problème. Né en Écosse, ? non loin d’Édimbourg et sans doute d’une famille aristocratique. Il effectue ses études ? à l’école cathédrale de Durham, puis aux universités d’Oxford et de la Sorbonne où il étudie vraisemblablement les arts libéraux et la théologie. Il est manifestement ordonné mais aussi passionné de langues : c’est un lecteur des Étymologies d’Isidore de Séville. En 1217, on sait qu’il effectue des traductions de textes arabes à Tolède, évoluant dans l’entourage de l’archevêque Rodrigo Jiménez. En 1220-1221, érudit errant, il est à Bologne où il se penche plus avant sur la médecine, puis à Palerme et, en faveur auprès de la papauté qu’il soutient manifestement, il fut à la Curie romaine en 1224-1227. En 1224 d’ailleurs, Honorius III, qui le qualifie de "magister", s’attache à prendre soin de sa carrière ecclésiastique et projette de faire de lui l’archevêque de Cashel en Irlande mais il refuse déclarant ignorans linguam terrae illius
. De même, Grégoire IX poursuivra ces faveurs, fera ses éloges et tentera de lui donner l’archevêché de Cantorbéry mais devant les réticences du clergé local, cela ne se fera pas. On sait néanmoins qu’il reçut des bénéfices pour des charges Angleterre et en Écosse, sans pourtant qu’il dut observer des condition de résidence. Scot cependant, choisit de séjourner ensuite à la cour itinérante (sicilienne à ce moment) de Frédéric II (reg. 1215–1250) en 1227-1236 et dont il devient le savant, mathématicien et astrologue favori(1), ce qui, malgré la position conflictuelle de l’empereur vis à vis du Vatican, n’entame par les excellentes relations de Scot avec le Saint-Siège. Il devra également y collaborer avec Hermannus Alemannus, autre important traduction de arb. vers lat.. Durant sa vie, Scot a la réputation d’être érudit, il s’intéresse à la philosophie, est compétent en astrologie et en médecine et, polyglotte, il parle le latin, le grec, l’hébreu et l’arabe.
↪ Cette réputation de savant renforcée par la pluralité des informations à la fois scientifiques et divinatoires présentées dans ses traités ainsi que ses inclinaisons pour les études arabes et son intérêt congruent pour l’astrologie፧ et la magie, le mènent à construire peu à peu une réputation de sage, de magiste, d’alchimiste, voire de sorcier(2); des légendes se constituèrent au moyen-âge autour de son personnage à propos de ses connaissances et pouvoirs surnaturels, voire diaboliques, évoquant notamment l’image d’un navire fabuleux lui permettant de naviguer en mer et d’un cheval démoniaque avec lequel il chevauchait dans les airs. Son souvenir fut vivace en Écosse et plusieurs localités se disputent son lieu de naissance(3). Dante devra ainsi le placer dans son enfer avec Bonatti et Asdente (XX, 115-17)(4). Scot, il est vrai, estime la méthode astrologique qu’il défini comme le plus noble des arts libéraux à la racine de tous les autres et qui ne saurait être dépassé en dignité que par la théologie dans la mesure où la science astrale, sagesse divine, s’occupe d’étudier les puissances célestes universelles gouvernant le monde sublunaire. Si elle est appliquée avec rigueur et discernement, cette science amène à pouvoir effectuer des pronostiques de réelle valeur. En revanche, il condamne la nécromancie et toute forme de magie "démoniaque", quoique lui-même se révèle instruit dans le domaine magique : il accepte la magie astrale, la véracité des opérations des esprits astraux, la doctrine médico-astrologique des sceaux qui en découle, ainsi que les méthodes géomantiques. En outre, dans son Liber introductorius, il signale Hermès comme détenteur d’une gnose permettant d’exalter l’Homme de lui faire éprouver un avant-goût paradis dans son corps terrestre. Il demeure que Scot est un des savants les plus importants vis à vis de la culture philosophique et scientifique occidentale de la pm.XIII, en témoignent les observations mélioratives de Fibonacci(5), puis les objections que Roger Bacon et Albert prirent soin de formuler à son endroit, bien que le premier estime que c’est grâce à Scot que le corpus aristotélicien et averroïste fut connu en Angleterre, dès 1230.
II. Traductions et œuvres
► Intéressé par la science arabe, il effectue plusieurs traductions d’Aristote depuis l’arb. vers lat., en 1215-1217, alors qu’il est à Tolède. Le Kitāb al-hayawān (De Animalibus)(6) d’abord. Cette traduction, d’ailleurs littérale et qui servira à Albert pour confectionner son propre De Animalibus (1258), devra rester une référence jusqu’au XV malgré la trad. du grc. de Guillaume de Moerbeke. Ensuite, le De Coelo et mundo, le De Anima et peut-être aussi la Physica et la Metaphysica, enfin les commentaires d’Averroès sur le corpus aristotélicien(7), dont il est le premier à introduire les textes dans le monde latin et qui auront grande influence sur la scolastique. Toujours à Tolède en 1217, il traduit également les كتاب الهيئة (Kitāb al-hayʾah) {Principes d’astronomie} d’Al Betrugi (Alpetragius) en De Motibus Celorum, ouvrage qui devra aussi être important pour l’astronomie européenne jusqu’au XVI et avec son système aristotélicien, concurrencer le système ptolémaïque de l’Almageste.
↪ Scot dédie à Frédéric II deux travaux qu’il termine vraisemblablement alors qu’il est à sa cour : sa traduction du De Animalibus d’Avicenne, ? de 1221 d’abord, puis un important Liber introductorius ensuite. Il s’agit d’un ouvrage éclectique à visée encyclopédique mais vulgarisatrice, dédié à l’art divinatoire et, écrit-t-il, commandé par l’empereur lui-même. Dans cet ouvrage à la transmission manuscrite tortueuse, on retrouve l’influence à la fois du christianisme et du néoplatonisme, de l’hermétisme et du gnosticisme, ainsi que des sources arabes et juives. Il est composé de trois traités plutôt indépendants car sans doute issus de notes d’abord éparses : 1. d’abord le Liber quatuor distinctionum, résumant de façon assez indigeste la science astrale, notamment du point de vu historique, allant de Zoroastre à Sylvestre II. 2. Ensuite le Liber particularis (avec le De Mirabilibus mundi) bien plus condensé et de nature cosmologique. En renfort de son exposé dans ces deux livres, on y trouve des considérations théologiques et démonologiques, médicales, calendaires, météorologiques et musicales ainsi qu’un nombre important de références aujourd’hui perdues. 3. Enfin, le Liber physiognomiæ au titre transparent, domaine dans lequel il est un pionnier dans l’occident latin, sachant que dans la première partie de l’ouvrage, Scot traite également de la formation du corps humain. L’ouvrage engendrera surtout des positions critiques chez les penseurs ultérieurs, notamment avec le Speculum astronomiae d’Albert ou le Lucidator d’Abano.
↪ Sa Divisio philosophiae, compilation des écrits de Gundissalvi et des arabes n’est plus disponible que sous forme fragmentaire grâce à Vincent de Beauvais et ses Quaestiones Nicolai peripatetici sont perdues. On lui attribue aussi, de façon clairement fautive à l’étude du texte, la Mensa Philosophica, traité médiéval sur l’hygiène et la diététique.
☩ 𝕍 d’abord les notes de 1⬝ Thorndike in History of magic and experimental science (T°2,pp. 307-337 ) | 2⬝ Michael Scot and alchemy in Isis (V°13, N°1 pp. 5-15), Dorothea Singer, 1929. | 3⬝ Michael Scot in Toledo: "natura naturans" and the hierarchy of being in Traditio (V°53, pp. 93-116), Lucy Pick, 1998. | 4⬝ Astronomy and Music in the Middle Ages: The "Liber introductorius" by Michael Scot in Musica Disciplina (V°27 pp. 5-9), Franco Gallo, 1973.
1.⟴ Scot rapporte que l’empereur l’interrogea sur des questions telluriques, cosmographiques et sur la nature de l’âme elle-même. Salimbene de Adam rapporte une histoire où Frédéric tenta de piéger le savant en lui faisant calculer deux fois la hauteur d’un clocher que l’empereur fit raccourcir entre-temps. Scot, ayant effectué une seconde fois le calcul affirma que soit la lune avait descendue, soit le cloche avait baissé, réponse qui emplit Frédéric de contentement.
2.⟴ En alchimie፧, on lui attribue le Ars alchemie ouvrage de compilation généraliste sur les esprits et les métaux ainsi que sur la fixation du mercure et sa projection sur le cuivre. Lui sont aussi attribués, le De Natura solis et lunæ (in Théâtre Chimique, T°5), le Liber magistri Scotti in quo continetur Magisterium et la traduction du Liber luminis luminum du pseudo-Rhazès, contenant une étude sur les sels. L’ouvrage est parfois attribué à Dédale à cause du passage en De Anima (I:3) : […] Ce dernier dit, en effet, que Dédale rendit mobile son Aphrodite de bois en y versant du vif-argent […]
. En magie enfin, on lui attribue un lapidaire Experimenta necromantica.
3.⟴ Une légende populaire f.XIII–d.XIV raconte par exemple que rentré dans son village natal il eut la vision qu’il mourra à cause d’un pierre tombant sur sa tête, aussi se décide-t-il à porter un casque. Cependant, il mourra dans l’Abbaye de Holmcultram : entrant dans l’édifice, il retire son casque et un éboulement le tue. Il y aurait été inhumé, la rumeur est ajd. encore complaisamment entretenue par les locaux.
4.⟴ Cet autre chancelant sur sa hanche amaigrie, / C’est Michel Scot, passé maître en sorcellerie / Et qui de la magie a vraiment connu l’art. // Vois Guido Bonatti ; vois Adsent qui regrette / D’avoir abandonné son cuir et sa navette, / Mais hélas, l’imprudent ! il se repent trop tard. // Vois ces femmes plus loin : à leurs mains meurtrières / L’aiguille et le fuseau répugnaient ; les sorcières / Avec l’herbe et la cire on fait œuvre d’Enfer.
Asdente, cordonnier de profession, bibliste et célèbre diseur de bonne aventure du XIII, qui portait ce surnom en raison de sa bouche édentée. Scot sera de même cité en ce sens dans plusieurs œuvres, ex. dans le Décaméron de Boccace (En IX : […] il y avait en cette cité un grand maître en nécromancie, nommé Michele Scotto […]
). Walter Scott s’en inspire encore dans son Lay of the Last Minstrel (1804) (In these far climes, it was my lot / To meet the wondrous Michael Scott; / A wizard of such dreaded fame, / Than when, in Salamanca’s cave, / Him listed his magic wand to wave, / The bells would ring in Notre Dame! / Some of his skill he taught to me; / And, warrior, I could say to thee, / The words that clove Eildon hills in three, / And bridled the Tweed with a curb of stone: / But to speak them were a deadly sin; / And for having but thought them my heart within, / A treble penance must be done.
(II, 13)), Allan Cunningham écrira un Sir Michael Scott : a romance (1828) et pour Samuel Coleridge enfin, son personnage est plus intéressant que celui de Faust lui-même !
5.⟴ Ce dernier transmet à Scot un exemplaire révisé du Liber abaci en 1228.
6.⟴ I.e. l’Historiae animalium (10L°), le De Partibus animalium (4L°) et le De Generatione Animalium (5L°).
7.⟴ Grand Commentaire du De Anima d’Aristote surtout, mais aussi, parmi les quatorze traductions, les commentaires du De Sensu, du De Caelo, de la Physica et du Metaphysica.
⟴François (d’Assise) [Pietro (di) Giovanni]🔗 pertinents ❙
Mystique 🞄 Christianisme (Catholicisme:Franciscain) 🞄 ≈ États pontificaux | 1181 – 1226
Alter Christus, Père Séraphique | Saint de l’Église catholique romaine (1228, 4 Octobre)
Œuvre
Nom : François (d’Assise)
Auteur : Bernardino Lanino
Date : ≈ 1545
Type : Huile sur toile
Source : Pinacothèque de Brera
I. Histoire
► Fils d’un drapier appartenant à la bourgeoisie urbaine aisée et en lien avec la France de par son métier(1) et son mariage. Le jeune François, dissipé mais généreux, est d’abord intéressé par la littérature courtoise provençale et la culture française des troubadours, inclinaison qu’il conservera toute sa vie et dont il porte la marque peu après sa naissance, son père le surnommant rapidement "Francesco" {Français}. Il veut d’abord effectuer une carrière militaire, devenir chevalier et épouser une gente dame. Cependant, il est poussé sur la voie spirituelle par divers évènements, intérieurs comme extérieurs(2), vivant une crise religieuse qui devra aboutir, en 1206 et contre l’avis de sa famille, au renoncement intégral de ses biens matériels dont il distribue la vente aux pauvres. Atteignant la réversion, il se fait, selon sa propre expression "chevalier de Dieu".
↪ Inspiré par Matthieu (X.7 et XIX.21) et Luc (IX.2) concernant la pauvreté, le prêche et le trésor céleste, il se met lui-même à prêcher, de façon itinérante, dans les villes et les villages, de façon ingénieuse en s’adaptant à ses auditeurs. Il sert également les malades dans les léproseries et travaille de ses mains pour subvenir à ses besoins. Bientôt, François est suivi par des disciples impressionnés par son zèle évangélique, son dynamisme et son charisme, disciples qu’il entraîne dans l’exercice de la charité et de l’amour du prochain(3) ainsi que sur la voie de la simplicité, de la pauvreté(4) et de l’humilité(5), qui sont pour lui des critères de sainteté et les vertus cardinales de son enseignement. Il envoie ses disciples prêcher dans l’Italie puis au-delà des frontières. Lui-même va en Espagne pour convertir les musulmans, puis, durant la Cinquième croisade (1217–1221), il tente de convertir Al-Kamil, sultan ayyoubide d’Égypte (reg. 1218-1238) et s’il ne parvient pas au terme de son projet, il obtient l’admiration du dirigeant et un sauf-conduit lui permettant de visiter la Palestine en sécurité.
II. Influence et pensée
► François fait accepter son ordre par Innocent III — d’abord prudent — en 1210. Après une version primitive très simple en 1209 et poussé par l’expansion très rapide du nombre de membres, il institue la première règle officielle en 1221, plus détaillée, qu’Honorius III accepte en 1223. Ainsi, François est le fondateur de l’ordre des Frères mineurs, mais aussi celui des Pauvres dames et du Tiers-Ordre franciscain(6); ses membres étant plus connus sous le nom de franciscains(7), et clarisses. La fin de sa vie, détaché progressivement, dès 1220, des fonctions officielles au sein de l’ordre qu’il a crée, est solitaire et de nature érémitique, il meurt aveugle. Instigateur d’un renouveau spirituel fondamental dans l’histoire du christianisme, considéré comme l’un des saints et mystique les plus importants de l’histoire de l’Église, il est canonisé rapidement, en 1228. Les Vies de François écrites après sa mort furent nombreuses, le décrivant sous des jours présentant des différences notables(8), en conséquence, une version définitive fut fixée par Bonaventure en 1266. Ces Vies rendent cependant toutes compte d’une dévotion pour les faits merveilleux liés à sa sainteté(9) ainsi que de plusieurs évènements sans doute hagiographiques, obscurcissant le personnage historique.
◆ Ouvert à la jubilation procurée par l’existence, attaché à l’incarnation dans le monde et à l’idéal du prêche par l’exemple, François prend à contre-pied son époque et se révèle anticonformiste. La nature revêt pour lui, une importante particulière, considérant qu’elle est le miroir de Dieu et que, tout comme l’Homme, elle est aussi une de ses créations et mérite donc, elle aussi, de la considération. Célèbre est l’histoire où il prêche aux oiseaux et son illustre Laudes creaturarum, canticum fratris solis {Cantique de frère soleil} (1224-1225)(10), qualifie le soleil, les étoiles et la lune, l’eau et le vent, comme ses frères et sœurs. Il fait également écrire un court Testament, de nature spirituelle et destiné à ses frères, peu avant son décès, en 1226. Particulièrement attaché la figure du Christ dont il brûle de suivre l’exemple, non plus seulement symbolique mais concrètement et dans sa chaire, il est le premier saint de l’histoire à recevoir des stigmates en 1224(11).
⟴Cantique des créatures (Cantique de frère Soleil)
(trad. du Couvent de Canclaux (2018) depuis le texte ombrien du manuscrit 338 de la Bibliothèque communale d’Assise)
Très Haut, Tout Puissant et bon Seigneur,
à toi sont les louanges, la gloire, l’honneur, et toute bénédiction ;
à toi seul, Très-Haut, ils conviennent,
et nul homme n’est digne de te nommer.
Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures,
spécialement messire le frère Soleil,
lequel est le jour, et tu nous illumines par lui.
Et lui, il est beau et rayonnant avec grande splendeur :
de toi, Très-Haut, il porte signification.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Lune et les Étoiles :
dans le ciel tu les as formées claires et précieuses et belles.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère Vent
et par l’Air et le Nuage et le Ciel serein et tout temps,
par lesquels à tes créatures tu donnes sustentation.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Eau,
laquelle est très utile et humble, précieuse et chaste.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère Feu
par lequel tu illumines la nuit,
et lui, il est beau et joyeux, robuste et fort.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur mère Terre,
laquelle nous sustente et gouverne
et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe.
Loué sois-tu, mon Seigneur,
par ceux qui pardonnent par ton amour
et soutiennent maladies et tribulations.
Bienheureux ceux qui les supporteront en paix,
car par toi, Très-Haut, ils seront couronnés.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par notre sœur Mort corporelle
à laquelle nul homme vivant ne peut échapper.
Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels !
Bienheureux ceux qu’elle trouvera en tes très saintes volontés,
car la seconde mort ne leur fera pas mal.
Louez et bénissez mon Seigneur,
rendez grâces et servez-le avec grande humilité !
1.⟴ Le français est d’ailleurs, à cette époque, la langue du commerce international.
2.⟴ Guerre, captivité, maladies mais aussi visions.
3.⟴ À une époque où les affrontements étaient monnaie courante, notamment entre rois ou contre les infidèles, musulmans ou cathares.
4.⟴ Les franciscains en effet, s’habillent tous d’une bure non teinte, d’une simple corde pour ceinture et marchaient pieds nus. Mendiants, ils ne vivent que du travail manuel et de l’aumône, en nature.
5.⟴ François valorise les pauvres et les faibles et se méfie tout ce qui donne du pouvoir : érudition livresque et argent.
6.⟴ D’abord Frères et sœurs de l’Ordre de la Pénitence.
7.⟴ Ou cordeliers.
8.⟴ Des dissensions faisaient déjà jour dans l’ordre sur de nombreux points, notamment la question de la pauvreté intégrale, difficile à suivre pour beaucoup de frères. En fait, très rapidement, les interprétations quant au sens de l’enseignement de François d’Assise et de son enseignement font débat, encouragé par l’hétérogénéité sociale et culturelle de ses membres.
9.⟴ Visions, guérisons, bilocation, lévitation…
10.⟴ Œuvre majeure de la poésie italienne et, François se voulant accessible, premier poème en italien ancien (dialecte ombrien « Volgare »), 𝕍 le texte tout de suite après.
11.⟴ Le sujet n’est pas nouveau et des religieux témoignèrent déjà de blessures et de marques mais elles furent attribuées au Diable.
⟴Shams (de Tabriz)🔗 pertinents
Poète 🞄 Islam (Soufisme) 🞄 Califat abbasside | 1185 – 1247
► Sunnite chafiite, dernier derviche errant, maître de Rûmî, loué par ce dernier dans le Diwan-i Shams-i Tabrīzī (Divân de Shams de Tabriz). Sa biographie est mal connue.
↪ Plusieurs traditions orales rapportent la rencontre merveilleuse entre Shams et Rumi(1), leur entrevue durant 40 jours à Konya avant son départ pour Damas et on raconte encore également que Shams aurait été tué par des disciples de Rumi. On trouve sa tombe à Khoy (Iran, Azerbaïdjan occidental). Auteur d’un مقالات شمس تبريزي (Maqalat-e Shams-e Tabrizi) {Dits de Shams de Tabriz}, la tradition lui attribue en outre un corpus poétique dont les véritables auteurs sont inconnus.
◆ Parfois confondu l’imam ismaélien du même nom dans les traditions orales des nezāris. Ce dernier vivait clandestinement en Azerbaïdjan(2) car il fut le seul fils survivant du dernier seigneur d’Alamut, tué par les mongols.
1.⟴ Où Rumi se comporte comme un cuistre avec Shams mais est subjugué par un miracle où notamment, ses livres prennent subitement feu ou sont jetés dans l’eau puis retrouvés secs.
2.⟴ Souvent déguisé en brodeur ou en soufi.
⟴Thibaut de Langres🔗 pertinents
Théologien 🞄 Christianisme (Catholicisme:Cistercien) 🞄 Royaume de France | f.XII – ≈ m.XIII
► Magister séculier et chanoine ℙ cistercien de la Cathédrale de Langres. Nous intéresse pour son De Quattuor modis quibus significationes numerorum aperiuntur (f.XII)(1), où, dans la lignée de Hugues de Saint-Victor et héritier de ses contemporains et coreligionnaires Odon de Morimond, Geoffroy d’Auxerre et Guillaume d’Auberive, il expose une somme relative aux lois afférentes au symbolisme des nombres.
☩ 𝕍 donc Le Symbolisme des nombres à l’époque romane in Cahiers de Civilisation Médiévale (A°4, N°14 pp. 159-169), Guy Beaujouan, 1961.
1.⟴ 𝕍 Latin 14444 bs. Bibliothèque Nationale de France, trad. fra. Traité sur le symbolisme des nombres.
⟴Joannes de Sacrobosco🔗 pertinents
Astrologue 🞄 Christianisme (Catholicisme) 🞄 Royaume d’Angleterre | f.XII – ≈ m.XIII
► On sait peu de choses certaines sur sa vie. Né certainement en Angleterre et étudiant à Oxford, il arrive à la Sorbonne en 1221 et devient professeur.
◆ Principalement connu pour son De Sphaera mundi (1230), ouvrage d’introduction et de synthèse à l’astronomie. Cet ouvrage est largement inspiré de l’Almageste, quoique incorporant vis à vis de ce dernier les avancées de l’astronomie arabe. Joannes est par ailleurs un des premiers à intégrer les avancées orientales à la science occidentale. L’influence de cet ouvrage fut prépondérant dans les facultés européennes durant la période pré-copernicienne et en tant quel tel, il fut le premier ouvrage d’astronomie imprimé, en 1472.
◆ Il est aussi connu pour son De Anni Ratione (1235), où il fait remarquer le décalage de dix jours du calendrier julien.
⟴Guillaume d’Auvergne🔗 pertinents
Théologien 🞄 Christianisme (Catholicisme) 🞄 Royaume de France | ≈ 1190 – 1249
► Montluisant prétend qu’il se serait intéressé à l’alchimie፧ : il le suppose auteur du Portail du Jugement Dernier de Notre-Dame de Paris.
⟴Vincent (de Beauvais)🔗 pertinents
Théologien, Encyclopédiste 🞄 Christianisme (Catholicisme:Dominicain) 🞄 Royaume de France | ≈ 1190 – 1264
Œuvre
Nom : Vincent de Beauvais
Auteur : ecr. Vincent de Beauvais
Date : f.XV
Type : Enluminure
Source : in Speculum historiale (Royal MS 14 E I) bs. Bibliothèque Britannique
► Peu de choses sont connues sur le liborum helluo {dévoreur de livres}. Entré chez les dominicains vers 1220, il est lecteur à l’Abbaye de Royaumont. Chapelain et pour ainsi dire bibliothécaire de son mécène Saint Louis dès les environs de 1250, il est aussi le précepteur des enfants royaux et son conseiller. Par l’intermédiaire du soutien financier du roi, Vincent est l’auteur du fameux Speculum majus (1244, aussi Bibliotheca Mundi), plus importante production de la littérature des miroirs.
↪ L’œuvre encyclopédique et monumentale(1), aborde de façon systématique(2) et pédagogique l’essentiel des branches du savoir médiéval occidental d’alors et cela en trois parties : Speculum naturale(3), Speculum doctrinale(4) et Speculum historiale où Vincent expose l’histoire depuis la création du monde. En outre, il indique ses sources, hiérarchise ces dernières et offre notablement une bonne place aux intellectuels gréco-romains : Aristote, Hippocrate, Cicéron… Cette œuvre au succès considérable — la partie historique en particulier — fit l’objet d’adjonctions jusqu’à la renaissance : une partie morale est ajoutée au XIV par un auteur anonyme et du reste, l’œuvre est appréciée des humanistes italiens et fera l’objet d’une traduction française en 1328.
➽ Influence Chaucer.
☩ 𝕍 Vincent de Beauvais et l’histoire du Speculum Maius in Journal des savants (N°1-2 pp. 97-124), Monique Paulmier-Foucart & Serge Lusignan, 1990.
1.⟴ Sa taille de 80 livres, qu’il rédige durant 24 ans, reste impressionnante jusqu’au XVIII.
2.⟴ Il dispose même d’un index rudimentaire.
3.⟴ Théologie, physique, sciences naturelles…
4.⟴ Philosophie, poésie, mathématiques, médecine, jurisprudence…
Fiches individuelles (XII)
Robert (de Boron) (XII – XIII), Chrétien (de Troyes) (≈ 1130 – 1185), Maïmonide Moïse (1138 – 1204), Sohrawardi (1154 – 1191), Isaac (l’aveugle) (≈ 1160 – 1235), Sturluson Snorri (≈ 1179 – 1241), Nahmanide Moïse (1194 – 1270)
Version: 1.5
Maj : 20/12/2024